Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 5
ARRET DU 29 SEPTEMBRE 2022
(n° 2022/ , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08470 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CANQO
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juin 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° F 17/00980
APPELANTE
Madame [B] [N]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Martine LEBOUCQ BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : R285
INTIMEE
SARL PAU.DO.MA
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nelly CAYOT, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre,
Madame Nelly CAYOT, Conseillère
Madame Lydie PATOUKIAN, Conseillère
Greffier : Madame Claire BECCAVIN, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Par contrat à durée indéterminée à effet à compter du 2 avril 2002, Mme [B] [N] a été engagée au poste d'employée de magasins à temps plein, coefficient 135 de la convention collective nationale de la parfumerie par la société Pau. Do. Ma, exploitant à [Localité 4] une boutique sous l'enseigne Yves Rocher.
A compter du 6 juillet 2006, Mme [N] a été placée en arrêt de travail pour maladie et a perçu des indemnités journalières de la sécurité sociale puis à compter du mois d'avril 2009, une pension d'invalidité de la caisse primaire d'assurance maladie.
Le 18 juillet 2017, sollicitant la résiliation judiciaire de son contrat de travail et estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil afin d'obtenir la condamnation de l'employeur à lui verser diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail.
Par jugement du 7 juin 2019 auquel il convient de se reporter pour l'exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud'hommes a :
- déclaré son action prescrite et donc irrecevable ;
- débouté Mme [N] de sa demande selon l'article 700 du code de procédure civile ;
- rejeté la demande de la société Pau. Do. Ma selon l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Mme [N] aux dépens.
Mme [N] a régulièrement relevé appel du jugement le 23 juillet 2019.
Aux termes de ses dernières conclusions d'appelante transmises par le réseau privé virtuel des avocats dit RPVA le 15 avril 2020 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, Mme [N] demande à la cour de :
- la dire recevable et bien fondée en son appel ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré son action prescrite et donc irrecevable ;
- statuant à nouveau, résilier le contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ;
- dire que cette résiliation produit les effets d'un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;
- condamner en conséquence la société Pau. Do. Ma au paiement des sommes suivantes :
* 15 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
* 1 000 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
* 2 500 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
* 250 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;
* 5 000 euros pour exécution déloyale du contrat de travail ;
- condamner la société Pau. Do. Ma à remettre une attestation Pôle emploi, un certificat de travail ainsi qu'un reçu pour solde de tout compte sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 8 jours suivant la notification de la décision à intervenir ;
- condamner la société Pau. Do. Ma au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Pau. Do. Ma aux entiers dépens y compris en cas d'exécution forcée.
Aux termes de ses conclusions d'intimée transmises par RPVA le 17 janvier 2020 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société Pau. Do. Ma demande à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
- dire la prescription acquise et débouter de la totalité de ses demandes Mme [N] ;
A titre subsidiaire,
- débouter Mme [N] de la totalité de ses demandes ;
A titre très subsidiaire,
- vu la mise en place de la visite médicale de reprise, et vu la sommation d'avoir à communiquer sa situation au regard de la retraite, surseoir à statuer en l'attente de l'avis de la médecine du travail et de l'issue de la sommation de communiquer ;
- condamner Mme [N] à la somme de 4 000 euros au visa de l'article 700 code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 juin 2021.
Par arrêt du 17 février 2012, la cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 16 mai 2022 afin que :
- Mme [B] [N] produise ses justificatifs de revenus (déclaration d'impôts et avis d'impôts ou tout autre document en justifiant) à compter de l'année 2017 et le justificatif de la date de son éventuelle demande de départ en retraite ;
- le conseil de l'appelante conclue au 31 mars 2022 sur ces éléments et sur la demande de résiliation judiciaire ;
- le conseil de l'intimée conclue en réponse au 28 avril 2022.
Mme [N] n'a pas communiqué les éléments sollicités par la cour et n'a pas conclu sur ces éléments.
Aux termes de ses conclusions d'intimée transmises par RPVA le 10 mai 2022 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société Pau. Do. Ma présente les mêmes prétentions que précédemment au visa de l'arrêt rendu et de la carence de l'appelante dans la fourniture des informations sollicitées par la cour.
MOTIVATION :
Mme [N] n'ayant pas conclu ni déféré à la demande de la cour, il convient de rappeler que :
- le départ ou la mise à la retraite de Mme [N], s'il est intervenu avant la saisine de la juridiction prud'homale a pour effet de rendre la demande de résiliation judiciaire sans objet,
- Mme [N] n'ayant pas déféré à la demande de la cour, celle-ci peut tirer toute conséquences de droit de sa carence.
S'agissant de la prescription :
La cour rappelle qu'en application de l'article L. 1471-1 du code du travail 'toute action portant sur l'exécution ou la rupture d'un contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exécuter son droit.'
Mme [N] sollicite la résiliation judiciaire du contrat de travail en reprochant à l'employeur de ne pas avoir organisé de visite de reprise en méconnaissance de l'article R. 4624-23 du code du travail dans sa version en vigueur à l'issue de son arrêt maladie. Elle soutient que le manquement s'est poursuivi dans le temps de sorte que le délai de prescription n'a pas couru.
La cour rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription dès lors le manquement de l'employeur allégué s'est poursuivi dans le temps, la visite de reprise ayant finalement été organisée pour le 25 octobre 2018 ainsi que cela ressort de la convocation à la visite médicale en date du 15 octobre 2018 communiquée par la société Pau Do Ma.
Sur le fond :
La cour a relevé comme il a été mentionné dans l'arrêt ayant ordonné la réouverture des débats que Mme [N] est née le 8 mai 1955, elle a donc atteint l'âge de 62 ans le 8 mai 2017. Elle justifie avoir perçu une pension d'invalidité jusqu'au 31 mars 2017 en produisant les attestations de la Caisse primaire d'assurance maladie de Charentes maritimes faisant état d'un versement jusqu'à cette date.
Malgré sommation de communiquer de la société Pau Do Ma et la demande de la cour, elle a refusé de fournir les justificatifs de ses revenus pour la période postérieure, ni de s'expliquer sur une éventuelle mise à la retraite.
La cour rappelle que l'article R. 4624-1 du code du travail dans sa version applicable au litige prévoit que 'Le salarié bénéficie d'un examen de reprise de travail par le médecin du travail :
1° Après un congé de maternité ;
2° Après une absence pour cause de maladie professionnelle ;
3° Après une absence d'au moins huit jours pour cause d'accident du travail ;
4° Après une absence d'au moins vingt et un jours pour cause de maladie ou d'accident non professionnel ;
5° En cas d'absences répétées pour raisons de santé.'
Aux termes de l'article R. 4624-22 dans sa version applicable au litige, 'l'examen de reprise a pour objet d'apprécier l'aptitude médicale du salarié à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation du salarié ou éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures.
Cet examen a lieu lors de la reprise du travail et au plus tard dans un délai de huit jours.'
En l'état des pièces communiquées par les parties, la cour relève que si l'employeur n'a effectivement pas organisé la visite de reprise à l'issue du dernier arrêt maladie de Mme [N] le 31 mars 2009, celle-ci ne justifie pas de son côté lui avoir signalé qu'elle était en mesure de reprendre son activité ou qu'elle bénéficiait désormais d'une pension d'invalidité. Par ailleurs, elle a attendu plus de 8 ans avant de se plaindre de la carence de l'employeur à cet égard et elle ne justifie en aucune manière l'avoir sollicité sur ce point. Enfin, elle-même n'a pas sollicité l'organisation d'une visite de reprise comme elle aurait pu le faire. La cour considère en conséquence que l'employeur a certes commis un manquement à l'obligation de sécurité en n'organisant pas de visite de reprise à l'issue du dernier avis d'arrêt de travail communiqué par la salarié mais ce manquement qui s'est prolongé huit années sans aucune réaction de la salariée, n'est pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.
Mme [N] est déboutée de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de toutes les demandes en découlant.
Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :
Mme [N] qui ne justifie en rien de sa situation postérieurement au 31 mars 2017 malgré la demande de la cour en ce sens, ne démontrant pas la réalité de son préjudice est déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.
Sur les autres demandes :
Mme [N], partie perdante est condamnée aux dépens. Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
INFIRME le jugement,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
REJETTE la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par la société Pau Do Ma,
DÉBOUTE Mme [B] [N] de l'ensemble de ses demandes,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties
CONDAMNE Mme [B] [N] aux dépens.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE