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20/10/2022 | FRANCE | N°20/00078

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - b, 20 octobre 2022, 20/00078


République française

Au nom du Peuple français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B



ARRET DU 20 Octobre 2022

(n°182 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/00078 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBSVW



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Novembre 2019 par le tribunal d'instance de Paris RG n° 11-19-001364





APPELANTE



IN'LI venant aux droits de [11]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représen

tée par Me Christine GALLON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0431



INTIMEES



Madame [S] [W] [X] épouse [O] (débitrice)

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 3]

comparante en per...

République française

Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B

ARRET DU 20 Octobre 2022

(n°182 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/00078 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBSVW

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Novembre 2019 par le tribunal d'instance de Paris RG n° 11-19-001364

APPELANTE

IN'LI venant aux droits de [11]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Christine GALLON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0431

INTIMEES

Madame [S] [W] [X] épouse [O] (débitrice)

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 3]

comparante en personne assistée de Me Laurent LOYER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1567

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/012679 du 22/06/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

[10]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

non comparante

ENGIE

Chez Intrium Justitia Pole Surendettement

[Adresse 7]

[Localité 2]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Septembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, présidente

Mme Laurence ARBELLOT, conseillère

Mme Fabienne TROUILLER, conseillère

Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats

ARRET :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Muriel DURAND présidente et par Madame Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 7 septembre 2018, Mme [S] [W] [X] épouse [O] a saisi la commission de surendettement des particuliers de Paris qui a, le 27 septembre 2018, déclaré sa demande recevable.

Le 22 novembre 2018, la commission a imposé une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

La société [12] venant aux droits de la société [11] à qui la mesure recommandée par la commission avait été notifiée le 27 novembre 2018, a formé un recours contre celle-ci.

Par jugement réputé contradictoire du 19 novembre 2019, le tribunal d'instance de Paris a déclaré le recours recevable mais mal fondé et confirmé la mesure de rétablissement personnel octroyée à Mme [W] [X].

Le tribunal a considéré que la débitrice était de bonne foi et que la preuve d'une aggravation volontaire de sa situation n'était pas rapportée. Il a estimé que les ressources mensuelles de Mme [W] [X] s'élevaient à la somme de 1 576,06 euros (817,07 euros de salaire, 279 euros d'aide au logement, 364,35 euros de prime d'activité) ses charges à la somme de 2 096,42 euros par mois et qu'elle ne disposait ainsi d'aucune capacité de remboursement. Il a constaté que son état de santé obérait sa capacité de travailler et qu'il n'existait pas de perspective d'évolution favorable au regard de la situation financière. Il en a déduit que sa situation était irrémédiablement compromise.

Par déclaration adressée le 03 décembre 2019 et enregistrée le 10 décembre 2019 au greffe de la cour d'appel Paris, la société [12] a interjeté appel du jugement.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 1er mars 2022 à laquelle Mme [W] [X] a sollicité un renvoi afin de pouvoir préparer son dossier.

L 'affaire a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 13 septembre 2022.

La société [12] aux termes d'écritures visées par le greffier et soutenues oralement sollicite la réformation du jugement, de voir juger que la mauvaise foi de la débitrice est établie et qu'elle ne peut bénéficier d'une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

L'appelante soutient que Mme [W] [X] refuse délibérément de régler sa dette locative et qu'il n'y a eu aucun règlement depuis décembre 2017 sauf deux règlements de 150 euros chacun alors que l'intéressée dispose d'un salaire et qu'elle perçoit une allocation logement de 281 euros par mois et que le reliquat de loyer est 791 euros. Elle explique que la dette est passée de 2 170,49 euros au dépôt du dossier à désormais 59 838,10 euros.

Elle affirme que Mme [W] [X] a à nouveau saisi la commission de surendettement en mai 2022 qui a déclaré son dossier recevable. Elle juge l'intéressée de mauvaise foi en ce qu'elle est logée gratuitement sans faire aucun effort de paiement et alors que la commission qui avait accordé un rétablissement personnel lui avait bien précisé qu'elle devait continuer à régler les échéances courantes.

Le conseil de Mme [W] [X] indique que la décision de recevabilité du nouveau dossier est du 12 mai 2022. Il conteste toute mauvaise foi et s'engage à produire sous 8 jours les justificatifs de ressources et de charges de l'intéressée. Il précise que Mme travaille en tant que vendeuse par intérim et que ses revenus sont de l'ordre de 880 euros outre 300 euros de prime d'activité et que si elle ne paie pas le loyer, elle règle les charges. Il précise qu'elle est reconnue travailleur handicapé, qu'elle est suivie au CMP et par la Fondation [8] et que son fils rencontre des problèmes de santé. Il ajoute qu'elle a déposé un dossier [K].

Aucun autre créancier n'a comparu.

Mme [W] [X] a été autorisée à communiquer sous huitaine toute pièce justificative de ses ressources et charges.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, il doit être rappelé que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les créanciers non comparants.

Sur la recevabilité du recours

En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours de la société [12].

Sur le moyen tiré de la mauvaise foi

Il résulte de l'article L.711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.

Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.

En application de l'article L.761-1 du code de la consommation, la mauvaise foi procédurale est également sanctionnée en ce qu'est déchue du bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement toute personne :

1° ayant sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts,

2° ayant détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens,

3° ayant, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou ayant procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel, ou pendant l'exécution du plan ou des mesures de traitement.

En l'espèce, le premier juge a considéré que si Mme [W] [X] avait reconnu ne pas avoir repris le paiement de son loyer courant depuis le dépôt du dossier de surendettement le 7 septembre 2018, la preuve n'était pas rapportée d'une volonté délibérée de sa part d'aggraver son endettement alors qu'elle ne disposait d'aucune capacité de remboursement.

Il n'est pas contesté que la dette qui était de 2 170,49 euros au dépôt du dossier en septembre 2018 s'est aggravée pour atteindre 59 838,10 euros, loyer de septembre 2022 inclus selon décompte communiqué par la société [12]. Mme [W] [X] ne conteste pas ne pas avoir effectué un quelconque paiement depuis le mois de décembre 2017, soit depuis 5 ans et demi, mis à part deux versements de 150 euros chacun et alors qu'elle percevait jusqu'en août 2020 une aide au logement de 281 euros par mois. Son loyer est actuellement de 940,74 euros hors charges soit un reliquat à payer de 659,74 euros dès lors que l'intéressée bénéfice d'une aide au logement.

Mme [W] [X] n'explique pas réellement l'absence de tout versement, se retranchant derrière sa situation financière et personnelle.

Elle communique aux débats :

-ses avis d'imposition pour 2018 (13 774 euros de revenus déclarés) 2019 (13 771 euros de revenus déclarés) et 2021 (11 665 euros de revenus déclarés),

-des attestations CAF des 20 mai 2019, 23 septembre 2019 (allocation logement de 279 euros, allocation de soutien familial de 115 euros) et 13 septembre 2022 (primes d'activité de juin à août 2022 de l'ordre de 341 euros),

-un bulletin de paie du mois d'août 2019 pour 850,50 euros, un bulletin de paie du 15 au 18 juin 2022 pour 62,05 euros, un bulletin de paie du 20 au 30 juillet 2022 pour 344,40 euros,

-une attestation de Pôle emploi du 13 septembre 2022 attestant de la perception d'une allocation de 858,70 euros par mois,

-un échéancier avec Total énergies pour le paiement d'électricité à hauteur de 34 euros par mois,

-une facture SFR de 35 euros au titre du mois d'avril 2022,

-une facture Engie du 18 septembre 2019 de 93,19 euros,

-une quittance de loyer du 1er septembre 2019 pour 793,90 euros charges comprises et aide au logement déduite,

-une attestation de demande de logement locatif social du 14 février 2022 et une décision du 23 juin 2022 droit au logement opposable la reconnaissant comme prioritaire et devant être logée en urgence,

-une notification de décision de reconnaissance de qualité de travailleur handicapé du 13 mars 2018 au 12 mars 2023,

-un certificat médical établi le 23 janvier 2019 par un pédopsychiatre du CMP du centre hospitalier [14] à [Localité 13] attestant que son fils né en 2004 est suivi au sein de cette structure depuis juin 2017.

Il résulte de ces éléments, que Mme [W] [X] justifie être reconnue travailleur handicapé depuis mars 2018 et alterner depuis cette date des périodes d'activité professionnelle et de chômage. Ses avis d'imposition permettent de dire qu'elle a bénéficié d'une moyenne de salaire allant de 1 147 euros en 2018 et 972 euros en 2021. Elle ne perçoit plus d'allocation logement depuis août 2020 mais une allocation de soutien familial de 115 euros depuis 2019 et une prime d'activité de 341 euros en 2022. Ses ressources actuelles peuvent donc être fixées à 1 428 euros alors que le premier juge avait retenu des ressources mensuelles de 1 576,06 euros (817,07 euros de salaire, 279 euros d'aide au logement, 364,35 euros de prime d'activité).

Les charges fixées par le premier juge à la somme de 2 096,42 euros par mois ne sont pas contestées et incluent un forfait logement de 1 012,42 euros, un forfait habitation de 144 euros, un forfait chauffage de 109 euros, un forfait de base de 751 euros et une imposition de 80 euros.

Si Mme [W] [X] ne dispose théoriquement d'aucune capacité de remboursement, c'est sous la condition qu'elle règle son loyer courant (indemnité d'occupation) fixé actuellement à 940,94 euros.

Or s'il est incontestable que Mme [W] [X] rencontre des difficultés personnelles liées à son état de santé ou à celui de son fils, obérant sa capacité de travailler régulièrement, force est de constater qu'elle n'a affecté absolument aucune somme au paiement de son loyer depuis décembre 2017, mise à part une somme de 300 euros, qu'elle n'explique pas cette carence alors que la dette locative n'a cessé de s'aggraver pour atteindre bientôt 60 000 euros sans perception d'aucune aide au logement.

Si l'intéressée affirme avoir déposé à nouveau un dossier de surendettement déclaré recevable au mois de mai 2022, elle ne produit aucune pièce en attestant.

La cour constate que le comportement de Mme [W] [X] a contribué à l'aggravation de son endettement caractérisant ainsi sa mauvaise foi.

Il s'en suit que le jugement doit être infirmé en toutes ses dispositions et Mme [W] [X] déclarée irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement. Il convient de la débouter de toutes des demandes.

Chaque partie supportera les éventuels dépens d'appel qu'elle a exposés.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré le recours recevable,

Statuant de nouveau,

Déclare Mme [S] [W] [X] épouse [O] irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement au regard de sa mauvaise foi,

Rejette le surplus des demandes,

Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et par lettre recommandée avec avis de réception aux parties.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - b
Numéro d'arrêt : 20/00078
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;20.00078 ?
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