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13/10/2022 | FRANCE | N°22/04132

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 13 octobre 2022, 22/04132


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 13 OCTOBRE 2022



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/04132 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFK3W



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Octobre 2021 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n°





APPELANTS



M. [G] [R]



[Adresse 2]

[Localité 6]



M. [C] [L]



[Adresse 2]

[Localité 6]



Représentés et assistés par Me Valentin SIMONNET, avocat au barreau de PARIS







INTIMEE



LA VILLE DE [Localité 6], prise en la personne de Madame la ...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 13 OCTOBRE 2022

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/04132 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFK3W

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Octobre 2021 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n°

APPELANTS

M. [G] [R]

[Adresse 2]

[Localité 6]

M. [C] [L]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentés et assistés par Me Valentin SIMONNET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

LA VILLE DE [Localité 6], prise en la personne de Madame la Maire de [Localité 6], Mme [V] [J], domiciliée en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée et assistée par Me Colin MAURICE de la SARL CM & L AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1844

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Septembre 2022, en audience publique, Thomas RONDEAU, Conseiller, ayant été entendu en son rapport dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

******

EXPOSE DU LITIGE

Par exploit délivré le 8 mars 2021, la ville de [Localité 6] a fait assigner Mme [R] et M. [L] devant le tribunal judiciaire de Paris, saisi selon la procédure accélérée au fond, sur le fondement des dispositions de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, concernant l'appartement situé [Adresse 3]) (bâtiment A, rez-de-chaussée, porte 3, lots n°3, 102 et 300).

Par jugement contradictoire rendu selon la procédure accélérée au fond du 22 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :

- condamné in solidum Mme [R] et M. [L] à payer une amende civile de 25.000 euros, dont le produit sera versé à la ville de [Localité 6] ;

- condamné in solidum Mme [R] et M. [L] à payer à la ville de [Localité 6] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté le surplus des demandes ;

- condamné in solidum Mme [R] et M. [L] aux dépens ;

- rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit.

Par déclaration du 17 février 2022, Mme [R] et M. [L] ont relevé appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 31 mars 2022,Mme [R] et M. [L] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a :

' rejeté la demande visant à prononcer une amende civile sur le fondement des dispositions l'article L. 324-1-1 IV du code du tourisme,

' constaté que le local composé des lots 102 et 300 est utilisé par les propriétaires aux fins de location commerciale de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile,

- infirmer le jugement de première instance pour le reste ;

Et statuant à nouveau,

- constater que les travaux prévus par le permis de construire n'ont pas été réalisés en intégralité ;

- juger que les lots indépendants 300 et 102 du bâtiment B sont restés à usage commercial pour y exercer une activité de location de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile ;

- juger que le champ d'application de l'amende civile prévue par l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation n'est pas rempli eu égard à la nature commerciale des lots 300 et 102 ;

- débouter la ville de [Localité 6] de toutes ses demandes ;

- condamner la mairie de [Localité 6] à verser 4.000 euros d'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

A titre subsidiaire,

- diminuer le quantum de l'amende civile à la somme de 2.000 euros ;

- juger que l'équité ne commande pas que les appelants soient condamnés au paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner que les parties conservent la charge de leurs frais de procédure et leurs dépens.

Mme [R] et M. [L] soutiennent en substance que :

- le tribunal a estimé que le local du bâtiment B composé des lots [Cadastre 1] et [Cadastre 5] était un local d'habitation au motif qu'un permis de construire a été déposé le 20 mars 2015, ce, avant l'acquisition du 15 avril 2016 ;

- pourtant, l'obtention d'un permis de construire n'impose pas de réaliser les travaux pour lesquels l'autorisation a été demandée, le permis de construire n'étant pas une obligation de construire ;

- il est manifeste que les plans visés par le permis de construire en 2015 ne correspondent pas aux travaux finalement réalisés en 2016, dès lors qu'au lieu d'un seul local d'habitation, ce sont deux locaux distincts et indépendants disposant de portes séparées qui ont été créés avec un local d'habitation sur rue et le maintien d'un local d'habitation sur cour ;

- ils n'ont pas transformé en habitation les lots [Cadastre 1] et [Cadastre 5] mais ont conservé leur commercialité pour en faire un usage de location commerciale de type airbnb ;

- ainsi, faute de réalisation des travaux modifiant leur nature, les lots 102 et 300 du bâtiment B ont gardé l'usage qu'ils avaient du 1er janvier 1970, soit un usage commercial ;

- à titre subsidiaire, le montant de l'amende devra être limité compte tenu de la situation des appelants, qui ont fait preuve d'une particulière bonne foi en procédant à la déclaration de leur activité, en ne provoquant la moindre gêne aux occupants de la copropriété par leur activité commerciale et en cessant toute location airbnb le temps qu'une décision définitive soit rendue par la cour d'appel de Paris ou la cour de cassation.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 22 avril 2022, la ville de [Localité 6] demande à la Cour de :

- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel de Mme [R] et de M. [L] ;

- juger celle-ci, prise en la personne de Mme la maire de [Localité 6], recevable en ses conclusions et l'y en juger bien fondée ;

In limine litis,

- ordonner la radiation de l'affaire enregistrée sous le numéro RG 22/04132 et pendante devant le pôle 1 - chambre 2 de la cour d'appel de céans en application de l'article 524 du code de procédure civile ;

Au fond,

- confirmer le jugement rendu selon la procédure accélérée au fond le 22 octobre 2021 en ce que le juge a :

' jugé que le manquement aux dispositions de l'article L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation est caractérisé à l'encontre de Mme [R] et de M. [L], et les a condamnés in solidum à payer une amende civile dont le produit lui sera versé ;

' condamné in solidum Mme [R] et M. [L] à lui payer la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamné in solidum Mme [R] et M. [L] aux dépens,

- infirmer le jugement rendu selon la procédure accélérée au fond le 22 octobre 2021 en ce que le juge a :

' fixé à la somme de 25.000 euros le montant de l'amende civile due in solidum par Mme [R] et par M. [L],

' rejeté ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 324-1-1 IV du code du tourisme,

Statuant de nouveau,

- condamner in solidum Mme [R] et M. [L] à une amende civile de 50.000 euros pour avoir enfreint les dispositions de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation en louant pour de courte durée l'appartement situé dans le bâtiment A, au rez-de-chaussée, porte 3 de l'immeuble du [Adresse 2]) (constituant les lots n°3 ; 102 et 300) ;

- juger que Mme [R] et M. [L] ont enfreint les dispositions de l'article L.324-1-1 IV du code du tourisme en ne transmettant le nombre de jours au cours desquels l'appartement a été loué dans le mois qui a suivi la demande ;

- condamner in solidum Mme [R] et M. [L] à payer une amende civile de 10.000 euros de l'article L. 324-1-1 V du code du tourisme et ordonner que le produit de cette amende lui soit intégralement versé ;

En tout état de cause,

- débouter Mme [R] et M. [L] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- condamner in solidum Mme [R] et M. [L] à lui verser une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner in solidum Mme [R] et M. [L] aux entiers dépens d'instance et d'appel.

La ville de [Localité 6] soutient en substance que :

- il convient de radier du rôle l'affaire enregistrée au greffe de la cour sous le numéro RG 22/04132 dès lors que les appelants n'ont pas réglé les sommes dues au titre de l'exécution provisoire en exécution du jugement rendu le 22 octobre 2021 ;

-devant le tribunal, Mme [R] et M. [L] ont admis que le local a changé d'usage ;

- pourtant, en appel, Mme [R] et M. [L] reviennent sur cet aveu et affirment pour la première fois que la preuve de l'usage ne serait pas rapportée dès lors que les plans visés par le permis de construire en 2015 ne correspondent pas aux travaux finalement réalisés en 2016 ;

- ce raisonnement est erroné en ce que le permis de construire daté du 16 juin 2015 porte mention du « réaménagement d'un commerce en habitation [Adresse 4] », ce qui atteste que le bien est à usage d'habitation ;

- par ailleurs, le bien litigieux n'est pas la résidence principale des appelants et a été loué 233 nuitées en 2019 et 239 nuitées en 2018 ;

- Mme [R] et M. [L] ne contestent pas avoir mis en location de courte durée le local litigieux dont ils sont propriétaires via les sites airbnb.fr et booking.com ;

- ils ont, en outre, enfreint les dispositions des articles L. 324-1-1 du code du tourisme en ne transmettant pas le nombre de jours au cours desquels les locaux ont été loués ;

- cette activité illicite a généré d'importants revenus si bien que le gain total estimé serait de l'ordre de 61.360 euros alors qu'une location régulière aurait généré un gain de 40.086 euros ;

- il convient par conséquent, de les condamner à une amende civile de 50.000 euros en application de l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation ;

- il convient également de les condamner à une amende civile de 10.000 euros au titre de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme dès lors que les appelants déclarent que le bien constitue leur résidence principale, que cela soit vrai ou non.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

A l'audience du 8 septembre 2022, les parties ont été autorisées à produire des notes en délibéré sur la question de la radiation de l'appel et celle de la compétence de la cour pour statuer sur cette prétention.

Par note du 21 septembre 2022, la ville de [Localité 6] a indiqué à la cour qu'elle n'entendait pas maintenir cette demande.

SUR CE LA COUR

L'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation dispose que toute personne qui enfreint les dispositions de l'article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50.000 euros par local irrégulièrement transformé.

Selon l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, un local est réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. Cette affectation peut être établie par tout mode de preuve. Les locaux construits ou faisant l'objet de travaux ayant pour conséquence d'en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés.

Toutefois, lorsqu'une autorisation administrative subordonnée à une compensation a été accordée après le 1er janvier 1970 pour changer l'usage d'un local mentionné à l'alinéa précédent, le local autorisé à changer d'usage et le local ayant servi de compensation sont réputés avoir l'usage résultant de l'autorisation.

Sont nuls de plein droit tous accords ou conventions conclus en violation du présent article.

Le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile constitue un changement d'usage au sens du présent article.

Pour l'application des dispositions susvisées, il y a donc lieu d'établir :

- l'existence d'un local à usage d'habitation, un local étant réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, sauf pour les locaux construits ou faisant l'objet de travaux ayant pour conséquence d'en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 qui sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés, le formulaire administratif de type H2 rempli à cette époque dans le cadre de la législation fiscale permettant de préciser l'usage en cause ;

- un changement illicite, sans autorisation préalable, de cet usage, un tel changement étant notamment établi par le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile.

Il est en outre constant que, s'agissant des conditions de délivrance des autorisations, la Ville de [Localité 6] a adopté, par règlement municipal et en application de l'article L. 631-7-1 du code de la construction et de l'habitation, le principe d'une obligation de compensation par transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage, obligation de compensation qui n'apparaît pas voir été respectée dans le cadre de la présente procédure.

En l'espèce, s'agissant d'abord de l'usage d'habitation, il sera rappelé qu'ici, le bien en cause a fait l'objet d'un permis de construire obtenu le 16 juin 2015, de sorte que le logement est réputé avoir l'usage pour lequel les travaux ont été autorisés.

Il sera donc observé que l'usage du logement au 1er janvier 1970 importe peu, dans la mesure où des travaux sont intervenus avec une autorisation administrative, postérieurement à cette date.

L'extrait de la promesse de vente versé aux débats par les appelants eux mêmes précise que les biens sont, le 12 novembre 2014, date de cette promessse, à usage commercial et qu'en qualité de bénéficiaires de ladite promesse ils déclarent qu'ils entendent les utiliser à titre d'habitation.

Le permis de construire obtenu en 2015, qui fait suite à la demande de changement de destination d'un local à usage commercial en habitation déposée par M. [L], vise notamment à transformer en usage d'habitation le local situé au rez-de-chaussée sur rue, constituant les lots n° 3, [Cadastre 1] et [Cadastre 5].

Le relevé de propriété produit par la ville fait par ailleurs lui aussi état d'une affectation "H", pour habitation tandis que le relevé cadastral mentionne un changement d'affectation au 30 décembre 2017.

La destination du bien résultant de l'autorisation administrative est donc bien un usage d'habitation, de sorte que ce dernier apparaît établi au sens de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, étant indifférente la circonstance alléguée par M. [L] et Mme [R] de ce qu'ils n'auraient finalement pas transformé les lots 102 et [Cadastre 5] en habitation mais leur auraient conservé leur commercialité pour les louer "en airbnb" , la loi visant l'usage pour lesquels les travaux ont été autorisés et non les conditions de leur réalisation effective.

Le bien en cause est donc réputé à usage d'habitation.

Le logement en cause a fait l'objet de locations de courte durée à une clientèle de passage, ainsi qu'en attestent les annonces publiées à cette fin sur les sites airbnb.fr et booking.com, étant précisé que le numéro de déclaration en ligne des locations meublées pour un logement à titre principal a été utilisé pour la mise en location de deux biens, l'un correspondant au local litigieux, l'autre à un appartement de deux pièces.

Il s'avère en réalité que :

- selon le plan du rez-de-chaussée versé aux débats, M. [L] et Mme [R] ont réuni plusieurs lots se trouvant dans les bâtiments A et B,

- selon ce plan toujours, la partie de logement occupée par ces derniers est située dans le bâtiment A (lots 300), la partie louée dans le bâtiment B ([Cadastre 8]),

- toutefois, les annonces produites présentent le bien à louer comme un "grand "studio et non une pièce intégrée dans le bien occupé par les appelants,

- en outre, ainsi que l'a parfaitement analysé le premier juge, alors que les lots 300 et 102 ont des superficies respectives de 14m2 et 16m2, force est de constater que les descriptions faites des lieux dans les annonces airbnb et booking, autant que dans les commentaires des visiteurs sur ces sites mentionnent "un grand studio pour 4 personnes", "un ancien atelier dans une cour", "une terrasse avec vue sur jardin", "un appartement privé", "de 20 m2", "un logement très bien adapté à une famille de 4",

- il s'en déduit que les deux lots ont nécessairement été offerts ensembles à la location de courte durée.

Mme [R] ayant déclaré le bien à titre de résidence principale, le logement en cause doit être considéré comme étant la résidence principale de M. [L] et Mme [R], ce que ces derniers ne contestent d'ailleurs pas in fine, sans qu'il soit besoin de vérifier le caractère effectif de cette résidence.

M. [L] et Mme [R] ne contestent pas avoir mis en location de courte durée le local dont ils sont propriétaires. Le constat d'infraction établit que, sur le site airbnb, l'hôte se prénomme [G], tout comme Mme [R], à qui est attribué le numéro d'enregistrement prévu par les dispositions de l'article L 324-1-1 du code du tourisme, et qui a accueilli l'agent assermenté de la ville le 4 juillet 2019 sur place, tout en refusant de lui répondre.

M. [L] et Mme [R] ont ainsi changé sans autorisation préalable l'usage des lots litigieux au sens de l'article L 631-7 alinéa 1er du code de la construction et de l'habitation en louant l'appartement dont ils sont propriétaires de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile.

Or, au regard des éléments rappelés ci-avant, il a été loué plus de 120 jours, de sorte que l'infraction est en toute hypothèse caractérisée, le code de la construction et de l'habitation limitant à 120 jours la possibilité de louer pour de courtes durées un meublé de tourisme déclaré comme résidence principale.

Sur le quantum de l'amende, il sera relevé que :

- l'infraction s'est poursuivie sur une longue période de plus de deux ans, le bien ayant été mis en location sur deux plateformes numériques ;

- au moment de la rédaction du constat d'infraction, le 2 décembre 2020, l'annonce était active ;

- M. [L] et Mme [R] précisent avoir coopéré et fait preuve de transparence, sans produire aucun élément à l'appui de leurs dires, alors qu'il est établi qu'ils n'ont pas répondu aux courriers de la ville ;

- le constat d'infraction fait état de locations de 233 nuitées en 2019 et 239 nuitées en 2018 ;

- par référence à un gain total de 61.360 euros sur la base d'un prix de location de 130 euros par nuit et compte tenu d'un loyer médian de 1.179 euros par mois, la part du gain illicite peut être estimée, comme l'indique la ville, à la somme de 40.086 euros ;

- le coût de la compensation aurait été de 90.000 euros.

Ainsi, l'amende prononcée par le premier juge sera revue à la hausse, la somme de 40.000 euros apparaissant proportionnée et adaptée, tenant compte des gains perçus par les diverses parties, du coût de la compensation et de l'objectif d'intérêt général de la législation, qui tend à répondre à la difficulté de se loger à [Localité 6].

Sur l'infraction secondaire, l'article L. 324-1-1 du code du tourisme dispose notamment que :

II.-Toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme, que celui-ci soit classé ou non au sens du présent code, doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé.

Cette déclaration préalable n'est pas obligatoire lorsque le local à usage d'habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l'article 2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986.

III.-Par dérogation au II, dans les communes où le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est soumis à autorisation préalable au sens des articles L.631-7 à L.631-9 du code de la construction et de l'habitation une délibération du conseil municipal peut décider de soumettre à une déclaration préalable soumise à enregistrement auprès de la commune toute location d'un meublé de tourisme.

La déclaration indique si le meublé de tourisme offert à la location constitue la résidence principale du loueur au sens de l'article 2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 précitée.

IV.-Dans les communes ayant mis en 'uvre la procédure d'enregistrement de la déclaration préalable mentionnée au III, toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme qui est déclaré comme sa résidence principale ne peut le faire au-delà de cent vingt jours au cours d'une même année civile, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure.

La commune peut, jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué. Le loueur transmet ces informations dans un délai d'un mois, en rappelant l'adresse du meublé et son numéro de déclaration.

V.- Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du III est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 5.000 euros.

Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du IV est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 10.000 euros.

S'agissant de l'infraction aux dispositions de l'article L 324-1-1 IV du code du tourisme, à savoir le défaut de transmission relative au nombre de jours loués, il sera relevé que l'obligation de transmission de l'article L.324-1-1 IV alinéa 2 du code du tourisme concerne les locations visées à l'article L.324-1-1 IV alinéa premier, à savoir les locations d'un meublé de tourisme déclaré comme résidence principale. Il est établi ici que le bien a été déclaré comme résidence principale, de sorte que cette disposition trouve à s'appliquer.

Au vu des éléments fournis, il apparaît que la ville de [Localité 6] a par lettre du 27 mai 2020 demandé aux appelants de lui transmettre le relevé des locations réalisées en 2019 et 2020, ce à quoi il ne lui a pas été répondu, ce qui n'est pas discuté.

L'infraction susvisée est ainsi constituée.

Sur le quantum de l'amende, étant rappelé que le bien a été loué 233 nuitées en 2019 et 239 nuitées en 2018, étant tenu compte de l'objectif d'intérêt général poursuivi, au regard duquel l'amende doit présenter un caractère dissuasif, il sera prononcé à l'encontre de M. [L] et Mme [R] une amende civile de 8.000 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Ce jugement sera enfin confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile dont il a été fait une juste appréciation.

M. [L] et Mme [R] qui succombent seront condamnés aux dépens de l'appel ainsi qu'à payer à la ville de [Localité 6] une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement rendu en ce qui concerne le quantum de l'amende prononcée en application de l'article L 631-7 alinéa 1er du code de la construction et de l'habitation, et en ce qui concerne l'infraction aux dispositions de l'article L 324-1-1 IV du code du tourisme,

Statuant à nouveau, et y ajoutant,

Condamne in solidum M. [L] et Mme [R] à payer une amende civile de 40.000 euros, dont le produit sera entièrement versé à la ville de [Localité 6], en application des dispositions de l'article L 631-7 alinéa 1er du code de la construction et de l'habitation,

Condamne in solidum M. [L] et Mme [R] à payer une amende civile de 8.000 euros, dont le produit sera entièrement versé à la ville de [Localité 6], en application des dispositions de l'article L 324-1-1 IV et V du code du tourisme,

Confirme le jugement entrepris pour le surplus,

Condamne in solidum M. [L] et Mme [R] aux dépens de l'appel,

Condamne M. [L] et Mme [R] à payer à la ville de [Localité 6] une somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/04132
Date de la décision : 13/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-13;22.04132 ?
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