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12/10/2022 | FRANCE | N°20/03875

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 12 octobre 2022, 20/03875


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 12 OCTOBRE 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03875 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6RG



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de VILLENEUVE-SAINT-GEORGES - RG n° 18/00449



APPELANTE



S.A.R.L. J ROQUE

[Adresse 5]

[Localité

2]

Représentée par Me Philippe MIALET, avocat au barreau d'ESSONNE



INTIME



Monsieur [E] [L] [K]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Thomas FORMOND, avocat au...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 12 OCTOBRE 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03875 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6RG

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de VILLENEUVE-SAINT-GEORGES - RG n° 18/00449

APPELANTE

S.A.R.L. J ROQUE

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Philippe MIALET, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIME

Monsieur [E] [L] [K]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Thomas FORMOND, avocat au barreau de PARIS, toque : C2615

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière présente lors de la mise à disposition.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :

Par deux contrats à durée déterminée, M. [E] [L] [K] a été engagé en tant que man'uvre du 2 avril au 28 décembre 2012, puis du 1er avril au 31 juillet 2013 par la S.A.R.L. J. Roque qui est une entreprise de peinture. Par contrat de travail à durée indéterminée à effet au 18 septembre 2013, il a ensuite été engagé par la même société au même poste.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de la métallurgie. La société J. Roque employait à titre habituel plus de dix salariés.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M. [K] s'élevait à 1.759,40 euros.

Par lettre datée du 7 mai 2018, M. [K] a été licencié pour faute grave en raison de son absence depuis le 26 février précédent et ce de manière continue et injustifiée malgré plusieurs mises en demeure des 28 février, 12 et 23 mars 2018.

Le 4 juillet 2018, contestant son licenciement et réclamant diverses indemnités, outre des rappels de salaires, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Villeneuve-Saint-Georges qui, par jugement de départage du 15 mai 2020, a requalifié la faute grave en cause réelle et sérieuse et condamné l'employeur au paiement des sommes subséquentes.

Par déclaration du 1er juillet 2020, la société J. Roque a fait appel de cette décision notifiée par le greffe le 4 juin précédent.

Dans ses dernières conclusions, adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 29 septembre 2020, l'appelante demande à la cour, infirmant le jugement, et statuant à nouveau et y ajoutant, de :

- juger le licenciement pour faute grave fondé ;

- condamner M. [K] à lui payer 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions, adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 2 octobre 2020, M. [K] demande à la cour de confirmer le jugement sauf en ce qu'il juge que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, de l'infirmer sur ce point, et statuant à nouveau et y ajoutant, de :

- juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamner la société J. Roque à lui payer 20.597,46 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- ordonner la remise de bulletins de salaires de février à mai 2018 et de documents sociaux conformes à la décision à venir ;

- ordonner l'intérêt au taux légal à compter de la date de saisine ;

- condamner la société J. Roque à lui payer 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour l'exposé des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 : Sur la rupture

1.1 : Sur la nullité du licenciement

En application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Or, au cas présent, si elle est développée dans le corps des conclusions, la demande tendant à voir juger le licenciement nul ne figure pas dans le dispositif qui comprend uniquement une demande de voir dire celui-ci dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La cour n'est donc pas saisie d'une demande d'annulation du licenciement et ne statuera pas de ce chef.

1.2 : Sur la cause réelle et sérieuse

L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Aux termes de l'article L.1232-1 du même code, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise.

En l'espèce, aux termes de la lettre de rupture du 7 mai 2018, M. [K] a été licencié pour faute grave au motif qu'il aurait été absent depuis le 26 février précédent et ce de manière continue et injustifiée malgré plusieurs mises en demeure les 28 février, 12 et 23 mars 2018.

Les allégations de l'employeur selon lesquelles le salarié aurait travaillé en intérim pendant cette période ne figurent pas dans ce courrier, qui fixe les limites du litige, et seront nécessairement écartées des débats.

Par ailleurs, M. [K] a été effectivement absent du 26 février 2018 jusqu'au 26 mars suivant, date à laquelle ce dernier soutient sans être utilement contredit être resté à la disposition de son employeur après s'être présenté à son poste et avoir refusé une mission à [Localité 4] compte tenu de sa situation familiale.

S'il n'a pas répondu aux courriers de mise en demeure qu'il a pourtant reçus pendant son absence antérieure, il ressort des débats que le salarié a envoyé à son employeur un certificat de naissance de son enfant né le 28 février, naissance lui ouvrant droit à trois jours d'autorisation d'absence ainsi qu'à un congé paternité de 11 jours consécutifs en l'état du droit applicable.

Il ressort également des pièces produites que, par courrier du 11 mars, il a informé son employeur qu'il souhaitait, à l'issue du congé pour paternité auquel il pouvait légitimement prétendre, être en congés payés du 15 au 27 mars suivant, et ce alors que, selon les mentions figurant sur sa fiche de paie, il lui restait un solde de congé suffisant pour l'année en cours.

Cependant, en l'état du droit alors applicable, le salarié qui souhaitait bénéficier d'un congé paternité devait avertir son employeur au moins un mois avant la date à laquelle il envisageait de le prendre, en précisant la date à laquelle il entendait y mettre fin. Faute d'avoir accompli cette démarche, M. [K] n'était donc pas en situation d'absence régulière pour paternité du 28 février au 14 mars 2018. Il ne l'était pas davantage du 15 au 26 mars suivant, ses congés n'ayant pas été accordés en amont par son employeur qui les lui a d'ailleurs finalement refusés.

Néanmoins, alors qu'il avait adressé un certificat de naissance à son employeur ainsi qu'une demande de congés dont le refus n'a été porté à sa connaissance que le jeudi 22 mars pour un retour effectif le lundi 26 suivant, il ne saurait être considéré qu'il a laissé son employeur dans l'ignorance de sa situation et n'a pas justifié de ses absences.

Dès lors, son absence non autorisée pendant près d'un mois dans une petite entreprise nécessairement perturbée par cette carence est constitutive d'une faute de nature à justifier la rupture du contrat de travail. En revanche, compte tenu de l'ancienneté du salarié, des justificatifs qu'il a effectivement transmis, du fait qu'il pouvait légitimement prétendre être en congé paternité puis en congés payés, ce comportement fautif n'était pas de nature à rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, étant souligné que l'avertissement préalable du 30 janvier précédent pour deux absences injustifiées était manifestement disproportionné compte tenu de la situation familiale du salarié justifiant ses absences et qu'il ne saurait dès lors constituer un précédent disciplinaire.

Il convient dès lors de confirmer le jugement en ce qu'il juge que le licenciement de M [K] n'est pas fondé sur une faute grave mais repose sur une cause réelle et sérieuse ainsi que sur les condamnations subséquentes.

2 : Sur la remise des documents de fin de contrat.

Il y a lieu d'ordonner la remise des bulletins de paie de février à mai 2018 et de documents sociaux conformes à la présente décision, celle-ci étant de droit.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

3 : Sur les intérêts

Conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil, les intérêts au taux légal courent sur les créances salariales à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes du 25 juillet 2018, du jugement du 15 mai 2020 sur les créances indemnitaires confirmées et du présent arrêt pour le surplus.

4 : Sur les autres demandes

La décision sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles.

Partie perdante en cause d'appel, la S.A.R.L. J. Roque supportera les éventuels dépens de cette instance, outre 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

- Dit qu'elle n'est pas saisie d'une demande tendant à voir juger le licenciement nul ;

- Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Villeneuve-Saint-Georges du 15 mai 2020 en toutes ses autres dispositions ;

Y ajoutant :

- Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les créances salariales à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes du 25 juillet 2018, du jugement du 15 mai 2020 sur les créances indemnitaires confirmées et du présent arrêt pour le surplus ;

- Condamne la S.A.R.L. J. Roque à payer à M. [E] [L] [K] la somme de 1.000 euros au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel ;

- Condamne la S.A.R.L. J. Roque aux éventuels dépens de l'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/03875
Date de la décision : 12/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-12;20.03875 ?
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