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30/09/2022 | FRANCE | N°17/10409

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 30 septembre 2022, 17/10409


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 30 Septembre 2022



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/10409 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B35DF



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Juin 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MEAUX RG n° 14-00034





APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PARIS

[Adresse 1]
r>[Localité 2]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901





INTIMEE

SA [4]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

non comparante et non re...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 30 Septembre 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/10409 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B35DF

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Juin 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MEAUX RG n° 14-00034

APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE PARIS

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

INTIMEE

SA [4]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

non comparante et non représentée, dispensée de comparaître

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre

Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre

Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre et par Madame Alice BLOYET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris d'un jugement rendu le 12 juin 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux dans un litige l'opposant à la S.A. [4].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [G] [S], salarié de la S.A. [4], a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 16 janvier 2005 ; que la société a complété une déclaration d'accident du travail en précisant les circonstances, à savoir qu'en nettoyant les sièges, le salarié avait ressenti une douleur dans le dos et qu'il avait déjà été sujet à une lésion au même endroit suite à un précédent accident du travail ; que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris a pris en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels ; qu'à réception de son compte employeur 2005- 2008, la société a demandé à la caisse la communication des pièces du dossier de son salarié ; qu'après vaine saisine de la commission de recours amiable, le 10 février 2011, la société a formé un recours le 8 janvier 2014 à l'encontre de la décision implicite de rejet de la dite commission.

Par jugement en date du 12 juin 2017, le tribunal a :

-rejeté le moyen tiré de la prescription de l'action soulevée par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris ;

-déclaré recevable l'action de la S.A. [4] ;

-déclaré inopposable à la S.A. [4] l'accident du travail survenu le 16 janvier 2005 à M. [G] [S] à compter du 6 février 2005 ;

-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le tribunal a indiqué que la prescription ne pouvait pas courir à compter de la date de l'accident du travail mais à compter de la date à laquelle l'employeur avait effectivement connaissance de la prise en charge par la caisse de l'accident au titre de la législation sur les risques professionnels ; que faute de notification de la prise en charge, le point de départ devait être fixé à la date du versement des cotisations générées par la décision de prise en charge ; que la copie écran du logiciel employé par la caisse ne suffisait pas à rapporter la preuve de la notification. Au fond, le tribunal a retenu que le certificat médical du 1er février 2005 avait prescrit une reprise du travail à partir du 6 février 2005 et la poursuite des soins jusqu'au 15 mars 2005, lesquelles ont été prolongées jusqu'au 30 avril 2005. Le tribunal a relevé que le 18 mars 2005, un nouvel arrêt travail avait été prescrit pour une pathologie identique et à partir du 10 juin 2005, que les certificats médicaux prolongeant les arrêts travail jusqu'au 9 août 2007 n'étaient pas descriptifs. Il a relevé que ces arrêts étaient importants pour une lésion bénigne et que l'avis médical du médecin-conseil de la société était suffisamment clair et précis pour fixer la date de consolidation au 18 mars 2005.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 22 juin 2017 à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris qui en a interjeté appel par déclaration formée par voie électronique le 21 juillet 2017.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris demande à la cour de :

-infirmer le jugement du 12 juin 2017 en toutes ses dispositions ;

en conséquence :

à titre liminaire :

-dire et juger que le Tribunal n'était pas saisi de la contestation de la prise en charge de l'accident du travail dont M. [G] [S] a été victime le 16 janvier 2005 et ne pouvait dès lors en prononcer l'inopposabilité ;

à titre principal

-déclarer irrecevable le recours de la S.A. [4] pour cause de prescription ;

à titre subsidiaire

-débouter la S.A. [4] de toutes ses demandes ;

-condamner la S.A. [4] aux dépens.

La S.A. [4] a écrit pour demander une dispense de comparution et a indiqué s'en rapporter à prudence de justice.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 20 juin 2022 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE :

- sur la nécessaire infirmation du jugement :

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris expose que la S.A. [4] a saisi la Commission de Recours Amiable le 10 février 2011 pour contester uniquement la prise en charge au titre de la législation professionnelle des seuls « arrêts, soins et prestations consécutifs à l'accident du travail dont M. [G] [S] a été victime le 16 janvier 2005 », l'employeur s'interrogeant « sur l'imputabilité de cette période d'indemnisation sans commune mesure avec les lésions initiales constatées » ; que devant le tribunal, la S.A. [4] contestait uniquement la durée de la prise en charge en demandant que les soins et arrêts de travail pris en charge lui soient déclarés inopposables à compter du 6 février 2005, à titre subsidiaire du 30 avril 2005 et à titre infiniment subsidiaire qu'une expertise médicale soit ordonnée ; que le tribunal a, dans une rédaction manifestement malheureuse, tant dans le corps de son jugement que dans le dispositif, déclaré « inopposable à la société [4] l'accident du travail survenu le 16janvier 2005 à M. [G] [S] à compter du 6 février 2005 ».

Il résulte des dispositions des articles R. 142-1, R. 142-6 et R. 142-18 dont la teneur a été reprise aux articles R. 142-1-A, R. 142-1, et R. 142-10-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction alors applicable, que préalablement à la saisine de la juridiction du contentieux générale, les réclamations contre les décisions prises par un organisme de sécurité sociale relevant du champ d'application du contentieux général de la sécurité sociale doivent être portées devant la commission de recours amiable de l'organisme concerné et ce à peine d'irrecevabilité des prétentions formées devant la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale.

Il s'ensuit que par application de ces mêmes textes, l'étendue du litige se trouve déterminée par l'étendue de la saisine de la commission de recours amiable d'un organisme de sécurité sociale se détermine au regard du contenu de la lettre de réclamation et non de celui de la décision ultérieure de cette commission (en ce sens 2ème Civ., 12 mars 2020, pourvoi n°19-13.422 ).

Au cas particulier, la S.A. [4] a saisi la commission de recours amiable le 10 février 2011 lui demandant d'infirmer la décision de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, des arrêts, soins et prestations consécutifs à l'accident dont a été victime M. [G] [S] le 16 janvier 2005. Le corps de la lettre de saisine ne contient aucune contestation de l'opposabilité de la reconnaissance de l'accident du travail lui-même.

Le tribunal a donc statué au-delà de sa saisine en ayant déclaré inopposable à la S.A. [4] l'accident du travail survenu le 16 janvier 2005 à M. [G] [S] à compter du 6 février 2005.

Le jugement sera donc infirmé de ce chef.

- sur la prescription

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris expose qu'au moment de la prise en charge de l'accident, le délai de prescription de droit commun applicable aux actions en inopposabilité était de 30 ans; que la réforme de la prescription issue de la loi du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008 date de sa publication, a ramené le délai de prescription de droit commun à 5 ans ; que l'article 26 prévoyait que les dispositions de la loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquaient aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'en l'espèce, un nouveau délai de prescription de 5 ans a donc commencé à courir le 19 juin 2008 ; que l'action en inopposabilité est manifestement une action mobilière car rattachée à un droit de créance ; que la procédure en inopposabilité qui correspond au droit pour un employeur de contester le caractère professionnel d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ou la régularité de la procédure menée pour parvenir à une décision de reconnaissance de ce caractère professionnel, afin que le juge la dise mal fondée et en neutralise les effets, répond bien à la définition de l'article 30 du code de procédure civile ; que les comptes employeurs versés aux débats par la S.A. [4] en première instance pour les années 2005 et 2006 lui ont été transmis en 2006 et 2007 ; que les comptes employeurs versés aux débats par la Société [4] en première instance pour les années 2007 et 2008 résultent de la consultation par ses propres soins de son compte employeur en ligne et qu'elle a édité respectivement les 12 mars 2008 et 16 novembre 2009 ; que par ailleurs, celle-ci a réglé ses cotisations, de sorte qu'elle ne pouvait ignorer la prise en charge de l'accident et l'imputation des indemnités journalières sur son compte au 19 juin 2008 ; que la S.A. [4] avait donc jusqu'au 19 juin 2013 pour saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux de sa demande d'inopposabilité ; qu'à la date de sa saisine du Tribunal, le 10 janvier 2014, sa demande était donc prescrite.

L'article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il résulte des dispositions combinées des articles 2224 du code civil, R. 142-18 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, le deuxième dans sa rédaction antérieure au décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 et le dernier dans sa rédaction antérieure au décret n°2009-938 du 29 juillet 2009, applicables au litige, que ni l'indépendance des rapports entre, d'une part, la caisse et la victime et d'autre part, la caisse et l'employeur, ni le particularisme du recours ouvert à l'employeur pour contester la décision d'une caisse primaire de reconnaître le caractère professionnel d'un accident, d'une maladie ou d'une rechute ne justifient que ce recours ne puisse constituer une action en justice et que, dès lors, il ne soit pas soumis à un délai de prescription. Il y a lieu, en conséquence, de considérer qu'en l'absence de texte spécifique, l'action de l'employeur aux fins d'inopposabilité de la décision de la caisse de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, de la maladie ou de la rechute est au nombre des actions qui se prescrivent par cinq ans en application de l'article 2224 du code civil.

Il convient de déterminer à compter de quelle date la société a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son action aux fins d'inopposabilité.

En l'espèce, le compte employeur des années 2005 à 2008 fait apparaître les prestations versées à M. [G] [S] au titre de son accident du travail. Le décompte employeur versé par la société devant les premiers juge pour l'année 2007 a été édité par elle-même le 12 mars 2008.

Si la S.A. [4] indique avoir saisi en lettre recommandée avec demande d'accusé de réception la commission de recours amiable le 10 février 2011, ce que ne conteste pas la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Paris, ce recours n'était à l'époque pas un préalable obligatoire (2e Civ., 20 décembre 2012, pourvoi n° 11-26.621, Bull. 2012, II, n° 208). Il n'est pas de nature à interrompre la prescription, la saisine de la commission de recours amiable ne valant pas citation (2e Civ., 25 octobre 2006, pourvoi n° 05-13.940).

Dès lors, la S.A. [4] devait saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale avant le 12 mars 2013. Or, la saisine n'est intervenue que le 8 janvier 2014, de telle sorte que la demande est prescrite et, par voie de conséquence, irrecevable.

La S.A. [4], qui succombe, sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement rendu le 12 juin 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux ;

Statuant à nouveau :

Déclare irrecevables les demandes présentées par la S.A. [4] ;

Condamne la S.A. [4] aux dépens.

La greffière,Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 17/10409
Date de la décision : 30/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-30;17.10409 ?
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