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13/10/2022 | FRANCE | N°22/04032

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 13 octobre 2022, 22/04032


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 13 OCTOBRE 2022



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/04032 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFKSN



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Janvier 2022 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG n° 21/50783





APPELANTE



S.A.R.L. NEW YORK HABITAT - EUROPE (R.C.S. de PARIS n

°432 777 613), prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Jeanne BAECHLIN ...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 13 OCTOBRE 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/04032 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFKSN

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Janvier 2022 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG n° 21/50783

APPELANTE

S.A.R.L. NEW YORK HABITAT - EUROPE (R.C.S. de PARIS n°432 777 613), prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assistée par Me Pierre QUEUDOT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1641

INTIMEE

LA VILLE DE [Localité 5], prise en la personne de Madame la Maire de [Localité 5], Mme [R] [N], domiciliée en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée et assistée par Me Colin MAURICE de la SARL CM & L AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1844

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 Septembre 2022, en audience publique, Thomas RONDEAU, Conseiller, ayant été entendu en son rapport dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Le site nyhabitat.com propose des locations de courte durée des meublés de tourisme, notamment à [Localité 5].

Par acte du 7 décembre 2020, la Ville de [Localité 5] a assigné la société New York Habitat Europe devant le tribunal judiciaire de Paris, statuant selon la procédure accélérée au fond, lui reprochant de ne pas respecter les dispositions de l'article L. 324-2-1 II premier alinéa du code du tourisme.

Par réquisitions écrites du 14 décembre 2020, le ministère public a soutenu l'action de la ville de [Localité 5].

A l'audience du 8 avril 2021, la Ville de [Localité 5] demandait au tribunal de :

- juger que la société New York Habitat Europe a enfreint les dispositions de l'article L.324-2-1 du code du tourisme en ne transmettant pas dans les délais impartis les informations sollicitées par la Ville de [Localité 5] sur le fondement des dispositions de l'article L.324-2-1 II du code du tourisme, du décret n°2019-1104 du 30 octobre 2019 et de l'arrêté du 31 octobre 2019 précisant le format des tableaux relatifs aux transmissions d'informations prévues par les articles R. 324-2 et R.324-3 du code du tourisme ;

- condamner la société New York Habitat Europe à payer une amende civile de 35.650.000 euros ;

- ordonner que le produit de cette amende soit intégralement versé à la ville de [Localité 5] en exécution des dispositions de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme ;

- rejeter les demandes de la société New York Habitat Europe ;

- condamner la société New York Habitat Europe à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

En réplique, la société New York Habitat Europe demandait à la juridiction saisie de :

- débouter la Ville de [Localité 5] de ses demandes ;

- subsidiairement, fixer le montant de l'amende due à un euro symbolique.

Par jugement contradictoire du 14 janvier 2022, la juridiction saisie a :

- dit que la société SARL New York Habitat Europe a méconnu les dispositions de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme en ne communiquant pas à la Ville de [Localité 5], à la date du 13 mars 2020, les informations exigées par le II de ce même article portant sur 23 meublés de tourisme proposés à la location à [Localité 5] par l'intermédiaire de sa plateforme www.nyhabitat.com, au titre de l'année 2019 ;

- condamné la société New York Habitat Europe au paiement d'une amende civile de 345.000 euros ;

- dit que la présente décision est notifiée au directeur départemental des finances publiques de [Localité 5] aux fins de recouvrement ;

- dit que le produit de l'amende sera versé à la Ville de [Localité 5] en application du III de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme ;

- rejeté le surplus des demandes présentées par chacun des parties ;

- rappelé que la présente décision bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire ;

- condamné la société New York Habitat Europe à payer à la Ville de [Localité 5] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société New York Habitat Europe aux entiers dépens.

Par déclaration du 18 février 2022, la société New York Habitat Europe a relevé appel de la décision.

Dans ses conclusions remises le 13 juin 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société New York Habitat Europe demande à la cour, au visa de l'article L. 324-2-1 du code de tourisme, de :

in limine litis,

- sur le fondement des articles 905-2 et 524 alinéa 1 et 2 du code de procédure civile, juger la Ville de [Localité 5] irrecevable en sa demande de radiation de son appel enregistré sous le numéro de RG 22/04032 devant le pôle 1 chambre 2 ;

au fond,

- la recevoir en son appel et son argumentation et l'y dire bien fondée ;

- débouter la Ville de [Localité 5], de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires ;

ce faisant,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

condamné celle-ci au paiement d'une amende civile de 345.000 euros pour avoir méconnu les dispositions de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme en ne communiquant pas à la Ville de [Localité 5], à la date du 13 mars 2020, les informations exigées par le II de ce même article portant sur 23 meublés de tourisme proposés à la location à [Localité 5] par l'intermédiaire de sa plateforme www.nyhabitat.com, au titre de l'année 2019,

dit que la décision est notifiée au directeur départemental des finances publiques de [Localité 5] aux fins de recouvrement, et que le produit de l'amende sera versé à la Ville de [Localité 5] en application du III de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme,

ordonné l'exécution provisoire et condamné celle-ci à 2.000 euros d'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

statuant à nouveau,

- prononcer à son encontre une amende symbolique d'un euro.

La société New York Habitat Europe soutient en substance :

- que la demande de radiation du rôle formulée par la Ville de [Localité 5] est irrecevable dès lors qu'elle n'a pas conclu, devant le premier président, sur sa demande de radiation de l'appel, dans le délai d'un mois, suivant la notification des conclusions de l'appelante intervenue le 21 avril 2022, alors que l'affaire est en circuit court ou bref délai, en application de l'article 905-2 du code de procédure civile, sans conseiller de la mise en état ;

- qu'elle n'est pas propriétaire, ne finance pas, n'exploite pas, ne gère pas, n'assure pas la maintenance du site d'annonce nyhabitat.com qui est la propriété de la société New York Habitat VLF Inc ;

- qu'elle n'intervient donc pas sur les locations de courte durée du site d'annonces nyhabitat.com si bien que l'ordonnance sera infirmée ;

- qu'à défaut, le montant de l'amende forfaitaire de 345.000 euros est disproportionné au regard de sa bonne foi et du nombre réduit de logements (23) pour lesquelles il a été retenu qu'elle a méconnu les dispositions de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme ;

- que le montant de l'amende devra être réduit eu égard à la quasi absence d'activité de location de courte durée sur [Localité 5] depuis 2016, eu égard aux éléments financiers produits, de sa bonne foi et des condamnations moindres prononcées à l'encontre des géants du même secteur.

Dans ses conclusions remises le 13 mai 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la Ville de [Localité 5] demande à la cour, au visa de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme, du décret n°2019-1104 du 30 octobre 2019 pris en application des articles L. 324-1-1 et L. 324-2-1 du code du tourisme et relatif aux demandes d'information pouvant être adressées par les communes aux intermédiaires de location de meublés de tourisme, de l'arrêté du 31 octobre 2019 précisant le format des tableaux relatifs aux transmissions d'informations prévues par les articles R. 324-2 et R. 324-3 du code du tourisme, des articles R. 324-2 et R.324-3 du code du tourisme et des articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, de :

- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel de la société New York Habitat Europe ;

- juger la Ville de [Localité 5], recevable en son appel incident ainsi qu'en ses conclusions et l'y en juger bien fondé ;

in limine litis,

- ordonner la radiation de l'affaire enregistrée sous le numéro RG 22/04032 et pendante devant le pôle 1 chambre 2 de la cour d'appel de céans en application de l'article 524 du code de procédure civile ;

au fond,

- confirmer le jugement rendu selon la procédure accélérée au fond le 14 janvier 2022 (RG 21/50783), en ce que le tribunal judiciaire de Paris a :

dit que la société New York Habitat Europe a méconnu les dispositions de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme en ne lui communiquant pas, à la date du 13 mars 2020 les informations exigées par le II de ce même article portant sur 23 meublés de tourisme proposés à la location à [Localité 5] par l'intermédiaire de sa plateforme www.nyhabitat.com, au titre de l'année 2019,

condamné la société New York Habitat Europe au paiement d'une amende civile ;

dit que la présente décision est notifiée au directeur départemental des finances publiques de [Localité 5] aux fins de recouvrement,

dit que le produit de l'amende sera versé à la Ville de [Localité 5] en application du III de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme,

rejeté le surplus des demandes présentées par chacune des parties,

rappelé que la présente décision bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire,

condamné la société New York Habitat Europe à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société New York Habitat Europe aux entiers dépens ;

- infirmer le jugement rendu selon la procédure accélérée au fond le 14 janvier 2022 (RG 21.50783) sur le quantum fixé par le tribunal, en ce que le tribunal judiciaire de Paris a condamné la société New York Habitat Europe au paiement d'une amende civile de 345.000 euros ;

et statuant de nouveau,

- condamner la société New York Habitat Europe au paiement d'une amende civile de 35.650.000 euros, dont le produit lui sera versé en application du III de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme ;

en tout état de cause,

- débouter la société New York Habitat Europe de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner la société New York Habitat Europe à lui payer une somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société New York Habitat Europe aux dépens d'appel.

La Ville de [Localité 5] soutient en substance :

- qu'il convient de radier du rôle l'affaire enregistrée au greffe de la cour sous le numéro RG 22/04032 dès lors que la société appelante n'a pas réglé les sommes dues au titre de l'exécution provisoire en exécution du jugement dont appel alors que le tribunal judiciaire de Paris a expressément rappelé aux parties que le jugement rendu le 14 janvier 2022 bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit ;

- que les constats ont été réalisés par un agent assermenté du service municipal du logement de la Ville de [Localité 5] en application de l'article L. 324-2-1 IV du code du tourisme ;

- que la société New York Habitat Europe exploite le site www.nyhabitat.com ;

- qu'elle est une personne au sens de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme qui se livre ou prête son concours contre rémunération ou à titre gratuit, par une activité d'entremise ou de négociation ou par la mise à disposition d'une plateforme numérique, à la mise en location d'un meublé de tourisme soumis à l'article L. 324-1-1 du présent code et aux articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l'habitation ;

- qu'elle est donc tenue de se conformer aux obligations de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme ;

- que la société New York Habitat Europe ne conteste pas l'applicabilité de cette réglementation mais conclut tout de même au rejet des demandes de la Ville de [Localité 5] aux motifs qu'elle n'a plus qu'une activité « symbolique en France », qu'elle n'a enregistré que deux locations en 2020 (pour 6 et 26 nuitées), qu'elle n'a enregistré que 23 locations en 2019 (pour des durées allant de 3 et 26 nuitées) et qu'elle n'a enregistré que 30 locations en 2018 (pour des durées allant de 4 et 31 nuitées) ;

- que pour autant, il appartient à toute société qui exploite une plateforme de se conformer aux dispositions de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme quelle que soit l'ampleur de son activité ;

- qu'en outre, l'affirmation selon laquelle la société New York Habitat Europe n'aurait plus qu'une activité symbolique à [Localité 5] est contredite par le nombre d'annonces publiées sur son site (713) et sa présence revendiquée sur les réseaux sociaux qui démontre sa volonté de toucher une large clientèle, les éléments financiers communiqués étant laconiques ;

- que la sanction doit être dissuasive pour mettre un terme aux manquements mais aussi pour éviter qu'ils ne se renouvellent ;

- que compte tenu du nombre de meublés de tourisme, estimé à 713, l'amende encourue par la société est de 713x50.000 euros soit 35.650.000 euros ;

- que le tribunal n'a retenu que 23 annonces de locations d'appartement aux motifs qu'aucun élément du constat ou de ses annexes ne permet de comprendre la méthodologie utilisé par l'agent assermenté pour aboutir au résultat de 713 annonces alors qu'il s'agit pourtant du nombre revendiqué par la société New York Habitat Europe et mentionné sur son site internet.

SUR CE LA COUR

L'article L. 324-2-1 II et III du code de tourisme, dans sa version applicable au présent litige, dispose notamment que, dans les communes ayant mis en 'uvre la procédure d'enregistrement mentionnée au III de l'article L. 324-1-1, la commune peut, jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander à toute personne se livrant ou prêtant son concours à une activité d'entremise, de négociation ou de mise à disposition par plateforme numérique de meublés de tourisme, lorsque celle-ci en a connaissance, de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé de tourisme a fait l'objet d'une location par son intermédiaire.

La personne transmet ces informations dans un délai d'un mois, en rappelant le nom du loueur, l'adresse du meublé et son numéro de déclaration ainsi que, le cas échéant, le fait que ce meublé constitue ou non la résidence principale du loueur au sens de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. La commune peut demander un décompte individualisé pour les meublés de tourisme situés sur tout ou partie de son territoire.

Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations ainsi définies, résultant du premier alinéa du II, est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 50.000 euros par meublé de tourisme objet du manquement.

En l'espèce, s'agissant d'abord de la demande de radiation formée par la ville pour défaut d'exécution du jugement dont appel, celle-ci apparaît bien irrecevable comme l'indique à juste titre la société appelante, étant observé qu'en application de l'article 524 du code de procédure civile, cette demande aurait dû, d'une part, être formée devant le premier président et, d'autre part, dans le délai d'un mois suivant la notification des conclusions de l'appelante.

Sur le fond du litige, il sera relevé :

- que la société New York Habitat Europe expose qu'elle n'est pas propriétaire, ne finance pas, n'exploite pas, ne gère pas, n'assure pas la maintenance du site d'annonce nyhabitat.com, qui est la propriété de la société New York Habitat VLF Inc, de sorte que sa responsabilité civile ne pourrait pas d'après elle être engagée ;

- que toutefois, l'article L. 324-2-1 précité s'applique à "toute personne qui se livre ou prête son concours contre rémunération ou à titre gratuit, par une activité d'entremise ou de négociation ou par la mise à disposition d'une plateforme numérique, à la mise en location d'un meublé de tourisme" ;

- qu'il résulte du procès-verbal de constat de l'agent de la ville (pièce 1) et des copies d'écran versées aux débats que, si le site apparaît édité aux termes des mentions légales par une société de droit américain ayant son siège à New York, la société appelante est la "filiale de [Localité 5]" de la société américaine, étant observé que New York Habitat Europe a par ailleurs répondu à la mairie de [Localité 5] par courrier du 25 mars 2020, précisant avoir répondu aux demandes d'informations, sans donc contester sa participation directe à l'activité de location de meublés de courte durée ni sa capacité à répondre aux demandes formées par la ville quant aux locations de meublés de tourisme, sans renvoyer la mairie vers la société américaine ;

- qu'ainsi, la société appelante, filiale de la société américaine gestionnaire de la plateforme numérique, prête son concours à l'activité en cause, qui a pour objet la mise à disposition de meublés de tourisme ;

- que, dans ces conditions, sa responsabilité civile est susceptible d'être engagée, sans qu'il ne soit nécessaire que la société visée édite le site litigieux ;

- que le 28 novembre 2019, les 2, 17 et 26 décembre 2019, et enfin le 12 février 2020, la Ville de [Localité 5] a sollicité la société appelante pour lui demander les meublés de tourisme ayant fait l'objet d'au moins une location par son intermédiaire à Paris, sur les années 2018 et 2019 (pièce 4) ;

- que pour rappel, la société a répondu le 25 mars 2020 qu'elle était à jour de ses obligations, sans toutefois transmettre de fichiers de données dans les délais impartis par le code du tourisme ;

- que le procès-verbal de l'agent de la ville, établi au 31 juillet 2020, fait état de constatations du 13 novembre 2019, et précise que la société est passible "pour l'année 2019, de l'amende fixée par l'article L. 324-2-1 du code du tourisme" ;

- que, les 22 et 24 décembre 2020, une nouvelle demande de transmission d'informations pour a été réalisée (pièce 10, constat complémentaire du 24 mars 2021), qui n'a donné lieu qu'à une réponse tardive et incomplète (pièce 12, tableau transmis le 29 avril 2021) ;

- que, sur ces points, la société appelante ne peut d'abord arguer de ce que la faute serait imputable à son expert-comptable pour contester sa responsabilité, étant observé que les obligations du code du tourisme s'imposent à elle et qu'il lui appartiendrait, le cas échéant, d'engager la responsabilité de son expert-comptable si celui-ci apparaissait défaillant ;

- que la société appelante reconnaît d'ailleurs que, s'il était retenu qu'elle participe à la gestion du site, les obligations déclaratives de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme lui sont bien applicables ;

- que, s'agissant du quantum de l'amende, la Ville de [Localité 5] rappelle à juste titre que les dispositions du code du tourisme ont un objet d'intérêt général, à savoir permettre à la ville de contrôler le respect de la législation applicable aux meublés de tourisme, notamment le respect des 120 jours maximums autorisés pour louer sa résidence principale pour de courtes durées, les carences de la société appelante ayant empêché un tel contrôle alors que la situation du logement à [Localité 5] est particulièrement difficile, notamment pour les habitants cherchant des logements en location ;

- que l'amende encourue est de 50.000 euros par meublé de tourisme objet du manquement ;

- que la ville estime sur ce point que le nombre de meublés de tourisme offerts sur le site litigieux serait de 713, de sorte que l'amende encourue serait, au maximum, de 35.650.000 euros ;

- que, cependant, le chiffre de 713 ne résulte pas d'une analyse effectuée par l'agent assermenté quant au nombre d'annonces constatées, mais se fonde uniquement sur une mention publicitaire du site, à savoir "nous offrons un choix de plus de 713 appartements dans [Localité 5]" ;

- que, dans ces circonstances, il ne peut être considéré qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'auraient été constatés 713 manquements, la seule mention publicitaire d'un site, au demeurant imprécise ("plus de 713"), ne suffisant pour l'établir, alors que la société New York Habitat Europe vient contester ce chiffre ;

- que, de même, si la Ville indique qu'il faudrait prendre en compte le tableau récapitulatif transmis par courriel le 29 avril 2021 (pièce 12) faisait état de 472 biens loués, tableau qu'elle qualifie par ailleurs d'incomplet et d'inexploitable, le premier juge a rappelé à juste titre qu'à l'issue des débats, ce tableau ne concerne que des données postérieures à l'année 2019, qui ne concerne donc pas les faits ayant justifié la saisine de la juridiction et objet du procès-verbal de l'agent assermenté, le procès-verbal de l'agent de la ville étant bien relatif à des manquements concernant la seule année 2019, année à prendre en compte pour fixer le montant de l'amende ;

- que, tout comme le premier juge, la cour constatera dès lors que la société New York Habitat Europe a reconnu 23 annonces de locations d'appartement pour l'année 2019, chiffre qui sera retenu au titre du nombre de meublés de tourisme n'ayant pas fait l'objet d'une transmission des informations dans les conditions prévues par la loi, ce que la société appelante ne conteste d'ailleurs pas à titre subsidiaire ;

- que, sur le montant de l'amende, si celui-ci doit présenter un caractère dissuasif, il doit aussi être tenu compte des facultés contributives de la personne poursuivie et des faits de l'espèce ;

- que les documents comptables (pièces 3 à 5) montrent que la société appelante, pour les exercices clos entre 2016 et 2019, a présenté un produit d'exploitation variant entre 11.578,35 euros et 16.942 euros, avec un résultat d'exploitation compris entre 337,73 euros et 567 euros ;

- que l'infraction ne concerne en outre que 23 logements ;

- qu'ainsi, nonobstant les autres décisions rendues pour des sociétés distinctes dans des procédures qui ne sont pas comparables à la présente affaire, la cour, par infirmation de la décision entreprise, limitera le montant de l'amende à la somme de 2.000 euros par annonce objet du manquement, soit une amende civile, pour 23 manquements, d'un montant total de 46.000 euros, une telle amende étant proportionnée à la situation de l'appelante résultant des pièces versées ainsi qu'aux faits en cause objet de la saisine de la juridiction.

Le sort des frais et dépens de première instance a été exactement réglé par le premier juge, la décision étant confirmée sur ce point.

Ce qui est jugé en cause d'appel commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel, chacune des parties conservant la charge de ses dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevable la demande de radiation formée par la Ville de [Localité 5] ;

Confirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a constaté que la société SARL New York Habitat a méconnu les dispositions de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme en ne transmettant pas dans les délais impartis les informations sollicitées par la ville de [Localité 5] sur le fondement des dispositions de l'article L. 324-2-1 II du code du tourisme, du décret n°2019-1104 du 30 octobre 2019 et de l'arrêté du 31 octobre 2019 précisant le format des tableaux relatifs aux transmissions d'informations prévues par les articles R. 324-2 et R.324-3 du code du tourisme et en ce qu'elle a statué sur le sort des frais et dépens de première instance ;

L'infirme au surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société SARL New York Habitat au paiement d'une amende civile de 46.000 euros ;

Dit que le produit de l'amende sera versé à la Ville de [Localité 5] en application du III de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme ;

Rejette les autres demandes ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel ;

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/04032
Date de la décision : 13/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-13;22.04032 ?
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