REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 7
ARRET DU 29 SEPTEMBRE 2022
(sur renvoi après cassation )
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15723 auquel est joint le N°RG 21/15724 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEJKY
Décision déférée à la Cour :
Ordonnances 8 novembre 2017 et du 29 juin 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 17/204
DEMANDEURS
Madame [R] [T], gérante de la SCI [Adresse 9]
[Adresse 5]
[Localité 10]
présente à l'audience
SCI [Adresse 9]
[Adresse 5]
[Localité 10]
Représentée par sa gérante
Monsieur [A] [T]
[Adresse 1]
[Localité 10]
Représenté par Me Philippe DAL MEDICO, avocat au barreau de PARIS, toque : C1270
DÉFENDEURS
Maître Michèle LEBOSSE
[Adresse 6]
[Localité 10]
Représentée par Me Philippe THOMAS COURCEL de la SELARL CABINET THOMAS-COURCEL BLONDE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0165, substitué par Me BLONDE
Madame [Z] [M] - AR de convocation signée
[Adresse 8]
[Localité 10]
Madame [J] [T] - AR de convocation signée
[Adresse 2]
[Localité 3]
Madame [C] [T] - assignée à personne
[Adresse 11]
[Adresse 7]
[Localité 4]
Défaillantes
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 23 Mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. François LEPLAT, Président de chambre
Mme Patricia LEFEVRE, Conseillère
M. Julien SENEL, Conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. François LEPLAT, Président de chambre dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN
ARRET :
- Réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par François LEPLAT, Président de chambre et par Sonia DAIRAIN, Greffière, lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par ordonnance du 20 avril 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a désigné Maître [P] [S], administrateur judiciaire, en qualité d'administrateur provisoire de la SCI [Adresse 9] pour une durée de douze mois, avec la mission suivante :
- se faire remettre par tout détenteur les documents et fonds de la société ;
- administrer la société avec les pouvoirs du gérant ;
- établir ou faire établir par une société d'expertise comptable, si nécessaire, un bilan de la situation financière de la société ;
- faire examiner, par un architecte extérieur aux associés, les devis produits par les associés et/ou faire établir par ledit architecte si nécessaire de nouveaux devis des travaux à effectuer conformément aux demandes de la préfecture de police de [Localité 10] ;
- réunir l'assemblée générale des associés de la SCI en vue de toute décision regardant l'avenir de la société.
Cette désignation était motivée par la mésentente existant entre les associés - M. [A] [T], Mme [Z] [M], son épouse, et leurs filles [J], [R] et [C] [T] - ainsi que par la nécessité de réaliser des travaux urgents sur l'immeuble sis [Adresse 5].
Au mois d'octobre 2017, Maître [P] [S] a présenté une première demande d'honoraires pour un montant de 5.442,50 euros TTC, à laquelle le président du tribunal de grande instance de Paris a fait droit par ordonnance de taxe du 8 novembre 2017.
Au mois d'avril 2018, après que sa mission eut pris fin à l'issue d'une assemblée générale des associés qu'elle avait organisée le 11 avril de ce mois, Maître [P] [S] a présenté une seconde demande d'honoraires pour un montant de 5.773,39 euros TTC, à laquelle il a été fait droit par ordonnance de taxe du 29 juin 2018.
Par lettre remise au greffe de la cour d'appel le 6 août 2018, M. [A] [T] a formé un recours contre les deux ordonnances de fixation d'honoraires et a sollicité la réduction de la rémunération allouée à Maître [P] [S] à la somme de 383,89 euros.
Par lettre recommandée du 18 février 2019, la SCI [Adresse 9], représentée par Mme [R] [T], sa gérante, a également formé un recours contre les deux ordonnances de fixation d'honoraires, en sollicitant le rejet de la demande de rémunération de Maître [P] [S], au motif que celle-ci n'aurait pas accompli sa mission.
Par ordonnance du 24 juin 2019, le magistrat délégué par le premier président de la cour d'appel de Paris (le premier président) a :
- ordonné la jonction des instances engagées respectivement par M. [A] [T] et la SCI [Adresse 9], représentée par Mme [R] [T] ;
- déclaré M. [A] [T] et la SCI [Adresse 9] recevables en leurs contestations des honoraires de Maître [P] [S] fixés par le président du tribunal de grande instance de Paris ;
- infirmé les ordonnances de fixation d'honoraires rendues les 8 novembre 2017 et 29 juin 2018 ;
- débouté Maître [P] [S], en sa qualité d'administrateur judiciaire de la SCI [Adresse 9] pour la période du 20 avril 2017 au 20 avril 2018, de sa demande d'honoraires afférente à cette mission ;
- ordonné en tant que de besoin la restitution à la SCI [Adresse 9] des honoraires perçus par Maître [P] [S] ;
- rejeté les prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Maître [P] [S] aux dépens.
Le 26 juillet 2019, Maître [P] [S] a formé un pourvoi en cassation contre cette ordonnance.
Par arrêt du 1er avril 2021, la Cour de cassation a ainsi statué :
Vu les articles 720 et 721 du code de procédure civile :
5. Selon ces textes, le juge statue sur les honoraires des auxiliaires de justice ou des officiers publics ou ministériels, dont le mode de calcul n'est pas déterminé par une disposition réglementaire, suivant la nature et l'importance des activités de l'auxiliaire de justice ou de l'officier public ou ministériel concerné, les difficultés qu'elles ont présentées et la responsabilité qu'elles peuvent entraîner.
6. Pour ce faire, il n'a pas le pouvoir de connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l'auxiliaire de justice ou de l'officier public ou ministériel en raison des fautes commises par l'intéressé dans l'exécution de sa mission.
7. Pour infirmer les décisions du premier juge ayant fixé la rémunération de Mme [S] au titre de sa mission d'administrateur provisoire de la société [Adresse 9], entre le 20 avril 2017 et le 20 avril 2018, et débouter l'intéressée de l'intégralité de sa demande d'honoraires, l'ordonnance retient en substance que, d'une part, Mme [S] n'a pas accompli les diligences qu'imposait l'exécution de sa mission et, notamment, n'a pas fait réaliser les travaux urgents sur l'immeuble, alors qu'elle en avait le pouvoir en sa qualité de gérant ainsi que les moyens financiers, ni n'a assuré la gestion locative courante à défaut d'avoir remis en location un logement devenu vacant au cours de son mandat d'administrateur, d'autre part, les modalités de son administration n'ont pas été adaptées aux facultés financières limitées d'une telle société familiale, dès lors que les dépenses engagées, notamment du fait du recours à un architecte et un expert-comptable, ne l'ont pas été avec la rigueur requise en ce que, s'agissant du premier, aucun contrat n'a été conclu permettant de délimiter le périmètre de son intervention, "ce qui est en contradiction avec les règles déontologiques applicables en ce domaine", et, s'agissant du second, la situation comptable de la société ne justifiait pas les frais que son intervention a occasionnés.
8. L'ordonnance en déduit que la société [Adresse 9] est fondée à soutenir que sa situation n'a pas progressé pendant les douze mois de l'administration judiciaire et que la rémunération sollicitée par Mme [S] n'est donc pas justifiée.
9. En statuant ainsi, par des motifs qui ne relèvent pas des seuls critères de l'article 721 du code de procédure civile, mais procèdent, pour certains d'entre eux, d'une mise en cause de la responsabilité de l'administrateur provisoire en raison de fautes qui lui sont prêtées dans l'exécution de sa mission, le premier président a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle a ordonné la jonction des instances engagées respectivement par M. [A] [T] et la société [Adresse 9] et a déclaré ceux-ci recevables en leurs contestations des honoraires de Mme [S], l'ordonnance rendue le 24 juin 2019, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société [Adresse 9] et M. [A] [T] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les dispositions des articles 1032 et suivants du code de procédure civile ;
Vu la déclaration de saisine du premier président de la cour d'appel de Paris, autrement composée, désignée comme juridiction de renvoi, par la SCI [Adresse 9], représentée par sa gérante, Mme [R] [T], par lettre du 5 juillet 2021, affaire enregistrée sous n° RG 21/15723 ;
Vu la déclaration de saisine du premier président de la cour d'appel de Paris, autrement composée, désignée comme juridiction de renvoi, par M. [A] [T], par lettre du 7 juillet 2021, affaire enregistrée sous n° RG 21/15724 ;
Vu les écritures accompagnant sa saisine par lesquelles la SCI [Adresse 9], représentée par Mme [R] [T], contestant les honoraires de Maître [P] [S], dont elle considère qu'elle n'a pas exécuté sa mission, demande en conséquence la suppression de sa rémunération ;
Vu les écritures accompagnant sa saisine et les conclusions remises à l'audience du 28 mars 2022 par lesquelles M. [A] [T] demande :
Vu les articles L.811-1 et R.814-27 du code de commerce et l'article 721 du Code de procédure civile,
Dire et juger sans fondement le cumul des honoraires au temps passé avec les honoraires au pourcentage sur la trésorerie de la SCI [Adresse 9] existante avant le mandat de Maître [P] [S] et sur les mouvements de recettes et de dépenses enregistrées pendant ledit mandat ;
En outre,
Dire et juger sans fondement les honoraires au temps passé relatif à des diligences ne relevant pas de la mission de Maître Michèle Lebossé,
En outre encore,
Dire et juger que les tâches confiées au conseil de Maître [P] [S] et relevant de la mission de l'administrateur provisoire doivent être rétribuées sur la rémunération de Maître [P] [S],
Enfin,
Dire et juger que la facturation des diligences non prévues dans le champ de la convention autorisée relative à des prestations d'expertise comptable doit être déduite de la rémunération de Maître [P] [S],
En conséquence,
Infirmer les deux décisions du président du tribunal de grande instance de Paris ayant fixé la rémunération de Maître [P] [S] en date des 8 novembre 2017 et 29 juin 2018 ;
Fixer les honoraires de Maître [P] [S] à la somme de 383,89 euros ;
En l'absence de taxation des frais,
Condamner Maître [P] [S] à rembourser à la SCI [Adresse 9] la somme trop perçue de 2.365,82 euros ;
Condamner Maître [P] [S] à payer à M. [A] [T] une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Vu les écritures transmises le 9 mars 2022, dans l'affaire enregistrée sous n° RG 21/15723 par lesquelles Mme [Z] [M] et Mme [J] [T], née [V] demandent :
Prendre acte que Mme [Z] [M] et Mme [J] [T] s'en rapportent à justice ;
Condamner tout succombant à payer à Mme [Z] [M] et Mme [J] [T] la somme de 1.000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.
Vu les écritures remises à l'audience du 23 mais 2022, dans affaire enregistrée sous n° RG 21/15723 par lesquelles Maître Michèle Lebossé demande le débouté de la SCI [Adresse 9] et de M. [A] [T] de leurs recours, leur condamnation solidaire à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux éventuels dépens.
Vu la justification par Mme [R] [T], gérante de la SCI [Adresse 9], de son recours devant le premier président de la cour d'appel de Paris par lettres recommandées avec avis de réception adressées à :
- Mme [R] [T] à sa personne qui ne forme aucune demande à titre personnel,
- à Mme [C] [T] à sa personne et M. [B] [T] à sa personne, qui ne comparaissent pas.
Vu la fixation de l'affaire à l'audience du 28 mars 2022 et son renvoi à celle du 23 mai 2022, en l'absence de Maître [P] [S] ou de son représentant.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par les parties, oralement soutenues à l'audience, et aux ordonnances de taxe déférées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la jonction d'instance
La cour relève que l'affaire enregistrée sous n° RG 21/15723 et l'affaire enregistrée sous n° RG 21/15724 concernent toutes deux une saisine après renvoi devant le premier président par la Cour de cassation dans son arrêt du 1er avril 2021 dans une affaire opposant la SCI [Adresse 9], une partie de ses associés et Maître [P] [S], ès qualités d'administrateur judiciaire.
Dans l'intérêt d'une bonne justice, il convient de les juger ensemble.
Par application de l'article 367 du code de procédure civile, la cour ordonnera leur jonction.
Sur la contestation des honoraires de Maître Michèle Lebossé
Selon l'article 720 du code de procédure civile : 'Les contestations relatives aux honoraires des auxiliaires de justice ou des officiers publics ou ministériels dont le mode de calcul n'est pas déterminé par une disposition réglementaire demeurent soumises aux règles qui leur sont propres."
L'article 721 de ce même code ajoute : "Dans le cas de l'article 720, le juge statue suivant la nature et l'importance des activités de l'auxiliaire de justice ou de l'officier public ou ministériel, les difficultés qu'elles ont présentées et la responsabilité qu'elles peuvent entraîner. Il mentionne, s'il y a lieu, les sommes déjà perçues soit à titre de provision, soit à titre de frais ou d'honoraires."
Il convient de rappeler qu'en l'espèce, par ordonnance de référé du 20 avril 2017, le président du tribunal de grande instance de Paris a désigné Maître Michèle Lebossé, administrateur judiciaire provisoire de la SCI [Adresse 9] pour une durée de douze mois,avec mission de :
- se faire remettre par tout détenteur les documents et fonds de la société ;
- administrer la société avec les pouvoirs du gérant ;
- établir ou faire établir par une société d'expertise comptable, si nécessaire, un bilan de la situation financière de la société ;
- faire examiner, par un architecte extérieur aux associés, les devis produits par les associés et/ou faire établir par ledit architecte si nécessaire de nouveaux devis des travaux à effectuer conformément aux demandes de la préfecture de police de [Localité 10] ;
- réunir l'assemblée générale des associés de la SCI en vue de toute décision regardant l'avenir de la société ;
Que Maître [P] [S] a présenté deux demandes d'honoraires pour un montant total de 9.346,58 euros HT et de 11.215,89 euros TTC, auxquelles il a été fait droit :
- à hauteur de 4.535,42 euros HT et de 5.442,50 euros TTC, par ordonnance de taxe du 8 novembre 2017
- à hauteur de 4.811,16 euros HT et de 5.773,39 euros TTC, par ordonnance de taxe du 29 juin 2018 ;
Que ces honoraires sont contestés par les demandeurs au renvoi, qui soutiennent essentiellement son absence de diligences quant à l'exécution de travaux de réfection de l'immeuble sis [Adresse 5].
A cet égard, il convient de relever, en premier lieu, que les deux demandes d'honoraires que Maître [P] [S] a présentées aux juges taxateurs, se répartissent en honoraires "prévus à la convention" et en émoluments au temps passé.
Les honoraires "prévus à la convention" se réfèrent à un barème, non produit, ne satisfaisant pas au critères fixés par l'article 721 du code de procédure civile précités.
Ils concernent trois postes :
- les deniers encaissés d'un montant de 40.000 euros pour lesquels Maître [P] [S] revendique un paiement de 880 euros correspondant à trois tranches de rémunération (6% jusqu'à 8.000 euros, 2% de 8.001 à 16.000 euros et 1% au-dessus) faisant valoir sa responsabilité civile encourue pour la conservation et un coût d'assurance obligatoire, au demeurant non justifié, de 0,2% des fonds.
Alors même qu'une partie de ces sommes aurait été encaissée antérieurement à sa désignation, la rémunération de ce poste sera appréciée à la somme de 80 euros ;
- les loyers des immeubles administrés d'un montant total de 27.452,71 euros, pour lesquels Maître [P] [S] revendique une rémunération excessive, compte tenu du faible nombre de locataires, de 8%, soit la somme de 2.196,22 euros, qui sera ramenée à celle de 1.000 euros.
- les paiements aux créanciers pour lesquels Maître [P] [S] revendique le paiement d'un montant total de 285,36 euros, correspondant à deux tranches de rémunération (5% jusqu'à 4.000 euros et 3% au-dessus), montant qui sera ramené à 120 euros.
Ainsi la rémunération totale de ces trois postes sera ramenée de la somme de 3.361,58 euros à celle de 1.200 euros HT.
Les "émoluments au temps passé" totalisent quant à eux pour les deux demandes d'honoraires la somme de 5.985 euros HT, représentant 35,25 heures au taux horaire de 180 euros, étant observé que ce poste présente une erreur de calcul pour la première demande formulée par Maître [P] [S].
Sur ce point, M. [A] [T], après avoir contesté, à bon droit, l'application d'un barème non réglementaire pour calculer une partie de la rémunération de Maître [P] [S], lui fait grief, tout comme la SCI [Adresse 9], de ne pas avoir accompli sa mission, au visa de l'article R.814-27 du code de commerce, qui dispose que : "La rémunération des administrateurs judiciaires au titre des mandats qui leur sont confiés en matière civile est fixée sur justification de l'accomplissement de leur mission par le président de la juridiction les ayant désignés.
Cette décision est susceptible de recours selon les règles des articles 714 à 718 du code de procédure civile."
Il lui reproche ainsi, alors qu'elle était investie des pouvoirs du gérant de la SCI [Adresse 9] en vertu de l'ordonnance de référé du 20 avril 2017, de ne pas avoir fait exécuter les travaux conformément aux injonctions de la préfecture de police de Paris dans son courrier du 7 août 2016, travaux essentiellement relatifs au rejointoiement des maçonneries, au remplacement des linteaux de fenêtres et à la réalisation d'un gobetis, ainsi qu'aux travaux directement complémentaires de vérification des zingueries et de traitement contre la corrosion des renforts métalliques présents en façades, afin d'éviter la prise d'un arrêté de péril, alors qu'elle disposait, dès le 24 juillet 2017, d'une part, des devis idoines et, d'autre part, de la trésorerie suffisante pour que la SCI [Adresse 9].
S'en déduit une demande de réduction d'un ensemble d'honoraires estimé ne pas relever de la mission de Maître [P] [S].
S'agissant de la réalisation de travaux, il sera rappelé que la mission confiée à Maître [P] [S] est ainsi libellée :
- faire examiner, par un architecte extérieur aux associés, les devis produits par les associés et/ou faire établir par ledit architecte si nécessaire de nouveaux devis des travaux à effectuer conformément aux demandes de la préfecture de police de [Localité 10] ;
Que dès le 19 juin 2017, les associés, réunis en l'étude de Maître [P] [S], ont, selon procès-verbal produit, décidé :
- de faire désigner un expert chargé d'examiner de nouveaux devis, l'un d'eux devant être adressé aux associés après expertise,
- de faire expertiser l'immeuble en vue d'une éventuelle vente ;
Qu'à cet égard, celle-ci a eu recours aux services de M. [H] [F], architecte DPLG, lequel, dans un courrier du 25 septembre 2017, écarte le devis de la société Kalison, soumis par les associés, dont il estime les offres anormalement basses et les compétences incomplètes au regard des références qu'il a contactées et soumet ceux des sociétés Batista et MG Peinture ;
Que Maître [P] [S] a transmis deux rapports, le premier prévoyant la réunion d'une assemblée générale le 27 septembre 2017 et un deuxième, daté du 18 décembre 2018 en vue de la réunion de l'assemblée générale le 9 janvier 2018, reportée à la demande des associés au 9 février 2008, puis au 11 avril 2008 ;
Que lors de l'assemblée générale du 11 avril 2018, il a été donné tous pouvoirs à l'administrateur provisoire pour engager les travaux selon le devis de l'entreprise Batista, résolution en fait sans objet, cette entreprise n'entendant pas y donner suite, et que l'assemblée a rejeté l'engagement des travaux sur la base des devis des sociétés MG Peinture et CBA et également sur la base du devis de la société Kalison.
Il doit, dans ces conditions, être considéré qu'aucune mission de faire réaliser des travaux n'ayant été expressément confiée à Maître [P] [S] par l'ordonnance de référé du 20 avril 2017, sa mission sur ce point a été effectuée, quand bien même elle détenait, tant en vertu des dispositions de l'article 1848 du code civil, que des stipulations de l'article 20 des statuts de la SCI [Adresse 9] des pouvoirs et de la trésorerie pour les faire exécuter, le juge taxateur ne pouvant apprécier les choix de gestion d'une société, sauf en l'espèce à rechercher la responsabilité professionnelle de l'administrateur judiciaire qui était investi des pouvoirs du gérant, ce qu'il n'est pas habilité à faire.
De même, le juge taxateur ne saurait, sans rechercher la faute de Maître [P] [S] apprécier la pertinence de la convocation d'assemblées générales de la SCI [Adresse 9], au demeurant partie intégrante de sa mission, ni le contenu des résolutions soumises au vote, étant à cet égard rappelé que le principe même d'une éventuelle vente de l'immeuble a été accepté par l'ensemble des associés le 19 juin 2017.
Des critiques sont encore formulées à l'encontre de Maître [P] [S] au visa de l'article L.811-1 du code de commerce qui édicte que : "Les administrateurs judiciaires sont les mandataires, personnes physiques ou morales, chargés par décision de justice d'administrer les biens d'autrui ou d'exercer des fonctions d'assistance ou de surveillance dans la gestion de ces biens.
Les tâches que comporte l'exécution de leur mandat incombent personnellement aux administrateurs judiciaires désignés par le tribunal. Ils peuvent toutefois déléguer tout ou partie de ces tâches à un administrateur judiciaire salarié, sous leur responsabilité. Ils peuvent, en outre, lorsque le bon déroulement de la procédure le requiert et sur autorisation motivée du président du tribunal, confier sous leur responsabilité à des tiers une partie de ces tâches.
Lorsque les administrateurs judiciaires confient à des tiers des tâches qui relèvent de la mission que leur a confiée le tribunal, ils les rétribuent sur la rémunération qu'ils perçoivent."
S'agissant des deux notes d'honoraires de la société d'expertise comptable DBF Audit du 28 février 2008 pour 600 euros et du 9 avril 2018 pour 1.800 euros, s'il est exact que la mission confiée à Maître [P] [S] prévoit :
- établir ou faire établir par une société d'expertise comptable, si nécessaire, un bilan de la situation financière de la société, ces notes d'honoraires mentionnent, sans ventilation, la préparation ou l'assistance à deux assemblées générales qui ne peuvent couvrir ce champ de mission, la somme totale devant être supportée par la SCI [Adresse 9] devant être ainsi ramenée de 2.400 à 1.200 euros.
Quant à la facture du 11 avril 2018 établie par la Selarl d'avocats [N] [D] pour la préparation et la participation à l'assemblée générale du même jour d'un montant de 960 euros, elle devra être laissée, en application du texte précité, à l'entière charge de Maître [P] [S].
Enfin, sont contestées trois sommes de frais périodiques dénommés "TTP" de 780,85 euros, 972,13 euros et 996,73 euros, que Maître [P] [S] affirme être les frais postaux inhérents à la vie de la SCI [Adresse 9], seules les deux premières figurant sur la 2ème demande d'honoraires, taxée à hauteur de 5.773,39 euros le 29 juin 2018, M. [A] [T] soutenant même l'irrecevabilité de ces demandes au motif que ces sommes auraient déjà été prélevées sur le compte de la SCI avant le changement de gérant consécutif à la fin de mission de Maître [P] [S].
Aucune pièce probante n'est cependant versée à l'appui de la fin de non-recevoir soulevée.
Sur le fond, Maître [P] [S] ne justifie pas davantage l'existence de ces frais d'un montant total de 2.749,71 euros HT, qui seront ainsi déduits de celui de ses honoraires.
Il s'ensuit que les deux ordonnances de taxes du 8 novembre 2017 et du 29 juin 2018 seront infirmées et la rémunération totale de Maître [P] [S] fixée à la somme totale de 2.275,29 euros HT, soit 2.730,34 TTC, correspondant :
- pour les "honoraires prévus à la convention" à celle de 1.200 euros HT
- pour les "émoluments au temps passé" à celle de 1.075,29 euros HT [5.985 euros - 4.909,71 euros (1.200 + 960 + 2.749,71 euros).
Que, les pièces mises aux débats ne permettant pas d'établir un versement intégral des honoraires, Maître [P] [S] sera condamnée, en tant que de besoin, à rembourser à la SCI [Adresse 9], la somme de 8.485,55 euros TTC (11.215,89 - 2.730,34)
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, autrement composée, statuant par arrêt réputé contradictoire,
ORDONNE la jonction de l'affaire enregistrée sous n° RG 21/15724 à l'affaire enregistrée sous n° RG 21/15723, l'arrêt étant rendu sous ce dernier numéro de répertoire,
INFIRME les deux ordonnances de taxes du 8 novembre 2017 et du 29 juin 2018,
FIXE la rémunération totale de Maître [P] [S] en exécution de la mission qui lui a été confiée par ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de Paris du 20 avril 2017 à la somme de 2.275,29 euros HT, soit 2.730,34 TTC,
Et y ajoutant,
REJETTE toutes autres demandes,
LAISSE à chacune des parties la charge de ses propres dépens d'appel.
Le greffier, Le Président,