REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 5
ARRET DU 27 OCTOBRE 2022
(n° 205 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02893 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDDRQ
Décision déférée à la Cour : Arrêt du 7 Octobre 2020 - Cour de Cassation - Arrêt n°512 F-D
Jugement du 9 Mai 2012 - Tribunal de commerce de Versailles - RG n°2011F00056
Arrêt du 3 Mai 2018 - cour d'appel de Versailles - RG n°17/03439
Arrêt du 7 Octobre 2020 - Cour de Cassation - Arrêt n°512 F-D
DEMANDERESSE A LA SAISINE
S.A. HELVETIA ASSURANCES venant aux droits de la Société GAN EUROCOURTAGE, elle même venant aux droits de la société GROUPAMA TRANSPORTagissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège
immatriculée au RCS du HAVRE sous le numéro 339 489 379
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque B0515, avocat postulant
Assistée de Me Nicolas MULLER, avocat au barreau de PARIS, toque A139, avocat plaidant
DEFENDERESSE A LA SAISINE
S.A.S. UNITED PARCEL SERVICE FRANCE agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 334 175 221
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Aude GONTHIER, avocat au barreau de PARIS, toque C0634
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 804 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Marie-Annick PRIGENT, Présidente de la chambre 5.5 et Madame Nathalie RENARD, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Annick PRIGENT, Présidente de la chambre 5.5
Madame Nathalie RENARD, Présidente de chambre
Madame Christine SOUDRY, Conseillère
Greffière, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Annick PRIGENT, Présidente de chambre et par Claudia CHRISTOPHE, Greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
La société Dimitech, assurée auprès de la société Groupama Transport (la société Groupama), aux droits de laquelle est venue la société Gan Eurocourtage, a confié des opérations de transport de marchandises à la société United Parcel Service France (la société UPS).
Invoquant des vols et des avaries causées aux marchandises pendant les transports au cours des années 2008 à 2010, la société Dimitech et la société Gan Eurocourtage ont assigné la société UPS en indemnisation.
Par jugement du 9 mai 2012, le tribunal de commerce de Versailles a :
- 'donné à la SNC United Parcel Service France (UPS) l'acte qu'elle a demandé' ;
- débouté la société UPS de sa demande en nullité de l'assignation du 24 décembre 2010 ;
- dit que la société Groupama ne justifiait pas d'un intérêt à agir et l'a déclarée irrecevable en ses demandes ;
- débouté la société Dimitech de sa demande en paiement de la somme de 45 294,87 euros ;
- condamné la société Groupama et la société Dimitech, chacune, à payer à la société UPS la somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire ;
- mis les dépens par moitié à la charge de la société Groupama et de la société Dimitech.
Par arrêt du 26 novembre 2013, la cour d'appel de Versailles a :
- constaté que depuis le 1er décembre 2012, le portefeuille maritime et transports de la société Gan Eurocourtage avait été acquis par la société Helvetia Assurances laquelle venait aux droits de la société Eurocourtage ;
- révoqué l'ordonnance de clôture prononcée le 19 septembre 2013 ;
- invité l'assureur Gan Eurocourtage à régulariser des écritures au nom de l'assureur Helvetia Assurances et à répondre aux moyens soulevés par l'intimée ;
- renvoyé la cause et les parties à l'audience de mise en état et réservé les dépens.
Par arrêt du 25 novembre 2014, la cour d'appel de Versailles a confirmé le jugement en ce qu'il a :
- débouté la société UPS de sa demande en nullité de l'assignation du 24 décembre 2010 ;
-infirmé pour le surplus, et statuant à nouveau, débouté la société UPS de ses moyens d'irrecevabilité, condamné la société UPS à payer à l'assureur Helvetia Assurances, venant aux droits de l'assureur Gan Eurocourtage, venant lui-même aux droits de l'assureur Groupama Transport, et à la société Dimitech, la somme de 41 519,30 euros outre intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2010, avec application de l'article 1154 du code civil.
Par arrêt du 31 janvier 2017 (pourvoi n° 15-11.428), la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 26 novembre 2013 entre les parties par la cour d'appel de Versailles, et constaté l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt rendu le 25 novembre 2014 entre les mêmes parties.
Elle a retenu que la cour d'appel avait révoqué l'ordonnance de clôture du 19 septembre 2013 sans relever l'existence d'une cause grave survenue depuis le prononcé de l'ordonnance de clôture.
Par arrêt du 3 mai 2018, la cour d'appel de Versailles, statuant sur renvoi, a :
- donné acte à la société Helvetia de son intervention volontaire aux droits et action de la société Gan Eurocourtage, venant aux droits et action de la société Groupama ;
-infirmé le jugement en toutes ses dispositions, sauf celle ayant rejeté la nullité de l'assignation ;
Statuant à nouveau,
- rejeté les autres exceptions et fins de non recevoir ;
- dit que la société UPS devait à la société Helvetia la garantie des matériels endommagés ou perdus recensés au tableau "Dossiers Dimitech UPS" communiqué en pièce n°2 ;
- invité les sociétés UPS et Helvetia à déterminer le montant de la garantie d'après les règles de plafond de l'article 9.2 des conditions générales UPS, avec intérêts et capitalisation des intérêts par année échue après le 24 décembre 2010.
Par arrêt du 7 octobre 2020 (pourvoi n° 19-13.256), la Cour de cassation a :
- cassé et annulé sauf en ce que, confirmant le jugement, il a rejeté la demande d'annulation de l'assignation, l'arrêt rendu le 3 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
- condamné la société Helvetia aux dépens et à payer à la société UPS la somme de 3 000 euros.
Elle a retenu que la cour d'appel avait rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société Helvetia sans constater que les contrats litigieux avaient été transférés à la société Helvetia par la société Gan Eurocourtage.
Par déclaration de saisine du 10 février 2021, la société Helvetia a saisi la cour d'appel de Paris.
Par ses dernières conclusions notifiées le 7 avril 2021, la société Helvetia demande de réformer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de condamner la société UPS à lui payer les sommes de :
- 45 294,87 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 24 septembre 2010, et capitalisés conformément aux dispositions de l'article de 1154 du code civil,
- 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Par ses dernières conclusions notifiées le 7 juillet 2021, la société UPS demande, au visa des articles 4, 22, 32, 56 et 112 et 117 et suivants et 122 du code de procédure civile, 1134 et 1147 du code civil, ainsi que L. 133-1 et suivants du code de commerce, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, excepté en ce qui concerne les sommes allouées au titre de l'article du code de procédure civile, et, statuant à nouveau :
- à titre principal et in limine litis, prononcer la nullité de l'assignation délivrée à la requête des sociétés Groupama et Dimitech le 24 décembre 2010 à la société UPS ;
- à titre subsidiaire, constater que la société Helvetia venant aux droits de la société Gan Eurocourtage venant elle-même aux droits de la société Groupama, ne justifie ni de sa qualité, ni de son droit ni de son intérêt à agir et la déclarer irrecevable en son appel ;
- donner acte à la société Helvetia de sa renonciation à solliciter la somme de 45 832,48 euros, au titre des transports antérieurs au 24 décembre 2009, ainsi qu'à celle de 874,39 euros au titre du contrat Putman du 7 juillet 2010 ;
- constater que l'action à son égard reste en sus prescrite à hauteur de 2 234,15 euros;
- à titre infiniment subsidiaire, dire et juger qu'elle n'est pas responsable de l'éventuel préjudice de la société Helvetia et qu'il y a lieu, en tout état de cause d'appliquer les plafonds d'indemnisation contractuels ou à défaut les plafonds réglementaires découlant du décret n° 99-269 du 6 avril 1999, lesquels ne peuvent être calculés en l'espèce, à défaut de précisions de la société Helvetia sur les sinistres concernés ;
- débouter la société Helvetia de ses demandes à son encontre ;
- en toutes hypothèses, condamner la société Helvetia à lui régler la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et celle d'appel, en sus des entiers dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions d'incident du 7 juillet 2021, la société UPS a saisi le conseiller de la mise en état pour demander de déclarer la société Helvetia irrecevable en sa saisine de la cour d'appel de renvoi après cassation, faisant valoir que la société Helvetia avait saisi la cour d'appel au-delà du délai de deux mois qui lui était imparti.
Par ses conclusions en réponse du 3 septembre 2021, la société Helvetia a conclu au rejet de l'incident et à la recevabilité de la saisine, soutenant que l'acte de signification, délivré à la requête de la société UPS le 25 novembre 2020, faisait état d'un délai erroné de quatre mois et déduisant qu'aucun délai n'avait commencé.
Par ordonnance du 2 décembre 2021, cette demande a été déclarée irrecevable.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
La Cour de cassation n'a pas cassé et annulé l'arrêt du 3 mai 2018 en ce que, confirmant le jugement, il a rejeté la demande d'annulation de l'assignation.
La cour d'appel n'est dès lors pas saisie de ce chef de dispositif et ne statuera donc pas sur la nullité de l'assignation.
Sur la recevabilité de la déclaration de saisine
La société UPS soutient, dans les motifs de ses conclusions, que la société Helvetia est irrecevable en sa saisine de la cour d'appel de renvoi au visa de l'article 1034 du code de procédure civile, l'arrêt de la Cour de cassation ayant été notifié le 25 novembre 2020 à la société Helvetia qui a saisi la cour d'appel de Paris par acte du 10 février 2021, soit au-delà du délai de deux mois imparti.
L'article 1034 du code de procédure civile dispose :
'A moins que la juridiction de renvoi n'ait été saisie sans notification préalable, la déclaration doit, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, être faite avant l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt de cassation faite à la partie. Ce délai court même à l'encontre de celui qui notifie.
L'absence de déclaration dans le délai ou l'irrecevabilité de celle-ci confère force de chose jugée au jugement rendu en premier ressort lorsque la décision cassée avait été rendue sur appel de ce jugement.'
En l'espèce, l'arrêt du 7 octobre 2020 de la Cour de cassation a été notifié par la société UPS à la société Helvetia par acte du 25 novembre 2020.
Cet acte de signification mentionne les dispositions de l'article 1034 mais dans leur version antérieure à celle issue du décret n°2017-891 du 6 mai 2017 et entrée en vigueur le 1er septembre 2017 qui prévoyaient un délai de quatre mois.
La mention erronée, dans l'acte de notification d'une décision de justice, de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités ne fait pas courir le délai.
En conséquence, la déclaration de saisine est recevable.
Sur la qualité à agir de la société Helvetia
Aux termes de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt légitime.
La société Helvetia prétend que l'opération de fusion-absorbation du 31 décembre 2011 inclut le transfert au profit de la société Gan Eurocourtage du portefeuille de contrat d'assurance souscrit par la société Groupama, qu'ainsi la société Gan Eurocourtage a été substituée dans tous les droits de la société Groupama, qu'elle-même a acquis, le 1er décembre 2012, le portefeuille 'maritime et transports' de la société Gan Eurocourtage et qu'elle intervient ainsi en lieu et place de la société Gan Eurocourtage venant aux droits de la société Groupama.
La société UPS soutient que la société Helvetia ne rapporte pas la preuve de sa qualité à agir en suite de l'arrêt de la Cour de cassation.
Selon une quittance du 14 décembre 2010, la société Groupama, assureur de la société Dimitech, a réglé à cette dernière une indemnité de 30 000 euros au titre de sinistres pour l'exercice 2009 concernant notamment la société UPS.
Selon une quittance du 4 mai 2011, la société Groupama, assureur de la société Dimitech, a réglé à cette dernière une indemnité de 32 393,37 euros au titre de sinistres pour l'exercice 2010, comprenant une somme de 26 397,05 euros correspondant aux 'sinistres UPS'.
Le transfert du portefeuille de contrats de la société Groupama à la société Gan Eurocourtage a fait l'objet d'une décision d'approbation du 26 octobre 2011 du sous-collège sectoriel de l'assurance, autorité de contrôle prudentiel, publiée au journal officiel le 22 décembre 2011.
Le transfert d'une partie du portefeuille de contrats de la société Gan Eurocourtage à la société Helvetia a fait l'objet d'une décision d'approbation du 23 octobre 2012 du sous-collège sectoriel de l'assurance, autorité de contrôle prudentiel, publiée au journal officiel le 24 novembre 2012.
La société Helvetia ne produit pas d'élément établissant que les contrats litigieux sont compris dans la partie du portefeuille de contrats transférée par la société Gan Eurocourtage.
En conséquence, elle ne justifie pas de sa qualité à agir contre la société UPS.
Son action est irrecevable.
Sur les demandes accessoires :
La société Helvetia succombant, sera tenue aux dépens d'appel.
Il apparaît équitable de la condamner à payer à la société UPS la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire,
La cour, dans les limites de sa saisine,
Déclare irrecevable l'action de la société Helvetia Assurance ;
Condamne la société Helvetia Assurance à payer à la société United Parcel Service France la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel en application de l'article 700 du code de procédure civile et rejette la demande de la société Helvetia Assurance à ce titre ;
Condamne la société Helvetia Assurance aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE