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22/09/2022 | FRANCE | N°20/18623

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 22 septembre 2022, 20/18623


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2022



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/18623

N° Portalis 35L7-V-B7E-CC2VC



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Novembre 2020 -TJ de PARIS - RG n° 18/10518



APPELANTE



Compagnie d'assurance GROUPAMA D'OC

[Adresse 7]

[Localité 9]

représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

substituée par Me Emmanuelle FARTHOUAT-FALEK, avocat au barreau de PARIS



INTIMES



M...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2022

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/18623

N° Portalis 35L7-V-B7E-CC2VC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Novembre 2020 -TJ de PARIS - RG n° 18/10518

APPELANTE

Compagnie d'assurance GROUPAMA D'OC

[Adresse 7]

[Localité 9]

représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

substituée par Me Emmanuelle FARTHOUAT-FALEK, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Madame [G] [J] veuve [K]

[Adresse 11]

[Localité 2]

née le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 12] (12)

représentée par Me Jean-Marc PEREZ de la SELARL AVOX, avocat au barreau de PARIS, toque : J109

assistée par Me Anne-Sophie DUPIRE, avocat au barreau de NANTES

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TARN ET DE L'AVEYRON

[Adresse 8]

[Localité 10]

n'a pas constitué avocat

RSI MIDI-PYRENEES

[Adresse 1]

[Localité 9]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre, et devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre assesseur, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Sophie BARDIAU, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

ARRÊT :

- Défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 14 juillet 2015 à [Localité 13] (87), alors qu'elle circulait au volant d'un véhicule assuré auprès de la société Groupama d'Oc dans lequel avaient pris place son mari, [P] [K], et ses trois enfants mineurs, [R], [F] et [D] [K], Mme [G] [J] épouse [K] a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué un véhicule conduit par Mme [X] et assuré auprès de la société Mutuelles de Poitiers Assurances (la société Mutuelle de Poitiers).

A la suite de l'accident, [P] [K] est décédé et Mme [G] [K] a été blessée.

Mme [G] [K] a fait l'objet d'une expertise amiable réalisée par le Docteur [A], désigné par la société Groupama d'Oc et par son médecin-conseil, le Docteur [V], lesquels ont chacun établi un rapport en date 19 avril 2018 et du 28 mars 2019.

Par actes d'huissier en date des 6, 7 et 8 août 2018, Mme [G] [K] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris, la société Mutuelle de Poitiers et la société Groupama SA en indemnisation de ses préjudices, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn et de l'Aveyron (la CPAM) et de la caisse du régime social des indépendants Midi-Pyrénées (le RSI).

La société Groupama d'Oc est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement du 10 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :

reçu l'intervention volontaire de la société Groupama d'Oc,

mis hors de cause la société Groupama SA,

dit que le véhicule conduit par Mme [X] assuré auprès de la société Mutuelle de Poitiers est impliqué dans l'accident du 14 juillet 2015 à [Localité 13],

dit que Mme [G] [K] a commis une faute cause directe et exclusive de son dommage, de nature à exclure son droit à indemnisation sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985,

débouté Mme [G] [K] de sa demande d'indemnisation sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985,

mis hors de cause la société Mutuelle de Poitiers,

débouté la société Groupama d'Oc et Mme [G] [K] de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Mutuelle de Poitiers,

déclaré la société Groupama d'Oc tenue à indemniser l'intégralité des préjudices subis par Mme [G] [K], en qualité de victime directe ainsi que de victime par ricochet, sur le fondement du contrat d'assurance « conducteur automobile » souscrit auprès de cette compagnie d'assurances,

condamné la société Groupama d'Oc à payer à Mme [G] [K] à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, les sommes suivantes :

- en sa qualité de victime directe de l'accident :

- dépenses de santé restées à charge : 40 euros

- frais divers : 600 euros

- assistance par tierce personne : 4 361,79 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 1 715 euros

- souffrances endurées : 8 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 500 euros

- déficit fonctionnel permanent : 5 780 euros,

- en sa qualité de victime par ricochet de l'accident qui a occasionné le décès de son époux, [P] [K] :

- préjudice d'affection : 35 000 euros

- préjudice économique lié à la perte de revenus de [P] [K] : 434 821.12 euros

- préjudice économique lié à la perte d'aide de [P] [K] pour l'éducation de leurs enfants : 177 937, 50 euros

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

déclaré le présent jugement commun à la CPAM et au RSI,

condamné la société Groupama d'Oc aux dépens et à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

- à Mme [G] [K] la somme de 3 500 euros

- à la société Mutuelle de Poitiers la somme de 1 500 euros

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile,

ordonné l'exécution provisoire du jugement à concurrence des deux tiers de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration en date du 17 décembre 2020, la société Groupama d'Oc a interjeté appel de ce jugement :

- en ce qu'il l'a condamnée à indemniser l'entier préjudice subi par Mme [G] [K] des suites de l'accident de la circulation du 14 juillet 2015 tant en qualité de victime directe qu'en qualité de victime indirecte suite au décès de son époux

- en ce qu'il l'a ainsi condamnée à payer à Mme [G] [K] en sa qualité de victime directe les sommes de 40 euros au titre des dépenses de santé restées à charge, 600 euros au titre des frais divers, 4 361,79 euros au titre de l'assistance par tierce personne, 1 715 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, 8 000 euros au titre des souffrances endurées, 500 euros au titre de préjudice esthétique temporaire, et du déficit fonctionnel permanent,

- en ce qu'il l'a condamnée à payer Mme [G] [K] en sa qualité de victime par ricochet, les sommes de 35 000 euros au titre de son préjudice d'affection, de 434 821,12 euros au titre du préjudice économique lié à la perte de revenus et de 177 937,50 euros au titre du préjudice économique lié à la perte de l'aide de [P] [K] pour l'éducation de leurs enfants, ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- en ce qu'il l'a condamnée aux dépens et à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile avec exécution provisoire du jugement à concurrence des deux tiers de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions de la société Groupama d'Oc, notifiées le 12 janvier 2022, aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Vu les dispositions de l'article 1353 du code civil et les articles L. 112-1 et suivants du code des assurances,

Vu les conditions générales et personnelles du contrat d'assurance souscrite par [P] [K] auprès de la société Groupama d'Oc,

- juger que ce contrat n'accorde pas à Mme [G] [K] de garantie pour l'indemnisation du préjudice d'affection et des préjudices économiques liés à la perte de revenus ainsi qu'à la disparition de l'aide de son mari, consécutives à son décès,

- juger que Mme [G] [K] est défaillante à établir qu'elle serait bénéficiaire d'un autre contrat que le contrat classique dit « conduire » souscrit le 12 août 2011,

- juger que la seule garantie contractuelle mobilisable est celle de la garantie « accident corporel du conducteur » (page 19 des conditions générales du contrat et conditions personnelles),

En conséquence,

- infirmer le jugement du 10 novembre 2020 en ce qu'il a condamné la société Groupama d'Oc à indemniser Mme [G] [K] des chefs de préjudice d'affection, du préjudice économique résultant de la perte des revenus de son mari décédé et du préjudice économique résultant de l'aide de son mari à l'éducation et l'entretien des enfants sur le fondement du contrat «conduire»,

En conséquence,

- débouter Mme [G] [K] de ses demandes à l'encontre de la société Groupama d'Oc pour ces chefs de préjudice,

-infirmer le jugement dans ses dispositions concernant le préjudice corporel direct de Mme [G] [K],

Statuant à nouveau,

- déclarer les offres de la société Groupama d'Oc satisfactoires concernant la réparation du préjudice corporel direct de Mme [G] [K] au titre de sa garantie contractuelle « accident corporel conducteur », à savoir 13 135 euros (sous déduction de la créance des organismes sociaux),

- constater en tant que de besoin que la garantie « accident corporel du conducteur » comporte une limitation de garantie à hauteur de 189 365,00 euros et que, quelle que soit la nature des sommes qui pourront être allouées à Mme [G] [K], celles-ci ne pourront dépasser ce montant à l'égard de la société Groupama d'Oc,

Subsidiairement, et en tout état de cause,

Vu la loi du 5 juillet 1985 et ses articles 3, 4, 6,

- juger que les fautes commises par Mme [G] [K], notamment d'avoir «déboîté» de son couloir de circulation pour aller heurter le véhicule circulant en sens inverse, excluent l'indemnisation des dommages qu'elle a subis en application des articles 3, 4 et 6 de la loi du 5 juillet 1985,

En conséquence,

- la débouter de toutes ses demandes à l'encontre de la société Groupama d'Oc,

Infiniment subsidiairement, pour le cas où la cour déclarait recevables et fondées les demandes d'indemnisation de Mme [G] [K],

- réduire son préjudice d'affection à la somme de 20 000 euros,

- la débouter de ses demandes de préjudices économiques consécutifs à la perte des revenus de son mari et à la disparition de son aide pour l'éducation des enfants,

Plus généralement,

- la débouter de son appel incident,

- condamner Mme [G] [K] à payer à la société Groupama d'Oc la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- condamner Mme [G] [K] en tous les dépens de la présente instance en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les conclusions de Mme [G] [K], notifiées le 3 février 2022, aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Vu la loi du 5 juillet 1985,

Vu le contrat d'assurance du véhicule conduit par Mme [G] [K],

confirmer le jugement du 10 novembre 2020 en ce qu'il a condamné la société Groupama d'Oc à garantir Mme [G] [K], en vertu de la garantie personnelle du conducteur figurant dans son contrat d'assurance, de son préjudice, tant en sa qualité de victime directe que de victime par ricochet de l'accident du 14 juillet 2015,

confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à Mme [G] [K] :

- en sa qualité de victime directe :

- dépenses de santé : 40 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 1 715,80 euros

- dommage esthétique temporaire : 500 euros

- frais divers : 600euros

- déficit fonctionnel permanent : 5 780 euros,

- en sa qualité de victime indirecte :

- préjudice d'affection : 35 000 euros

- au titre des frais irrépétibles la somme de 3 500 euros,

infirmer le jugement en ce qu'il a alloué des sommes inférieures à celles sollicitées par Mme [G] [K] et le réformer, en lui allouant sur les postes suivants :

- en sa qualité de victime directe :

- souffrances endurées : 15 000 euros

- assistance par tierce personne : 12 748,24 euros,

- en sa qualité de victime indirecte:

- préjudice économique lié à la perte des revenus que procurait [P] [K] : 885 661,96 euros

- perte économique liée à la substitution de [P] [K] pour s'occuper des enfants : 434 202,30 euros,

En tout état de cause,

condamner la société Groupama d'Oc à verser en cause d'appel à Mme [G] [K] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société Groupama d'Oc en tous les dépens,

débouter la société Groupama de l'ensemble de ses demandes.

La RSI et la CPAM, auxquelles la déclaration d'appel a été signifiée par actes d'huissier de justice en date du 10 février 2021 et du 19 février 2021, délivrés respectivement à personne habilitée et suivant les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, n'ont pas constitué avocat.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient d'observer que par l'effet des appel principal et incident, la cour n'est pas saisie des dispositions du jugement ayant dit que Mme [G] [K] avait commis une faute de nature à exclure son droit à indemnisation sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985, débouté cette dernière de sa demande d'indemnisation sur le fondement de ce texte et mis hors de cause la société Mutuelle de Poitiers.

Sur les préjudices indemnisables au titre de la garantie «accident corporel du conducteur»

La société Groupama d'Oc, assureur du véhicule conduit par Mme [G] [K] fait valoir que l'assurance automobile obligatoire prévue à l'article L. 211-1 du code des assurances couvre la responsabilité civile du conducteur pour les dommages causés aux tiers mais non les dommages personnels du conducteur, qu'il découle de ce texte que si le conducteur souhaite être garanti pour ses propres dommages, il doit souscrire des garanties complémentaires optionnelles et qu'il appartient ainsi à Mme [G] [K] de démontrer qu'elle ou son mari ont souscrit une telle garantie et d'apporter la preuve de son contenu.

La société Groupama d Oc oppose qu'il résulte des conditions particulières signées par l'assureur et des conditions générales de la police d'assurance souscrite par [P] [K] que la garantie «accident corporel du conducteur» ne couvre que les dommages corporels du conducteur blessé et en cas de décès de celui-ci les préjudices moraux et économiques de ses ayants droits.

Elle conclut que Mme [G] [K], à laquelle il incombe d'apporter une preuve littérale et suffisante de l'étendue des garanties souscrites, ne démontre pas qu'elle bénéfice d'une garantie couvrant son préjudice d'affection et son préjudice économique à la suite du décès de son mari, lequel n'était pas conducteur du véhicule lors de l'accident

Elle admet, en revanche que la police d'assurance couvre les dommages corporels de Mme [G] [K], à savoir l'indemnisation de l'incapacité temporaire de travail ou d'activité, des frais médicaux, chirurgicaux et pharmaceutiques, de l'incapacité permanente partielle ou totale, des frais d'assistance de tierce personne, des souffrances endurées et du préjudice esthétique, évalués selon le droit commun.

La société Groupama d'Oc fait valoir à titre subsidiaire que la faute de conduite de Mme [G] [K] qui s'est déportée sur la voie de circulation des véhicules venant en sens inverse exclut l'indemnisation de ses préjudices d'affection et de nature économique liés au décès de son mari.

Elle oppose en tout état de cause l'application du plafond de garantie de 189 365 euros prévue dans les conditions particulières de la police d'assurance.

Mme [G] [K] fait valoir que'elle bénéficie selon les conditions particulières du contrat d'assurance de la garantie personnelle du conducteur, que la société Groupama d'Oc est tenue de l'indemniser des préjudices qu'elle a subis tant en sa qualité de victime directe que de victime par ricochet, qu'en l'absence de signature par l'assuré des conditions particulières renvoyant aux conditions générales, les limitations et exclusions de garantie mentionnées dans ces conditions générales lui sont inopposables.

Elle estime rapporter la preuve de l'existence et du contenu de la garantie «accident corporel du conducteur» et relève que la société Groupama d'Oc a admis dans une lettre du 26 octobre 2015 que cette garantie avait vocation à s'appliquer.

Elle avance que les conditions particulières et générales non signées lui étant inopposables, aucun argument ne permet d'exclure ou de limiter l'indemnisation de ses préjudices en sa qualité de victime par ricochet.

Elle ajoute que le moyen selon lequel les conditions générales ne prévoient une indemnisation qu'en cas de décès du conducteur assuré est dénué de pertinence alors que la société Groupama d'Oc, sur la base de ce même contrat, a indemnisé les préjudices économiques et d'affection subis par ses trois enfants à la suite du décès de leur père.

Mme [G] [K] estime en outre que les conditions générales sont claires concernant l'objet de la garantie qui est de couvrir les atteintes corporelles et le décès consécutifs à un accident de la circulation dont l'assuré est ou non responsable et que ces stipulations concernent de manière générale les préjudices par ricochet subis en cas de décès, y compris ceux qu'elle a subis à la suite du décès de son conjoint.

****

Sur ce, il convient de relever à titre liminaire qu'en application de l'article L. 211-1 du code des assurances, le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur assuré en vertu d'un contrat d'assurance garantissant les conséquences pécuniaires de la responsabilité qu'il pourrait encourir en raison de dommages corporels et matériels subis par des tiers, dans la réalisation desquels le véhicule assuré est impliqué, ne peut obtenir de son propre assureur la réparation des préjudices qu'il a personnellement subis, directement ou par ricochet.

Par ailleurs, il résulte de l'article R. 211-8 du code des assurances que l'obligation d'assurance prévue à l'article L. 211-1 du code des assurances ne s'applique pas aux dommages subis par la personne conduisant le véhicule.

Mme [G] [K], conductrice du véhicule impliqué dans l'accident du 14 juillet 2015 et assuré auprès de la société Groupama d'Oc ne peut ainsi obtenir de son propre assureur la société Groupama d'Oc l'indemnisation de ses préjudices qu'en justifiant de l'existence d'une assurance facultative couvrant les dommages causés au conducteur.

Sur ce point, la souscription d'une telle assurance n'est pas contestée et résulte en particulier de l'aveu de la société Groupama d'Oc qui a dans une lettre du 28 octobre 2015 admis que l'indemnisation du préjudice corporel de Mme [G] [K] relevait de la garantie «accidents corporels du conducteur» et dans une lettre du 24 mai 2018 que la responsabilité de Mme [G] [K] était entièrement engagée et que la garantie contractuelle «accidents corporels du conducteur» avait vocation à être mise en jeu.

En revanche, il résulte des articles L. 112-1 et suivants du code des assurances que la preuve de l'existence d'une assurance comportant une garantie facultative des «accidents corporels du conducteur» ne dispense pas l'assurée, Mme [G] [K], d'apporter également la preuve littérale et suffisante du contenu et des conditions de cette garantie.

Si les conditions particulières de la police d'assurance renvoyant aux conditions générales référencées sous le n° 215174D n'ont pas été signées par [P] [K], désigné comme étant le souscripteur du contrat d'assurance, ce dont Mme [G] [K] déduit qu ni les conditions particulières ni les conditions générales de la police d'assurance ne lui sont opposables, cette circonstance ne la dispense pas en sa qualité d'assurée d'apporter, en cas de contestation de l'assureur, la preuve littérale et suffisante du contenu de la garantie «accident corporel du conducteur» et des préjudices qu'elle indemnise.

La société Groupama d'Oc verse aux débats un exemplaire des conditions particulières de la police d'assurance «Conduire» signée par le seul assureur et mentionnant dans le tableau des garanties souscrites, la garantie «accident corporel du conducteur» qui n'est pas autrement définie ainsi que la prévision d'une limite de garantie d'un montant de 189 365 euros «indexés AGIRC».

La société Groupama d'Oc produit également les conditions générales de la police d'assurance dont l'article 2/3 relatif à la garantie «accidents corporels du conducteur» prévoit après avoir défini les conducteurs assurés, que la garantie couvre en cas de blessure de l'assuré l'incapacité temporaire de travail ou d'activité à compter du premier jour d'interruption, des frais de traitements médicaux, chirurgicaux et pharmaceutiques, y compris les frais de rééducation, de prothèse et d'appareillage, l'incapacité permanente partielle ou totale selon le barème de droit commun, les frais d'assistance de tierce personne, les souffrances endurées et le préjudice esthétique et, en cas de décès du conducteur assuré, survenu dans un délai d'un an, des suites de l'accident garanti, le remboursement des frais d'obsèques, l'indemnisation du préjudice moral des ayants droit et les préjudices économiques subis par ces derniers.

Cet article précise que l'indemnité est déterminée, dans la limite du plafond de garantie choisi, en fonction des préjudices effectivement subis, évalués selon les règles du droit commun, sous déduction des prestations à caractère indemnitaire versées par tout organisme social, de prévoyance ou par l'employeur.

Il résulte de ces dispositions claires et précises que seuls sont couverts au titre de la garantie «accident corporel du conducteur», en cas de blessures du conducteur assuré les préjudices et frais limitativement énumérés et en cas de décès de celui-ci avant l'expiration d'un délai d'un an les préjudices subis par ses ayants droit.

En revanche, ne sont pas garantis les préjudices subis par ricochet par le conducteur assuré en cas de décès d'un proche, passager du véhicule accidenté, étant rappelé que la garantie facultative des dommages causés au conducteur relève de la liberté contractuelle.

Comme le relève la société Groupama d'Oc l'absence de couverture des préjudices par ricochet du conducteur assuré ne constitue par une exclusion de garantie mais une non-assurance.

Or, ni la circonstance que la société Groupama d'Oc a admis que la garantie «accidents corporels du conducteur» était mobilisable pour les préjudices corporels du conducteur ni celle qu'elle a adressé à Mme [G] [K] prise en sa qualité de représentante légale de ses enfants mineurs des offres d'indemnisation de leurs préjudices d'affection et économiques en application de la loi du 5 juillet 1985 et non en vertu de la garantie «accidents corporels du conducteur» ne permet d'apporter une telle preuve.

Eu égard à la contestation de la société Groupama d'Oc, Mme [G] [K] échoue à démontrer que la garantie «accidents corporels du conducteur» couvre les préjudices par ricochet de l'assuré conducteur en cas de décès d' un passager.

Sa demande d'indemnisation au titre de la garantie «accidents corporels du conducteur» de son préjudice d'affection et des préjudices économiques liés à la perte de revenus consécutive au décès de [P] [K] et à la nécessité de substituer ce dernier dans la prise en charge de leurs enfants sera en conséquence rejetée et le jugement infirmé sur ces points.

Sur le préjudice corporel de Mme [G] [K]

La société Groupama d'Oc ne contesta pas devoir indemniser au titre de la garantie «accidents corporels du conducteurs» l'incapacité temporaire de travail ou d'activité à compter du premier jour d'interruption, les frais de traitements médicaux, chirurgicaux et pharmaceutiques, y compris les frais de rééducation, de prothèse et d'appareillage, l'incapacité permanente partielle ou totale selon le barème de droit commun, les frais d'assistance de tierce personne, les souffrances endurées et le préjudice esthétique, évalués selon le droit commun et après déduction des prestations servies.

Il convient d'observer que l'ancienne notion d'«incapacité totale de travail» comporte en droit commun une composante extra-patrimoniale que constitue le déficit fonctionnel temporaire.

Le Docteur [A], désigné par la société Groupama d'Oc en qualité d'expert et le Docteur [V], médecin-conseil de Mme [G] [K] ont examiné cette dernière le 19 mars 2019 et établi chacun un rapport d'expertise.

Le Docteur [A] indique dans son rapport en date du 19 avril 2019 que Mme [G] [K], droitière, a présenté à la suite de l'accident du 14 juillet 2015 une fracture fermée engrenée transversale de la diaphyse ulnaire droite, des hématomes des parties molles sous-cutanées pariétales antérieures aux étages thoraciques (à l'union des cadrans supérieurs du sein droit) et abdomino-pelvien (flanc droit et fosses iliaques) et sur le plan psychologique une réaction aigue à un facteur de stress constatée par un médecin psychiatre dans les suites de l'accident au cours duquel son mari est décédé.

Il relève qu'elle conserve comme séquelles des douleurs barotraumatiques de l'avant-bras droit ainsi qu'une hypervigilance lors de la conduite automobile.

Il conclut son rapport dans les termes suivants :

- arrêt total des activités professionnelles du 14 juillet 2015 au 30 mai 2016

- gêne temporaire totale du 14 juillet au 18 juillet 2018,

- gêne temporaire partielle :

* du 18 juillet 2015 au 19 septembre 2015 : classe III

* du 20 septembre 2015 au 31 juillet 2016 : classe I

- consolidation au 1er août 2016

- souffrances endurées de 3,5/7

- déficit fonctionnel permanent de 3 %

- dommage esthétique permanent : aucun

- retentissement sur les activités d'agrément : aucun

- aucune incidence professionnelle dans les suites de cet accident de la voie publique

- aide humaine qualifiée ou non :

* 1h30 par jour en moyenne pendant la période de classe III

* 3 heures par semaine en moyenne du 20 septembre 2015 au 20 octobre 2015

* «par ailleurs, son état psychologique [celui de Mme [G] [K]] ainsi que les éléments orthopédiques ont justifié la présence de tierce personne (notamment la famille et les amis) afin de s'occuper des différentes activités des enfants, notamment du petit dernier âgé alors de 2 ans»

- frais futurs : aucun.

Le Docteur [V] a détaillé ses conclusions dans un rapport établi le 28 mars 2015 :

- déficit fonctionnel temporaire total du 14 juillet au 18 juillet 2018,

- déficit fonctionnel temporaire partiel :

* de classe III du 18 juillet 2015 au 19 septembre 2015

* de classe II du 20 septembre 2015 au 31 juillet 2016

- consolidation au 1er août 2016

- souffrances endurées de 3,5/7

- déficit fonctionnel permanent de 5 %

- assistance par tierce personne :

* 1h30 par jour pendant la période de classe III

* 3 heures par semaine pendant les 30 jours qui ont suivi, aide à laquelle il faut adjoindre l'aide à la parentalité qui doit faire l'objet d'une prise en charge totalement indépendante.

Ces rapports conjugués constituent, sous les réserves qui seront plus loin exposées notamment en ce qui concerne l'évaluation divergente du taux de déficit fonctionnel permanent et l'absence de prise en compte du préjudice esthétique temporaire, une base valable d'évaluation du préjudice corporel de Mme [G] [K].

Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles

Ce poste de préjudice vise à indemniser l'ensemble des dépenses de santé, incluant les frais d'hospitalisation, médicaux et pharmaceutiques, exposés avant la date de la consolidation.

Il résulte du décompte définitif de créance de la CPAM en date du 12 novembre 2019 que cet organisme a pris en charge à la suite de l'accident dont a été victime Mme [G] [K] le 14 juillet 2015 des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques et d'appareillage d'un montant de 4 715,13 euros, sous déduction de franchises médicales d'un montant de 40 euros.

Mme [G] [K] est ainsi fondée en application de la garantie «accidents corporels du conducteur» a obtenir l'indemnisation des dépenses de santé demeurées à sa charge pour un montant justifié de 40 euros.

Le jugement sera confirmé.

- Frais divers

La société Groupama d'Oc et Mme [G] [K] s'accordent sur l'indemnisation des honoraires d'assistance à expertise par le Docteur [V], médecin-conseil, d'un montant justifié de 600 euros.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

- Assistance temporaire par une tierce personne

Ce poste vise à indemniser, pendant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident jusqu'à la consolidation, le besoin d'assistance de la victime directe par une tierce personne pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, y compris la prise en charge de ses enfants, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie.

Mme [G] [K] réclame au titre de ce poste de préjudice en infirmation du jugement une indemnité d'un montant de 1 967,14 euros au titre de ses besoins d'assistance personnelle et de 10 781,10 euros pour l'assistance spécifique requise par son état afin de s'occuper de ses enfants.

Elle demande à la cour de chiffrer ce poste de préjudice sur la base d'un taux horaire de 18 euros, d'un besoin d'assistance personnelle conforme aux conclusions communes des experts et d'un besoin d'assistance spécifique pour l'éducation des enfants de 8,15 heures par jour multiplié par le taux de déficit fonctionnel temporaire retenu pour chaque période.

Elle se fonde pour déterminer ce besoin d'assistance spécifique sur une étude réalisée par le Docteur [B], médecin expert auprès de la cour d'appel de Caen, pour évaluer les besoins en aide humaine d'un enfant handicapé, étude à laquelle se réfère son médecin-conseil dans son rapport d'expertise pour déterminer en fonction de leur âge le volume horaire des actes de substitution et des besoins de surveillance de ses trois enfants.

La société Groupama d'Oc offre d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 1 428 euros calculée sur la base d'un taux horaire de 15 euros et en fonction du seul volume horaire d'assistance personnelle retenu par les experts.

Sur ce, les Docteurs [A] et [V] ont retenu un besoin d'assistance personnelle par une tierce personne de 1 heure et 30 minutes par jour, soit 1,5 heure par jour, pendant la période de déficit fonctionnel temporaire partiel de classe III (50 %) du 18 juillet 2015 au 19 septembre 2015 et de 3 heures par semaine pendant le mois suivant, soit entre le 20 septembre 2015 et 20 octobre 2015, ces conclusions ne faisant l'objet d'aucune critique.

Par ailleurs, les Docteurs [A] et [V] s'accordent sur l'existence d'un besoin d'assistance spécifique complémentaire pour la prise en charge par Mme [G] [K] de ses trois enfants mineurs en raison de son état psychologique et des éléments orthopédiques.

Il est en effet établi que Mme [G] [K] a présenté à la suite de l'accident dans lequel son époux est décédé une «réaction aiguë à un facteur de stress» ayant nécessité un suivi psychologique qui constitue un élément de l'atteinte à son intégrité physique et psychique, distinct du préjudice d'affection lié au décès de son conjoint.

Elle a par ailleurs présenté, alors qu'elle est droitière, une fracture de la diaphyse ulnaire droite ayant nécessité selon le Docteur [A] une immobilisation par contension brachio-antébrachio-palmaire pendant 8 semaines, ce qui suffit à caractériser un besoin d'assistance pour la prise en charge de ses trois enfants, [F], âgé de 11 ans au moment de l'accident comme étant né le [Date naissance 5] 2003, [D], âgée de 10 ans, comme étant née le [Date naissance 6] 2005 et [R], âgé de 2 ans lors de l'accident, comme étant né le [Date naissance 4] 2013.

En revanche, ce besoin d'assistance spécifique doit être fixé en fonction des actes de surveillance, de soins et d'éducation que la victime ne pouvait plus accomplir seule et non en fonction d'une étude tendant à évaluer les besoins en aide humaine d'un enfant handicapé.

Le Docteur [A] rapporte qu'à l'issue de son hospitalisation, Mme [G] [K] est restée à l'hôpital en tant qu'accompagnante de ses enfants, ce dont il résulte que ces derniers étaient pris en charge par le personnel soignant jusqu'à la date de leur retour domicile dont l'expert indique qu'il aurait eu lieu le 24 juillet 2015.

Il n'est pas justifié dans ces conditions d'un besoin d'assistance spécifique pour la prise en charge des enfants non satisfait par le personnel hospitalier avant le 24 juillet 2015.

Compte tenu des troubles psychologiques et lésions orthopédiques de Mme [G] [K], la cour est en mesure d'évaluer le besoin d'aide à la parentalité de la victime de la manière suivante:

* 4 heures par jour pour les trois enfants entre le 25 juillet 2015 et le 19 septembre 2015, période au cours de laquelle le bras droit de la victime était immobilisé,

* 2 heures par jour pour les trois enfants du 20 septembre 2015 au 20 octobre 2015.

En revanche, le Docteur [A] n'ayant retenu aucun besoin d'assistance personnelle par une tierce personne à partir du 21 octobre 2020, il n'est pas établi qu'à compter de cette date l'état de Mme [G] [K] ait nécessité une aide spécifique à la parentalité.

Eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser, l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire de 18 euros conformément à la demande de Mme [G] [K].

L'indemnité de tierce personne s'établit ainsi de la manière suivante :

- aide personnelle

* du 18 juillet 2015 au 19 septembre 2015

1,5 heure x 64 jours x 18 euros = 1 728 euros

* du 20 septembre 2015 et au 20 octobre 2015

3 heures x 31jours/7 jours x 18 euros = 239,14 euros

- aide à la parentalité

* du 25 juillet 2015 au 19 septembre 2015

4 heures x 57 jours x 18 euros = 4 104 euros

* du 20 septembre 2015 et au 20 octobre 2015

2 heures x 31 jours x 18 euros = 1 116 euros

Soit la somme totale de 7 187,14 euros (1 728 euros + 239,14 euros + 4 104 euros + 1 116 euros).

Le jugement sera infirmé.

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, y compris le préjudice d'agrément temporaire et le préjudice sexuel.

Mme [G] [K] sollicite la confirmation du jugement qui a évalué ce poste de préjudice à la somme de 1 715 euros en retenant une base journalière d'indemnisation de 25 euros.

La société Groupama d'Oc demande que ce poste de préjudice soit évalué à la somme de 1 387 euros, soit 115 euros pour la période gêne temporaire totale, 632 euros pour la période de gêne temporaire partielle de classe III et 632 euros pour la période de gêne temporaire partielle de classe I.

Eu égard à l'incapacité fonctionnelle subie par Mme [G] [K] et aux troubles apportés à ses conditions d'existence avant la date de consolidation, ce poste de préjudice sera calculé sur une base journalière de 25 euros pour les périodes de déficit fonctionnel total et proportionnellement pour les périodes de déficit fonctionnel partiel.

Le déficit fonctionnel temporaire doit ainsi être évalué comme suit :

-125 euros pour la période de déficit fonctionnel temporaire total du 14 juillet au 18 juillet 2018 (5 jours),

- 800 euros pour la période de déficit fonctionnel temporaire partiel de classe III (50 %) du 18 juillet 2015 au 19 septembre 2015 (64 jours)

- 790 euros pour la période de déficit fonctionnel temporaire partiel de classe I (10%) du 20 septembre 2015 au 31 juillet 2016 (316 jours)

Soit la somme totale de 1 715 euros.

Le jugement sera confirmé.

- Souffrances endurées

Ce poste de préjudice indemnise les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés que la victime endure pendant la maladie traumatique.

Mme [G] [K] sollicite à ce titre en infirmation du jugement une indemnité de 15 000 euros.

La société Groupama d'Oc offre d'indemniser ce poste de préjudice à hauteur de 6 000 euros en faisant valoir que le Docteur [A] a commis une confusion entre les souffrances endurées par Mme [G] [K] du fait de ses blessures et le préjudice moral résultant du décès de son mari et de son sentiment de culpabilité.

Sur ce, il y a lieu de prendre en considération pour évaluer ce poste de préjudice côté 3,5/7 par les deux experts, le traumatisme initial, les souffrances induites par les différentes lésions, l'hospitalisation, la pénibilité des soins incluant une immobilisation du bras droit pendant 8 semaines, les séances de rééducation mais également la «réaction aiguë à un facteur de stress» ayant nécessité un suivi psychologique qui constitue un élément de l'atteinte à l'intégrité physique et psychique de la victime, distinct du préjudice d'affection lié au décès de son conjoint.

Au vu de ces éléments, ce préjudice sera évalué à la somme réclamée de 12 000 euros.

Le jugement sera infirmé.

- Préjudice esthétique temporaire

Ce poste de préjudice indemnise les atteintes esthétiques et plus généralement l'altération de l'apparence physique de la victime avant la consolidation.

Mme [G] [K] conclut à la confirmation du jugement qui a évalué ce poste de préjudice à la somme de 500 euros alors que la société Groupama d'Oc conclut au rejet de la demande en relevant qu'il n'a été retenu par les experts ni préjudice esthétique temporaire, ni préjudice esthétique permanent.

Sur ce, même s'il n'a pas été retenu par les experts, ce préjudice est caractérisé par la présence d'hématomes sous-cutanés précisément décrits par le Docteur [A] et par une immobilisation par contention brachio-antébrachio-palmaire pendant 8 semaines ayant modifié l'apparence de la victime aux yeux des tiers.

Ce préjudice a été justement évalué à la somme de 500 euros par les premiers juges dont la décision sera confirmée sur ce point.

Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent

Ce poste de préjudice vise à indemniser, pour la période postérieure à la consolidation, les atteintes aux fonctions physiologiques, les souffrances chroniques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales.

Mme [G] [K] conclut à la confirmation du jugement qui a évalué ce préjudice à la somme de 5 780 euros en retenant compte tenu de la divergence d'appréciation des deux experts un taux de déficit fonctionnel permanent de 4%.

La société Groupama d'Oc demande que ce poste de préjudice soit chiffré à la somme de 4 320 euros sur la base du taux de déficit fonctionnel permanent de 3 % retenu par le Docteur [A].

Sur ce, le docteur [A] a retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 3 % en raison de la persistance de douleurs barotraumatiques de l'avant-bras droit ainsi que d'une hypervigilance lors de la conduite automobile.

Le Docteur [V] a pour sa part évalué à 5 % le taux de déficit fonctionnel permanent de la victime sans aucune explication permettant de justifier sa divergence d'appréciation avec le Docteur [A].

Il convient dans ces conditions de retenir un taux de déficit fonctionnel permanent de 3 % conformément aux conclusions du Docteur [A].

Au vu des séquelles constatées, des douleurs persistantes et des troubles induits dans les conditions d'existence de Mme [G] [K], qui était âgée de 47 ans à la date de consolidation, comme étant née le [Date naissance 3] 1969, il convient d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 4 740 euros.

Le jugement sera infirmé.

Récapitulatif

Les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux de Mme [G] [K] après déduction des prestations servies par la CPAM sur les postes de préjudice qu'elles indemnisent s'établissent de la manière suivante :

- dépenses de santé actuelles : 40 euros (confirmation)

- frais divers : 600 euros (confirmation)

- assistance temporaire par une tierce personne : 7 187,14 euros (infirmation)

- déficit fonctionnel temporaire : 1 715 euros (confirmation)

- souffrances endurées : 12 000 euros (infirmation)

- préjudice esthétique temporaire : 500 euros (confirmation)

- déficit fonctionnel permanent : 4 740 euros (infirmation)

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

La société Groupama d'Oc qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel.

L'équité commande d'allouer à Mme [G] [K] en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour et de rejeter la demande de la société groupama d'Oc formulée au même titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt rendu par défaut, par mise à disposition au greffe,

Et dans les limites de l'appel,

- Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a :

- déclaré la société Groupama d'Oc tenue d'indemniser l'intégralité des préjudices subis par Mme [G] [J] veuve [K] en sa qualité de victime par ricochet,

- condamné la société Groupama d'Oc à payer à Mme [G] [J] veuve [K] à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites, les sommes suivantes :

- en sa qualité de victime directe de l'accident :

* assistance par tierce personne : 4 361,79 euros

* souffrances endurées : 8 000 euros

* déficit fonctionnel permanent : 5 780 euros,

- en sa qualité de victime par ricochet :

* préjudice d'affection : 35 000 euros

* préjudice économique lié à la perte de revenus : 434 821.12 euros

* préjudice économique lié à la perte de l'aide de [P] [K] pour l'éducation des enfants : 177 937, 50 euros

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Déboute Mme [G] [J] veuve [K] de sa demande d'indemnisation au titre de la garantie «accidents corporels du conducteur» de son préjudice d'affection et des préjudices économiques liés à la perte de revenus consécutive au décès de [P] [K] et à la nécessité de substituer ce dernier dans la prise en charge de leurs enfants,

- Condamne la société Groupama d'Oc à payer à Mme [G] [J] veuve [K], les indemnités suivantes, provisions et sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement non déduites, au titre des postes de préjudice ci-après :

* assistance temporaire par une tierce personne : 7 187,14 euros

* souffrances endurées : 12 000 euros

* déficit fonctionnel permanent : 4 740 euros,

- Condamne la société Groupama d'Oc à payer à Mme [G] [J] veuve [K] en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour,

- Rejette la demande de la société Groupama d'Oc formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la société Groupama d'Oc aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 20/18623
Date de la décision : 22/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-22;20.18623 ?
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