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27/10/2022 | FRANCE | N°20/17500

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 27 octobre 2022, 20/17500


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 27 OCTOBRE 2022



(n° /2022, pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17500

N° Portalis 35L7-V-B7E-CCX2F



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Octobre 2020 -TJ de PARIS - RG n° 18/01531



APPELANT



Monsieur [O] [C]

[Adresse 2]

[Localité 10]

né le [Date naissance 1]

1982 à [Localité 10]

représenté par Me Benoît HENRY de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

assisté par Me Alice BARRELLIER, avocat au barreau de...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 27 OCTOBRE 2022

(n° /2022, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17500

N° Portalis 35L7-V-B7E-CCX2F

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Octobre 2020 -TJ de PARIS - RG n° 18/01531

APPELANT

Monsieur [O] [C]

[Adresse 2]

[Localité 10]

né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 10]

représenté par Me Benoît HENRY de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

assisté par Me Alice BARRELLIER, avocat au barreau de CAEN

INTIMEES

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ORNE

[Adresse 4]

[Localité 6]

N'a pas constitué avocat

FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES

[Adresse 7]

[Localité 8]

représentée par Me Laure FLORENT de l'AARPI FLORENT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0549

Société MUTUA GESTION

[Adresse 5]

[Adresse 9]

[Localité 3]

N'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre, et de Mme Nina TOUATI, présidente de chambre assesseur chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Sophie BARDIAU, conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

ARRÊT :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 14 octobre 2013, sur le boulevard périphérique extérieur parisien, alors qu'il circulait au guidon de son scooter, M. [O] [C] a été percuté sur le côté gauche par un véhicule qui le dépassait et qui n'a pas été identifié.

Cet accident de trajet a été pris en charge au titre de la législation professionnelle.

Le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO) saisi par M. [C] a organisé une expertise amiable contradictoire confiée aux Docteurs [R] et [U].

Par actes des 18, 24 et 31 janvier 2018, M. [C] a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris, le FGAO, la société Mutua gestion et la caisse primaire d'assurance maladie de l'Orne (la CPAM) afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

Par ordonnance du 9 novembre 2018, le juge de la mise en état de cette juridiction a ordonné une expertise médicale confiée au Docteur [X] qui a établi son rapport le 3 mai 2019.

Par jugement du 19 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :

- dit que le droit à indemnisation de M. [C] des suites de l'accident de la circulation survenu le 14 octobre 2013 est entier,

- alloué à M. [C] les sommes suivantes, en deniers ou quittance, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, en réparation des préjudices suivants :

- dépenses de santé actuelles : 82 euros

- frais divers : 4 423,55 euros

- assistance par tierce personne : 6 298,29 euros

- perte de gains professionnels actuels : 299,81 euros

- incidence professionnelle : 50 000 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 8 022,50 euros

- souffrances endurées : 20 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 1 000 euros

- déficit fonctionnel permanent : 25 000 euros

- préjudice esthétique permanent : 3 000 euros,

- débouté M. [C] de ses demandes au titre de l'incidence professionnelle temporaire et du préjudice d'agrément,

- dit que les sommes allouées porteront intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 19 novembre 2019, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 14 juin 2014 et jusqu'au 19 novembre 2019,

- dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil,

- déclaré le jugement commun à la CPAM et opposable au FGAO,

- dit que les dépens seront à la charge du Trésor public et que ces derniers seront directement recouvrés par Maître Dalila Yakoub en application de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamné le FGAO à payer à M. [C] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 2 décembre 2020, M. [C] a interjeté appel de cette décision en critiquant ses dispositions relatives à l'indemnisation des postes de préjudice liés aux dépenses de santé actuelles, à l'assistance par une tierce personne, à la perte de gains professionnels actuels, à l'incidence professionnelle, au déficit fonctionnel temporaire, aux souffrances endurées, au déficit fonctionnel permanent, au rejet de ses demandes au titre de l'incidence professionnelle temporaire et du préjudice d'agrément ainsi qu'au doublement du taux de l'intérêt légal.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions de M. [C], notifiées le 16 août 2021, aux termes desquelles il demande à la cour de :

Vu la loi du 5 juillet 1985,

Vu l'article L. 421-1 et suivants du code des assurances,

Vu les articles 1231-7 et 1343-2 du code civil,

Vu ensemble le principe de réparation intégrale et la résolution n° 75-7 du Conseil de l'Europe,

Vu les articles L.211-9, L.211-13 et R.211-40 du code des assurances,

- recevoir M. [C] en son appel et le déclarer bien fondé,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

' limité l'indemnisation :

* des dépenses de santé actuelles à 82 euros

* du besoin d'assistance par tierce personne à 6 298,29 euros

* de l'incidence professionnelle à 50 000 euros

* du déficit fonctionnel temporaire à 8 022,50 euros

* des souffrances endurées à 20 000 euros

* du déficit fonctionnel permanent à 25 000 euros

* du préjudice esthétique permanent à 3 000 euros,

' rejeté les demandes d'indemnisation de l'incidence professionnelle temporaire et du préjudice d'agrément,

' dit que les sommes allouées porteront intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 19 novembre 2019, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 14 juin 2014 et jusqu'au 19 novembre 2019,

- confirmer le jugement en ce qu'il a fixé :

' les frais divers à 4 423,55 euros,

' les pertes de gains professionnels actuels à 299,81 euros,

' le préjudice esthétique temporaire à 1 000 euros,

En conséquence, statuant à nouveau,

- actualiser les condamnations prononcées au titre des frais divers,

- condamner le FGAO à verser à M. [C] en réparation de son préjudice corporel la somme de 907 011,74 euros ou subsidiairement de 906 779,98 euros, soit une fois déduites les provisions versées (10 000 euros), un solde de 897 011,74 euros ou subsidiairement de 896 77,98 euros,

Postes

Evaluation

Priorité victime

Tiers payeurs

PRÉJUDICES PATRIMONIAUX

Dépenses de santé actuelles

20 573,24 euros

4 087,14 euros

16 486,10 euros

Frais divers avant consolidation

5 913,50 euros

5 913,50 euros

0 euro

Tierce personne temporaire

57 035,74 euros

57 035,74 euros

0 euro

Perte de gains professionnels actuels

7 826,90 euros

299,81 euros

7 527,09 euros

Incidence professionnelle temporaire

principal

130 882,47 euros

130 882,47 euros

0 euro

subsidiaire

0 euro

0 euro

0 euro

Incidence professionnelle permanente

604 040,44 euros

604 040,44 euros

0 euro

PRÉJUDICES EXTRA PATRIMONIAUX

Déficit fonctionnel temporaire

principal

9 947,90 euros

9 947,90 euros

0 euro

subsidiaire

48 864,46 euros

48 864,46 euros

0 euro

Déficit fonctionnel permanent

principal

50 304,74 euros

50 304,74 euros

0 euro

subsidiaire

67 072,98 euros

67 072,98 euros

0 euro

Souffrances endurées

principal

22 000 euros

22 000 euros

0 euro

subsidiaire

113 965,91 euros

113 965,91 euros

0 euro

Préjudice d'agrément

principal

17 000 euros

17 000 euros

0 euro

subsidiaire

0 euro

0 euro

0 euro

Préjudice esthétique temporaire

1 000 euros

1 000 euros

0 euro

Préjudice esthétique permanent

4 500 euros

4 500 euros

0 euro

PRINCIPAL TOTAL

931 024,93 euros

907 011,74 euros

24 013,19 euros

- provisions versées

- 10 000 euros

TOTAL DU

897 011,74 euros

subsidiairement

930 793,17 euros

906 779,98 euros

24 013,19 euros

- provisions versées

- 10 000 euros

total dû

896 779,98 euros

- dire que le total du préjudice de M. [C], incluant la créance des organismes sociaux et provisions non déduites, portera intérêts au double du taux légal à compter du 14 juin 2014 jusqu'au jour où la décision sera définitive,

- dire que ces condamnations emporteront intérêts à compter du jour de l'assignation et que les intérêts ayant plus d'un an d'ancienneté seront eux-mêmes productifs d'intérêts,

Y ajoutant,

- allouer à M. [C] une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- laisser les dépens à la charge du Trésor public.

Vu les conclusions du FGAO, notifiées le 21 mai 2021, aux termes desquelles il demande à la cour de :

Vu les articles L.421-1 et suivants, R.421-14 et R.421-15 du code des assurances,

- juger l'appel formé par M. [C] mal fondé,

- en conséquence, l'en débouter,

- juger l'appel formé par le FGAO bien fondé,

- en conséquence, le recevoir en son appel,

- rappeler que l'appel est limité aux postes frais divers, assistance d'une tierce personne, incidence professionnelle, souffrances endurées, préjudices esthétique temporaire, déficit fonctionnel permanent et préjudice esthétique permanent ainsi qu'à la question des intérêts,

En conséquence,

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 19 décembre 2020 pour les postes dépenses de santé actuelles, perte de gains professionnels actuels, déficit fonctionnel temporaire et préjudice d'agrément,

- pour le surplus, infirmer le jugement,

Statuant à nouveau,

- juger que M. [C] devra être indemnisé de son préjudice découlant de l'accident dont il a été victime le 14 octobre 2013 par les sommes suivantes :

- dépenses de santé actuelles : 82 euros

- frais divers : mémoire

- assistance d'une tierce personne temporaire : 5 117,36 euros

- perte de gains professionnels actuels : 299,81 euros

- incidence professionnelle : mémoire

- déficit fonctionnel temporaire : 8 022,50 euros

- déficit fonctionnel permanent : mémoire

- souffrances endurées : 8 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : rejet

- préjudice esthétique permanent : 2 200 euros

- préjudice d'agrément : rejet,

- débouter M. [C] de toutes ses autres demandes, fins et conclusions,

- rappeler que le FGAO a déjà versé la somme de 119 626,15 euros à M. [C], en ce compris l'article 700 du code de procédure civile, qu'il conviendra de déduire,

- condamner, en tant que de besoin, M. [C] à rembourser au FGAO la somme éventuellement trop perçue,

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

Bien que destinataires de la déclaration d'appel qui leur a été signifiée respectivement par actes des 19 et 22 janvier 2021 à personne habilitée, la CPAM et la société Mutua gestion n'ont pas constitué avocat.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Par l'effet des appels principal et incident, la cour n'est pas saisie des dispositions du jugement ayant dit que le droit à indemnisation de M. [C] était intégral, étant rappelé qu'en application de l'article L.421-1, I, du code des assurances, le FGAO indemnise les victimes de dommages résultant d'une atteinte à la personne causés par un accident survenu en France dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur lorsque le responsable des dommages est inconnu ainsi que les dommages aux biens subis par ces mêmes victimes.

Sur l'indemnisation des préjudices de M. [C]

L'expert judiciaire, le Docteur [X], indique dans son rapport en date du 3 mai 2019 que M. [C] a présenté à la suite de l'accident du 14 octobre 2013 une fracture de la clavicule gauche, une rupture du ligament radial de la métacarpo-phalangienne du pouce droit ainsi qu'une neurolyse compression du nerf ulnaire du coude gauche.

Il relève que M. [C], qui est droitier, a été opéré de la clavicule gauche et a toujours une gêne fonctionnelle à l'effort, qu'il persiste des troubles neurologiques et des fourmillements dans le territoire du nerf ulnaire à gauche, qu'il a également été opéré du pouce droit, qu'on note aussi une gêne à l'effort associée à des lombalgies et qu'il a été pris en charge sur le plan psychologique dans les suites immédiates de l'accident.

Il conclut à :

- un arrêt des activités professionnelles du 14 octobre 2013 au 1er décembre 2013 puis du 16 avril 2015 au 17 mai 2016 pour ablation du matériel de la clavicule gauche et du 17 octobre 2016 au 20 novembre 2016 pour la neurolyse du coude gauche, précisant que M. [C] n'a pas été placé en arrêt de travail le 15 janvier 2016 pour la réparation ligamentaire du pouce droit,

- un déficit fonctionnel temporaire total :

* du 14 au 21 octobre 2013

* du 16 au 17 avril 2015

* le 15 janvier 2016

* le 17 octobre 2016

- un déficit fonctionnel temporaire partiel:

* au taux de 50 % du 22 octobre 2013 au 1er décembre 2013

* au taux de 25 % du 2 décembre 2013 au 14 juillet 2014

* au taux de 15 % du 15 juillet 2014 au 15 avril 2015

* au taux de 25 % du 18 avril 2015 au 14 janvier 2016

* au taux de 50 % du 16 janvier 2016 au 15 février 2016

* au taux de 15 % du 16 février 2016 au 16 octobre 2016

* au taux de 50 % du 18 octobre 2016 au 17 novembre 2016

* au taux de 25 % du 18 novembre 2016 au 17 janvier 2017

* au taux de 15 % du 18 janvier 2017 au 11 octobre 2017

- une consolidation au 11 octobre 2017

- des souffrances endurées de 4/7

- un préjudice esthétique temporaire de 3/7 pendant la période de prise en charge

- un déficit fonctionnel permanent de 12 %

- un préjudice esthétique permanent de 2/7

- un préjudice d'agrément : «En ce qui concerne ses activités d'agrément, M. [C] pratiquait le footing et l'escalade, activités qu'il n'a pas pu reprendre. Il pratique la natation qu'il a reprise en juin 2015. Il a abandonné la réfection de sa résidence secondaire. Il pratique le piano qu'il a repris depuis l'accident. Par contre, en ce qui concerne la guitare, il en fait de moins en moins depuis l'accident.»

- un besoin d'assistance temporaire par une tierce personne d'une heure et demi par jour pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50 % et de trois heures par semaine pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 %. L'expert précisé qu'aucune aide humaine n'est nécessaire pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 15 %.

Son rapport constitue sous les précisions qui suivent une base valable d'évaluation du préjudice corporel de M. [V] à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 1] 1982, de son activité professionnelle de chef de projet pour un cabinet d'architectes, la société Archicopro, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale.

Il conviendra de tenir compte de ce qu'il résulte des articles 29 et 33 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et des articles L. 421-1 et R. 421-13 du code des assurances que lorsque le FGAO intervient, il paie les indemnités allouées aux victimes ou à leurs ayants droit qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre lorsque l'accident ouvre droit à réparation et que les versements effectués au profit des victimes ou de leurs ayants droit et qui ne peuvent pas donner lieu à une action récursoire contre le responsable des dommages ne sont pas considérés comme une indemnisation à un autre titre.

Enfin, il y a lieu de procéder conformément à la demande à l'actualisation des indemnités allouées au titre des postes de préjudice patrimoniaux antérieurs à la consolidation en fonction de l'évolution de l'indice des prix à la consommation pour tenir compte de la dépréciation monétaire.

Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles

Ce poste de préjudice vise à indemniser l'ensemble des dépenses de santé, incluant les frais d'hospitalisation, médicaux et pharmaceutiques, exposés avant la date de la consolidation.

Il ressort du décompte définitif de créance de la CPAM en date du 17 octobre 2019 que cet organisme a pris en charge à la suite de l'accident de trajet de M. [C] du 14 octobre 2013 et jusqu'au 11 octobre 2017, date de la consolidation, des frais hospitaliers d'un montant de 14 025,78 euros, des frais médicaux d'un montant de 1 999,55 euros et des frais pharmaceutiques s'élevant à la somme de 366,80 euros, soit la somme totale de 16 392,13 euros dont à déduire les franchises médicales d'un montant de 82 euros.

La cour d'appel ayant demandé à la société Mutua gestion, gestionnaire du contrat d'assurance complémentaire santé de M. [C] de produire le décompte des prestations servies, le responsable du pôle contentieux de l'institution de prévoyance Klesia, organisme assureur, a indiqué que les dépenses de santé réglées à la suite de l'accident de M. [C] s'élevaient à la somme de 1 907,85 euros dont 152 euros de frais d'hospitalisation et 1 755,85 euros de frais pharmaceutiques, ce document ayant été transmise par le greffe aux parties le 14 décembre 2021.

M. [C] a par ailleurs produit un décompte des remboursements de dépense de santé effectués en exécution de son contrat d'assurance complémentaire santé entre le 4 novembre 2013 et le 14 décembre 2015 détaillant pour chaque dépense la part prise en charge par la sécurité sociale et celle prise en charge par l'assurance complémentaire.

Ceci étant rappelé, M. [C] fait valoir que des dépenses de santé sont demeurées à sa charge pour un montant actualisé de 4 087 euros incluant des franchises médicales ainsi que des frais relatifs à des séances de soutien psychologique, à des consultations médicales à l'hôpital [11], à des consultations en neurologie et auprès de son médecin traitant ainsi qu'à des radiographies.

Le FGAO conclut à la confirmation du jugement qui a chiffré le montant des dépenses de santé demeurées à la charge de M. [C] à la somme de 82 euros correspondant aux franchises médicales.

Sur ce, compte tenu du retentissement psychologique de l'accident admis par l'expert, des troubles neurologiques constatés et du parcours de soins décrit par M. [X], les dépenses de santé invoquées par M. [C] sont bien en lien de causalité avec l'accident de la circulation dont il a été victime, y compris les consultations à l'hôpital [11] où M. [C] a été suivi, les consultations auprès de son médecin généraliste et en neurologie, les radiographies qui sont pour certaines reproduites dans le rapport d'expertise et le suivi psychologique dont M. [C] justifie entre 2013 et 2015.

Le décompte détaillé établi par la société Mutua gestion des prestations servies au titre du contrat d'assurance santé complémentaire de M. [C], qui détaille pour chaque dépense de santé engagée la part prise en charge par la sécurité sociale et celle prise en charge au titre de ce contrat permet de déterminer le montant des dépenses demeurées à la charge de M. [C] entre le 3 novembre 2013 et le 14 décembre 2015.

En revanche, il n'est pas établi que M. [C] ait conservé à sa charge des dépenses de santé pour la période postérieure.

Par ailleurs, au vu des attestations délivrées par Mme [S], psychologue clinicienne et par le Docteur [E], psychiatre, il est justifié de 29 séances de suivi psychologique au coût unitaire de 100 euros entre 2013 et 2015.

Au bénéfice de ces observations les dépenses de santé demeurées à la charge de M. [C] s'établissent de la manière suivante :

- franchises médicales : 82 euros

- séances de soutien psychologique :

29 séances x 100 euros = 2 900 euros

- consultation en soins externes à l'hôpital [11] le 6 novembre 2013 : 7,80 euros

- 4 consultations d'un médecin généraliste entre le 10 décembre 2013 et le 19 septembre 2015

(3 x 16,20 euros) +17,20 = 65,80 euros

- 5 consultations d'un neurologue entre le 31 janvier 2014 et 19 juin 2015

98,90 euros x 5 = 494,50 euros

- actes d'imagerie médicale février 2015 et décembre 2015 : 50,27 euros

Soit une somme totale de 3 600,37 euros.

Après actualisation, l'indemnité revenant à M. [C] s'élève à la somme de 3 815,80 euros.

- Frais divers

Ce poste de préjudice indemnise tous les frais, hormis les dépenses de santé, que la victime directe a été contrainte d'exposer en raison du fait dommageable jusqu'à la date de la consolidation.

* Sur les sommes réclamées par M. [C] au titre de ce poste de préjudice

M. [C] réclame en réparation de ce poste de préjudice les indemnités suivantes, après actualisation à la date de l'arrêt :

- 3 333,88 euros au titre des honoraires de son médecin-conseil

- 671,36 euros en réparation de son préjudice vestimentaire

- 513,61 euros au titre des frais de déplacement,

- 42,41 euros au titre des frais de télévision exposés lors de son hospitalisation.

Le FGAO objecte que si ces frais pourraient être pris en charge comme l'a jugé le tribunal, il résulte des dispositions de l'article L. 421-1 du code des assurances que son obligation d'indemnisation revêt un caractère subsidiaire et qu'il incombe à M. [C] de justifier qu'il ne bénéficie pas d'un contrat d'assurance protection juridique et/ou défense-recours permettant de les indemniser.

Sur ce, outre le fait qu'une assurance de protection juridique ou une garantie «défense recours» ne peut couvrir ni les dommages aux biens, ni les frais liés à une hospitalisation, il ne peut être exigé de M. [C] qu'il rapporte la preuve de l'absence de souscription d'une telle assurance facultative, s'agissant d'un fait négatif.

Au vu des factures produites, M. [C] justifie avoir acquitté des honoraires d'assistance à expertise par un médecin conseil d'un montant total de 2 420 euros, ce qui représente après actualisation une somme de 3 333,88 euros.

Cette dépense rendue nécessaire par le fait dommageable est par là même indemnisable.

Par ailleurs, il ressort du procès-verbal de police que M. [C] qui circulait sur sa motocyclette lors de l'accident a été éjecté de son engin et a chuté sur le sol.

Compte tenu de la violence du choc, il est suffisamment établi que les effets personnels de M. [C] ont été détruits ou endommagés dans l'accident, y compris son équipement de motard dont il a déclaré la perte lors de son audition devant les services de police.

Au vu des factures d'achat versées aux débats, le préjudice matériel de M. [C] s'élève à la somme de 615,84 euros, ce qui représente après actualisation à la date de l'arrêt une indemnité de 671,36 euros.

S'agissant des frais de déplacement nécessaires dont M. [C] sollicite l'indemnisation sur la base d'une indemnité kilométrique actualisée en 2021, en produisant un certificat d'immatriculation et des justificatifs des distances parcourues pour se rendre aux différentes consultations médicales et aux réunions d'expertise, il convient conformément à la demande de les chiffrer à la somme actualisée de 513,61 euros.

M. [C] démontre enfin au vu des factures produites avoir exposé des frais de télévision d'un montant de 38 euros lors de ses deux hospitalisation en 2013 et 2015, soit la somme actualisée de 42,41 euros, étant observé qu'il n'aurait pas eu à engager ces dépenses sans la survenance du fait dommageable.

* Sur les travaux de rénovation d'une résidence secondaire

Il convient d'examiner sous la rubrique des frais divers dont elle relève la demande présentée par M. [C] au titre des frais de main d'oeuvre exposés en novembre 2014 pour poursuivre les travaux de rénovation de sa résidence secondaire.

M. [C] fait valoir qu'il avait entrepris de rénover lui-même une maison d'habitation en Normandie, qu'il a été contraint d'y renoncer à la suite de l'accident et qu'il a eu recours aux services d'une entreprise.

Il précise qu'étant chef de projet dans un cabinet d'architectes et titulaire d'un diplôme de conducteur de travaux, il avait les compétences et la capacité de procéder lui-même à tous les travaux de rénovation.

Il réclame ainsi après actualisation une indemnité d'un montant de 49 264,35 euros.

Le FGAO réplique que M. [C] ne démontre ni qu'il avait entrepris ces travaux seuls ni qu'il serait dans l'incapacité de les réaliser du fait de l'accident, ni qu'il avait la capacité et le temps de procéder à la réfection de sa résidence secondaire, sa qualité de chef de projet n'impliquant pas qu'il ait les compétence pour rénover entièrement une maison.

Sur ce, M. [C] verse aux débats un attestation établie par un ami, M. [L] qui déclare : «Je connais [O] [[C]] depuis de nombreuses années (...) Je l'ai aidé à rénover sa maison quand mon emploi du temps le permettait. Il a tout arrêté après son accident, physiquement cela lui était trop pénible et douloureux (...)»

Il produit des clichés photographiques témoignant de ce qu'il procédait lui-même aux travaux de réfection de sa résidence secondaire, y compris les travaux de toiture.

M. [C] justifiant exercer un emploi de chef de projet dans un cabinet d'architectes et avoir une qualification de conducteur de travaux, il est suffisamment établi qu'il avait les compétences nécessaires pour procéder avec l'aide d'amis à la rénovation intégrale de sa résidence secondaire, y compris les travaux de maçonnerie et de gros oeuvre et qu'il avait commencé d'y procéder.

Compte tenu de la nature et de l'importance des lésions et séquelles consécutives à l'accident précisément décrites par l'expert qui fait état de l'abandon des travaux dans son rapport, il est démontré que l'état de santé de M. [C] ne lui permettait pas de poursuivre la rénovation de sa résidence secondaire et qu'il a été contraint de recourir aux services d'une entreprise extérieure.

M. [C] produit une facture des travaux de réhabilitation en date du 30 octobre 2014 pour un montant de 77 606,10 euros ainsi qu'une attestation de l'entreprise qui les a réalisés selon laquelle 40 % de cette somme correspond à la fourniture de matériaux et 60 % à la main d'oeuvre.

Il convient ainsi d'indemniser les frais de main d'oeuvre que la victime a été contrainte d'exposer en raison de l'accident qui s'élèvent à la somme de 46 562,66 euros (77 606,10 euros x 60 %), ce qui représente après actualisation pour tenir compte des effets de la dépréciation monétaire une indemnité de 49 264,34 euros.

*************

Le poste des frais divers, incluant le préjudice matériel, s'établit ainsi de la manière suivante :

- frais d'assistance à expertise : 3 333,88 euros

- préjudice matériel : 615,84 euros

- frais de déplacement : 513,61 euros

- frais de télévision : 42,41 euros

- frais de main d'oeuvre : 49 264,34 euros

Soit un total de 53 770,08 euros.

Le jugement sera infirmé.

- Assistance temporaire par une tierce personne

Ce poste de préjudice vise à indemniser pendant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident jusqu'à la consolidation, le besoin d'assistance de la victime directe par une tierce personne pour s'assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité et suppléer sa perte d'autonomie.

La demande d'indemnisation des frais de main d'oeuvre engagés pour poursuivre les travaux de rénovation de sa résidence secondaire que M. [C] avait présentée au titre de ce poste de préjudice a été examinée sous la rubrique des frais divers dont elle relève.

La nécessité de la présence auprès de M. [C] d'une tierce personne avant consolidation pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne selon les périodes et le volume honoraire retenus par l'expert judiciaire n'est par contestée.

Les parties s'opposent en revanche sur les bases d'évaluation de l'indemnité.

M. [C] demande en infirmation du jugement qu'elle soit calculée en fonction d'un taux horaire de 19,67 euros (correspondant au montant du SMIC horaire net en 2021, majoré des cotisations sociales salariales et patronales et de la majoration pour travail le dimanche, sur la base de 412 jours par an (17,43 euros x 412/365 jours) pour tenir compte des congés payés et jours fériés).

Le FGAO qui conclut également à l'infirmation du jugement offre d'évaluer ce préjudice sur la base d'un tarif horaire de 13 euros s'agissant d'une aide non spécialisée et non médicalisée.

Il reprend à son compte les motifs des premiers juges selon lesquels M. [C] ne démontre pas avoir engagé des dépenses au titre de la tierce personne et avoir eu la qualité d'employeur.

Sur ce, en application du principe de la réparation intégrale, l'indemnité allouée au titre de la tierce personne qui doit être appréciée en fonction des besoins ne saurait être réduite en cas d'aide familiale ni subordonnée à la production des justificatifs des dépenses effectuées.

En revanche, le calcul de M. [C] qui intègre les cotisations sociales salariales alors que ces charges sont supportées par le salarié et non par l'employeur est sur ce point erroné.

Eu égard à la nature de l'aide requise non spécialisée et du handicap qu'elle est destinée à compenser, il est justifier d'indemniser ce poste de préjudice sur la base d'un taux horaire de 20 euros sur une année de 365 jours, ramené à 19,67 euros pour rester dans les limites de la demande.

L'indemnité de tierce personne s'établit ainsi de la manière suivante :

- pour les périodes du 22 octobre 2013 au 1er décembre 2013, du 16 janvier 2016 au 15 février 2016 et du 18 octobre au 17 novembre 2016 (103 jours)

* 103 jours x 1,5 heures x 19,67 euros = 3 039,02 euros

- pour les périodes du 2 décembre 2013 au 14 juillet 2014, du 18 avril 2015 au 14 janvier 2016 et du 18 novembre 2016 au 17 janvier 2017 (558 jours)

* 558 jours / 7 jours x 3 heures x 19,67 euros = 4 703,94 euros

Soit une somme totale de 7 742,96 euros.

Le jugement sera infirmé.

- Perte de gains professionnels actuels

Ce poste vise à indemniser la perte ou la diminution de revenus causée par l'accident pendant la période antérieure à la consolidation.

Les parties sollicitent la confirmation du jugement qui a chiffré ce poste ce préjudice à la somme de 299,81 euros, après imputation de la créance des tiers payeurs.

Le jugement sera confirmé.

- Sur la demande d'indemnisation au titre d'une incidence professionnelle temporaire

M. [C] soutient que si dans la nomenclature Dintilhac, il n'a pas été envisagé d'incidence professionnelle pour la période antérieure à la consolidation, il n'en demeure pas moins que lorsque la victime reprend son travail avant cette date, le principe de la réparation intégrale impose que ce préjudice, distinct des souffrances endurées et du déficit fonctionnel temporaire qui sont des postes de préjudice extra-patrimoniaux, soit indemnisé.

Il fait valoir qu'il a subi jusqu'à la date de la consolidation une incidence professionnelle caractérisée d'une part, par une pénibilité et une fatigabilité accrues depuis la reprise de son travail le 2 décembre 2013, d'une perte d'intérêt liée à l'obligation de renoncer aux visites de chantier ainsi qu'une dévalorisation sur le marché du travail en raison des restrictions imposées par la médecine du travail.

M. [C] réclame à ce titre une indemnité d'un montant de 130 882,47 euros calculées sur la base de 12 % de son salaire pour la pénibilité, de 50 % puis de 25 % de son salaire pour la perte d'intérêt et de 20 % de son salaire au titre de la dévalorisation sur le marché du travail.

Le FGAO conclut à la confirmation du jugement qui a écarté la demande tendant à une indemnisation distincte d'une incidence professionnelle pour la période antérieure à la consolidation.

Sur ce, les souffrances morales et physiques ressenties par la victime avant la date de consolidation, y compris celles liées à une perte d'intérêt sur le plan professionnel et à une pénibilité accrue après la reprise d'activité sont incluses dans le poste de préjudice des souffrances endurées.

De même une éventuelle dévalorisation sur le marché du travail, en l'espèce non établie, M. [C] ayant continué d'occuper le même poste auprès du même employeur avec un aménagement jusqu'à la date de consolidation, relève du poste de préjudice du déficit fonctionnel temporaire.

Le jugement qui a rejeté la demande sera confirmé.

Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Incidence professionnelle

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.

M. [C] avance qu'il subit non seulement une fatigabilité et une pénibilité accrues dans l'exercice de sa profession, mais également une perte d'intérêt de son emploi attestée par ses clients habituels en raison de l'impossibilité de monter sur les toitures, les échafaudages et les échelles et une dévalorisation sur le marché du travail au regard de la nature des restrictions à l'emploi portant sur des éléments essentiels pour un architecte.

S'agissant des modalités d'évaluation de son préjudice, il reproche aux premiers juges d'avoir procédé à une indemnisation forfaitaire et estime justifié d'asseoir cette évaluation sur une fraction du salaire.

Il sollicite ainsi en infirmation du jugement une indemnité d'un montant de 604 040,44 euros calculée sur la base de 4 % de son salaire au titre de la pénibilité, de 25 % de son salaire pour la perte d'intérêt et de 20 % de son salaire pour la dévalorisation sur le marché du travail avec capitalisation selon un euro de rente temporaire jusqu'à la date prévisible de son départ à la retraite.

Le FGAO qui conteste ce mode d'évaluation de l'incidence professionnelle propose d'évaluer ce poste de préjudice, constitué seulement d'une pénibilité accrue, à la somme de 15 000 euros.

Il ajoute qu'il ressort des bulletins de paie versés aux débats que M. [C] pourrait éventuellement prétendre à une rente au titre du contrat de prévoyance souscrit par son employeur et pour lequel il cotisait.

Relevant que cette rente éventuelle doit être déduite de ce poste de préjudice, le FGAO estime qu'aucune somme ne peut être versée à M. [C] en l'état.

Sur ce, il résulte des pièces versées aux débats que lors de l'examen périodique de M. [C] réalisé le 13 décembre 2013, le médecin du travail a établi une fiche d'aptitude au poste de chef de projet qu'il occupait avant l'accident au sein d'un cabinet d'architectes, rédigée dans les termes suivants : «apte à le reprise du travail avec poste aménagé : limiter les déplacements ; privilégier les transports en commun ; limiter les efforts en particulier ECHELLES + examen complémentaire demandé».

Il n'est versé aux débats aucun avis du médecin du travail postérieur à la date de consolidation des lésions le 11 octobre 2017, étant observé que selon le rapport d'expertise du Docteur [X], M. [C] présentait le 2 décembre 2013 lorsqu'il a repris le travail un déficit fonctionnel temporaire de 25 % alors que son déficit fonctionnel permanent n'est que de 12 %.

L'expert judiciaire qui a rappelé la teneur de la fiche d'aptitude avec aménagement de poste dans son rapport ne s'est pas autrement prononcé sur la nature et l'importance de l'incidence professionnelle du dommage auquel il ne consacre aucun autre développement.

Compte tenu de la nature et de l'importance des séquelles que conserve M. [C] après consolidation incluant une gêne fonctionnelle à l'effort au niveau de la clavicule gauche, des troubles neurologiques et des fourmillements dans le territoire du nerf ulnaire gauche et des lombalgies, il est suffisamment établi que M. [C] subit une incidence professionnelle dont l'importance doit toutefois être relativisée dans la mesure où il demeure apte à l'exercice de sa profession.

Cette incidence professionnelle inclut une pénibilité et une fatigabilité accrues dans l'exercice de la profession de chef de projet dans un cabinet d'architectes qui nécessite après la phase d'étude et de conception de procéder à un suivi du chantier de construction ainsi que le rappelle un client du cabinet pour lequel M. [C] travaillait (pièce n° 8-21), mais également une dévalorisation sur le marché du travail par rapport à un salarié ne présentant aucune limitation de ses capacités physiques, étant observé que M. [C] n'est pas assuré de pouvoir conserver le même emploi jusqu'à l'âge de la retraite et qu'il sera ainsi en concurrence avec d'autres salariés valides.

S'agissant de la perte d'intérêt invoquée, elle apparaît limitée, le médecin du travail n'ayant pas interdit les visites de chantier mais seulement prescrit une limitation des déplacements et des efforts, en particulier l'utilisation des échelles.

Il n'est pas pertinent, contrairement à ce que soutient M. [C] d'opérer une corrélation entre le montant du salaire de la victime et l'évaluation des composantes de l'incidence professionnelle liées à la pénibilité accrue, à la perte d'intérêt ou à la dévalorisation sur le marché du travail dont l'importance n'est pas liée au niveau de rémunération.

Compte tenu des éléments qui précèdent, de l'âge de M. [C] à la date de la consolidation, soit 35 ans, et de la durée prévisible pendant laquelle il subira les incidences professionnelles ci-dessus décrites, il convient d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 50 000 euros qui tient compte des données concrètes de l'espèce et ne revêt aucun caractère forfaitaire.

Il n'est fait état dans le décompte définitif de créance de la CPAM en date du 17 octobre 2019 d'aucun capital ni d'aucune rente d'accident du travail versée à M. [C] qui communique un message électronique d'un préposé de la CPAM indiquant que ce dernier ne perçoit ni rente d'accident du travail ni pension d'invalidité en lien avec l'accident.

La cour d'appel ayant demandé à la société Mutua gestion de produire le décompte de sa créance, le responsable du pôle contentieux de l'institution de prévoyance Klesia, organisme assureur, a confirmé ne pas avoir versé de prestations à M. [C] au titre de son contrat de prévoyance, celui-ci ayant été souscrit postérieurement à l'accident ; ce document qui reprend la teneur de la pièce n° 6-2 de M. [C] a été transmis par le greffe aux parties le 14 décembre 2021.

Quant-au contrat de prévoyance des cadres à adhésion obligatoire souscrit par la société Archicopro au bénéfice de ses salariés, auquel M. [C] avait adhéré avant la date de l'accident ainsi qu'il résulte des mentions du bulletin de paie de juillet 2013 faisant état du prélèvement de cotisations à ce titre, il est suffisamment établi que M. [C] dont le déficit fonctionnel permanent n'est que de 12 % et dont la capacité de gains est demeurée intacte n'a bénéficié, ainsi qu'il l'affirme, d'aucune rente d'invalidité, ce que confirme l'examen de ses avis d'imposition qui ne font état d'aucune rente ou pension d'invalidité.

En l'absence de prestations imputables sur le poste de préjudice de l'incidence professionnelle, le FGAO est tenu d'indemniser M. [C] en lui versant la somme de 50 000 euros.

Le jugement sera confirmé.

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de la qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, y compris les préjudices d'agrément et sexuel temporaires et les répercussion temporaires du dommage dans la vie sociale et professionnelle de la victime.

M. [C] réclame en réparation de ce poste de préjudice, à titre principal, une indemnité de 9 947,90 euros calculée en fonction d'une base journalière de 31 euros pour un déficit total et à titre subsidiaire, dans le cas où la cour ne lui accorderait pas une indemnité distincte au titre de l'incidence professionnelle temporaire, une indemnité d'un montant de 48 864,46 euros incluant la dévalorisation temporaire sur le marché du travail.

Le FGAO conclut à la confirmation du jugement qui a chiffré ce poste de préjudice à la somme de 8 022,50 euros en retenant une base d'indemnisation journalière de 25 euros.

Sur ce, M. [C] ayant conservé jusqu'à la date de consolidation le même poste de travail, qui a seulement été aménagé, et ayant continué de travailler auprès du même employeur sans qu'il soit justifié d'un changement envisagé, la dévalorisation temporaire sur le marché du travail alléguée est purement hypothétique.

Eu égard à l'incapacité fonctionnelle subie par M. [G] et aux troubles apportés à ses conditions d'existence avant la date de consolidation y compris en ce qui concerne ses activités de loisirs et d'agrément et dans sa vie intime, ce poste de préjudice sera calculé conformément à la demande de la victime sur une base journalière de 30 euros pour les périodes de déficit fonctionnel total et proportionnellement pour les périodes de déficit fonctionnel partiel.

Le déficit fonctionnel temporaire doit ainsi être évalué comme suit :

- 360 euros pour les périodes de déficit fonctionnel temporaire total du 14 au 21 octobre 2013, du 16 au 17 avril 2015, le 15 janvier 2016 et le 17 octobre 2016 (12 jours x 30 euros)

- 1 545 euros pour les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50 % du 22 octobre 2013 au 1er décembre 2013, du 16 janvier 2016 au 15 février 2016 et du 18 octobre au 17 novembre 2016 (103 jours x 30 euros x 50 %)

- 4 185 euros pour les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 % du 2 décembre 2013 au 14 juillet 2014, du 18 avril 2015 au 14 janvier 2016 et du 18 novembre 2016 au 17 janvier 2017 (558 jours x 30 euros x 25 %)

- 3 537 euros pour les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 15 % du 15 juillet 2014 au 15 avril 2015, du 16 février 2016 au 16 octobre 2016 et du 18 janvier 2017 au 11 octobre 2017 (786 jours x 30 euros x 15 %)

Soit une somme globale de 9 627 euros.

Le jugement sera infirmé.

- Souffrances endurées

Ce poste de préjudice indemnise les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés que la victime endure pendant la maladie traumatique, y compris la souffrance morale liée à une perte d'intérêt sur le plan professionnel et la pénibilité accrue liée à la reprise de son activité professionnelle avant la date de consolidation.

M. [C] demande à voir porter le montant de l'indemnité allouée au titre de ce poste de préjudice à la somme de 22 000 euros et subsidiairement à celle de 113 965,91 euros s'il n'était pas retenu d'indemnisation distincte au titre de l'incidence professionnelle temporaire.

Le FGAO qui conclut également à l'infirmation du jugement propose d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 8 000 euros.

Sur ce, il y a lieu de tenir compte pour évaluer ce poste de préjudice coté 4/7 par l'expert du traumatisme initial, des souffrances physiques mais également psychiques induites par les différentes lésions y compris dans la sphère professionnelle pendant toute la durée de la maladie traumatique, de la durée du parcours de soins, des différentes hospitalisations, des interventions chirurgicales, des douleurs dans le territoire ulnaire, du retentissement psychologique ayant nécessité des séances de psychothérapie et la prise d'un traitement psychotrope.

Au vu de ces éléments, ce préjudice sera évalué à la somme de 30 000 euros.

Le jugement sera infirmé.

- Préjudice esthétique temporaire

M. [C] sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué une indemnité de 1 000 euros en réparation de ce poste de préjudice.

Le FGAO conclut au rejet de la demande en soutenant que pour caractériser un tel préjudice il faut justifier d'une altération de l'apparence aux conséquences très préjudiciables et que les plaies et l'immobilisation du membre supérieur dans un Dujarrier pendant 10 semaines et du pouce dans un gantelet pendant 4 semaines ne sauraient justifier une indemnisation distincte, étant précisé que le retentissement esthétique temporaire est toujours pris en compte dans les souffrances endurées.

Sur ce, le préjudice esthétique temporaire qui est distinct des souffrances endurées, indemnise les atteintes physiques et plus généralement l'altération de l'apparence physique de la victime avant la consolidation, sans qu'il soit nécessaire qu'elles revêtent un caractère particulier de gravité pour être indemnisables.

En l'espèce, le préjudice esthétique temporaire de M. [C], côté 3/7 par l'expert pendant la période de prise en charge, est caractérisé par les plaies initiales, par l'immobilisation coude au corps du membre supérieur gauche pendant six semaines et par le port d'un gantelet pendant quatre semaines à la suite de l'intervention chirurgicale au niveau du pouce droit, ces différents éléments ayant altéré l'apparence de la victime.

Ce poste de préjudice a été justement évalué à 1 000 euros par le tribunal.

Le jugement sera confirmé.

Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent

Ce poste de préjudice vise à indemniser, pour la période postérieure à la consolidation, les atteintes aux fonctions physiologiques, les souffrances chroniques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiale et sociales.

Les premiers juges ont évalué ce poste de préjudice à la somme de 25 000 euros.

M. [C] réclame en infirmation du jugement une indemnité d'un montant de 50 304,74 euros qu'il évalue en fonction d'une indemnité journalière de 5 euros rapportée à son espérance de vie appréciée au regard des dernières tables de mortalité publiées par l'INSEE.

Il sollicite à titre subsidiaire que cette indemnité soit portée à la somme de 67 072,98 euros si la cour estimait que les justificatifs qu'il produit sont insuffisants à caractériser un préjudice d'agrément.

Il souligne que son déficit fonctionnel permanent est constitué d'une part d'un taux d'AIPP fixé à 12 % en raison de troubles neurologiques dans le territoire du nerf ulnaire droit (et non gauche comme indiqué par erreur dans le rapport d'expertise) et d'une limitation de la mobilité du membre supérieur gauche, mais également par des douleurs lombaires bilatérales non prévues dans le barème médico-légal des incapacités et des troubles subis dans ses conditions d'existence, justifiant l'indemnité réclamée.

Il soutient que la méthode consistant à indemniser le déficit fonctionnel permanent sur la base d'un point d'incapacité est contraire au principe de la réparation intégrale et ne permet pas d'indemniser à leur juste mesure les souffrances pérennes endurées par la victime et les troubles apportés à ses conditions d'existence qui constituent des composantes du déficit fonctionnel permanent.

Il ajoute que l'indemnisation en fonction d'une base journalière d'indemnisation et de l'espérance de vie de la victime est conforme au principe indemnitaire.

Le FGAO objecte que l'expert a retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 12 % en ce compris les aspects physiques et psychologique.

Il propose d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 25 000 euros retenue par le tribunal mais estime pour les mêmes motifs que ceux avancés s'agissant de l'incidence professionnelle que M. [C] est susceptible d'avoir perçu une rente «d'accident du travail» au titre du contrat de prévoyance souscrit par son employeur, que le montant de cette rente doit être pris en compte et qu'en l'état qu'aucune somme ne peut être versée à M. [C].

Sur ce, l'expert a retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 12 % tant sur le plan physique que psychologique, après avoir relevé que M. [C], droitier, a été opéré de la clavicule gauche et a toujours une gêne fonctionnelle à l'effort, qu'il persiste des troubles neurologiques et des fourmillements dans le territoire du nerf ulnaire à gauche, qu'il a également été opéré du pouce droit, qu'on note aussi une gêne à l'effort associée à des lombalgies et qu'il a été pris en charge sur le plan psychologique dans les suites immédiates de l'accident.

L'expert ayant relevé que M. [C] avait présenté une neurolyse compression du nerf ulnaire du coude gauche et constaté lors de son examen médical qu'il persistait des fourmillements dans le territoire du nerf ulnaire gauche des quatrième et cinquième doigts, son rapport n'est affecté d'aucune erreur sur ce point.

Au vu des séquelles constatées, des douleurs persistantes et des troubles induits dans les conditions d'existence de M. [C], qui était âgé de 35 ans à la date de consolidation, il convient d'évaluer ce poste de préjudice, en se plaçant à la date du présent arrêt, à la somme de 27 600 euros, sans qu'il y ait lieu de se référer à la valeur abstraite d'un pont d'incapacité.

Pour les mêmes motifs que ceux énoncés s'agissant de l'incidence professionnelle et auxquels il convient de se référer, en l'absence de prestations imputables sur le poste de préjudice de l'incidence professionnelle, le FGAO est tenu d'indemniser M. [C] en lui versant la somme de 27 600 euros.

Le jugement sera infirmé.

- Préjudice esthétique permanent

Ce poste de préjudice indemnise les atteintes physiques et plus généralement l'altération de l'apparence physique de la victime après la consolidation.

Les parties concluent chacune à l'infirmation du jugement, M. [C] réclamant une indemnité de 4 500 euros en réparation de ce préjudice alors que le FGAO propose de l'évaluer à la somme de 2 200 euros.

Sur ce, coté 2/7 par l'expert judiciaire, ce préjudice caractérisé par la présence d'une cicatrice de 15 centimètres de long au niveau de la clavicule gauche et d'une cicatrice ulnaire au niveau du coude gauche de 5 centimètres justifie une indemnité de 4 000 euros compte tenu de l'âge de M. [C] à la date de la consolidation, soit 35 ans, et de la localisation des cicatrices sur des parties visibles du corps en période estivale.

Le jugement sera infirmé.

- Préjudice d'agrément

M. [C] réclame au titre du préjudice d'agrément une indemnité d'un montant de 17 000 euros en raison de l'abandon de l'escalade, des travaux de rénovation de sa résidence secondaire et du bricolage et de la gêne dans la pratique de la guitare.

Le FGAO conclut à la confirmation du jugement qui a rejeté cette demande.

Il fait valoir que le préjudice d'agrément n'indemnise que l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité sportive ou de loisir antérieure à la maladie traumatique si les souffrances qu'elle invoque ne sont pas réparées au titre du déficit fonctionnel permanent.

Il estime que M. [C] ne communique ni licence sportive ni justification d'inscription en club ou en salle de sport ne rapporte pas la preuve de la pratique effective et régulière du footing, de l'escalade et des travaux de réfection de sa résidence secondaire avant l'accident ni la preuve d'une souffrance qui en résulte n'est pas déjà réparée au titre du déficit fonctionnel permanent.

Sur ce, le préjudice d'agrément est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs et inclut la limitation de la pratique antérieure.

Contrairement à ce que suggère le FGAO, la preuve d'une telle pratique peut être rapportée par tous moyens sans qu'il soit nécessaire pour la victime de justifier d'une licence sportive ou d'une inscription en club ou dans une salle de sport.

Par ailleurs, ce préjudice, distinct du déficit fonctionnel permanent, est indemnisable dès lors qu'il est caractérisé au regard des critères ci-dessus rappelés.

En l'espèce, M. [C] justifie par les photographies et attestations qu'il produit qu'il pratiquait régulièrement avant l'accident l'escalade avec des amis, qu'il était un adepte du bricolage et rénovait sa résidence secondaire, et qu'il jouait de la guitare, ayant suivi une formation musicale au conservatoire municipal de Courbe voie.

Le Docteur [X] a admis dans son rapport d'expertise que M. [C] n'avait pu reprendre l'escalade à la suite de l'accident, qu'il avait abandonné la rénovation de sa résidence secondaire et qu'il jouait de moins en moins de la guitare.

L'abandon de l'escalade, de la rénovation de sa résidence secondaire qui constituait une activité de loisirs et la limitation de la pratique antérieure de la guitare sont justifiées par la nature des séquelles de M. [C] incluant une gêne fonctionnelle à l'effort au niveau de l'épaule gauche, des troubles neurologiques et des fourmillements dans le territoire du nerf ulnaire gauche des quatrième et cinquième doigts ainsi que des lombalgies.

Au vu de ces éléments, M. [C] subit un préjudice d'agrément justifiant l'allocation d'une indemnité de 10 000 euros.

Le jugement sera infirmé.

*****

Récapitulatif :

Les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux de M. [C] s'établissent de la manière suivante après déduction de la créance des tiers payeurs :

- dépenses de santé actuelles : 3 815,80 euros (infirmation)

- frais divers incluant les frais de main-d'oeuvre pour la rénovation de la résidence secondaire : 53 770,08 euros (infirmation)

- assistance temporaire par une tierce personne : 7 742,96 euros (infirmation)

- pertes de gains professionnels actuels : 299,81 euros (confirmation)

- indemnisation distincte d'une incidence professionnelle temporaire : rejet (confirmation)

- incidence professionnelle : 50 000 euros (confirmation)

- déficit fonctionnel temporaire : 9 627 euros (infirmation)

- souffrances endurées : 30 000 euros (infirmation)

- préjudice esthétique temporaire : 1 000 euros (confirmation)

- déficit fonctionnel permanent : 27 600 euros (infirmation)

- préjudice esthétique permanent : 4 000 euros (infirmation)

- préjudice d'agrément : 10 000 euros (infirmation)

Sur la condamnation du FGAO au paiement des indemnités

Si le FGAO ne peut ni être appelé en déclaration de jugement commun ni faire l'objet d'une condamnation, y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile, lors de l'instance engagée contre le responsable, il résulte de l'article R. 421-14 du code des assurances qu'à défaut d'accord du FGAO avec la victime sur la fixation de l'indemnité lorsque le responsable des dommages est inconnu, la victime saisit la juridiction compétente pour trancher le litige.

Il en résulte que lorsque comme en l'espèce, l'accident a été causé par un véhicule terrestre à moteur dont le conducteur est demeuré non-identifié, le FGAO peut être assigné en justice et condamné au paiement des indemnités mises à sa charge ainsi qu'à une indemnité de procédure en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [C] est ainsi bien fondé à obtenir la condamnation du FGAO au paiement des indemnités ci-dessus fixées et le jugement qui s'est borné à déclarer opposable sa décision au FGAO sera sur ce point complété.

Sur le doublement du taux de l'intérêt légal

Le tribunal a dit que les sommes allouées porteront intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 19 novembre 2019, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées à compter du 14 juin 2014 et jusqu'au 19 novembre 2019.

M. [C] qui conclut à l'infirmation du jugement fait valoir que le FGAO qui a été immédiatement informé de l'accident n'a formulé dans le délai de 8 mois de sa survenance aucune offre provisionnelle détaillée, que la provision versée dans ce délai d'un montant de 500 euros ne peut être considérée comme valant offre pas plus que les provisions subséquentes.

Il ajoute que l'offre d'indemnisation définitive formée par voie de conclusions notifiées le 19 novembre 2019 est non seulement incomplète mais également manifestement insuffisante.

Il demande ainsi à la cour de dire que le montant total de son préjudice incluant la créance des organismes sociaux et provisions non déduites, portera intérêts au double du taux légal à compter du 14 juin 2014 jusqu'au jour où la décision de la cour sera définitive.

Le FGAO réplique que dès qu'il a eu connaissance de l'accident dont M. [C] a été victime, il a ordonné une expertise médicale contradictoire, qu'il a en outre versé plusieurs provisions amiables, que les experts désignés ayant constaté l'absence de consolidation, il a versé une provision complémentaire de 10 000 euros, qu'en l'absence de consolidation il ne pouvait pas formuler d'offre comme le prévoit l'article L. 211-9 du code des assurances, que M. [C] a préféré solliciter l'organisation d'une expertise judiciaire plutôt que de poursuivre la procédure amiable, qu'il ne peut faire peser les délais de cette procédure sur la solidarité nationale.

Le FGAO conclut ainsi au rejet de la demande et subsidiairement à la confirmation du jugement.

Sur ce, en application de l'article L. 211-9 du code des assurances, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime, lorsque la responsabilité, n'est pas contestée, et le dommage entièrement quantifié, une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.

Une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans un délai maximal de huit mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime et l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

A défaut d'offre dans les délais impartis, étant précisé que le délai applicable est celui qui est le plus favorable à la victime, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal, en vertu de l'article L.211-13 du même code, à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.

Selon l'article L. 211-22 du code des assurances ces dispositions sont applicables au FGAO dans ses rapports avec les victimes ou leurs ayants droit.

Toutefois, ce texte précise que les délais prévus à l'article L. 211-9 du code des assurances courent contre le FGAO à compter du jour où celui-ci a reçu les éléments justifiant son intervention.

En l'espèce, il n'est pas justifié que le FGAO ait été informé des éléments justifiant son intervention, à savoir la survenance d'un accident dont l'auteur est demeuré inconnu, avant le 18 décembre 2013, date à la laquelle il a adressé à M. [C] une lettre lui indiquant qu'il avait été informé de son accident et lui adressait une avance de 500 euros.

Le FGAO avait ainsi, en application des textes rappelés ci-dessus, la double obligation de présenter à M. [C] dont l'état n'était pas consolidé, une offre provisionnelle dans le délai de 8 mois suivant la date à laquelle il a été informé des éléments justifiant son intervention et de lui faire ensuite, une offre définitive dans le délai de 5 mois suivant la date à laquelle il a été informée de la consolidation de son état.

Le FGAO devait ainsi faire une offre d'indemnisation provisionnelle portant sur tous les éléments indemnisables du préjudice au plus tard le 18 août 2014, ce qu'il n'a pas fait, étant observé que le versement de provisions amiables ne le dispensait pas de faire une offre d'indemnisation provisionnelle détaillée dans le délai qui lui est imparti.

Le FGAO encourt ainsi la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal à compter du 19 août 2014.

S'agissant de l'offre définitive, le rapport d'expert du Docteur [X] fixant la consolidation au 11 octobre 2017 a été établi le 3 mai 2019 et selon ses mentions adressé le même jour au conseil du FGAO qui ne conteste pas en avoir eu connaissance dès cette date.

Le FGAO devait ainsi formuler une offre d'indemnisation définitive au plus tard le 3 octobre 2019, l'engagement par la victime d'une procédure tendant à obtenir l'indemnisation de son préjudice ne le dispensant pas de cette obligation.

La première offre d'indemnisation définitive dont le FGAO justifie a été formulée tardivement par voie de conclusions notifiés le 19 novembre 2019.

Cette offre d'indemnisation dont les termes sont rappelés dans le jugement déféré ne porte pas toutefois sur tous les éléments indemnisables du préjudice, dans la mesure où elle ne comprend aucune proposition d'indemnisation des frais divers mentionnés seulement pour «mémoire», du préjudice d'agrément et du préjudice esthétique temporaire, alors que M. [C] avait été assisté par un médecin-conseil au cours des opérations d'expertise, que le Docteur [X] avait retenu l'existence d'un préjudice d'agrément et d'un préjudice esthétique temporaire et qu'il incombait au FGAO s'il ne disposait pas d'informations suffisantes pour évaluer ces postes de préjudice d'adresser à la victime une demande de renseignement dans les conditions prévues à l'article R. 211-37 du code des assurances, ce qu'il ne justifie pas avoir fait.

Cette offre incomplète qui équivaut à une absence d'offre n'a pu interrompre le cours des intérêts au double du taux de l'intérêt légal.

Il résulte des motifs qui précèdent que le FGAO doit être condamné à payer à M. [C] les intérêts au double du taux légal à compter du 19 août 2014 et jusqu'au jour de l'arrêt devenu définitif, sur le montant des indemnités allouées, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées.

Les intérêts au taux doublés visés à l'article L. 211-13 du code des assurances ayant la nature d'intérêts moratoires, il y a lieu de dire, conformément à la demande, que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées, sauf à préciser que les dépenses seront à la charge de l'Etat et non du Trésor public.

Les dépens d'appel qui ne figurent pas au rang des charges que le FGAO est tenu d'assurer, seront, compte tenu de la solution du litige, mis à la charge de l'Etat.

L'équité commande enfin d'allouer à M. [C] en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe et dans les limites de l'appel,

- Infirme le jugement en ses dispositions relatives aux dépenses de santé actuelles, aux frais divers, à l'assistance temporaire par une tierce personne, au déficit fonctionnel temporaire, aux souffrances endurées, au préjudice esthétique temporaire, au déficit fonctionnel permanent, au préjudice esthétique permanent, au préjudice d'agrément et au doublement des intérêts au taux légal,

- Le confirme pour le surplus, sauf à préciser que le Fonds de garantie des assurances obligatoire de dommages est condamné au paiement des indemnités allouées et que les dépens de première instance sont mis à la charge de l'Etat,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant :

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à M. [O] [C] les sommes suivantes, provisions et sommes versées au titre de l'exécution provisoire non déduites, au titre des postes de préjudice ci-après :

- dépenses de santé actuelles : 3 815,80 euros

- frais divers incluant les frais de main-d'oeuvre pour la rénovation de la résidence secondaire : 53 770,08 euros

- assistance temporaire par une tierce personne : 7 742,96 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 9 627 euros

- souffrances endurées : 30 000 euros

- déficit fonctionnel permanent : 27 600 euros

- préjudice esthétique permanent : 4 000 euros

- préjudice d'agrément : 10 000 euros,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à M. [O] [C] les intérêts au double du taux légal à compter du 19 août 2014 et jusqu'au jour de l'arrêt devenu définitif, sur le montant des indemnités allouées, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées,

- Dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à M. [O] [C] en application de l'article 700 du code de procédure civile une somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

- Dit que les dépens d'appel seront à la charge de l'Etat.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 20/17500
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;20.17500 ?
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