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27/10/2022 | FRANCE | N°22/05212

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 27 octobre 2022, 22/05212


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 27 OCTOBRE 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05212 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFOJ6



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Février 2022 -Président du TJ de PARIS - RG n°





APPELANTE



S.C.I. DES GRANDS BOULEVARDS, prise en la personne de ses représentants léga

ux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334

Assistée par Me Da...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 27 OCTOBRE 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05212 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFOJ6

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Février 2022 -Président du TJ de PARIS - RG n°

APPELANTE

S.C.I. DES GRANDS BOULEVARDS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334

Assistée par Me David FERTOUT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1770

INTIMEE

Mme [J] [E]

[Adresse 5]

[Localité 4] (ÉMIRATS ARABES UNIS)

Représentée et assistée par Me Adrian BROCHU, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Septembre 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre chargée du rapport, et Michèle CHOPIN, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

M. [K] [N] et Mme [J] [E] sont associés à parts égales dans le capital de la société des Grands boulevards ; M. [N] en assure les fonctions de gérant.

La société des Grands boulevards, dans le cadre de son activité, a acquis le 29 juin 2016 des biens immobiliers situés [Adresse 3], au moyen d'un emprunt contracté par la société et d'apports en compte courant de Mme [E] à hauteur de 516.270,37 euros. Un pacte entre associés a été conclu entre Mme [E] et M. [N] le 9 octobre 2018.

Par acte du 29 octobre 2021, Mme [E] a fait assigner en référé la société des Grands boulevards devant le président du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir :

- constater le caractère non sérieusement contestable de sa créance à l'égard de la société des Grands boulevards ;

- condamner la société des Grands boulevards à lui payer, à titre de provision, la somme de 142.270 euros en principal correspondant au solde de son compte courant d'associé, augmentée des intérêts au taux contractuel prévu à l'article 2 de la convention de compte courant d'associé du 9 octobre 2018, avec capitalisation des intérêts ;

- condamner la société des Grands boulevards à lui payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Par ordonnance contradictoire du 7 février 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

- déclaré la demande de Mme [E] recevable, le juge des référés étant compétent pour connaître de ce litige, rejetant ainsi l'exception d'incompétence soulevée par la société des Grands boulevards ;

- condamné la société des Grands boulevards à payer à Mme [E] la somme provisionnelle de 142.270 euros à valoir sur le solde de son compte-courant d'associé, assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1342-3 du code civil ;

- condamné la société des Grands boulevards aux dépens de l'instance ;

- condamné la société des Grands boulevards à payer à Mme [E] la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes.

Par déclaration du 09 mars 2022, la société des Grands boulevards a relevé appel de l'ensemble des chefs du dispositif de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 05 mai 2022, elle demande à la cour de réformer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

In limine litis,

- déclarer le juge des référés incompétent au visa de l'article 789 du code de procédure civile compte tenu de l'existence d'une procédure au fond devant le tribunal judiciaire de Paris portant sur les demandes avec les mêmes parties, dont le juge de la mise en état a été désigné ;

A titre principal,

- débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause,

- condamner Mme [E] à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Bellichach conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 30 mai 2022, Mme [E] demande à la cour de :

- dire et juger la société des Grands boulevards mal fondée en son appel principal et en toutes ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter ;

En conséquence,

- confirmer l'ordonnance du 7 février 2022 pour l'ensemble de ses dispositions sauf en ce qu'elle a dit que la somme de 142.270 euros serait assortie d'intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance rendue ;

- dire et juger Mme [E] recevable et bien fondée en son appel incident ;

- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a dit que la somme de 142.270 euros serait assortie des intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance rendue ;

Statuant à nouveau,

- condamner la société des Grands boulevards à payer sur la somme de 142.270 euros en principal des intérêts au taux contractuel prévu à l'article 2 de la convention de compte courant d'associés du 09 octobre 2018 avec capitalisation des intérêts conformément au même article ;

- condamner la société des Grands boulevards à payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société des Grands boulevards aux entiers dépens.

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, MOTIFS

Sur l'exception d'incompétence

La SCI des Grands boulevards soulève l'incompétence du juge des référés au profit du juge de la mise en état, faisant valoir que l'assignation qui a été délivrée en référé par Mme [E] est postérieure à l'assignation qui a été délivrée par la société les Grands boulevards devant le juge du fond à l'effet d'obtenir le remboursement par Mme [E] de la somme de 377.000 euros qu'elle a prélevée sur les comptes sociaux au titre de la première partie de son compte courant d'associé.

C'est toutefois à bon droit que le premier juge a rejeté cette exception d'incompétence au motif que le juge de la mise en état n'était pas saisi lorsque l'assignation en référé a été délivrée.

En effet, selon l'article 789 du code de procédure civile, "Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour [...]

3° Accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. [...]".

Selon l'article 779 du même code, l'affaire est fixée à une audience d'orientation à laquelle le président de la chambre saisie décide de la saisine ou non du juge de la mise en état.

En l'espèce, l'affaire introduite au fond sur l'assignation délivrée par la société les Grands boulevards contre Me [E] a été fixée à une audience d'orientation en date du 20 juin 2022.

L'assignation en référé de Mme [E] a ainsi été engagée avant la saisine du juge de la mise en état, en sorte que le juge des référés est bien compétent pour statuer sur sa demande de provision.

Sur le fond du référé

En application de l'article 835 du code de procédure civile, le juge des référés peut accorder une provision au créancier dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

Il est de jurisprudence constante que l'associé a le droit d'exiger le remboursement à tout moment de son compte courant d'associé, à défaut d'une disposition conventionnelle contraire.

En l'espèce, outre les statuts de la société, mis à jour le 9 octobre 2018, il a été conclu à la même date entre les associés et la société un pacte entre associés et une convention de compte courant d'associé.

Le pacte entre associés prévoit notamment, à son paragraphe relatif au compte courant d'associés, que le remboursement des comptes courants d'associés pourra intervenir sur simple demande de l'associé ayant apporté les fonds.

La convention de compte courant d'associé prévoit quant à elle, à son article 3, que tout retrait de fonds du compte courant d'associé est subordonné au respect d'un préavis de cinq jours adressé à la société par tout moyen écrit.

Si le remboursement du compte courant d'associé peut ainsi intervenir sur simple demande de l'associé ayant apporté les fonds, moyennant le respect d'un préavis de cinq jours, ces clauses ne précisent pas s'il s'agit là de conditions de forme et/ou de fond, ni n'excluent l'application des dispositions statutaires.

Or, il résulte des statuts que certaines opérations limitativement énumérées exigent l'accord préalable de la collectivité des associés, parmi lesquelles "Toutes dépenses ou charges pour la société supérieures à 1.000 euros par an ; et plus généralement, les actes ou opérations impliquant un engagement, direct ou indirect, supérieur à 1.000 euros."

La question, et elle est sérieuse, se trouve ainsi posée de l'assimilation du remboursement par la société d'un compte courant d'associé d'un montant supérieur à 1.000 euros à une opération impliquant un engagement supérieur à 1.000 euros, ce qui nécessite une interprétation de la clause des statuts et aussi de celles issues du pacte entre associés et de la convention du compte courant d'associé, ce qui n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés, juge de l'évidence, mais dans ceux du juge du fond.

La contestation soulevée à ce titre par la société des Grands boulevard est ainsi suffisamment sérieuse pour qu'il soit dit n'y avoir lieu à référé, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres contestations soulevées tenant à l'existence d'une action au fond tendant au remboursement par Mme [E] de la première partie de son compte courant d'associé dont elle a opéré le retrait, et à la situation financière de la société les Grands boulevards.

L'ordonnance entreprise sera par conséquent infirmée en ce qu'elle a fait droit à la demande de provision de Mme [E].

Partie perdante, cette dernière sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La nature du litige commande d'exclure l'application de l'article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu'en appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a retenu la compétence du juge des référés,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé,

Condamne Mme [E] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/05212
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;22.05212 ?
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