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20/10/2022 | FRANCE | N°19/10577

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 20 octobre 2022, 19/10577


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2022

(n° 2022/ , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/10577 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA2FC



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2019 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F17/02725





APPELANT



Monsieur [C], [T], [M] [K]

[Adresse 2]

[Lo

calité 3]



Représenté par Me Anne LEFORT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0547



INTIMÉS



Maître AXEL CHUINE ès qualité de mandataire ad'hoc de la SARL GERANCE 3005 14-16 ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 20 OCTOBRE 2022

(n° 2022/ , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/10577 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA2FC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2019 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F17/02725

APPELANT

Monsieur [C], [T], [M] [K]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Anne LEFORT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0547

INTIMÉS

Maître AXEL CHUINE ès qualité de mandataire ad'hoc de la SARL GERANCE 3005 14-16 rue de lorraine à bobigny

[Localité 5]

Non représenté

ASSOCIATION UNEDIC-DELEGATION AGS IDF EST

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Vanina FELICI, avocat au barreau de PARIS, toque : C1985

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nelly CAYOT, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre,

Madame Nelly CAYOT, Conseillère

Madame Lydie PATOUKIAN, Conseillère

Greffier : Madame Pauline BOULIN, lors des débats

ARRÊT :

- par défaut,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour,

- signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Cécile IMBAR , greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat de travail à durée indéterminée du 29 décembre 2015 à effet au 2 janvier 2016, M. [C] [K] a été engagé par la société Gérance 3005 en qualité de collaborateur moyennant un salaire mensuel brut de 3 172 euros pour une durée de travail à temps complet.

La société Gérance 3005 a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire prononcée par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 16 novembre 2016, la SCP Jacques [L] étant désignée en qualité de liquidateur. Il résulte des mentions du jugement du conseil de prud'hommes non contestées par les parties que la liquidation judiciaire de la société Gérance 3005 a été clôturée pour insuffisance d'actifs le 22 décembre 2017 et que Me Axel Chuine a été désigné en qualité de mandataire ad hoc de la société Gérance 3005 par décision du tribunal de commerce du 9 août 2018.

Selon les mentions non contestées du jugement, Me Chuine ès qualités a notifié à M. [K] son licenciement pour motif économique le 30 novembre 2016. L'AGS a refusé de faire l'avance des sommes portées au relevé de créances de M. [K] établi par Me [L].

Contestant ce refus et estimant ne pas être rempli de ses droits, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny le 1er septembre 2017.

Par jugement du 28 mai 2019 auquel il convient de se reporter pour l'exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Bobigny a débouté M. [K] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

M. [K] a régulièrement relevé appel du jugement le 21 octobre 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions d'appelant transmises et notifiées par le réseau privé virtuel des avocats dit RPVA le 17 février 2022 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, M. [K] demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- rejeter l'exception d'irrecevabi1ité soulevée par l'AGS en application de l'article L. 625-4 du code de commerce ;

- juger recevable sa demande de condamnation directe de l'AGS, du fait de son refus de payer une créance inscrite sur le relevé des créances salariales ;

- condamner l'AGS CGEA IDF Est à lui verser les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter de sa demande devant le conseil de prud'hommes en date du 1er septembre 2017 :

* 22 204 euros brut au titre de rappel de salaires, `

* 2 220 euros brut au titre des congés payés afférents,

* 3 172 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 317 euros au titre des congés payés afférents,

* 30 000 euros au titre des dommages et intérêts,

* remise des documents, bulletins de paye et attestation Pôle emploi, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document,

- condamner l'AGS au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 19 février 2020 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile de France Est demande à la cour de :

- dire irrecevables les demandes de condamnation à son encontre ;

- confirmer le jugement entrepris et débouter M. [K] de l'ensemble de ses demandes ;

En tout état de cause,

- débouter M. [K] de l'ensemble de ses demandes ;

- constater, vu les dispositions de l'article L 622-28 du code de commerce, que les intérêts ont nécessairement été arrêtés au jour de l'ouverture de la procédure collective ;

- constater vu les termes de l'article L. 3253-6 du code du travail, que le paiement d'une astreinte et d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile n'entre pas dans le champ d'application de sa garantie;

- dire qu'elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-6 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions des dispositions des articles L. 3253-17 et suivants du code du travail ;

- statuer ce que de droit quant aux dépens sans qu'ils puissent être mis à sa charge .

Me Alex Chuine, ès qualités de mandataire as hoc de la société Gérance 3005, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 19 décembre 2019 à domicile en la personne d'une employée et les conclusions d'appelant par exploit signifié selon les mêmes modalités le 16 janvier 2020 n'a pas constitué avocat et n'a pas conclu. L'arrêt est rendu par défaut en application de l'article 474 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 février 2022.

MOTIVATION

Sur la recevabilité des demandes à l'encontre de l'AGS CGEA Ile de France Est :

M. [K] soutient qu'en application de l'article L. 625-4 du code de commerce, il dispose en cas de refus de garantie de L'AGS sur le relevé de créances établi par le mandataire liquidateur d'une action directe légale à son encontre.

L'AGS fait valoir à bon droit que M. [K] ne peut demander sa condamnation et qu'il doit solliciter la fixation de ses créances au passif de la société Gérance 3005 et la garantie de l'assurance légale. En effet, il résulte des dispositions de l'article L. 3253-15 du code du travail que l'AGS avance les sommes correspondant à des créances établies par décision de justice exécutoire et que les décisions de justice lui sont de plein droit opposables.

En conséquence, il n'y a pas lieu de condamner l'AGS à régler les créances de M. [K] mais de rappeler, que la présente décision fixant s'il y a lieu les dites créances lui est opposable et qu'elle doit sa garantie dans les limites et conditions légales.

Sur la réalité du contrat de travail :

La cour rappelle que l'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ; qu'il appartient à celui qui se prévaut d'un contrat de travail de rapporter la preuve de l'existence d'une activité rémunérée accomplie sous la subordination de l'employeur ; que le lien de subordination se caractérise par le pouvoir de l'employeur de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné et enfin, qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui en invoque le caractère fictif de supporter la charge de la preuve.

M. [K] soutient qu'il bénéficiait d'un contrat de travail et qu'il en démontre le caractère apparent de sorte qu'il appartient à l'AGS qui invoque son caractère fictif de supporter la charge de la preuve.

L'AGS de son côté conteste l'existence du contrat de travail en faisant valoir que M. [K] ne rapporte pas la preuve du lien de subordination.

M. [K] produit les éléments suivants :

- un contrat de travail du 29 décembre 2015 ;

- la déclaration préalable à l'embauche du 10 février 2016 ;

- ses bulletins de salaire de janvier à avril 2016 ;

- des courriers de M. [P] en tant que dirigeant de diverses sociétés mentionnant l'intervention de M. [K] en qualité de collaborateur ainsi qu'un avis aux locataires à l'en tête de la société gérance 3005 mentionnant le nom de M. [K] comme collaborateur.

Ces éléments suffisent à établir l'apparence d'un contrat de travail et il appartient en conséquence à l'AGS qui en invoque le caractère fictif de supporter la charge de la preuve.

L'AGS met en avant les liens familiaux existant entre la petite-fille du gérant de la société gérance 3005 et M. [K] qui est le beau-père de celle-ci et la proximité entre l'embauche du salarié en janvier 2016 et la date de cessation des paiements fixée par le jugement de liquidation au 30 Mai 2016, et s'étonne des erreurs portées sur les bulletins de salaire produits seulement en cause d'appel. En outre elle produit :

- la fiche d'avance AGS qui apporte les éléments de la situation de M. [K] au sein de la société cependant la cour observe qu'aucun élément de cette fiche ne contredit la réalité d'un contrat de travail ;

- le relevé de carrière de M. [K] qui ne fait pas mention de son activité salariée au profit de la société Gérance 3005 mais la cour relève que cette situation n'est pas le fait de ce dernier,

- la lettre de l'AGS du 9 mars 2017 adressée à Me [L] indiquant suspendre les avances et concluant à une éventuelle extension de procédures aux autres sociétés gérées par M. [P] ce qui ne suffit pas non plus à prouver l'inexistence de la relation de travail,

Elle fait également état de l'absence d'expérience professionnelle de M. [K] ce qui ne suffit pas non plus à démontrer l'absence de contrat de travail.

Enfin, la cour observe que les anomalies des mentions des bulletins de salaire et le caractère tardif de leur communication ne suffisent pas à rapporter la preuve du caractère fictif de la relation de travail et que la critique des éléments de preuve apportés par M. [K] pour justifier son activité au sein de la société Gérance 3005 ne constitue pas une preuve du caractère fictif du contrat de travail.

En définitive, l'AGS ne produit pas d'élément de nature à démontrer la fictivité du contrat de travail. La cour retient donc que M. [K] était bien salarié de la société Gérance 3005.

Sur les demandes financières :

Sur le rappel de salaire :

M. [K] réclame le paiement de ses salaires du mois de mai 2016 au mois de novembre 2016. L'AGS s'y oppose au motif que le salarié ne rapporte pas la preuve qu'il avait effectué une prestation de travail et se tenait à la disposition de son employeur.

Le contrat de travail ayant été rompu le 30 novembre 2016, l'employeur était tenu jusqu'à cette date de fournir du travail au salarié et de lui payer la rémunération convenue. Il appartient à l'AGS qui le soutient de démontrer que le salarié ne s'est pas tenu à la disposition de son employeur sur la période précédant la rupture du contrat de travail et que la société Gérance 3005 était ainsi libérée de son obligation de fournir du travail au salarié. Elle échoue à le faire et ne produit aucun élément en ce sens. La cour fait donc droit à la demande sauf à fixer au passif de la société Gérance 3005 les créances de M. [K] au titre de ses salaires pour la période courant de mai à novembre 2016 à hauteur de la somme réclamée de 22 204 euros brut outre 2 220 euros brut au titre des congés payés afférents. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

En application de l'article L 1234-1 du code du travail, le préavis étant d'un mois compte tenu de l'ancienneté du salarié, la cour fixe la créance de M. [K] à ce titre à hauteur de la somme de 3 172 euros outre 317 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis. Le jugement est infirmé de ce chef.

La cour rappelle que l'AGS doit sa garantie sur ces sommes en application des dispositions de l'article L. 3253-8 et suivants du code du travail. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages intérêts :

M. [K] reproche à l'AGS d'avoir tardé à faire connaître son refus et de l'en avoir informé au mois de juin 2017 en le privant ainsi de tous revenus pendant plusieurs mois.

L'AGS conteste toute faute, fait valoir qu'elle a fait connaître sa position au liquidateur dans un courrier du 9 mars 2017 qu'elle communique aux débats et soutient que M. [K] ne rapporte pas la preuve d'un préjudice.

M. [K] ne rapporte pas la preuve d'une quelconque faute commise par l'AGS dans le retard allégué et est débouté de sa demande de dommages-intérêts. Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes :

Me Chuine ès qualités doit remettre à M. [K] les documents sociaux sollicités sans qu'il soit nécessaire de prononcer une astreinte. La demande en ce sens est rejetée.

Sur les frais irrépétibles

L'AGS, partie perdante est condamnée aux dépens mais la cour ne fait pas application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de M. [K].

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par défaut et par arrêt mis à disposition,

INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. [C] [K] de sa demande de dommages intérêts ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DÉCLARE irrecevable la demande de condamnation de l'AGS au paiement des sommes dues à M. [C] [K] au titre du contrat de travail,

FIXE les créances de M. [C] [K] au passif de la liquidation de la société Gérance 3005 aux sommes suivantes:

* 22 204 euros brut à titre de rappel de salaires pour la période courant de mai à novembre 2016,

* 2 220 euros brut au titre de l'indemnité de congés payés sur rappel de salaire,

* 3 172 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 317 euros brut au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

DIT que la présente décision est opposable à l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile de France Est qui doit sa garantie dans les limites légales,

ORDONNE la remise par Me Axel Chuine ès qualités de mandataire ad hoc de la société Gérance 3005 à M. [C] [K] de bulletins de salaire et d'une attestation Pôle emploi conformes à la présente décision,

DÉBOUTE M. [C] [K] du surplus de ses demandes,

CONDAMNE l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile de France Est aux dépens.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 19/10577
Date de la décision : 20/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-20;19.10577 ?
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