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26/10/2022 | FRANCE | N°18/06226

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 26 octobre 2022, 18/06226


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 26 OCTOBRE 2022



(n° 2022/ , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/06226 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5U6D



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mars 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 16/01868





APPELANT



Monsieur [B] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par M

e Michel GUIZARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020





INTIMÉE



SASU DÉLICE & CRÉATION

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par Me Christophe PLAGNIOL de la SELAFA CMS FRANCIS LE...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 26 OCTOBRE 2022

(n° 2022/ , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/06226 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5U6D

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mars 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 16/01868

APPELANT

Monsieur [B] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Michel GUIZARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

INTIMÉE

SASU DÉLICE & CRÉATION

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Christophe PLAGNIOL de la SELAFA CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : NAN701

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Nadège BOSSARD, Conseillère, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

M. [B] [I] a été engagé par la société Pomona en qualité de Directeur de l'audit interne, selon contrat de travail à durée indéterminée en date du 5 août 1998. Le contrat de travail a pris effet le 14 octobre 1998.

M. [I] a successivement occupé les postes de Responsable Administratif et Financier de la Branche Episaveurs du Groupe à compter du 1er décembre 2002 puis Directeur du Développement Episaveurs pour la Normandie à compter du 1er décembre 2005.

M. [I] a été nommé Directeur adjoint de la société La Berrichonne le 1er août 2007.

Par avenant tripartite du 1er octobre 2008, il a été nommé directeur d'exploitation de la société La Berrichonne, statut cadre, niveau 9 de la convention collective de détail et de gros à prédominance alimentaire avec une rémunération mensuelle fixe de 7421,62 euros bruts et une rémunération variable.

A compter du 1er avril 2011, à la suite d'une transmission universelle du patrimoine de la société La Berrichonne à la société Délice et création, la Berrichonne est devenue un établissement de la société Délice et création.

Le 21 janvier 2016, M. [I] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement et a été placé en dispense d'activité à effet immédiat.

Le 3 février 2016, la société lui a notifié son licenciement pour insuffisance professionnelle.

M. [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil en contestation de son licenciement.

Par jugement en date du 29 mars 2018, le conseil de prud'hommes de Créteil a:

Fixé le salaire de référence de M. [I] à 13.385 euros

Dit que le licenciement était pour cause réelle et sérieuse

Débouté M. [B] [I] de ses autres demandes

Débouté la société Délice & Création de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Mis les éventuels dépens à la charge de chacune des parties.

M. [I] a interjeté appel le 7 mai 2018.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 13 mars 2019 confirmée sur déféré par arrêt de la cour du 13 septembre 2019, les premières écritures de l'intimée ont été déclarées irrecevables faute d'avoir été notifiées à l'avocat constitué de l'appelant dans le délai imparti par l'article 911 du code de procédure civile.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 17 décembre 2019, les conclusions de l'intimée déposées au greffe les 18 mars et 19 septembre 2019 ont été déclarées irrecevables et le conseiller de la mise en état s'est dit incompétent pour « adjuger à la société Délice et Création le bénéfice de ses conclusions et pièce prises devant le premier juge, adopter les motifs non contraires du premier juge et débouter M. [B] [I] de ses demandes ».

Par arrêt du 18 janvier 2021, la cour d'appel de Paris a confirmé l'ordonnance déférée du 17 décembre 2019 en toutes ses dispositions et a condamné Délice et Création à payer à M. [I] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe, notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 24 juin 2022, M. [I] demande de :

Réformer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 29 mars 2018 en ce qu'il a :

- jugé que le licenciement de M. [I] est intervenu pour une cause réelle et sérieuse ;

- débouté M. [I] de l'intégralité de ses demandes.

En conséquence

- Recevoir M. [I] dans ses écritures, l'y déclarant bien fondé,

- Fixer le salaire de référence de M. [I] à 19.223 €,

- Dire et Juger que le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. [I] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner la société Délice et Création à payer à M. [I] la somme de 326.400 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner la société Délice et Création à payer à M. [I] la somme de 12.596 euros au titre du reliquat de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- Condamner la société Délice et Création à payer à M. [I] les intérêts au taux légal des condamnations à compter de la date de convocation en bureau de conciliation,

- Condamner la société Délice et Création à payer à M. [I] les intérêts au taux légal au titre du règlement tardif de la rémunération variable : 551,87 euros,

- Condamner la société Délice et Création au paiement de la somme de 3.600 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la société Délice et Création aux entiers dépens,

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 28 juin 2022.

MOTIFS :

En vertu de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur l'insuffisance professionnelle :

L'insuffisance professionnelle se définit comme l'inaptitude du salarié à exécuter son travail de manière satisfaisante, au regard de son statut, de ses responsabilités et des compétences requises pour l'exercice de ses fonctions.

Elle est de nature qualitative et ce motif n'entraîne pas comme dans le cas d'un licenciement disciplinaire l'énumération précise et exhaustive des griefs, la seule référence à cette insuffisance constituant un motif de licenciement matériellement vérifiable pouvant être précisé et discuté devant le juge prud'homal.

Caractérisée par le manque de compétences du salarié pour exécuter les tâches qui lui sont confiées, elle doit donc reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur la seule appréciation purement subjective de l'employeur.

La lettre de licenciement mentionne que les missions fixées à M. [I] lors de son embauche étaient de redresser la Berrichonne puis de faire évoluer la succursale, la 'faire sortir de ses modes de fonctionnement ancestraux (pilotage de la tarification par les commerciaux eux-mêmes par exemple)', de donner du sens et de la vision, de piloter les fondamentaux (commerce, achats, logistique, RH), les transformations et développer la culture managériale dans l'entreprise. La lettre fait grief à M. [I] de ne pas avoir procédé aux transformations attendues malgré le temps qui lui a été laissé pour mettre en oeuvre ces changements et de l'aide des services supports du groupe et de la branche, de ne pas se comporter en directeur de succursale, de ne pas manager ses équipes ce qui a eu pour conséquence de mauvaises performances avec une baisse du chiffre d'affaire de 2,1%, un résultat net de gestion de 104 000 euros, un nombre de clients en baisse, un taux de service de 79% inférieur à la moyenne de la branche et au taux de l'année précédente, un encours client de 53,3 jours, supérieur à celui de la branche, un turn over des effectifs supérieur à celui de la branche et des autres succursales d'[Localité 3] et le plus mauvais taux de satisfaction clients de la branche. La société en conclut que si le résultat de la succursale reste positif, c'est à la faveur d'un marché parisien très important et dynamique et d'un loyer excessivement bas.

L'employeur reproche également à M. [I] de ne pas respecter les règles de gestion des encours clients, de ne pas avoir mis en place de contre-mesures un an après l'audit métier de 2014, de ne pas respecter la politique d'achat de la branche vis-à-vis de laquelle il lui est reproché de se comporter en franc-tireur vis-à-vis des fournisseurs et d'avoir adopter une attitude hautaine.

Le conseil de prud'hommes a jugé en ces termes que la société intimée est réputée faire siens : 'Attendu que le salarié ne change pas ses pratiques au sein de la société malgré l'accompagnement et formation ainsi que les mises en garde ;

Attendu que le taux de service n'est que la conséquence de ce qui précède ;

Attendu que le dernier trimestre 2015 est parlant ;

Attendu que pendant 1 /2 an rien ne change ;

Attendu que la prime dont le salarié fait état n'est pas une prime de satisfaction, mais une prime correspondant à l'avenant de 2008 ;

Attendu que tous les griefs figurant dans la lettre de licenciement et les pièces viennent étayer les dires ;

Attendu que le salarié n'apporte pas la preuve de préjudice ;

Attendu qu'il retravaille depuis juin 2016".

M.[I] soutient au contraire avoir mis en oeuvre la modification du système de tarification et l'avoir présenté avec son responsable commercial lors d'une réunion plénière le 4 janvier 2016.

Il expose avoir présenté des propositions pour absorber le surcoût de loyer à venir pour la succursale lors de la présentation du budget 2015/2016 lesquelles n'ont pas été analysées par le directeur de Branche, M. [G].

Il établit que sa vision selon laquelle le développement de l'activité devait s'appuyer sur la conquête de dossiers multi-boutiques a été confortée par l'étude BAIN.

Il soutient que le taux de rentabilité de la société était de 6,9% et non de 6,2% en 2014/215 et donc en progression par rapport à l'année précédente où il était de 6,6%. Il soutient que la créance pour laquelle une provision a été opérée à la demande du contrôleur de gestion de la branche, qui a eu pour effet de réduire le taux de rentabilité, a été encaissée sur la période subséquente.

Il établit, par la production de tableaux comptables, la progression constante du résultat avant impôt de la Berrichonne de 2009 à 2015 ainsi que du taux de rentabilité.

Il démontre qu'il a été félicité pour ses performances le 28 mars 2012 par le président du groupe Pomona et son directeur de branche, M. [G], lors de la journée de l'encadrement supérieur 2012.

Il justifie avoir également été félicité le 14 octobre 2014 par le directeur de branche pour la réussite de l'opération de prospection 'les 100 clients' dont il était à l'initiative et qui a été reprise par une autre société du groupe.

Il établit avoir respecté les recommandations figurant dans la note qui lui avait été remise par M. [G] lors d'un entretien individuel le 18 juin 2014, en réduisant l'encours clients de 6 jours sur la période 2013-2015 et en procédant à des réformes structurelles en recrutant un responsable Télévente, un responsable logistique et un chef des ventes.

Il expose avoir obtenu de bons résultats grâce à un travail d'équipe de l'ensemble des salariés de la société la Berrichonne et dans un bon climat social grâce à un management de proximité et de confiance avec ses équipes sans accomplir leur travail à leur place. Les attestations produites témoignent de l'action de chaque membre de l'équipe, chacun dans sa fonction, et de la mobilisation de l'équipe que M. [I] dirigeait. Il justifie également avoir réuni une fois par trimestre le comité de direction de la société La Berrichonne d'octobre 2014 à janvier 2016.

Il soutient avoir en outre accompagné ses collaborateurs afin qu'ils acquièrent de nouvelles responsabilités au sein du groupe lesquels sont devenus cadres ce dont il justifie en produisant leurs curriculum vitae. M. [P], ex-responsable de la gestion des carrières au sein du groupe Pomona atteste du dynamisme et de la mobilisation des collaborateurs de la Berrichonne pour devenir distributeur leader en boulangerie pâtisserie. Il indique également avoir constaté que l'organigramme était en phase avec les préconisations du groupe.

Il établit que parmi les six succursales de la branche, la moitié a enregistré une baisse de chiffre d'affaires au 30 septembre 2015 par rapport à l'année N-1 et relève que cette baisse a été plus forte pour les deux autres succursales ayant vu leur chiffre d'affaires baisser. Il fait également observer que le responsable logistique n'a pas été remplacé d'avril à septembre 2015 ce qui a eu un impact sur l'organisation et la performance de la Berrichonne et que le recrutement interne d'un chef de vente a mis trois mois, délais imputables au service DRH du groupe.

Il relève que le premier semestre 2015 a été marqué par les conséquences sur le commerce des attentats de janvier 2015 ce dont attestent de nombreux boulangers clients de la Berrichonne et membres de la chambre professionnelle des boulangers.

Il établit par les pièces qu'il produit que le résultat net de gestion de la société la Berrichonne est de 1 972 K euros au 30 septembre 2015, et non de 104 K euros, ce qui la place deuxième au sein des succursales.

M. [O], ancien directeur d'un autre établissement de Délice et création atteste en outre, pour l'exercice suivant, 2015/2016, des 'résultats historiquement hauts et jamais atteints par la succursale la berrichonne'.

M. [I] souligne qu'en tant qu'ancien directeur de l'audit interne, il a toujours eu à coeur d'appliquer strictement les règles du groupe.

Il fait valoir qu'il a réduit l'encours clients qui était historiquement haut, de 55 jours en 2014 à 49 jours en 2015, en incorporant cet objectif dans les réunions du comité de direction de La Berrichonne et en recrutant un chargé de recouvrement.

Il fait observer que le turn over de la Berrichonne est similaire à celui de ses collègues des autres branches en [Localité 3] et que l'enquête de satisfaction client n'est pas représentative de la satisfaction clients sur les dernières années. Il verse aux débats les attestations de boulangers chefs d'entreprises, clients de La Berrichonne qui témoignent de leur satisfaction.

Il démontre que de nombreux autres indicateurs de profitabilité sont passés sous silence par l'employeur tels que le chiffre d'affaires par client, la marge à la livraison, le poids moyen livré, le taux de pénétration du marché, le ratio frais de personnel/CA, le ratio frais totaux/CA, le ratio de vente hygiène et le ration stocks.

Il conteste que le marché parisien soit dynamique et que le loyer soit excessivement bas au regard du ratio loyer/chiffre d'affaires.

Il soutient avoir fait bénéficier les autres sociétés de la branche des conditions tarifaires qu'il avait obtenues auprès de fournisseurs et n'avait donc pas agi en franc-tireur.

Il établit avoir perçu en novembre 2015 soit deux mois avant la notification de son licenciement sa rémunération variable d'un montant de 133 712 euros bruts démontrant qu'il avait atteint ses objectifs pour l'année 2014.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [I] a exercé ses fonctions de directeur d'exploitation de manière professionnelle, que ses actions étaient conduites dans l'intérêt de la société et que les résultats obtenus étaient conformes à ceux des autres succursales du groupe.

L'insuffisance professionnelle qui est invoquée par l'employeur comme motif de licenciement n'est pas caractérisée.

Le licenciement est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement :

M. [I] revendique l'application de la convention collective du « commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire » (IDCC 2216) désignée par l'avenant au contrat de travail le nommant « Directeur d'exploitation » de la Berrichonne au 1er octobre 2008 au lieu de celle du « commerce de gros de la confiserie, chocolaterie, biscuiterie et alimentation fine et des négociants-distributeurs de levure » (IDCC 1624) mentionné sur ses bulletins de paie et à laquelle s'est référé son employeur pour déterminer ses droits à indemnité de licenciement.

Selon l'article L2261-14 du code du travail, dans sa rédaction applicable au jour du licenciement, lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis prévu à l'article L. 2261-9, sauf clause prévoyant une durée supérieure.

Lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans les délais précisés au premier alinéa, les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord, à l'expiration de ces délais.

Une nouvelle négociation doit s'engager dans l'entreprise concernée, à la demande d'une des parties intéressées, dans les trois mois suivant la mise en cause, soit pour l'adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables, soit pour l'élaboration de nouvelles stipulations.

En vertu de l'article L2261-2 du code du travail, la convention collective applicable est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur.

Si l'avenant tripartite au contrat de travail de M. [I] conclu le 1er octobre 2008 avec les sociétés Pomona et la Berrichonne prévoyait l'application de la convention collective du commerce de gros à prédominance alimentaire, le contrat de travail de M. [I] a ensuite été transféré à la société Délice et création le 1er avril 2011 par effet de la transmission universelle du patrimoine de la société La Berrichonne à la société Délice et création laquelle a pour activité le commerce et le négoce de produits alimentaires et notamment le commerce de gros de sucre, chocolat et confiserie.

A la date du licenciement en février 2016, plus d'une année s'était écoulée après la transmission universelle de patrimoine intervenue en avril 2011 de sorte que la convention collective initiale n'a pas survécu.

Il en résulte que la convention collective applicable est celle du commerce de gros de la confiserie, chocolaterie, biscuiterie et alimentation fine et des négociants-distributeurs de levure.

Celle-ci étant applicable de droit et non de manière volontaire, il n'y a pas lieu à application d'un principe de faveur.

Par ailleurs, le mode de calcul de l'indemnité de licenciement ne fait pas l'objet d'une clause du contrat, l'indemnité n'a donc pas été contractualisée.

C'est en outre vainement que M. [I] invoque un avantage acquis, le mode de calcul d'une indemnité de licenciement ne constituant pas un avantage acquis au jour de l'absorption de son employeur par l'entreprise à laquelle son patrimoine est universellement transmis.

La demande de rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement est en conséquence rejetée.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les intérêts moratoires relatifs au paiement tardif du rappel de rémunération variable :

Les intérêts moratoires d'une créance courent à compter de la mise en demeure adressée au débiteur.

En l'espèce, M. [I] a sollicité le paiement du solde de sa rémunération variable par lettre recommandée avec avis de réception adressée le 10 avril pour une date d'exigibilité au 2 mai 2016, date qui doit être retenue pour faire courir les intérêts.

Le paiement est intervenu le 6 novembre 2017.

Les intérêts moratoires dus s'élèvent donc à 541,50 euros. La société Délice et Création est condamnée à payer cette somme à M. [I].

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Selon l'article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9.

Compte tenu de l'ancienneté de M. [I] de 17 années, de son âge lors de son licenciement soit 50 ans, de son salaire mensuel brut moyen des six derniers mois de 19 223 euros, de sa qualification, du délai qui lui a été nécessaire pour retrouver un emploi, au titre duquel il perçoit un salaire nettement inférieur, le préjudice par lui subi sera réparé par l'allocation de la somme de 270 000 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur le remboursement des allocations servies par Pôle emploi :

En vertu de l'article L1235-4 du code du travail, dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.

Compte tenu du licenciement sans cause réelle et sérieuse de M. [I], il y a lieu d'ordonner à la société de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La société Délice et création est condamnée aux dépens de première instance et d'appel et au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté la demande de reliquat d'indemnité conventionnelle de licenciement,

Statuant à nouveau sur le chefs infirmés et contestés,

JUGE que le licenciement de M. [B] [I] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Délice et Création à payer à M. [B] [I] la somme de 270 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt,

CONDAMNE la société Délice et Création à payer à M. [B] [I] la somme de 541,50 euros au titre des intérêts moratoires échus au jour du paiement de la créance de solde de rémunération variable,

CONDAMNE la société Délice et création à rembourser à Pôle emploi les indemnités versées à M. [B] [I] dans la limite de six mois d' allocations,

CONDAMNE la société Délice et Création à payer à M. [B] [I] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Délice et Création à payer aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 18/06226
Date de la décision : 26/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-26;18.06226 ?
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