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22/09/2022 | FRANCE | N°22/011027

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 22 septembre 2022, 22/011027


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 22/01102 - No Portalis 35L7-V-B7G-CFBAM

Décision déférée à la cour : arrêt du 04 novembre 2021-Cour de cassation

APPELANTE

Madame [M] [L] [I]
[Adresse 1]
[Localité 4]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034<

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INTIMÉE

SELARL MJ et ASSOCIÉS
représentée par Maître [O] [J], société d'exer...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 22/01102 - No Portalis 35L7-V-B7G-CFBAM

Décision déférée à la cour : arrêt du 04 novembre 2021-Cour de cassation

APPELANTE

Madame [M] [L] [I]
[Adresse 1]
[Localité 4]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
Plaidant par Me Denis LALOUX, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

SELARL MJ et ASSOCIÉS
représentée par Maître [O] [J], société d'exercice libéral à responsabilité limitée au capital de 32.928, 99 €, ayant son siège social [Adresse 3], immatriculée au RCS de DIJON sous le numéro 419 349 030,
agissant ès qualités de liquidateur de la liquidation judiciaire de la S.A.S. « ACIERIES DU VAL DE SAONE », connue sous l'enseigne « ACIERIE FONDERIE » au capital de 80.000 €, immatriculée au RCS de DIJON sous le numéro 384 113 106, dont le siège social est [Adresse 2].

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Plaidant par Me Jean-Eudes CORDELIER, avocat au barreau de DIJON

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
Par arrêt du 13 novembre 2007, signifié le 3 décembre 2007 à Mme [M] [I] selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, la cour d'appel de Dijon a, notamment, confirmé le jugement du 26 septembre 2006 sur le principe de la condamnation solidaire de M. [N] et Mme [I] en paiement à la Scp [K] et Thiebaut, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aciérie du Val-de-Saône (ci-après la société AVS), au titre du comblement du passif de ladite société, et l'a infirmé quant au montant de cette condamnation, le réduisant à la somme de 200.000 euros.

A la suite d'une cession de parts entre Maître [K] et Maître [J] le 30 juin 2008 et déposée au greffe du tribunal de commerce de Dijon le 20 août 2008, la Scp [K] et [J] est devenue la Scp [O] [J].

Par ordonnance du 22 octobre 2015, le premier président de la Cour de cassation a constaté la péremption de l'instance ouverte sur pourvoi formé contre l'arrêt du 13 novembre 2007.

Agissant sur le fondement de l'arrêt du 13 novembre 2007, la Scp [O] [J], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société AVS, a fait délivrer à Mme [I], le 20 septembre 2017, un commandement de payer valant saisie immobilière, publié le 31 octobre 2017, visant un bien immobilier lui appartenant et sis à [Localité 4] (Seine-Saint-Denis).

Selon acte d'huissier du 26 décembre 2017, la Scp [O] [J], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société AVS, a assigné Mme [I] à l'audience d'orientation devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bobigny aux fins de voir ordonner la vente forcée du bien visé au commandement.

Le 12 décembre 2018, à la suite d'une modification statutaire, la Scp [O] [J] a évolué en Selarl MJ et Associés.

Par jugement d'orientation du 16 avril 2019, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bobigny a notamment :
– rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de représentation légale du créancier poursuivant,
– constaté que les intérêts légaux ont commencé à courir à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, soit le 30 novembre 2007,
– débouté Mme [I] de l'ensemble de ses autres demandes,
– mentionné le montant de la créance retenu pour 200.000 euros en principal, outre les intérêts légaux à compter du 30 novembre 2007, les accessoires et les frais de saisie immobilière,
– ordonné la vente forcée des biens immobiliers visés au commandement de payer valant saisie,
– fixé l'audience d'adjudication au 16 juillet 2019,
– dit que les dépens suivront le sort des frais taxés.

Selon déclaration du 3 mai 2019, Mme [I] a interjeté appel de ce jugement. Par ordonnance du délégataire du premier président du 10 mai 2019, elle a été autorisée à assigner à jour fixe pour l'audience du 6 novembre 2019. Par acte d'huissier du 29 mai 2019, elle a fait assigner la société MJ et Associés, anciennement Scp [O] [J], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société AVS, pour l'audience de la cour d'appel du 6 novembre 2019. L'exemplaire de cette assignation remis au greffe via le RPVA le 6 juin 2019 ne comportait que trois pages, outre une page sur les modalités de la remise à la Selarl Mj et associés.

A l'audience du 6 novembre 2019 et par avis adressé aux parties, la cour d'appel a soulevé d'office la caducité de l'appel faute de remise par l'appelante, par voie électronique, d'une copie complète de son assignation à jour fixe avant la date de l'audience et a autorisé les parties à déposer une note en délibéré sur ce moyen avant le 13 novembre 2019.

Par arrêt du 28 novembre 2019, cette cour, autrement composée, a déclaré caduque la déclaration d'appel de Mme [I] en date du 3 mai 2019, constatant qu'elle n'était pas valablement saisie.

Par jugement du 23 mars 2021, le juge de l'exécution a ordonné l'adjudication du bien immobilier objet de la saisie au prix de 165.000 euros.

Par arrêt du 4 novembre 2021, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt du 28 novembre 2019.
Pour statuer ainsi, la Cour de cassation a dit que la cour d'appel avait violé l'article 922 du code de procédure civile en constatant la caducité de l'appel au motif que Mme [I] avait remis au greffe avant la date de l'audience une copie incomplète de l'assignation à jour fixe, que cette copie ne comprenait notamment pas le dispositif de l'assignation de sorte que la cour n'était pas valablement saisie, alors que l'assignation remise au greffe était affectée d'un vice de forme susceptible d'entraîner sa nullité sur la démonstration d'un grief par l'intimée, et que la cour ne pouvait ainsi prononcer la caducité de la déclaration d'appel sans constater, le cas échéant, au préalable, la nullité de cet acte.

Par déclaration du 21 janvier 2022, Mme [I] a saisi la cour d'appel de renvoi. Elle a été autorisée à assigner à jour fixe par ordonnance du 26 janvier 2022 pour l'audience du 29 juin 2022. Elle a fait assigner pour ce jour la Selarl MJ et Associés, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société AVS, par acte d'huissier du 3 février 2022.

Par dernières conclusions signifiées le 20 juin 2022, Mme [I] demande à la cour de :
– prononcer l'annulation du jugement d'adjudication du 23 mars 2021 au visa de l'article 625 du code de procédure civile et par suite de la cassation de l'arrêt rendu le 28 novembre 2019 statuant sur l'appel du jugement d'orientation ;
– déclarer sa déclaration d'appel du 3 mai 2019 recevable et bien fondée ;
– infirmer le jugement d'orientation du 16 avril 2019 ;
– prononcer la nullité de la procédure de saisie immobilière ;
– ordonner la mainlevée de la saisie immobilière ;
– « condamner la société MJ et Associés, venant aux droits de la Scp [O] [J], ès-qualités de liquidateur de la société AVS ' » (manque l'objet de la condamnation) ;
subsidiairement, sur le montant de la créance,
– fixer la créance à la somme de 172.910,14 euros ;
en tout état de cause,
– condamner la société MJ et Associés ès-qualités à lui payer la somme de 8.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société MJ et Associés ès-qualités aux entiers dépens, directement recouvrables par la Scp Jeanne Baechlin, avocats.

Par conclusions signifiées le 4 avril 2022, la société MJ et Associés ès-qualités de liquidateur de la SAS AVS, demande à la cour de renvoi de :
– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
– condamner Mme [I] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [I] aux entiers dépens.

MOTIFS

Sur l'annulation du jugement d'adjudication du 23 mars 2021

L'appelante soutient que le jugement d'adjudication procède de l'autorisation donnée par le juge de l'exécution, ou son juge d'appel, dans le jugement d'orientation ; que, dès lors que le jugement d'orientation était frappé d'appel, la procédure d'adjudication ne pouvait prospérer ; que la Cour de cassation l'ayant restaurée dans la recevabilité de son appel, le jugement d'adjudication doit donc être annulé.

Aux termes de l'article R. 322-28 du même code, la vente forcée ne peut être reportée que pour un cas de force majeure ou sur la demande de la commission de surendettement formée en application des articles L. 722-4 ou L. 721-7 du code de la consommation.

Par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article R. 322-19 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution que, faute par la cour saisie d'un appel du jugement d'orientation de statuer dans le délai d'un mois avant la date prévue pour l'ajudication, le juge de l'exécution peut, à la demande du seul créancier poursuivant, reporter la date de vente forcée mais que, sauf les cas visés à l'article R. 322-28 ou sursis à l'exécution ordonné par le premier président de la cour d'appel interdisant de tenir l'audience d'adjudication, si le créancier requiert la vente forcée à l'audience d'adjudication, le juge de l'exécution est tenu d'y procéder dans la mesure où le jugement d'orientation est, de plein droit, assorti de l'exécution provisoire.

Il résulte de ces dispositions combinées avec celles de l'article R. 322-27 alinéa 1er du même code, selon lesquelles, au jour indiqué, le créancier poursuivant, à défaut, tout créancier inscrit, alors subrogé dans les poursuites, sollicite la vente, que le créancier n'est nullement tenu, en cas d'appel, de solliciter le report de l'audience d'adjudication. Si le créancier ne requiert pas la vente à l'audience d'adjudication et ne sollicite pas le report de la vente, le juge ne peut que constater la caducité du commandement, mais ne peut ordonner d'office le report de la vente.

En l'espèce, la date de l'audience d'adjudication initialement fixée par le jugement d'orientation au 16 juillet 2019 a été reportée à plusieurs reprises, dans un premier temps en raison de l'appel interjeté, dans un second temps en raison de la crise sanitaire. La cour d'appel a statué sur l'appel formé contre le jugement d'orientation par arrêt du 28 novembre 2019 prononçant la caducité de l'appel, même si cet arrêt a été frappé de pourvoi, puis cassé par arrêt du 4 novembre 2021. En définitive, un jugement d'adjudication a été rendu à l'audience du 23 mars 2021.

Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a nullement lieu d'annuler le jugement d'adjudication rendu le 23 mars 2021 au motif que le jugement d'orientation n'était pas définitif.

Sur l'appel du jugement d'orientation

Mme [I] est appelante d'un jugement du 16 avril 2019, ayant orienté la procédure en vente forcée d'un immeuble lui appartenant. Pour statuer comme il l'a fait, le juge de l'exécution a constaté que l'assignation comme le commandement de payer valant saisie immobilière avaient été régulièrement délivrés. Il a écarté le moyen tiré de la nullité de la signification du titre exécutoire, l'analysant comme une exception de nullité pour irrégularité de forme au sens de l'article 112 du code de procédure civile et nécessitant la démonstration d'un grief, grief manquant en fait, les parties, toutes dûment représentées à l'audience de la cour d'appel, n'ayant pu se méprendre sur la qualité de mandataire liquidateur de la société AVS en laquelle la Scp [K] et [J] agissait. Ensuite, sur le montant de la créance, il a estimé justifiée la majoration du taux d'intérêt légal de 5 points dès lors que la signification du titre exécutoire était régulière, mais a fixé le point de départ des intérêts à la date de la signification de l'arrêt d'appel infirmatif quant au montant des condamnations, en application de l'article 1231-7 du code civil.
Sur la régularité de la signification du titre exécutoire

– Sur l'absence de mention de la qualité du créancier à l'acte de signification

La signification du titre exécutoire, à savoir l'arrêt du 13 novembre 2007, a été faite à la requête de la Scp [K] et [J] agissant poursuites et diligences et non pas ès-qualités de mandataire liquidateur de la société AVS.

L'appelante soutient que le moyen soulevé ne s'analyse pas comme une exception de procédure, mais comme une irrégularité de fond au sens de l'article 117 du code de procédure civile, la Cour de cassation ayant clairement énoncé dans un arrêt de principe du 5 septembre 2019 que l'exception de nullité de l'acte de signification d'une décision de justice, invoquée pour contester le caractère exécutoire de la décision, constitue non une exception de procédure mais une défense au fond. Elle en déduit que la signification de l'arrêt, faite à la requête de la Scp [K] et [J] agissant poursuites et diligences et non pas ès-qualités de mandataire liquidateur de la société AVS, est entachée d'une irrégularité de fond, peu important l'absence de démonstration d'un grief.

L'intimée réplique que certes, l'arrêt précité précise que la nullité invoquée, qui tend à contester le caractère exécutoire de la décision de justice, constitue non une exception de procédure mais une défense au fond, la démonstration d'un grief n'étant alors plus nécessaire, mais que la régularité des actes d'huissier, et notamment des notifications, est régie par les articles 649 et 694 du code de procédure civile, lesquels renvoient aux dispositions gouvernant la nullité des actes de procédure ; que dès lors, la démonstration d'un grief est une condition préalable au prononcé de la nullité de tout acte de notification, ce que confirment la jurisprudence et la doctrine.

Les exceptions de nullité qui sont régies par les articles 112 et suivants du code de procédure civile sont les exceptions tendant à voir déclarer nul un acte de la procédure dont la juridiction est saisie et non pas un acte afférent à une autre procédure. C'est pourquoi le moyen tiré de l'irrégularité de la signification d'une décision de justice tendant à contester le caractère exécutoire de la décision servant de fondement à une mesure d'exécution constitue une défense au fond et non une exception de procédure. (Civ. 2ème, 5 sept. 2019, no17-28.471).

En l'espèce, la demande d'annulation de la signification à Mme [I] de l'arrêt du 13 novembre 2007 tend bien à contester le caractère exécutoire de cette décision sur le fondement de laquelle la saisie immobilière a été pratiquée. L'irrégularité soulevée s'analyse donc en une défense au fond et nullement comme une exception de procédure tendant à voir constater la nullité de cette signification pour irrégularité de fond au sens de l'article 117 du code de procédure civile, contrairement à ce que soutient l'appelante.

Cependant, le moyen soulevé n'en repose pas moins sur la constatation préalable de la nullité d'un acte de notification par huissier, assujetti, selon les dispositions combinées des articles R. 121-5 du code des procédures civiles d'exécution, 649 et 694 du code de procédure civile, au régime des nullités des actes de procédure, gouverné par les articles 112 et suivants du code de procédure civile.

Il résulte de ce qui précède que la demande, tendant à voir prononcer la nullité de la signification du 3 décembre 2007, doit être examinée à la lumière des dispositions des articles 694 et 112 et suivants du code de procédure civile. Le fait que l'huissier de justice ait omis de préciser sur l'acte de signification la qualité en laquelle la Scp [K] et [J] lui avait donné mandat de signifier l'arrêt, procède manifestement d'une omission matérielle, à tout le moins constitue un vice de forme et non pas un vice de fond, les irrégularités de fond, qui sont limitativement énumérés à l'article 117 du code de procédure civile, ne comprenant pas le défaut de mention de la qualité du créancier sur un acte de signification.

Or s'agissant d'un vice de forme, il appartient à l'appelante de démontrer le grief qu'il lui a causé, conformément aux dispositions de l'article 114 alinéa 2 du code de procédure civile, selon lesquelles la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public. Or l'arrêt du 13 novembre 2007 ayant été prononcé contradictoirement à l'encontre de Mme [I] au bénéfice de la Scp [K] et [J], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société AVS, et ayant confirmé sur le principe une condamnation en comblement du passif de cette société à son encontre, Mme [I] ne pouvait se méprendre sur la qualité de mandataire liquidateur de celle-ci en laquelle la Scp [K] et [J] lui a fait signifier l'arrêt par acte d'huissier du 3 décembre 2007. Au demeurant, Mme [I] n'allègue aucun grief, lequel est d'autant moins caractérisé qu'elle a pu former le 28 janvier 2008, soit dans le délai légal, un pourvoi en cassation, puisque celui-ci a été radié par ordonnance du 6 novembre 2008 puis déclaré périmé par ordonnance du 22 octobre 2015 en application des dispositions des articles 386 et 1009-2 du code de procédure civile, mais non pas déclaré irrecevable.

Par conséquent, en l'absence de démonstration d'un grief causé par l'absence de précision de la qualité en laquelle la Scp [K] et [J] a donné mandat à l'huissier de justice pour signifier à Mme [I] l'arrêt du 13 novembre 2007, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que le titre exécutoire avait été valablement signifié à cette dernière préalablement à l'introduction de la saisie immobilière et ainsi rejeté les demandes d'annulation du commandement de payer valant saisie immobilière ainsi que l'assignation devant le juge de l'exécution.

– Sur l'absence de mention d'une expédition revêtue de la formule exécutoire

L'appelante fait encore grief à l'intimée de lui avoir signifié une simple copie de l'arrêt du 13 novembre 2007 et non l'expédition exécutoire de celui-ci, en violation de l'article 502 du code de procédure civile.

L'intimée réplique qu'aucun élément ne permet à l'appelante d'affirmer que seule une copie non exécutoire de l'arrêt lui aurait été signifiée par l'huissier de justice et soutient justifier de ce que la copie signifiée comportait bel et bien la formule exécutoire apposée par la cour.

Si l'article 502 du code de procédure civile prévoit que nul jugement ne peut être mis à exécution que sur présentation d'une expédition revêtue de la formule exécutoire, aucun texte n'impose à l'huissier de justice de mentionner sur l'acte de signification que la copie qu'il signifie est elle-même revêtue de la formule exécutoire. Au surplus, dans l'acte de signification litigieux, l'huissier de justice indique signifier un arrêt contradictoire rendu par la cour d'appel de Dijon en date du 13/11/2007 et en laisser copie, sans que l'appelante ne démontre que l'arrêt lui-même, dont il laissait copie, n'ait pas été revêtu de la formule exécutoire, alors que c'est au moment où le créancier lui donne mandat aux fins d'exécution du titre exécutoire que l'huissier de justice doit réclamer une expédition revêtue de la formule exécutoire. Ce moyen doit donc être écarté.

Sur les prétentions subsidiaires relatives au montant de la créance

Dans le dispositif du jugement d'orientation du 16 avril 2019, le juge de l'exécution a retenu la créance de la Scp [O] [J], ès-qualités de mandataire liquidateur de la société AVS, à hauteur d'une « somme de 200.000 euros en principal, outre les intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2007, les accessoires et les frais de saisie immobilière ».

– Sur le point de départ des intérêts

Mme [I] fait valoir que le décompte des intérêts présenté par la société MJ et Associés est inexact en ce qu'il fait partir les intérêts à compter du jugement et non, comme l'a retenu le premier juge, à compter de l'arrêt réformatif.

La société MJ et Associés soutient, en sens inverse, que les intérêts ont couru à compter du jugement de première instance, confirmé par la cour d'appel sauf sur le quantum.

Aux termes de l'article 1231-7 alinéa 2 du code civil, en cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l'indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d'appel. Le juge d'appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa.

L'arrêt du 13 novembre 2007 n'ayant pas confirmé purement et simplement le jugement entrepris, mais l'ayant infirmé quant au montant de la condamnation en comblement de passif, il ne s'agit donc pas d'une confirmation pure et simple au sens de l'article 1231-7 précité. Par conséquent, en l'absence de disposition contraire de l'arrêt relative au point de départ des intérêts, les intérêts au taux légal n'ont couru qu'à compter de de la date de l'arrêt d'appel, soit du 13 novembre 2007. Le jugement du juge de l'exécution, qui avait fixé le point de départ au 30 novembre 2007, date de la signification de l'arrêt, sera réformé sur ce point.

– Sur la majoration du taux d'intérêt

L'appelante contestant la régularité de la signification du 3 mai 2019, elle considère que la majoration du taux d'intérêt à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification, ne s'applique pas.

La signification du titre exécutoire ayant ci-dessus été jugée régulière, il y a lieu d'écarter ce chef de contestation.

– Sur les frais de recouvrement

L'appelante conteste, en l'absence de justificatifs, les frais suivants :
– dépens tribunal de commerce : 199,59 euros
– frais d'hypothèque : 14.082,73 euros
– frais d'hypothèque définitive : 812,91 euros
– état de frais de Me Gerbay : 8213,89 euros
– frais de procédure : 3405,39 euros
total : 26714,51 euros

L'intimée soutient avoir adressé tant à Mme [I] qu'à M. [N] le décompte des frais.

Cependant l'intimée, sur qui repose la charge de la preuve, ne produit aucune pièce justificative des frais contestés. Par conséquent, il y a lieu de confirmer de ce chef, le jugement entrepris qui ne les a pas retenus expressément, hormis les frais de saisie immobilière.

– Sur les acomptes versés par M. [N], codébiteur solidaire

L'appelante fait valoir à ce titre que le premier juge n'a pas tenu compte, pour la fixation de la créance retenue, des acomptes versés par M. [N], son codébiteur solidaire, pour 32.089,59 euros. Elle en déduit que la créance doit être réduite à 172.910,14 euros, admettant implicitement être redevable de l'indemnité mise à charge en application de l'article 700 du code de procédure civile par la cour d'appel de Dijon.

Or, pas davantage devant la cour qu'en première instance, l'appelante ne justifie du versement de ces acomptes par son codébiteur solidaire.

Par suite, il convient de fixer la créance détenue par la société MJ et Associés ès-qualités à la somme de :
– principal : 200.000
– article 700 NCPC : 5000
– dépens d'appel : 8,84
– signification d'arrêt du 30/11/2007 : 80,60
– article 700 CPC (ordonnance Cour de cassation 22/10/2015) : 1500
– droit art. A444-31 Ccom : 660
total : 207.249,44 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt réformatif du 13 novembre précédent.

Sur les demandes accessoires

L'issue du litige justifie la condamnation de Mme [I] aux dépens d'appel.

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il y a lieu de la condamner à payer à l'intimée la somme de 2000 euros.

PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt no1010 F-B rendu le 4 novembre 2021 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation,

Dit n'y avoir lieu d'annuler le jugement d'adjudication du 23 mars 2021 ;

Confirme le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bobigny du 16 avril 2019, sauf en ce qui concerne le montant de la créance de la Selarl MJ et Associés ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aciéries du Val de Saône et sur le pint de départ des intérêts ;

Statuant à nouveau de ce seul chef,

Fixe la créance de la Selarl MJ et Associés ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aciéries du Val de Saône à la somme de 207.249,44 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2007,

Et y ajoutant,

Condamne Mme [M] [I] à payer à la Selarl MJ et Associés ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Aciéries du Val de Saône, la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [I] aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 22/011027
Date de la décision : 22/09/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Bobigny, 16 avril 2019


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-09-22;22.011027 ?
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