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22/09/2022 | FRANCE | N°21/177657

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 22 septembre 2022, 21/177657


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/17765 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEOY7

Décision déférée à la cour :
jugement du 21 septembre 2021-juge de l'exécution de CRETEIL-RG no 21/05233

APPELANT

DIRECTEUR DEPARTEMENTAL DES FINANCES PUBLIQUES DU VAL-DE-MARNE
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représenté par Me Laurine

SALOMONI de la SARL FRICAUDET LARROUMET SALOMONI, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 333

INTIMÉ

Monsieur [F] [W]
[Adresse 2]
[L...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/17765 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEOY7

Décision déférée à la cour :
jugement du 21 septembre 2021-juge de l'exécution de CRETEIL-RG no 21/05233

APPELANT

DIRECTEUR DEPARTEMENTAL DES FINANCES PUBLIQUES DU VAL-DE-MARNE
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représenté par Me Laurine SALOMONI de la SARL FRICAUDET LARROUMET SALOMONI, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 333

INTIMÉ

Monsieur [F] [W]
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représenté par Me Gwenaël SAINTILAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0664

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Aux fins de recouvrement d'une somme de 393.433,06 euros au titre d'impôts sur les revenus des années 2014, 2015 et 2016, le responsable du pôle de recouvrement spécialisé du Val-de-Marne (ci-après le PRS) a notifié le 5 novembre 2020 à la Sacem, une saisie administrative à tiers détenteur au préjudice de M. [F] [W]. La saisie a été dénoncée le même jour à M. [W] par lettre recommandée avec accusé de réception.

Par lettre du 26 avril 2021, M. [W] a formé opposition à cette procédure de recouvrement auprès de l'administration fiscale.

Par acte d'huissier du 9 juillet 2021, M. [W] a fait assigner le directeur départemental des finances du Val-de-Marne (ci-après le DDF) devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Créteil aux fins de voir déclarer irrégulière la saisie à tiers détenteur, en ordonner la mainlevée et le remboursement de toutes les sommes saisies.

Par jugement du 21 septembre 2021, le juge de l'exécution a :
– annulé la saisie administrative à tiers détenteur no20 00001 pratiquée entre les mains de la Sacem le 5 novembre 2020 ;
– ordonné la restitution des sommes saisies sur le fondement de cette saisie ;
– débouté M. [W] de sa demande de mainlevée ;
– condamné le DDFP du Val-de-Marne à payer à M. [W] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamné le DDFP du Val-de-Marne au paiement des dépens.

Par déclaration du 11 octobre 2021, le DDFP du Val-de-Marne a interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions du 25 mai 2022, le DDFP du Val-de-Marne demande à la cour de :
– infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté M. [W] de sa demande de mainlevée ;
statuant à nouveau,
à titre principal,
– déclarer irrecevable M. [W] en son action ;
à titre subsidiaire,
– débouter M. [W] de sa demande de mainlevée de la saisie administrative à tiers détenteur no 20 00001 pratiquée entre les mains de la Sacem le 5 novembre 2020 ;
en tout état de cause,
– condamner M. [W] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamner M. [W] aux dépens de première instance et d'appel.

L'appelant fait valoir que :
– la saisie administrative à tiers détenteur effectuée entre les mains de la Sacem le 5 novembre 2020 est régulière comme ayant été dénoncée le jour même à M. [W] par lettre recommandée avec accusé de réception retournée avec la mention « pli avisé et non réclamé » ; si M. [W] n'en a pas pris connaissance, c'est faute par lui d'avoir fait preuve de diligences, dès lors que l'avis de passage, dont il ne lui appartient pas de rapporter la preuve du dépôt, mentionnait nécessairement les informations relatives aux modalités de retrait du pli ;
– le signataire de la saisie administrative à tiers détenteur était compétent ainsi qu'en atteste l'arrêté versé aux débats portant nomination de celui-ci es qualités de chef du service comptable responsable du PRS du Val-de-Marne ;

– le délai de deux mois pour faire opposition à compter de la dénonciation de la saisie administrative à tiers détenteur était expiré à la date de la contestation formée le 26 avril 2021 par M. [W] de sorte que celle-ci est irrecevable comme ne respectant pas le formalisme prescrit aux articles L.281, R*281-1 et suivants du livre des procédures fiscales ; en l'absence de contestation par M. [W] de son adresse, le fait que la lettre recommandée ait été retournée avec la mention « pli avisé non réclamé » est sans effet sur la computation des délais.

Par dernières conclusions du 9 décembre 2021, M. [W] demande à la cour de :
– le dire recevable et bien fondé en ses demandes ;
– rejeter l'intégralité des demandes du DDFP du Val-de-Marne ;
en conséquence,
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré à la cour ;
– condamner le DDFP du Val-de-Marne à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamner le DDFP du Val-de-Marne aux entiers dépens.

L'intimé soutient que :
– rien ne permet de vérifier la signature et la qualité du signataire de la saisie à tiers détenteur ;
– en l'absence de production de l'avis de passage, le DDFP ne prouve pas l'effectivité du dépôt dans sa boîte aux lettres de l'avis l'informant de la tentative de remise, de la mise en instance du pli, du lieu où ce pli pouvait être retiré, enfin du délai dont il disposait pour le faire ; il n'a été informé de la procédure que par simple mail ;
– compte tenu de l'irrégularité de la procédure de recouvrement, les sommes saisies à hauteur de 14.450,02 euros à la date de l'opposition doivent lui être restituées, les impositions visées par cette saisie ayant été par ailleurs intégralement contestées par voie de réclamation.

MOTIFS

Pour annuler la saisie à tiers détenteur litigieuse, le juge de l'exécution a retenu que le DDFP du Val-de-Marne, absent et non représenté à l'audience, ne rapportait pas la preuve de la notification faite à M. [W] de l'avis à tiers détenteur.

Sur la recevabilité de l'opposition à saisie à tiers détenteur formée par M. [W]

Selon l'article L. 262 1. du livre des procédures fiscales, les créances dont les comptables publics sont chargés du recouvrement peuvent faire l'objet d'une saisie administrative à tiers détenteur notifiée aux dépositaires, détenteurs ou débiteurs de sommes appartenant ou devant revenir aux redevables. (?) L'avis de saisie administrative à tiers détenteur est notifié au redevable et au tiers détenteur. L'exemplaire qui est notifié au redevable comprend, sous peine de nullité, les délais et voies de recours.

Aux termes de l'article L. 281 alinéa 1er du livre des procédures fiscales, les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, condamnations pécuniaires et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites.

L'alinéa 3 de ce texte prévoit que les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance ; qu'elles peuvent porter :
1o Sur la régularité en la forme de l'acte ;
2o A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée ;
que les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1o devant le juge de l'exécution.

Aux termes de l'article R*281-1 du même livre, les contestations relatives au recouvrement prévues par l'article L. 281-1 peuvent être formulées par le redevable lui-même ou la personne tenue solidairement ou conjointement.
Elles font l'objet d'une demande qui doit être adressée, appuyée de toutes les justifications utiles, au chef de service compétent suivant :
a) Le directeur départemental ou régional des finances publiques du département dans lequel a été prise la décision d'engager la poursuite ou le responsable du service à compétence nationale si le recouvrement incombe à un comptable de la direction générale des finances publiques ; (...)

L'article R*281-3-1 dispose encore que la demande prévue à l'article R.*281-1 doit, sous peine d'irrecevabilité, être présentée dans un délai de deux mois à partir de la notification :
a) De l'acte de poursuite dont la régularité en la forme est contestée ;
b) A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, de tout acte de poursuite si le motif invoqué porte sur l'obligation au paiement ou sur le montant de la dette ;
c) A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, du premier acte de poursuite permettant de contester l'exigibilité de la somme réclamée.

Il résulte de l'ensemble de ces textes que la saisie à tiers détenteur devait être notifiée à M. [W] à peine de nullité de la procédure de recouvrement, comme l'a rappelé le premier juge, et que, à peine d'irrecevabilité, M. [W] devait adresser sa contestation au DDFP du Val de Marne dans le délai de deux mois à compter de la notification de la saisie à tiers détenteur. L'intimé soutient n'en avoir pas reçu notification autrement que par courriel.

Cependant, à hauteur d'appel, le DDFP justifie de la notification de la saisie à tiers détenteur par la production de l'avis de réception du 12 novembre 2020 de la lettre recommandée du 5 novembre précédent. Il en ressort que le destinataire a été avisé et n'a pas réclamé le pli. Or M. [W] ne conteste pas qu'il demeurait à l'adresse du [Adresse 2] à [Localité 3] à cette date. Le retour à l'expéditeur d'un tel accusé de réception atteste de ce que l'adresse de l'intéressé est connue de la poste (à défaut, aurait été cochée la case « destinataire inconnu à l'adresse ») et qu'un avis de passage a été laissé dans sa boîte aux lettres. Le rappel des modalités pour retirer le pli figurent sur l'avis de passage constitué de la partie du bordereau de recommandé que l'appelant n'est pas en mesure, par conséquent, de produire devant la cour. En tout état de cause, M. [W] n'apporte pas la preuve contraire de ce que cet avis de passage lui a été laissé dans sa boîte aux lettres conformément aux obligations de la Poste.

Par conséquent, la notification de la saisie à tiers détenteur étant régulièrement intervenue le 12 novembre 2020, l'opposition adressée par M. [W] par lettre recommandée avec avis de réception le 26 avril 2021, soit au delà du délai légal de deux mois, doit être déclarée irrecevable. Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.

Sur les demandes accessoires

L'issue du litige commande la condamnation de M. [W] aux dépens de première instance et d'appel.

En revanche, compte tenu de ce que le DDFP du Val-de-Marne n'a pas fait connaître en première instance les éléments utiles à la solution du litige, il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Déclare irrecevable la contestation de la saisie à tiers détenteur no20 00001 formée par M. [F] [W] ;

Déboute les parties de leurs demandes respectives de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [F] [W] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/177657
Date de la décision : 22/09/2022
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-09-22;21.177657 ?
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