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22/09/2022 | FRANCE | N°22/01400

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 22 septembre 2022, 22/01400


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2022



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/01400 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFCEO



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG n° 20/52546





APPELANTE



S.C.I. RUBEN CHAMP DE MARS (RCS de PARIS n°817 916

224)



[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représentée par Me Laurent POZZI-PASQUIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Assistée par Me Lorène DERHY, avocat au barreau de...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2022

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/01400 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFCEO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG n° 20/52546

APPELANTE

S.C.I. RUBEN CHAMP DE MARS (RCS de PARIS n°817 916 224)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Laurent POZZI-PASQUIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Assistée par Me Lorène DERHY, avocat au barreau de PARIS, toque : E1320

INTIMEE

LA VILLE DE [Localité 5], prise en la personne de Madame la Maire de [Localité 5], Mme [L] [W], domiciliée en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Colin MAURICE de la SARL CM & L AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1844

Assistée par Me Alix DE CHEZELLES, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 juin 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, et Thomas RONDEAU, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 12 février 2020, la Ville de [Localité 5] a fait assigner la société civile immobilière Ruben champ de Mars devant le tribunal judiciaire de Paris, saisi selon la procédure accélérée au fond, aux fins de la voir condamner au paiement d'une amende civile sur le fondement des articles L. 631-7 et L.651-2 du code de la construction et de l'habitation, concernant l'appartement situé au 1er étage porte gauche de l'immeuble sis [Adresse 2]), lot n°14.

Par jugement du 8 juillet 2020, le tribunal a sursis à statuer sur les demandes de la Ville de [Localité 5] dans l'attente d'une décision de la Cour de justice de l'Union européenne appelée, sur renvoi préjudiciel de la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 15 nov. 2018, no 17-26.156), à apprécier la compatibilité de la réglementation nationale, telle que celle prévue par l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, à la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006.

Par arrêt du 22 septembre 2020, la Cour de justice de l'Union européenne a considéré la réglementation nationale conforme aux dispositions de la directive 2006/123/CE (CJUE, 22 septembre 2020, Cali Apartments, affaires jointes C-724/18 et C-727/18). Par cinq arrêts en date du 18 février 2021, la Cour de cassation a tiré les conséquences de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne. Elle a notamment jugé que la réglementation locale de la ville de [Localité 5] sur le changement d'usage est conforme à la réglementation européenne.

L'affaire a été rétablie a l'audience du 10 septembre 2021.

La Ville de [Localité 5] a demandé au tribunal de :

- condamner la société Ruben champ de Mars à lui payer une amende civile de 50.000 euros ;

- ordonner le retour à l'habitation des locaux transformés sans autorisation, sis [Adresse 2]), lot n°14, sous astreinte de 314 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai qu'il plaira au tribunal de fixer ;

- se réserver la liquidation de l'astreinte ;

- rejeter toutes prétentions adverses ;

- condamner la société Ruben champ de Mars à payer à la Ville de [Localité 5] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Ruben champ de Mars aux entiers dépens.

Par ordonnance contradictoire du 15 octobre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

- condamné la société Ruben champ de Mars à payer une amende civile de 42.000 euros, dont le produit sera versé à la Ville de [Localité 5] ;

- rejeté la demande portant sur le retour à l'habitation des locaux transformés sans autorisation situés [Adresse 2]), lot n°14 ;

- condamné la société Ruben champ de Mars à payer à la Ville de [Localité 5] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Ruben champ de Mars aux dépens.

Par déclaration du 13 janvier 2022, la société Ruben champ de Mars a relevé appel de cette décision, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande portant sur le retour à l'habitation des locaux transformés sans autorisation situés [Adresse 2]), lot n°14.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 17 mai 2022, l'appelante demande à la cour de :

- déclarer recevables l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de la Ville de [Localité 5] d'ordonner le retour à l'habitation des locaux transformés sans autorisation sous astreinte provisoire de 314 euros par jour de retard ;

- infirmer les autres dispositions du jugement et statuant à nouveau,

à titre principal,

- juger l'infraction de changement d'usage non constituée en l'absence de démonstration par la Ville de [Localité 5] de l'usage d'habitation des lieux au 1er janvier 1970 ;

en conséquence,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à une amende civile de 42.000 euros ;

- débouter la Ville de [Localité 5] de l'intégralité de ses demandes,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire l'infraction présumée de changement d'usage devait être caractérisée,

- juger que le local litigieux a été occupé à titre gracieux et de résidence principale par M. [Y], fils du gérant de la société appelante, durant la période litigieuse ;

- juger que l'infraction au chargement d'usage n'est donc pas constituée à son encontre, de sorte qu'elle ne saurait lui être imputée ;

en conséquence :

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à une amende civile de 42.000 euros ;

- débouter la Ville de [Localité 5] de l'intégralité de ses demandes,

à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire son absence de responsabilité n'était pas constatée,

- prendre acte de sa bonne foi et des diligences entreprises pour se conformer à la réglementation en vigueur, de la coopération totale avec la Ville de [Localité 5] lors de l'opération de contrôle diligentée, de la cessation de toute activité de location avant que le tribunal judiciaire n'ait été amené à statuer et de l'absence d'enrichissement par rapport à une location meublée classique,

- infirmer la condamnation de l'appelante à une amende de 42.000 euros ;

- réduire l'amende civile à un montant ne pouvant excéder la somme de 10.000 euros ;

en tout état de cause :

- condamner la Ville de [Localité 5] à verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement par Me [Z], et subsidiairement, ordonner que chacune des parties conserve à sa charge les frais de procédure et les dépens compte tenu de l'équité.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 13 avril 2022, la Ville de [Localité 5] demande à la cour de :

- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel de la société civile immobilière Ruben champ de Mars ;

- la juger recevable en ses conclusions et l'y en juger bien fondée ;

in limine litis,

- ordonner la radiation de l'affaire enregistrée sous le numéro RG 22/01400 et pendante devant le pôle 1 ' chambre 2 de la cour d'appel de céans en application de l'article 524 du code de procédure civile ;

au fond,

- confirmer le jugement rendu selon la procédure accélérée au fond le 15 octobre 2021, en ce qu'il a :

jugé que le manquement aux dispositions de l'article L631-7 et L651-2 du code de la construction et de l'habitation est caractérisé à l'encontre de la société civile immobilière Ruben champ de Mars ;

rejeté la demande de retour à l'habitation des locaux ;

condamné la société civile immobilière Ruben champ de Mars à lui payer la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société civile immobilière Ruben champ de Mars aux dépens ;

rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société civile immobilière Ruben champ de Mars à payer une amende civile de 42.000 euros, dont le produit lui sera versé ;

statuant de nouveau,

- condamner la société civile immobilière Ruben champ de Mars à une amende civile de 50.000 euros et ordonner que le produit de cette amende lui soit intégralement versé conformément aux dispositions de l'article L.651-2 du code de la construction et de l'habitation ;

en tout état de cause,

- débouter la société civile immobilière Ruben champ de Mars de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- condamner la société civile immobilière Ruben champ de Mars à lui verser une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour l'exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

A titre liminaire, la demande de la Ville de [Localité 5] tendant à la radiation de l'appel pour défaut de paiement de l'amende prononcée en première instance sera rejetée, cette demande relevant de la compétence du premier président en application de l'article 524 du code de procédure civile.

Sur le rappel des textes applicables, il convient de se référer à la décision de première instance qui en a fait un exposé exhaustif, la cour rappelant simplement qu'en application des articles L.631-7 et L.651-2 du code de la construction et de l'habitation et conformément à l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à la Ville de [Localité 5] d'établir :

- l'existence d'un local à usage d'habitation, un local étant réputé à usage d'habitation si la preuve est apportée par tout moyen qu'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, sauf pour les locaux construits ou faisant l'objet de travaux ayant pour conséquence d'en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 qui sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés ;

- un changement illicite, sans autorisation préalable, de cet usage, un tel changement étant notamment établi par le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile.

L'appelante soutient à titre principal que la condition de l'infraction tenant à l'usage d'habitation du local en cause au 1er janvier 1970 n'est pas remplie, la fiche H2 produite ne correspondant manifestement pas à ce local ou à tout le moins permettant d'en douter.

La fiche H2 versée aux débats par la Ville de [Localité 5] a été remplie le 13 octobre 1970. Elle concerne un local situé dans le bâtiment unique A de l'immeuble sis [Adresse 2], au premier étage porte G (gauche). Y figure le nom de la propriétaire Mme [N], celui de l'occupant du local Mme [P] avec la mention d'un loyer au 1er janvier 1970 et d'une date d'entrée dans les lieux du locataire en 1941.

Si le montant du loyer est rayé de même que l'année d'entrée dans les lieux du locataire, ces rayures, comme le souligne l'intimée, ne remettent pas en cause la validité du document ni sa valeur probante, les ratures et ajouts sur les fiches correspondant à des actualisations opérées au fil du temps par les services fiscaux.

La fiche R établie en octobre 1970 confirme d'ailleurs la réalité de l'occupation du logement de Mme [N] par Mme [P], et les noms de Mmes [N] et [P] figurent aussi sur le calepin des propriétés bâties s'agissant du lot n° 14, étant observé que le titre de propriété de la société Ruben champ de Mars mentionne que son appartement correspond au lot 14 situé dans le bâtiment A au premier étage côté gauche. Or, la fiche H2 indique bien que le local est situé dans le bâtiment unique A au 1er étage porte gauche.

La discordance existant entre le numéro de code "0102" qui figure sur la fiche H2 et sur le calepin et le code "0101" qui figure sur l'imprimé de demande de renseignements au titre de la taxe d'habitation 2018 qui a été adressé par l'administration fiscale à la société Ruben champ de Mars le 20 mars 2018, n'est pas de nature à remettre en cause la correspondance de la fiche H2 au local concerné, l'identification du bien par sa situation dans le bâtiment unique A au 1er étage porte gauche apparaissant suffisante pour lever tout doute. La fiche R permet en effet de s'assurer qu'il n'existe qu'un bâtiment A et qu'à chaque étage il n'y a que deux appartements, un côté gauche et un coté droit, si bien que l'appartement de la société Ruben champ de Mars, comme cela figure sur son titre de propriété, est bien celui du 1er étage côté gauche comme l'indique la fiche H2.

Si la fiche H2 ne mentionne pas qu'il s'agit du lot n°14, elle ne mentionne pas non plus, contrairement à ce que soutient l'appelante, qu'il s'agit du lot n°4, la mention "loc 4" sur laquelle elle s'appuie (et non "lot 4"), qui figure tout en haut à gauche de la fiche et hors du champ des rubriques à remplir par le propriétaire correspondant manifestement à un code de l'administration et non à un numéro de lot.

S'agissant de la discordance, dont il est aussi fait état par l'appelante, entre les pièces d'habitation de l'appartement telles que décrites sur la fiche H2 et celles décrites sur le titre de propriété de la société Ruben champ de Mars, outre que les deux descriptions ne sont que peu divergentes, la divergence alléguée n'est pas pertinente dès lors que l'appartement a été acquis en 2017 par la société appelante et qu'il est susceptible d'avoir connu des modifications d'agencement depuis octobre 1970. Une divergence de superficie serait en revanche pertinente, mais elle n'est pas alléguée en l'espèce puisque si la fiche H2 fait état d'une superficie de 42 m², le titre de propriété ne précise pas la superficie du bien.

Il est donc bien démontré en l'espèce que la fiche H2 produite par la Ville de [Localité 5] correspond au local dont est propriétaire la société Ruben champ de Mars et qui a fait l'objet du constat d'infraction. Or, la mention qu'elle contient d'une location et de la perception par le propriétaire d'un loyer au 1er janvier 1970 établit incontestablement l'usage d'habitation au 1er janvier 1970 comme l'a dit le premier juge.

L'appelante soutient à titre subsidiaire que l'infraction n'est pas caractérisée dès lors que l'appartement litigieux a constitué durant la période litigieuse la résidence principale de M. [B] [Y], fils du gérant de la société Ruben champ de Mars.

Selon l'article L.631-7-1 A du code de la construction et de l'habitation, "[...] Lorsque le local à usage d'habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l'article 2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, l'autorisation de changement d'usage prévue à l'article L.631-7 du présent code ou celle prévue au présent article n'est pas nécessaire pour le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile."

Selon l'article 2 de la loi du 6 juillet 1989, la résidence principale est entendue comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l'habitation.

En l'espèce, il y a lieu de relever que c'est la société Ruben champ de Mars qui est propriétaire du local en cause et non son gérant M. [Y] [U], et que la société Ruben champ de Mars n'a pas son siège social dans ce local mais au [Adresse 3] comme cela résulte de son Kbis et ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par son gérant. En outre, et comme le souligne la Ville de [Localité 5], la société Ruben champ de Mars n'a pas pour objet social de mettre son bien à la disposition gratuite du fils de son gérant.

Il ne peut donc être considéré que le local litigieux constitue la résidence principale de la société Ruben champ de Mars, propriétaire du local concerné, ni d'ailleurs la résidence principale de son gérant M. [Y] [U], lequel est domicilié au [Adresse 1] d'après le Kbis de la société Ruben champ de Mars.

Il s'en suit qu'à défaut de propriétaire occupant du local en cause, le fils du gérant ne peut être considéré comme une personne à charge au sens de l'article 2 de la loi du 6 juillet 1989.

En tout état de cause, le premier juge a exactement relevé qu'au vu du nombre de locations de courte durée tel que ressortant des constatations de la Ville de [Localité 5] et non contesté par la société Ruben champ de Mars (279 nuitées en 2018 et 156 nuitées en 2019), qui excède quatre mois par an, l'appartement en cause ne peut être considéré comme étant la résidence principale effective du fils du gérant de la société Ruben champ de Mars.

L'appelante est donc mal fondée à soutenir que l'infraction n'est pas constituée au motif que le local constituerait la résidence principale du fils de son gérant durant la période de locations de courte durée litigieuse.

Sur le changement illicite de l'usage d'habitation sans autorisation, la société Ruben champ de Mars n'élève pas de contestation et le premier juge l'a parfaitement caractérisé au vu des éléments du dossier qu'il a énoncés, retenant à juste titre une période d'infraction de septembre 2017 à mars 2020, non contestée par l'appelante.

Celle-ci argue seulement du montant excessif de l'amende en faisant valoir sa bonne foi (déclaration des locations, méconnaissance de la réglementation), sa collaboration avec la Ville de [Localité 5], la cessation des locations illicites dès le 15 mars 2020 et la conclusion d'un bail meublé d'un an à effet du 10 septembre 2020, l'absence d'enrichissement de la société qui n'a dégagé que 9.678,53 euros de profits alors qu'elle en aurait réalisés pour 16.745,40 euros si elle avait conclu un bail d'habitation meublé.

Toutefois, c'est par une juste appréciation des éléments du dossier et en tenant compte des arguments précédemment exposés de la contrevenante que le premier juge a fixé à 42.000 euros le montant de l'amende, la cour relevant, à l'instar du premier juge, que l'infraction n'a cessé qu'après la délivrance de l'assignation en justice soit un an après que la société Ruben champ de Mars a reçu notification de l'infraction par lettre de la Ville de [Localité 5] du 21 mars 2019 ; que compte tenu du volume des locations de courte durée notamment en 2018 et de la durée de l'infraction, les profits réalisés ont été substantiels même s'ils sont discutés ; que la société Ruben champ de Mars ne justifie pas de difficultés financières pour elle-même ou son gérant ; qu'y ajoutant, la cour relève que le montant de la compensation que la société appelante aurait dû acquitter pour pouvoir se livrer régulièrement à son activité de location de courte durée atteint la somme de 63.000 euros.

L'ordonnance entreprise sera donc aussi confirmée sur le montant de l'amende, de même que sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile dont elle a fait une exacte appréciation.

Partie perdante, l'appelante sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel et à payer à la Ville de [Localité 5] la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

Rejette la demande de radiation de l'appel,

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,

Y ajoutant,

Condamne la société Ruben champ de Mars aux dépens d'appel et à payer à la Ville de [Localité 5] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/01400
Date de la décision : 22/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-22;22.01400 ?
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