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24/10/2022 | FRANCE | N°21/00555

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 24 octobre 2022, 21/00555


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2022



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00555 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CC4R2



Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après un arrêt de la Cour de Cassation de PARIS RG n°P18-17-955 prononcé le 14 Octobre 2020 emportant cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Paris (Pôle 5 chambre 10) le 5 mars 2018 sur l'appel d'un jug

ement du 26 février 2016 par le tribunal de grande instance de Paris.



DEMANDEUR A LA SAISINE



MONSIEUR LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2022

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00555 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CC4R2

Décision déférée à la Cour : Sur renvoi après un arrêt de la Cour de Cassation de PARIS RG n°P18-17-955 prononcé le 14 Octobre 2020 emportant cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Paris (Pôle 5 chambre 10) le 5 mars 2018 sur l'appel d'un jugement du 26 février 2016 par le tribunal de grande instance de Paris.

DEMANDEUR A LA SAISINE

MONSIEUR LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE [Localité 7]

Pôle Fiscal Parisien 1, Pôle Juridictionnel Judiciaire

Ayant ses bureaux [Adresse 1]

[Localité 4]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représenté par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430

DEFENDEUR A LA SAISINE

Madame [R] [U] [O] [L] [F] [T] [S] [G] épouse [J]

née le [Date naissance 3] 1964 à [H]

Monsieur [Z] [V] [J]

Domicilié [Adresse 8]

[Adresse 2]

Représentée par Me Olivier BERNABÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753

Représentée par M. Victor CORTYL, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Brigitte BRUN-LALLEMAND, Présidente de chambre

Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur M.[P] [M] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Sylvie MOLLÉ

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signée par Brigitte BRUN-LALLEMAND, Présidente de chambre, et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCÉDURE

La société anonyme Financière de Rosario a été immatriculée en 1956. La société a pour objet en France et à l'étranger :

- la prise de participations industrielles, commerciales, immobilières ou financières, par voie de création de sociétés nouvelles, de fusion, association...

- la gestion et acquisition de valeurs mobilières (...) l'obtention, la concession l'exploitation ou la vente de tous brevets ou marques et généralement, toutes opérations commerciales, industrielles, mobilières et immobilières ou financières se rattachant directement ou indirectement en tout ou partie à l'un des objets ci-dessus.

Par acte du 20 décembre 2007, enregistré au service des impôts des entreprises de [Localité 6] 1er le 21 décembre 2007, M. [I] [J] a fait donation à son fils, M. [Z] [J], et à ses deux petits-fils mineurs, [X] et [Y] [J], de la nue propriété de 17 870 actions de la société Financière de Rosario, dont la valeur unitaire en pleine propriété était déclarée à 435 euros.

Pour le calcul des droits de mutation, les donataires ont bénéficié de l'exonération prévu à l'article 787 B du code général des impôts qui prévoit en matière de droits de mutation un abattement de 75 % sur la valeur des titres transmis.

Selon proposition de rectification du 15 décembre 2010, l'administration fiscale a remis en cause l'exonération partielle des droits de mutation prévue à l'article 787 B, en estimant que l'activité développée par la société était, à titre prépondérant, une activité civile de gestion de valeurs mobilières, non éligible au régime de faveur.

Elle a notifié des rappels de droits d'enregistrement à concurrence de 46 252 euros à l'intention de M. [Z] [J] et de 816 713 euros, chacun, à [X] et [Y] [J], outre intérêts de retard.

Les redevables ont saisi le conciliateur départemental qui a confirmé la rectification par courrier du 17 avril 2012.

M. et Mme [J] ont présenté, le 23 décembre 2013, une réclamation contentieuse qui a été rejetée le 27 juin 2014.

Par acte d'huissier du 21 octobre 2014, ils ont assigné la directrice de la direction nationale des vérifications des situations fiscales (DNVSF) devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins d'annulation de la décision de rejet du 27 juin 2014.

Par jugement en date du 26 février 2016, le tribunal de grande instance de Paris a infirmé la décision de rejet du 27 juin 2014 et prononcé la décharge de la totalité des impositions afférentes.

L'administration fiscale a interjeté appel du jugement.

Par arrêt du 5 mars 2018, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement déféré.

Par arrêt du 14 octobre 2020, la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt d'appel en toutes ses dispositions et a renvoyé les parties devant la cour autrement composée. La cassation est prononcée pour manque de base légale, la cour d'appel s'étant déterminée 'par motifs impropres à établir que la société Financière de Rosario avait pour activité principale l'animation de son groupe, ce que l'administration contestait en soutenant que la valeur vénale réelle des actifs de la société relatifs à son activité civile de gestion de valeurs mobilières représentait une part prépondérante de son actif total, réévalué au jour de la mutation'.

Par déclaration du 28 décembre 2020, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris a saisi la cour d'appel de renvoi.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 février 2021, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de [Localité 6] demande à la cour de :

'- le recevoir en son appel et l'y déclarer fondé ;

- réformer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 26 février 2016 en ce qu'il a considéré à tort que la transmission à titre gratuit des titres de la société holding Financière de Rosario, pouvait bénéficier de l'exonération partielle des droits prévue à l'article 787 B du code général des impôts ;

- condamner les époux [J] en tous les frais et dépens de première instance et d'appel.'

Au soutien de ses prétentions, l'administration fiscale soutient que pour bénéficier de l'exonération partielle prévue à l'article 787 B du code général des impôts, la seule qualité de holding animatrice ne suffit pas mais que, par assimilation aux sociétés opérationnelles ayant une activité mixte, son activité civile autre que agricole ou libérale ne doit pas être prépondérante.

Reconnaissant que la prépondérance de l'activité opérationnelle s'apprécie en considération d'un faisceau d'indices déterminés d'après la nature de l'activité de la société et les conditions de son exercice, et non au regard des deux critères cumulatifs que sont le chiffre d'affaires procuré par cette activité (au moins 50'% du montant du chiffre d'affaires total) et le montant de l'actif brut immobilisé (au moins 50 % du montant total de l'actif brut) qui étaient énoncés dans l'instruction du 9 mars 2012 référencée 7 G 3-12, l'administration fiscale soutient avoir appliqué ce principe en l'espèce, faisant valoir que, la valeur d'une société holding financière dépendant principalement de la valeur de ses actifs, il est approprié de se référer à une ventilation des actifs affectés aux différentes activités pour déterminer le caractère prépondérant de l'activité de la société holding.

L'administration fiscale expose que si la société Financière de Rosario détient plusieurs participations dans différentes sociétés commerciales, une seule, à savoir celle détenue dans la société Slota, permet de caractériser un rôle de holding animatrice de filiales déployant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Elle soutient que la composition de l'actif de la société Financière de Rosario, qu'il soit pris en compte pour sa valeur comptable ou sa valeur vénale au 31 décembre 2007, révèle la prépondérance d'actifs générant des produits financiers (intérêts, plus-value de cession de valeurs mobilières de placement) et des loyers et relevant donc d'activités civiles de gestion d'un portefeuille de valeurs mobilières de placement et de gestion d'un patrimoine immobilier. Elle ajoute qu'elle a également examiné les relations à l'intérieur du groupe, concernant la trésorerie des sociétés filiales et sous filiales, et qu'elle démontre que celles-ci disposent de liquidités suffisantes pour faire face à d'éventuelles difficultés financières, de sorte que le portefeuille de valeurs mobilières de placement ne peut être retenu comme un actif affecté au soutien des filiales.

L'administration fiscale fait valoir enfin que, s'agissant des holdings animatrices de leur groupe, il appartient au contribuable qui revendique le bénéfice de l'exonération partielle de droits d'enregistrement visée à l'article 787 B du code général des impôts, laquelle est dérogatoire du droit commun, d'apporter la preuve que l'activité de la société holding concernée est éligible au dispositif. Elle soutient que la preuve n'est pas rapportée par M. et Mme [J] d'une non prépondérance de l'activité civile de la société Financière de Rosario alors que le critère de l'actif brut doit être apprécié par référence aux valeurs vénales et non en fonction des valeurs comptables. Elle en déduit que la démonstration à laquelle procèdent M. et Mme [J] repose sur des valeurs erronées en ce qu'elles correspondent à des valeurs comptables non réévaluées.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 avril 2021, M. [Z] [J] et Mme [R] [F] [T] [S] [G] épouse [J] demandent à la cour de :

'Vu les dispositions de l'article 787 B du code général des impôts,

- Confirmer le jugement de première instance du 26 février 2016 en toutes ses dispositions   ;

En conséquence :

- Débouter l'appelant, M. le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de [Localité 6], de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause :

- Condamner l'appelant, M. le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de [Localité 6], au paiement d'une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de M. et Mme [Z] [V] [J], au titre de la procédure d'appel ;

- Condamner l'appelant, M. le directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et de [Localité 6], au paiement des entiers dépens, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel.'

M. et Mme [J] répliquent que la prépondérance de l'activité d'animation d'une société holding s'apprécie par la méthode du faisceau d'indices, d'après la nature de l'activité et les conditions de son exercice et qu'elle est présumée lorsque la valeur vénale, au jour du fait générateur de l'imposition, des titres des filiales détenus par la société holding représente plus de la moitié de son actif total. Ils contestent que la charge de la preuve repose sur le contribuable, soutenant qu'il appartient à l'administration fiscale, qui remet en cause l'exigibilité du régime fiscal de l'article 787 B du code général des impôts, d'établir le caractère civil de l'activité principale de la société Financière de Rosario.

Ils soutiennent qu'en l'espèce, la société Financière de Rosario participe activement à la conduite de la politique de son groupe et au contrôle de ses filiales et leur rend des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. Ils font valoir que l'administration ne rapporte pas la preuve du caractère prépondérant de l'activité civile de la société au 31 décembre 2007 et que son analyse n'est pas pertinente dans la mesure où elle s'est focalisée sur une seule ligne de titres, et notamment sur le cours particulièrement élevé des actions [K] et Prom en 2007, lequel a chuté en 2008.

Ils contestent l'analyse bilantielle de l'administration qui repose sur trois postes du bilan : les titres de participation, les immeubles et les valeurs mobilières de placement, en faisant valoir que sa méthode consiste à procéder par voie d'affirmation pour exclure des éléments pertinents et indispensables à l'activité d'animation, alors que l'analyse in concreto de l'activité de la société Financière de Rosario démontre qu'elle employait ses moyens matériels, humains et financiers dans le but principal d'animer un groupe de sociétés et leur rendre des services.

M. et Mme [J] soulignent que le ratio entre l'actif brut immobilisé et l'actif brut total de la société Financière de Rosario excède 50 % que soient prises en compte les valeurs de bilan ou les valeurs réévaluées au 31 décembre 2007, ratio qui demeure pertinent afin de caractériser le fait que son activité d'animation des filiales de son groupe constitue son activité principale.

Ils font valoir qu'en tout état de cause la part des actifs immobilisés et circulants utilisés pour l'activité de holding animatrice représente l'essentiel de son actif total dès lors qu'il convient de prendre en considération l'ensemble des titres de participations détenus et non seulement ceux de la société Slota ainsi que les créances rattachées à ces participations mais également l'ensemble immobilier donné à bail à la filiale opérationnelle de la société Financière Slota lequel est constitutif du site d'exploitation du groupe Slota dont l'activité est la location de taxis. Ils soutiennent également qu'il convient de prendre en compte l'ensemble des valeurs mobilières de placement, pour leur valeur de bilan et non leur valeur réactualisée au 31 décembre 2007 en raison de la très grande volatilité de la valeur de marché de ces titres, au motif qu'elles sont affectées aux besoins de l'exploitation en permettant le financement des moyens humains et matériels de la société Financière de Rosario ainsi que le financement de l'activité des sociétés opérationnelles et qu'elles permettent le financement d'investissements opérationnels, notamment la prise de participations dans de nouvelles sociétés opérationnelles.

M. et Mme [J] maintiennent que, conformément à la décision du tribunal de grande instance de Paris du 26 février 2016, il n'y a pas lieu de s'interroger sur la non prépondérance de l'activité civile de la société Financière de Rosario dès lors qu'il n'est pas contesté par l'administration fiscale que cette dernière est une société holding animatrice effective de son groupe.

MOTIVATION

1.- Sur l'éligibilité de la donation des actions de la société Financière de Rosario au dispositif de l'article 787 B du code général des impôts

En application de l'article 787 B du code général des impôts, pris dans sa rédaction en vigueur à la date de la donation génératrice des droits d'enregistrement en cause, les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs sont, à condition qu'elles aient fait l'objet d'un engagement collectif de conservation présentant certaines caractéristiques, exonérées de droits de mutation à titre gratuit à concurrence de 75 % de leur valeur.

L'activité de la société dont les parts sont transmises peut être mixte à condition que la part de son activité civile autre qu'agricole ou libérale ne soit pas prépondérante, l'activité éligible au régime fiscal de faveur devant rester l'activité principale de cette société. La prépondérance de l'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale s'apprécie en considération d'un faisceau d'indices déterminés d'après la nature de l'activité et les conditions de son exercice.

La doctrine administrative publiée le 9 mars 2012 (instruction 7 G-3-12) a précisé que : ' Les sociétés holding admises au bénéfice de l'exonération partielle [prévue à l'article 787 B du code général des impôts] sont celles qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations participent activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle des filiales et rendent, le cas échéant, à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. En revanche, les parts et actions de société holding passives, simples gestionnaires d'un portefeuille mobilier, ne bénéficient pas de l'exonération partielle.'

La transmission de parts ou actions d'une société holding animatrice de son groupe de sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale bénéficie du régime de faveur prévu à l'article 787 B du code général des impôts par assimilation aux sociétés opérationnelles visées par ce texte. Par l'effet de cette assimilation, les sociétés holdings animatrices de leur groupe doivent remplir toutes les conditions d'éligibilité au régime fiscal de faveur imposées aux sociétés opérationnelles. Il en résulte que, lorsque la société holding animatrice a une activité mixte, à la fois d'animation de filiales exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et de gestion patrimoniale, alors cette activité d'animation doit être prépondérante pour que la transmission de ses titres puisse être partiellement exonérée de droits d'enregistrement.

C'est donc à tort que les premiers juges ont dit que la condition de la non prépondérance de l'activité civile n'était pas applicable à une société holding animatrice de son groupe ayant également une activité de gestion patrimoniale.

Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme [J] sur le fondement de l'article R*194-1 du livre des procédures fiscales, il appartient au contribuable qui se prévaut du bénéfice d'un régime de faveur de démontrer qu'il en réunit les conditions. M. et Mme

[J] doivent donc établir, qu'au jour de la donation des actions de la société Financière de Rosario, cette dernière réunissait les conditions prévues par les dispositions de l'article 787 B du code général des impôts.

Le fait que l'administration fiscale ait reconnu, dans la proposition de rectification du 15 décembre 2010, que la société Financière de Rosario exerçait, au 20 décembre 2007, une activité d'animation effective de la société Financière Slota, dont elle détenait 77,62 % du capital social, laquelle contrôlait la SA Slota, société de transports de voyageurs par taxis, n'induit aucunement qu'elle a reconnu ce rôle de holding animatrice de la société Financière de Rosrio aux autres sociétés commerciales dans lesquelles la société Financière de Rosario détenait une participation, qu'elle soit majoritaire ou minoritaire.

L'administration fiscale soutient à bon droit que, pour déterminer le caractère prépondérant de l'activité d'animation de la société holding, il convient de ne retenir que les titres de participations détenus dans les filiales exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale que la société holding anime effectivement au jour de la mutation de ses parts ou actions. En effet, si la détention par une société holding de participations minoritaires au capital de sociétés commerciales qu'elle n'anime pas n'est pas exclusive de la qualification de holding animatrice si la société holding détient en outre une ou plusieurs participations au capital d'autres sociétés commerciales qu'elle anime effectivement, ces participations minoritaires au capital de filiales non animées par la société holding sont de nature purement financières et ne peuvent être prises en compte pour caractériser la prépondérance de l'activité d'animation de la société holding.

M. et Mme [J] soutiennent que la société holding Financière de Rosario était, au 20 décembre 2007, animatrice non seulement de la société Financière Slota et de la société anonyme Slota mais également de l'ensemble des sociétés commerciales au capital desquelles elle détenait des participations, à savoir les sociétés Epëe, Physio développement, Sereps, Aircraft, Seren, Jdp France, Comcell, Pacifico Forage et Picardia.

Ils ne produisent cependant aucune pièce de nature à établir non seulement la réalité d'une activité d'animation de ces autres sociétés commerciales par la société Financière de Rosario mais encore, à supposer qu'elle ait existé, que cette activité d'animation ait été active et effective à la date de la mutation à titre gratuit des actions de la société Financière de Rosario.

Il ressort au contraire de l'évaluation de la société Financière de Rosario à laquelle a procédé la société AEG Finances le 6 décembre 2007 (pièce n°9 des intimés) que toutes ces sociétés commerciales soit n'avaient pas encore démarré leur activité commerciale soit n'avaient plus en raison d'une liquidation en cours, de sorte que elles ne pouvaient faire l'objet d'aucune animation effective à la date de la donation des actions de la société Financière de Rosario.

Il est en effet constaté dans le rapport d'évaluation du 6 décembre 2007 ce qui suit  : 'Les sociétés Seren, Comcell Investissements, Epëe, Aircraft, Jdp et Jdp France n'ont pas encore atteint leur seuil de rentabilité car elles sont actuellement en phase de lancement de leur activité voire d'études de faisabilité (Seren). Elles ne disposent donc pas de business plan et il est impossible à ce jour d'apprécier leur rentabilité future.

Selon les informations qui nous ont été communiquées, ces sociétés ne possèdent aucun actif susceptible de receler une plus-value latente significative. Dans ces conditions et comme pour Pacifico Forages et les sociétés en cours de liquidation, nous avons donc retenu leur valeur nette comptable estimée au 31 décembre 2007 par la responsable comptable Financière de Rosario.'

Par ailleurs, les participations détenues par la société Financière de Rosario dans des sociétés de capital-risque (SCR) et dans des fonds communs de placement à risque (FCPR), figurant au bilan arrêté au 31 décembre 2007 en compte titres immobilisés pour une valeur totale de 2 057 852,07 euros, ne peuvent être pris en compte afin de caractériser une activité de holding animatrice de son groupe dès lors que, si elles caractérisent un investissement dans une activité économique, elles ne peuvent procurer à leur détenteur un pouvoir de contrôle et d'orientation stratégique de sociétés exerçant une activité industrielle ou commerciale.

Il en résulte que la prépondérance de l'activité animatrice de la société holding Financière de Rosario ne peut s'apprécier qu'au regard de la part des actifs affectés à l'animation des sociétés Financière Slota et Slota SA.

Le caractère principal de l'activité d'animation de groupe est caractérisé lorsque la valeur vénale, au jour du fait générateur de l'imposition, des titres des filiales animées par la société holding représente plus de la moitié de l'actif total de cette dernière.

La seule référence à l'actif brut immobilisé n'est en revanche pas pertinente dès lors que celui-ci n'est pas de nature à caractériser la prépondérance de l'activité animatrice d'une société holding.

L'article L.17 du livre des procédures fiscales, dûment cité par l'administration fiscale dans sa proposition de rectification du 15 décembre 2010, dispose que : 'En ce qui concerne les droits d'enregistrement et la taxe de publicité foncière ou la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elle est due au lieu et place de ces droits ou taxe, l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception d'une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations.

La rectification correspondante est effectuée suivant la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55, l'administration étant tenue d'apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations.'

La valeur vénale d'un bien soumis aux droits de mutation est donc le prix auquel ce bien pourrait ou aurait pu se négocier à l'époque à laquelle il y a lieu de l'évaluer dans des conditions normales de marché.

Il en résulte en l'espèce que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme [J], tous les postes d'actif de la société Financière de Rosario, en ce compris les valeurs mobilières de placement, doivent être pris en compte, afin d'effectuer un calcul actualisé et pertinent de la part des actifs affectés à l'activité d'animation dans l'actif total, pour leur valeur vénale au jour de la donation des actions de la société Financière de Rosario et non pour leur valeur inscrite au bilan.

En l'espèce, la valeur réévaluée des actifs de la société Financière de Rosario a été prise en compte par l'administration fiscale par référence au bilan arrêté au 31 décembre 2007 avec réévaluation de certains postes du bilan au vu de l'évaluation de la société Financière de Rosario, mais également de la société Financière Slota et des actifs immobiliers, datée du 6 décembre 2007 ayant servi à fixer la valeur vénale des actions de la société Financière de Rosario au jour de la donation faite le 20 décembre 2007 (pièce n°8 et 9 des intimés).

Il en résulte que la valeur vénale des participations de la société Financière de Rosario au capital des sociétés Financière Slota et Slota SA s'élevait à la somme totale de 25 577 980,36 euros alors que l'actif total de la société Financière de Rosario était d'un montant de 86 044 335,29 euros.

Le caractère principal de l'activité d'animation de la société holding financière de Rosario ne peut donc être déduit de la valeur vénale des titres des sociétés Financière Slota et Slota SA.

S'agissant d'une holding animatrice de son groupe, il convient cependant d'examiner si les autres actifs qu'elle détient, qu'ils soient immobilisés ou circulants, sont affectés à l'activité d'animation de la société Financière Slota et de la société Slota SA.

Parmi les actifs immobiliers détenus directement par la société Financière de Rosario, l'ensemble immobilier situé [Adresse 5], évalué, pour le terrain et les constructions, à la somme totale de 6 819 000 euros est intégralement affecté à l'activité opérationnelle de la société Slota à laquelle il est donné à bail et dont il constitue le site d'exploitation. Le bail donné à la société Slota pour la jouissance de ce bien immobilier, financé par la société Financière de Rosario, caractérise le service immobilier fourni par la holding animatrice à sa filiale exerçant une activité commerciale.

Cet actif immobilier doit donc être pris en compte pour sa valeur vénale au 20 décembre 2007 pour caractériser le caractère principal de l'activité d'animation de la société Financière de Rosario.

Il n'en est pas de même pour les autres actifs immobiliers qu'elle détient lesquels ne sont pas affectés aux activités opérationnelles des sociétés Slota.

M. et Mme [J] sollicitent la prise en compte des créances rattachées à des participations figurant au bilan de la société Financière de Rosario pour la somme totale réévaluée de 2.601.788,59 euros. Toutefois, à l'exception d'une créance d'intérêts courus sur cautions fournies au bénéfice de la société Slota SA, d'un montant de 28 899,56 euros, toutes ces créances sont afférentes à des participations détenues dans des sociétés commerciales dans lesquels il n'est pas établi que la société Financière de Rosario exerçait une activité d'animation effective au 20 décembre 2007. Elles ne peuvent donc être prises en compte que dans la limite de la somme de 28 899,56 euros

Les bons de souscription d'actions de la société Financière Slota détenus par la société Financière de Rosario, qui offrent à cette dernière la possibilité de souscrire à des actions futures de la société Financière Slota à un prix déterminé, sont par nature des actifs affectés à la gestion patrimoniale de la société holding et de sa filiale mais ne sont pas caractéristiques d'un service fourni par la société holding à la filiale qu'elle anime. Ils ne peuvent donc en l'espèce être pris en compte afin de caractériser l'activité d'animation de la société Financière de Rosario.

La société Financière de Rosario détient un portefeuille de valeurs mobilières de placement d'une valeur liquidative totale de 41 054 267,39 euros. M. et Mme [J] soutiennent que ces valeurs mobilières de placement ne sont pas de simples actifs patrimoniaux mais sont indispensables à l'activité d'animation de la société holding Financière de Rosario dès lors qu'elles permettent d'assurer le financement des moyens humains et matériels de cette dernière, dont l'immeuble pris à bail dans lequel est situé le siège social du groupe, d'accorder des prêts et garanties à ses filiales opérationnelles et d'assurer le financement de nouveaux investissements opérationnels.

Toutefois, M. et Mme [J] ne produisent aucune pièce de nature à démontrer l'utilisation de cet actif circulant à des fins de trésorerie ou de garantie pour la société Financière de Rosario elle-même ou les sociétés Financière Slota et Slota SA. L'administration fiscale oppose à juste titre le fait que les sociétés Financière Slota et Slota SA disposent de liquidités suffisantes pour financer leur propre activité, la première détenant plus de 2 300 000 euros de disponibilités au 31 décembre 2007 et la seconde plus de 3 700 000 euros de liquidités et de valeurs mobilières de placement à cette date, ce qui, en dépit de leur endettement invoqué par M. et Mme [J], ne permet pas de présumer un besoin de financement au moyen du portefeuille de valeurs mobilières de placement dont les contribuables n'apportent pas la preuve d'une utilisation effective au profit des sociétés Slota.

Par ailleurs, M. et Mme [J] citent plusieurs projets d'investissements opérationnels que devait mener la société Financière de Rosario afin de développer son activité d'animation de sociétés commerciales mais, d'une part, ils ne démontrent pas que les valeurs mobilières de placement que détenait la société Financière de Rosario à la date des investissements étudiés, en 2004, 2005, 2006 et 2007, devaient être utilisées afin de les financer et, d'autre part, ils reconnaissent qu'aucun des investissements projetés n'a été réalisé à la date du 20 décembre 2007.

Les valeurs mobilières de placement détenues par la société Financière de Rosario ne peuvent donc être prises en compte comme étant affectées aux besoins de son activité d'animation.

M. et Mme [J] invoquent enfin la fourniture de services intra-groupe par la société Financière de Rosario à ses filiales mais, au-delà des services administratifs et immobiliers fournis à la société Financière Slota et à la société Slota SA, ne produisent aucune pièce afin d'en justifier.

En conséquence, la part des actifs de la société Financière de Rosario affectée à son activité d'animation de ses filiales ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, représentant une valeur vénale totale de 32 425 879,92 euros sur un actif total de 86.044.335,29 euros, n'est pas prépondérante et ne permet pas de caractériser le fait que l'activité d'animation de la société holding Financière de Rosario constitue son activité principale.

Il en résulte que les actions de la société Financière de Rosario transmises le 20 décembre 2007 par M. [I] [J] ne réunissaient pas les conditions d'éligibilité pour bénéficier de l'exonération de droits de mutation à titre gratuit sur une partie de leur valeur.

Il se déduit de ce qui précède que le jugement déféré doit être infirmé en toutes ses dispositions.

2.- Sur les frais du procès

Parties perdantes au procès, M. et Mme [J] seront condamnés aux dépens de première instance et des instances d'appel, en application des articles 695 et suivants du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

DÉBOUTE M. [Z] [J] et Mme [R] [F] [T] [S] [G] épouse [J] de toutes leurs demandes,

CONDAMNE M. [Z] [J] et Mme [R] [F] [T] [S] [G] aux dépens de première instance, de la première instance d'appel et de la présente instance,

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE

S.MOLLÉ B.BRUN-LALLEMENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 21/00555
Date de la décision : 24/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-24;21.00555 ?
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