REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 9
ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2022
(n° , 30 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17653 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCYGS
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juillet 2020 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2018053434
APPELANTS
Monsieur [J] [V]
né le [Date naissance 7] 1961 à [Localité 26]
[Adresse 14]
[Localité 22]
Madame [R] [V]
née le [Date naissance 2] 1994 à [Localité 20]
[Adresse 14]
[Localité 22]
Madame [Y] [V]
née le [Date naissance 1] 1996 à [Localité 20]
[Adresse 14]
[Localité 22]
Monsieur [K] [P]
né le [Date naissance 16] 1968 à [Localité 28]
[Adresse 6]
[Localité 18]
Monsieur [A] [G]
né le [Date naissance 8] 1959 à [Localité 30]
[Adresse 15]
[Localité 19]
Monsieur [F] [B]
né le [Date naissance 9] 1955 à
[Adresse 3]
[Localité 21]
S.A.S. H2M - INVEST
RCS de Lyon sous le n°820 204 758,
[Adresse 6]
[Localité 18]
Représentés par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, avocat postulant
Représentés par M. Philippe GONNET, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant
S.A.R.L. DIVERRE
RCS de Lyon sous le n°484 452 289
[Adresse 31]
[Localité 24]
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, avocat postulant
Représentée par M. Philippe GONNET, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant
INTIMES
Monsieur [U] [N]
né le [Date naissance 13] 1964 à [Localité 27]
[Adresse 17]
[Localité 23]
S.A.S. SEQENS GROUP BIDCO
N° SIRET : 453 094 082
[Adresse 12]
[Localité 20]
Représentés par Me Jean-didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240, avocat postulant
Représentés par Me Sandrine GARDEL, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
Monsieur [E] [Z]
né le [Date naissance 4] 1977 à [Localité 29]
[Adresse 10]
[Localité 5] ETATS-UNIS
S.A. ARDIAN FRANCE
N° SIRET : 403 201 882
[Adresse 11]
[Localité 25]
AXA LBO FUND IV
[Adresse 11]
[Localité 25]
Représentés par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant
Représentés par Me Myria SAARINEN RUBNER et par Me Bertrand REPOLT, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidants
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Sophie MOLLAT, Présidente
Madame Isabelle ROHART, Conseillère
Madame Déborah CORICON, Conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Sophie MOLLAT, Présidente et par Madame FOULON, Greffière .
**********
Exposé des faits et de la procédure
Le groupe NOCAVAP exerce une activité de chimie, de synthèse pharmaceutique et de produits de spécialités sur les marchés de la pharmacie, de la santé, de la cosmétique et des fragrances, de l'alimentation, de la nutrition animale et des plastiques, principalement en Europe, Asie et en Amérique.
Le fonds AXA LBO FUND IV, géré par la société ARDIAN FRANCE, a acquis le 29 mars 2011 le contrôle du groupe NOVACAP dans le cadre d'une opération de "leverage buy out".
Dans le cadre de cette acquisition des actions et obligations convertibles étaient acquises par un groupe de dirigeants, dont messieurs [G], [P], [V], et [B].
Monsieur [U] [N] est dirigeant de la société NOVACAP INTERNATIONAL, société tête du groupe. Il détenait lui aussi une participation personnelle dans la société NOVACAP INTERNATIONAL.
Un pacte d'actionnaires était signée entre l'actionnaire majoritaire et les actionnaires minoritaires, en présence de la société NOVACAP INTERNATIONAL, le 29.03.2011 puis modifié les 9.05.2014 et 12.12.2014.
En 2016 le capital était donc réparti entre un actionnaire majoritaire s'agissant du FPCI AXA LBO FUND IV représenté par sa société de gestion ARDIAN FRANCE, détenant 95,6% du capital, et les actionnaires minoritaires suivants:
- ALCHIMIE NM 1, 2, 3 et 4 sociétés par actions simplifiée représentée par [U] [N] et regroupant les managers actionnaires
- Monsieur [U] [N]
- les managers du Cercle 2
- les managers du Cercle 3
- ANABASE SARL représentée par Monsieur [I]
- Monsieur [X] [T]
- Monsieur [ZC] [D]
- Monsieur [S] [M]
- Monsieur [O] [C].
En 2016 l'actionnaire majoritaire s'engageait dans un processus de cession du groupe.
La société ARDIAN gestionnaire de AXA LBO FUND IV concluait ainsi, le 18 mars 2016, un accord pour la cession de NOVACAP INTERNATIONAL avec EURAZEO, qui intervenait au travers d'une holding d'acquisition, la société LEGENDRE HOLDING 48 devenue ensuite SEQENS GROUP BIDCO, dont Monsieur [N] deviendra président le jour même de la cession.
Les actionnaires minoritaires cèdaient leurs titres aux côtés du fonds majoritaire.
L'acquisitíon était effectuée par acte du 8 avril 2016 intitulé Share Purchase Agreement ou SPA qui prévoyait un prix fixe de 220 millions d'euros et un complément de prix de 30 millions d'euros soumis à des conditions de performance financière et de réinvestissement des actionnaires sortants.
Dans le cadre de l'opération de cession Monsieur [E] [Z], alors membre des équipes de gestion d'ARDlAN était mandaté par certains actionnaires minoritaires, dont MM [V], [P] et [G], pour la signature des documents relatifs à la cession de leurs titres à travers les managers companies (MANCO) ALCHIMIE 2 et 3, étant précisé que monsieur [V] avait fait donation à ses deux filles [Y] et [R] d'une partie de ses titres, M [P] avait fait apport de ses titre à la société H2M INVEST et M [G] avait également fait apport à la société DIVERRE de ses titres.
D'autres actionnaires des MANCO ALCHIMIE 2, 3 et 4, dont Monsieur [B] étaient représentés, dans le cadre de la cession, par M [N], PDG de la société cédée et actionnaire minoritaire le plus important.
Le contrat de cession était définitivement signé le 22 juin 2016 et le même jour un avenant était signé modifiant le prix de cession en prévoyant la diminution du complément de prix de 30 millions d'euros à 22 millions d'euros et réservant ce complément de prix au seul actionnaire majoritaire sortant (sous réserve de réalisation de la même performance financière que celle prévue dans le SPA) .
Le même jour un plan d'attribution gratuite d'actions au profit de certains mandataires sociaux et membre du personnel salarié, pour 8 millions d'actions à 1 euro de société NOVACAP GROUP HOLDING (devenue SEQENS GROUP HOLDING), était décidé par les actionnaires de la société en assemblée générale, ceux ci donnant pouvoir à Monsieur [N], président de NOVACAP GROUP HOLDING depuis le 22.06.2016 mais également de SGB et toujours de NOVACAP INTERNATIONAL, de déterminer l'identité des bénéficiaires et le nombre d'actions devant leur être attribué.
Messieurs [G], [P], [V], et [B] sollicitaient par courrier du 30 mars 2018 le paiement à leur profit d'un complément de prix en faisant valoir le SPA du 8 avril 2016.
La société ARDIAN leur répondait, par la voix de son conseil, qu'aucun complément de prix ne leur était dû, ce dernier étant réservé aux seuls vendeurs ayant réinvesti.
La société SGB et son président Mr [N] répondaient par la voix de leur conseil ne pas être concernés par la demande effectuée.
Par actes du 13.09.2018 Monsieur [J] [V], Madame [R] [V], Madame [Y] [V], Monsieur [K] [P], la SASU H2M-INVEST, Monsieur [A] [G], la SARL DIVERRE, et Monsieur [F] [B] assignaient devant le tribunal de commerce de PARIS, la SA ARDIAN, le fonds d'investissement AXA LBO FRANCE représentée par la SA ARDIAN, la SAS LEGENDRE HOLDING 48 devenue NOVACAP GROUP BIDCO devenue SEQENS GROUP BIDCO, Monsieur [U] [N], et Monsieur [E] [Z] pour demander principalement le versement du complément de prix qu'ils estimaient devoir recevoir.
Par jugement du 3.07.2020, saisi par les demandeurs d'une demande de communication de pièces, le tribunal de commerce fixait un calendrier de procédure en indiquant dans la motivation de sa décision, que cette question de la communication ne pouvait être disjointe du fond de l'affaire et que le tribunal statuerait le moment venu sur l'éventuel bien fondé des demandes de communication.
Par jugement en date du 6.11.2020 le tribunal de commerce de PARIS a:
- dit Monsieur [J] [V], Madame [R] [V], Madame [Y] [V], Monsieur [K] [P], la SASU H2M-lNVEST, Monsieur [A] [G], la SARL DIVERRE, et Monsieur [F] [B] irrecevables en leur demande de renvoi de l'affaire devant une formation collégiale de plaidoirie
- leur a donné acte de leur demande de nullité du présent jugement et les a déclaré irrecevables en cette demande
- écarté les conclusions n°5 et nouvelles pièces correspondantes des demandeurs transmises aux défendeurs hors délais fixés par son jugement. portant calendrier, du 3 juillet 2020,
- dit monsieur [N] recevable en son exception d'incompétence matérielle et l'en a débouté
- débouté Monsieur [J] [V], Madame [R] [V], Madame [Y] [V], Monsieur [K] [P], la SASU H2M-INVEST, Monsieur [A] [G], la SARL DIVERRE, et Monsieur [F] [B] de leurs demandes de production forcée de pièces.
- débouté ARDIAN de sa demande de mise hors de cause.
- débouté Monsieur [J] [V], Madame [R] [V], Madame [Y] [V], Monsieur [K] [P], la SASU H2M-INVEST, Monsieur [A] [G], [H] [L]. DIVERRE, et Monsieur [F] [B] de leurs demandes formées à l'encontre de SEQENS GROUP BIDCO, au titre du complément de prix.
- débouté Monsieur [J] [V]. Madame [R] [V], Madame [Y] [V], Monsieur [K] [P], la SASU I-H2M-INVEST, Monsieur [A] [G], la SARL DIVERRE, et Monsieur [F] [B] de leurs demandes de dommages et intérêts formées à l'encontre d'ARDIAN, AXA LBO FUND IV, M [Z] et M [N]
- condamné in solidum les demandeurs à payer les sommes suivantes au titre de l'article 700 du code de procédure civile:
20.000€ ensemble à ARDIAN FRANCE, AXA LBO FUND IV et M [Z]
20.000€ ensemble à la SAS SEQENS GROUP BIDCO et M [N]
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif.
- condamné in solidum Monsieur [J] [V], Madame [R] [V], Madame [Y] [V], Monsieur [K] [P], la SASU H2M-INVEST, Monsieur [A] [G], la SARL DIVERRE, et Monsieur [F] [B] aux dépens.
Monsieur [J] [V], Madame [R] [V], Madame [Y] [V], Monsieur [K] [P], la SASU H2M-INVEST, Monsieur [A] [G], [H] [L]. DIVERRE, et Monsieur [F] [B] ont formé appel par déclaration d'appel du 7.12.2020.
Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 11.04.2022, Monsieur [J] [V], Madame [R] [V], Madame [Y] [V], Monsieur [K] [P], la SASU H2M-INVEST, Monsieur [A] [G], la SARL DIVERRE, et Monsieur [F] [B] demandent à la cour de:
1. In limine litis, sur l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [N] :
Vu l'article L.721-3 du Code de commerce,
Vu les articles 75 et suivants du Code de procédure civile
Vu la jurisprudence citée,
Vu le caractère commercial de la cession de contrôle et des actes préparatoires,
Infirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a déclaré recevable l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [U] [N] ;
Confirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [N] ;
2. L'annulation des jugements des 3 juillet et 6 novembre 2020 (RG n°2018053434) :
Vu les articles 430, 482, 483, 861-3, 862 et 871 du Code de procédure civile,
Vu l'article L.722-1 du Code de commerce,
Annuler les jugements rendus par le Tribunal de commerce de Paris les 3 juillet 2020 et 6 novembre 2020 sous le RG n°2018053434 ;
Et statuant à nouveau,
3. Sur les dispositions du jugement relatives à la mise en état de l'affaire :
Infirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes:
- de renvoi de l'affaire devant une formation collégiale pour les plaidoiries ;
- de nullité du jugement en raison du refus de collégiale ;
Infirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a écarté les conclusions n°5 et la pièce n°30 des demandeurs ;
4. Sur les sommations de communication de pièces et informations :
Vu les articles 2, 3, 132, 133, 137, 138, 142, 446-3, 862 et 865 du Code de procédure civile,
Infirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a débouté les appelants de leurs demandes de production forcée de pièces ;
Enjoindre à ARDIAN FRANCE, à SEQENS GROUP BIDCO, au fonds AXA LBO FUND IV, à Monsieur [U] [N] et à Monsieur [E] [Z] de communiquer les documents et informations suivantes :
- le montant total et les modalités précises de paiement du complément de prix versé suite au rachat de NOVACAP INTERNATIONAL
- la liste complète des bénéficiaires du plan d'actions gratuites décidé par SEQENS GROUP HOLDING le 22 juin 2016 et le nombre d'actions gratuites attribuées à chacun d'entre eux ;
' la liste des personnes listées en annexe 1 de chaque traité d'apport de titres conclu avec les sociétés MANNEON, MANHELIUM et MANARGON le 21 juin 2016 ;
' la liste des apports figurant en annexe 2 de chaque traité d'apport de titres conclu avec les sociétés MANNEON, MANHELIUM et MANARGON le 21 juin 2016;
' les attestations de souscriptions émises par le CREDIT AGRICOLE CORPORATE AND INVESTMENT BANK pour chacune des augmentations de capital en numéraire des société MANNEON, MANARGON et MANHELIUM vierges de tout biffement ou anonymisation des noms des souscripteurs ;
' la formule de calcul utilisée pour arrêter la quote-part de complément de prix d'ARDIAN à la somme de 22 millions d'euros au titre du complément de prix ;
Assortir chaque injonction d'une astreinte de 10.000 euros par jour de retard et par manquement à compter du prononcé de la décision ordonnant cette communication ;
5. Sur la mise hors de cause d'ARDIAN FRANCE :
Confirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a débouté la société ARDIAN FRANCE de sa demande de mise hors de cause;
6. Sur la condamnation de SEQENS GROUP BIDCO en exécution de l'acte de cession du 8 avril :
Vu les anciens articles 1168, 1176 et 1178 du Code civil,
Vu l'acte de cession du 8 avril 2016,
Vu les pièces versées aux débats,
Infirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande de condamnation de SEQENS GROUP BIDCO en exécution de l'acte de cession du 8 avril 2016 ;
Statuant à nouveau,
Condamner la société SEQENS GROUP BIDCO à payer les sommes suivantes :
' 1.196.150,73 euros à Monsieur [J] [V] ;
' 16.592,01 euros à Madame [R] [V] ;
' 16.592,01 euros à Madame [Y] [V] ;
' 871.548,40 euros à Monsieur [A] [G] ;
' 298.032,48 euros à la société DIVERRE ;
' 1.169.580,88 euros à Monsieur [K] [P] ;
' 553.823,93 euros à Monsieur [F] [B] ;
Assortir ces condamnations à l'intérêt au taux légal à compter du 30 mars 2018, date de la première mis en demeure ;
Ordonner la capitalisation des intérêts échus par année entière ;
7. À défaut de condamnation en exécution de l'acte de cession du 8 avril 2016 : la condamnation solidaire des intimés au paiement de dommages et intérêts :
Vu les anciens articles 1382, 1984, 1988, 1992 et 1993 du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats et notamment les pouvoirs consentis à Monsieur [E] [Z],
Vu l'avenant du 22 juin 2016 découvert en cours d'instance,
Infirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande de dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau,
Condamner solidairement ARDIAN FRANCE, son fonds AXA LBO FUND IV, SEQENS GROUP BIDCO, Monsieur [E] [Z] et Monsieur [U] [N] à payer :
' la somme de 1.196.150,73 euros à Monsieur [J] [V] ;
' la somme de 16.592,01 euros à Madame [R] [V] ;
' la somme de 16.592,01 euros à Madame [Y] [V] ;
' la somme de 871.548,40 euros à Monsieur [A] [G] ;
' la somme de 298.032,48 euros à la société DIVERRE ;
' la somme de 1.169.580,88 euros à Monsieur [K] [P] ;
' la somme de 553.823,93 euros à Monsieur [F] [B]
Assortir ces condamnations à l'intérêt au taux légal à compter du 30 mars 2018, date de la première mise en demeure ;
Ordonner la capitalisation des intérêts échus par année entière ;
8. Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens :
Infirmer le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a condamné les appelants à payer les sommes suivantes :
- 20.000 euros ensemble à ARDIAN, AXA LBO FUND IV et Monsieur [E] [Z],
- 20.000 euros ensemble à la société SEQENS GROUP BIDCO et Monsieur [U] [N],
- les entiers dépens d'instance dont 377,24 euros liquidés par le greffe.
9. En tout état de cause,
Rejeter toutes demandes, fins et conclusions plus amples et contraires ;
Condamner la société SEQENS GROUP BIDCO ou, selon qui mieux le devra, condamner solidairement la société ARDIAN FRANCE, le fonds AXA LBO FUND IV, Monsieur [U] [N] ou Monsieur [E] [Z] à payer à chaque demandeur une somme de 40.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner la société SEQENS GROUP BIDCO ou, selon qui mieux le devra, condamner solidairement la société ARDIAN FRANCE, le fonds AXA LBO FUND IV, Monsieur [U] [N] ou Monsieur [E] [Z] aux entiers dépens ;
Aux termes de leurs conclusions d'intimés et d'appel incident, signifiées par voie électronique le 30.03.2022, la société ARDIAN FRANCE, le fonds d'investissement AXA LBO FIND IV représenté par la société ARDIAN FRANCE et Monsieur [E] [Z] demandent à la cour:
SUR L'APPEL INCIDENT INTERJETE PAR ARDIAN FRANCE :
Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 6 novembre 2020 en ce qu'il a rejeté la demande de mise hors de cause d'Ardian France ;
Statuant à nouveau,
Prononcer la mise hors de cause de la société Ardian France ;
SUR L'APPEL PRINCIPAL :
A titre principal
Débouter les Appelants de la demande d'annulation du Jugement avant dire droit et du Jugement sur le fond ;
Confirmer le Jugement dans son intégralité sauf en ce qu'il a débouté Ardian France de sa demande de mise hors de cause ;
Débouter les Appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
A titre subsidiaire
Juger que le calcul de l'indemnisation des Appelants ne peut se faire que sur la base de la somme de 8 millions d'euros, laquelle correspond à la part du complément de prix revenant aux managers réinvestisseurs ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
Condamner in solidum les Appelants à payer la somme de 60.000 euros à Ardian France, AXA LBO Fund IV et [E] [Z] en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;
Condamner les Appelants aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SELARL LEXAVOUE PARIS VERSAILLES, agissant par Maître Matthieu Boccon-Gibod, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 29.03.2022, Monsieur [N] et la société SEQENS GROUP BIDCO demandent à la cour de:
Vu les articles 700, 15, 132, 133, 11, 138, 142, 139, 144, 146, 446-3, 871, 455, 482 du Code de procédure civile ;
Vu les articles 1984 et suivants, 1178, 1168, 1833, 1202 ancien et 1344 du Code civil ;
Vu les articles L. 721-3, L722-1, L722-20 et L. 225-197-1 du Code de commerce,
Vu le Share Purchase Agreement daté du 8 avril 2016 et son Avenant daté du 22 juin 2016,
In limine litis, sur l'exception d'incompétence du Tribunal de commerce de Paris
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre en ce qu'il a déclaré recevable l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [U] [N] ;
- INFIRMER le jugement du 6 novembre en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [N] ;
En conséquence, statuant à nouveau,
- PRONONCER l'incompétence du Tribunal de Commerce (et par voie de conséquence, la chambre commerciale de la Cour d'appel)
Sur les demandes d'annulation des jugements des 3 juillet et 6 novembre 2020
- REJETER les demandes d'annulation des jugements rendus par le Tribunal de commerce de Paris les 3 juillet 2020 et 6 novembre 2020 ;
En conséquence,
- REFUSER de statuer à nouveau sur le fond ;
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a jugé irrecevables l'intégralité des demandes de production forcée de documents et informations formulées par Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] ;
Sur les dispositions relatives à la mise en état de l'affaire
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a déclaré irrecevables la demande de renvoi de l'affaire devant une formation collégiale pour les plaidoiries ;
En conséquence,
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de nullité du jugement pour refus de renvoi de l'affaire en formation collégiale; - CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a écarté les conclusions n°5 et la pièce n°30 des Appelants ;
Sur les productions forcées de pièces
- CONFIRMER le jugement en ce qu'il a jugé irrecevables l'intégralité des demandes de production forcée de documents et informations formulées par Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] ;
Sur la condamnation de SEQENS Group Bidco au paiement d'un complément de prix aux Appelants
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il jugé que la clause de complément de prix issue du SPA n'est pas applicable à Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V];
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a jugé que la clause de complément de prix prévue par le SPA n'est pas applicable aux actionnaires minoritaires;
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a jugé irrecevable la prétention de Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G] et [F] [B] en paiement du complément de prix sur le fondement qu'ils seraient à l'origine de la surperformance du groupe SEQENS ayant déclenché le paiement du complément de prix ;
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a jugé que Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] n'ont pas été empêchés par SEQENS Group Bidco d'investir dans le cadre de l'opération ;
- CONFIRMER que le versement du complément de prix n'a pas été détourné au travers d'un plan d'attribution gratuite d'actions mis en place par le nouvel actionnaire du groupe SEQENS ;
En conséquence,
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a jugé infondée la demande de paiement du complément de prix par SEQENS Group Bidco ;
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a débouté Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions à l'égard de SEQENS Group Bidco.
Si par extraordinaire la Cour infirmait le jugement en ce qu'il a jugé que Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G] et [F] [B] n'ont pas été empêchés par SGB d'investir :
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a jugé que le préjudice subi par Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] est inexistant ;
En conséquence,
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre 2020 en ce qu'il a débouté Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions à l'égard de SEQENS Group Bidco.
Sur la condamnation solidaire des intimés au paiement de dommages et inrérêts
- CONFIRMER le jugement du 6 novembre en ce qu'il a débouté les appelants de leur demande de dommages et intérêts
A défaut,
- REJETER la demande de condamnation solidaire de SGB, Monsieur [N], AXA LBO FUND IV et Ardian en paiement de dommages et intérêts à l'égard de Monsieur [B]
- JUGER que le calcul des intérêts légaux ne peut courir à compter du 30 mars 2018 ;
- REJETER la demande de paiement des sommes avec application des intérêts légaux à compter du 30 mars 2018 ;
- JUGER que les arguments développés par Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] ainsi que les sociétés H2M ' Invest et DIVERRE ne justifient pas de prononcer l'exécution provisoire de la décision à venir,
- CONDAMNER in solidum Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] ainsi que les sociétés H2M ' Invest et DIVERRE à verser à Monsieur [U] [N] et la société Novacap Group SGB, la somme de 40.000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- CONDAMNER in solidum Messieurs [J] [V], [K] [P], [A] [G], [F] [B], Mesdames [R] [V] et [Y] [V] ainsi que les sociétés H2M ' Invest et DIVERRE aux entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de nullité du jugement du 3.07.2020
Les appelants demandent que la nullité du jugement du 3.07.2020 soit prononcée en ce qu'il ne constitue aucunement un jugement avant dire droit puisqu'il n'aménage pas une situation temporaire et n'ordonne aucune mesure d'instruction et qu'en tout état de cause l'établissement d'un calendrier de procédure relève de la compétence exclusive du juge rapporteur, et concluent que le jugement a donc été rendu en méconnaissance des articles 482, 483, 861-3 et 862 du code de procédure civile.
Monsieur [N] et SEQENS soutiennent que le jugement rendu le 3.07.2020 constituait un jugement avant dire droit puisqu'il a traité la demande de production forcée de pièces.
ARDIAN, AXA LBO Fund IV et Monsieur [Z] concluent au rejet de la demande faisant valoir en premier lieu qu'à supposer que la mention "jugement avant dire droit" serait inexacte cette circonstance ne saurait entrainer la nullité du jugement, en second lieu que le jugement intervenu a fixé un calendrier d'échanges de conclusions et la date de l'audience de plaidoirie de telle sorte que le terme "jugement avant dire droit" est exact, et en troisième lieu que le tribunal était compétent pour organiser les échanges entre les parties et non seulement le juge chargé d'instruire l'affaire.
Sur ce
Le jugement du 3.07.2020 statue sur la demande de communication de pièces même si il ne reprend pas dans son dispositif la décision adoptée, puisqu'il décide, dans sa motivation, de ne pas y faire droit et de renvoyer l'examen de chaque demande à l'examen au fond des demandes estimant que c'est seulement dans ce cadre que la pertinence des demandes de communication pourra être appréciée.
Par ailleurs le jugement organise l'échange des conclusions entre les parties étant précisé que cette compétence n'est pas exclusivement réservée au juge chargé d'instruire l'affaire.
Il en résulte que le jugement est un jugement avant dire droit puisque statuant sur la demande de communication de pièce, quand bien même il est affecté d'une erreur matérielle constituée par le fait que la décision prise dans le cadre de la motivation n'a pas été rappelée dans le dispositif de la décision, et organisant les échanges entre les parties.
Sur la demande de nullité du jugement du 6.11.2020
Les appelants demandent que le jugement soit déclaré nul:
-compte tenu du refus de renvoi de l'affaire devant une formation collégiale de plaidoirie en violation des dispositions de l'article L 772-1 du code de commerce et de l'article 871 du code de procédure civile, en indiquant qu'aucun délai pour demander le renvoi en collégiale n'est imposé, que la nécessité d'une collégialité s'est imposée après l'audience ayant donné lieu au jugement du 3 juin 2020 et que la demande de collégiale peut être faite même à l'audience
- en ce qu'il a écarté les conclusions n°5 et la pièce n°30 des appelants
- et en ce qu'il a débouté les appelants de leurs demandes de production forcée de pièces dans la mesure où les pièces dont la communication était réclamée étaient en lien direct avec l'objet du litige et sont nécessaires à sa solution comme permettant de déterminer les conditions juridiques et financières de l'opération de rachat de NOVACAP INTERNATIONAL, en ce qu'il était demandé: le montant total du complément de prix payé par SEQENS GROUP BIDCO suite au rachat, l'identité des bénéficiaires du plan d'actions gratuites accordées par NOVACAP GROUP HOLDING le jour de réalisation de la cession concomitamment à la décision de versement d'une somme de 22 millions d'euros à ARDIAN au titre du complément de prix de NOVACAP INTERNATIONAL et les modalités précises de ce paiement, l'identité des actionnaires minoritaires de NOVACAP INTERNATIONAL ayant été autorisés à réinvestir lors de l'opération de rachat, et la méthode de calcul ayant abouti à l'attribution d'une quote-part de 22 millions d'euros à ARDIAN FRANCE au titre du complément de prix pour comprendre comment le complément de prix a été calculé, qui l'a perçu, et à quelles conditions (de montant notamment).
Monsieur [N] et SEQENS soutiennent que les appelants n'ont à aucun moment lors de l'audience du 11 juin 2020 ni même avant pendant les deux ans de procédure, émis le souhait de voir cette affaire entendue par une formation collégiale et ont attendu le 27 juillet 2020 pour effectuer cette demande, que la cour ne pourra que rejeter la demande d'annulation et confirmer le jugement en ce qu'il a jugé irrecevable la demande de renvoi en collégiale.
Ils demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté les conclusions et pièces communiquées par les demandeurs la veille de l'audience en violation du principe du contradictoire, et en ce qu'il a rejeté la demande de communication forcée des pièces dans la mesure où les pièces demandées n'ont aucune utilité pour la résolution du litige.
ARDIAN, AXA LBO FUND IV et Monsieur [Z] soutiennent que les appelants ont clairement manifesté leur absence d'opposition à la mise en oeuvre des dispositions de l'article 871 du code de procédure civile puisque celle ci a été constaté dans le jugement avat dire droit du 3 juillet 2020, qu'ils ne pouvaient ensuite se dédire sauf à violer le principe de loyauté procédurale ou processuelle qui interdit à une partie de se contredire au détriment d'une autre dans un procès, qu'ils n'ont pas interjeté appel du jugement du 3 juillet 2020 avant le 7 décembre 2020, et que les conditions de mise en oeuvre de l'article 871 ont été respectées, que par ailleurs le développement des appelants sur le "constat d'audience de calendrier" qui a pour but de démontrer que la demande de plaidoirie en formation collégiale pouvait être formulée à l'audience, est inopérante puisque ce type de constat était en cours d'expérimentation devant deux formations qui n'étaient pas la formation qui a jugé de la présente affaire, et que par ailleurs ce "constat d'audience de calendrier" n'est pas établi lors de l'audience de plaidoirie mais lors d'une audience de procédure dont le but est de fixer le calendrier, qu'enfin l'article 5 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 autorisait le président du tribunal de commerce à déroger à la règle de la collégialité.
Sur ce
Par jugement du 3.07.2020 l'affaire a été renvoyée pour plaidoirie devant un juge rapporteur à l'audience du 17 septembre 2020 après avoir organisé l'échange des conclusions.
Le 27 juillet 2020, ainsi que le reconnaissent les intimés, les demandeurs ont fait une demande de renvoi en collégialité.
Il n'a pas été fait droit à cette demande de collégialité alors que l'article L 722-1 du code de commerce dispose que Sauf dispositions qui prévoient un juge unique, les jugements des tribunaux de commerce sont rendus par des juges statuant en formation collégiale, et que l'article 871 du code de procédure civile dispose que le juge chargé d'instruire l'affaire peut également si les parties ne s'y opposent pas tenir l'audience seul pour entendre les plaidoiries, ce qui a contrario signifie que lorsque la collégialité est demandée par l'une des parties le juge chargé d'instruire l'affaire ne peut pas l'entendre seul.
Les appelants se sont opposés, par leur demande de renvoi en collégialité, à ce que l'affaire soit entendue par un seul juge et cette demande dont le bien fondé n'a pas à être apprécié par le juge chargé d'instruire l'affaire puisque la collégialité est de droit, impose le renvoi de l'affaire devant une collégialité.
Le fait que les parties aient dans un premier temps acquiescé à la plaidoirie devant le juge chargé d'instruire l'affaire, ne permet pas de rejeter leur demande pour autant que cette manoeuvre ne soit pas dilatoire. En effet l'évolution du litige peut les amener à souhaiter la réunion d'une collégialité.
En l'espèce les appelants ont demandé le renvoi devant le tribunal statuant en collégialité le 27 juillet soit 24 jours après le jugement du 3 juillet 2020 ayant rejeté leur demande de communication de pièces. Cette demande n'était pas tardive au regard de la date de plaidoirie fixée au 17 septembre et ne peut donc être qualifiée de dilatoire.
Par ailleurs il n'a pas été fait application des dispositions de l'ordonnance 2020-304 par le juge chargé d'instruire l'affaire, pour refuser le renvoi en collégialité et en conséquence ce moyen ne peut être retenu pour rejeter la demande des appelants de voir prononcer la nullité du jugement.
En refusant de faire droit à la demande de plaidoirie devant une formation collégiale le tribunal de commerce a violé une disposition légale et a porté atteinte aux droits des appelants et en conséquence le jugement rendu doit être annulé.
Compte tenu de l'effet dévolutif de l'appel la cour est cependant saisie de l'ensemble des demandes portées devant elle.
Sur l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [U] [N]
Les appelants demandent que cette exception d'incompétence soit déclarée irrecevable car Monsieur [N] n'a pas indiqué dans ses conclusions la juridiction de renvoi et n'a finalement qu'indiqué oralement celle ci sur interrogation du juge rapporteur devant le tribunal de commerce.
Si l'exception d'incompétence était déclarée recevable les appelants demandent son rejet au motif que le contentieux né des fautes commises par Monsieur [N] dans l'exercice de son mandat relève de la compétence du tribunal de commerce puisque le mandat donné par Monsieur [B] à Monsieur [N] est l'accessoire d'actes relatifs à un acte de commerce s'agissant de la cession de contrôle de la société NOVACAP INTERNATIONAL.
Monsieur [N] et SEQENS exposent que la procédure est orale ce qui leur a permis de préciser leur demande de renvoi, que cette exception d'incompétence est donc recevable.
Ils soutiennent que le tribunal de commerce est incompétent pour connaitre des fautes commises dans le cadre d'un mandat civil et indiquent que Monsieur [N] n'est ni une société commerciale ni un commerçant par ailleurs.
Sur ce
La procédure étant orale devant le tribunal de commerce Monsieur [N] était bien fondé à compléter sa demande de renvoi en indiquant la juridiction compétente lors de l'audience de plaidoirie. Il convient donc de rejeter la demande d'irrecevablité tirée du fait que la juridiction de renvoi n'était pas indiqué dans les conclusions déposées en première instance et de dire recevable l'exception d'incompétence.
Dans le cadre du processus de cession Monsieur [N] est intervenu pour représenter certains actionnaires minoritaires regroupés dans les MANCO et a, à ce titre, représenté Monsieur [B] pour la signature des différents actes de cession de parts sociales.
Sa responsabilité est recherchée en qualité de mandataire de Monsieur [B] pour les fautes commises dans l'exercice de son mandat.
Ce mandat étant l'accessoire d'actes relatifs à un acte de commerce s'agissant de la cession de contrôle de la société NOVACAP INTERNATIONAL, il relève en conséquence de la compétence du tribunal de commerce, étant au surplus souligné que le mandat a été confié à celui qui était par ailleurs représentant des MANCO, et de la société cédée.
Il convient donc de rejeter l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [N].
Sur la mise hors de cause d'ARDIAN
Les appelants demandent la confirmation du jugement rendu le 6 novembre 2020 en ce qu'il a débouté ARDIAN FRANCE de sa demande de mise hors de cause, dans la mesure où ils recherchent la responsabilité personnelle d'ARDIAN FRANCE au titre des agissements frauduleux et délictuels commis par elle à titre personnel puisqu'elle a orchestré toute l'opération de cession et qu'elle a concouru à l'éviction des appelants pour les empêcher de toucher leur quote part du complément de prix devant leur revenir.
ARDIAN demande sa mise hors de cause en faisant valoir que seul le fonds qu'elle gère, AXA LBO FUND IV est partie au SPA, qu'elle même n'est pas partie au SPA et que sa responsabilité personnelle ne saurait donc être mise hors de cause.
Sur ce
La responsabilité d'ARDIAN est recherchée pour les fautes personnelles commises par elle, et pas seulement en sa qualité de gestionnaire du fonds AXA LBO FUND IV, sur le fondement de l'article 1382 ancien du code civil. En conséquence il convient de ne pas la mettre hors de cause au regard des demandes et moyens articulés contre elle.
La demande de mise hors de cause est rejetée.
Sur la demande de communication de pièces
Les appelants demandent la communication de diverses pièces s'agissant:
- du montant total du complément de prix payé par SEQENS GROUP BIDCO suite au rachat,
- de l'identité des bénéficiaires du plan d'actions gratuites accordées par NOVACAP GROUP HOLDING le jour de réalisation de la cession concomitamment à la décision de versement d'une somme de 22 millions d'euros à ARDIAN au titre du complément de prix de NOVACAP INTERNATIONAL et les modalités précises de ce paiement,
- de l'identité des actionnaires minoritaires de NOVACAP INTERNATIONAL ayant été autorisés à réinvestir lors de l'opération de rachat:
et ce pour vérifier que les bénéficiaires sont bien des actionnaires minoritaires cédants et qu'il étaient salariés de l'entreprise, ainsi que pour vérifier qu'il existe une corrélation entre les montants d'actions gratuites distribuées et les réinvestissements.
- et la méthode de calcul ayant abouti à l'attribution d'une quote-part de 22 millions d'euros à ARDIAN FRANCE au titre du complément de prix pour comprendre comment le complément de prix a été calculé, qui l'a perçu, et à quelles conditions (de montant notamment).
Monsieur [N] et SEQENS concluent au débouté de la demande de communication des pièces car ne réunissant pas les conditions des articles 138 et 139 du code de procédure civile puisque ces demandes portent sur de simples informations et non sur une pièce en tant que telles et les documents et informations demandés sont inutiles à la résolution du litige.
ARDIAN, AXA LBO FUND IV et Monsieur [Z] concluent que la production forcée des pièces et informations réclamées par les appelants ne se justifient pas car ne concernant pas les appelants ou étant indifférentes à la solution du litige ou encore n'étant pas pertinentes, étant précisé que certains documents et informations ne sont pas en leur possession.
Sur ce
La demande de communication est de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état de telle sorte que la demande présentée devant la cour est irrecevable.
De façon surabondante il convient de constater que la demande de communication porte sur des informations et non sur des pièces et qu'il était loisible aux appelants de faire délivrer une sommation interpellative aux intimés pour que ceux ci répondent aux questions posées.
Sur la demande des appelants de condamnation de SEQENS GROUP BIDCO à leur verser le complément de prix en exécution du SPA du 8.04.2016
Les appelants demandent paiement du complément de prix prévu par le SPA du 8.04.2016 en exécution de celui ci.
Les appelants exposent que lorsqu'ARDIAN a cédé à EURAZEO la participation majoritaire de son fonds AXA LBO FUND IV dans NOVACAP elle a négocié dans la plus grande opacité les conditions de sortie des actionnaires minoritaires, que les négociations ont permis de dissimuler aux actionnaires minoritaires les conditions juridiques et financières de l'opération,
Ils soutiennent que cette opacité sur les conditions de négociation a pris la forme d'une part d'un refus catégorique de circulariser en amont et dans un temps permettant de les négocier, les documents contractuels négociés par ARDIAN et d'autre part d'un refus de laisser les minoritaires signer les actes par eux même en leur imposant l'interposition de fondés de pouvoirs s'agissant de Monsieur [Z] et de Monsieur [N]. Ils indiquent que messieurs [V] [G] et [P] ont eu uniquement la communication du SPA, grâce à l'intervention de leur avocat et après signature de celui ci, et que Monsieur [B] qui n'avait pas d'avocat ne l'a pas obtenu. Ils expliquent que ces modalités leur ont été imposés sous la menace d'une mise en oeuvre des clauses de cession forcées prévues au pacte d'actionnaire qui sont moins avantageuses pour les minoritaires.
Ils soutiennent en conséquence qu'ils n'ont eu à aucun moment la possibilité de prendre connaissance du contenu exact de l'opération et de leurs obligations contractuelles au regard des pouvoirs qu'ils ont du signer qui permettent au mandataire de prendre seul l'initiative de négocier tout avenant qu'il juge nécessaire s'agissant des pouvoirs signés par messieurs [P], [V] et [G], le pouvoir signé par Monsieur [B] indiquant faussement qu'il a été informé des principales modalités et condtions de l'opération.
A ce titre ils soutiennent que l'avenant du 22.06.2016 qui supprime le complément de prix initialement prévu au profit des actionnaires réinvestisseurs, le réservant à l'actionnaire majoritaire sortant sans condition de réinvestissement leur est inopposable, et qu'il convient donc de revenir à l'application du SPA du 8.04.2016, car ils en ignoraient l'existence en faisant valoir qu'ils n'y ont jamais consenti et que l'acte accompli par leurs mandants respectifs a excédé les pouvoirs qui leur étaient accordés.
Ils précisent d'ailleurs que le complément de prix qui a ainsi disparu a été transformé en un plan de distribution gratuite d'actions mis en place par SEQENS d'un montant de 8 millions d'actions d'une valeur nominale de 1 euro, réservé à certains mandataires sociaux et membres du personnel de la société SEQENS GROUP HOLDING et/ou des sociétés qui lui sont directement ou indirectement liées, notamment la société SEQENS GROUP BIDCO selon décision du seul président.
S'agissant de l'application du SPA du 8.04.2016 ils exposent que deux conditions étaient prévues pour percevoir le complément de prix: d'une part le fait de parvenir à un seuil d'EBITDA cible en 2017 et d'autre part de réinvestir les fonds dans l'opération de rachat.
Or ils exposent qu'il ne peut leur être reproché de ne pas avoir réinvesti en faisant valoir:
-qu'il ne peut être présumé et supposé qu'ils auraient refusé de réinvestir, sur la base de la négociation intervenue avant la signature du SPA du 8.04.2016
- qu'une proposition de réinvestissement devait être faite par SEQENS préalablement à leur acceptation mais que SEQENS GROUP BIDCO ne leur a jamais proposé de réinvestir puisqu'il n'est versé aux débats aucune justification de proposition de réinvestissement de la part de SEQENS, qu'en conséquence SEQENS a fait sciemment obstacle à l'exécution de bonne foi du SPA du 8.04.2016 et a privé les appelants d'une partie du prix à laquelle il avait droit. Ils précisent à ce titre que cette condition de réinvestissement n'est pas un LBO dans lequel SGB pouvait librement choisir ses associés mais une quote-part de la valeur des actions créée avant leur cession qui doit revenir aux actionnaires cédants.
Ils concluent donc que la condition est réputée accomplie à leur profit.
Monsieur [N] et SEQENS soutiennent que le complément de prix a été purement et simplement supprimé pour les actionnaires minoritaires par l'avenant du 22.06.2016, peu important qu'ils soient réinvestisseurs et étant précisé que le complément de prix était prévu initialement pour les managers restant dans le groupe.
Subsidiairement ils contestent avoir fait obstacle au réinvestissement par les appelants dans le cadre de l'opération exposant qu'aucun d'entre eux ne prouve la volonté qu'il aurait exprimé de réinvestir ou son regret de ne pas avoir eu cette faculté à la date de l'opération.
Ils contestent que la finalité de la mise en place du plan d'attribution gratuite d'action ait été de se substituer à une partie du complément de prix exposant qu'un complément de prix et un plan d'AGA n'ont pas les mêmes finalités: le premier a pour objet d'ajuster le prix des titres d'une société cédée en prenant en compte des évènements qui ne seront connus que postérieurement au transfert de la propriété des titres et l'autre étant un mécanisme d'actionnariat salarié ayant pour finalité d'inciter certains salariés à rester dans l'entreprise.
ARDIAN, AXA LBO FUND IV et Monsieur [Z] soutiennent que la prise de contrôle par la société SGB dans le cadre du LBO secondaire a été formalisée par un contrat de cession signé le 8 avril 2016 et exécuté le 22 juin 2016 qui prévoyait sous certaines conditions la distribution d'un complément de prix pour les seuls actionnaires procédant à un réinvestissement mais que les appelants ont choisi de ne pas réinvestir les sommes issues de la cession de leurs titres, qu'ils sont malfondés à soutenir qu'il ne leur aurait pas été proposé de réinvestir dans la mesure où il leur suffisait en application de l'article 7.3 de le faire savoir mais qu'à aucun moment ils n'ont émis ce souhait.
Ils font valoir que, dans le courant du mois de juin 2016 quelques jours avant la réalisation de l'opération, EURAZEO et les actionnaires réinvestisseurs, dont ne faisaient pas partie les appelants, ont négocié que les 8 millions d'euros qui pouvaient leur revenir au titre de l'Earn Out leur soient distribués sous une autre forme et qu'il a été indiqué à ARDIAN que cette distribution pourrait prendre la forme d'une participation au capital du groupe NOVACAP de telle sorte qu'il a été demandé à ARDIAN de signer un avenant, rédigé par l'acheteur et soumis à ARDIAN qui conservait uniquement la mention de la quote-part de 22 millions d'euros pouvant lui revenir, que l'avenant a donc uniquement modifié les modalités de distribution de l'Earn-Out pour les actionnaires minoritaires réinvestisseurs.
Ils exposent que la force obligatoire du SPA s'impose aux appelants qui y ont pleinement consenti via la signature des mandats et que la Cour de cassation considère que les clauses d'un contrat conclu par le mandataire dans la limite de son pouvoir s'imposent au mandant, quand bien même ce dernier n'en a pas eu connaissance.
Sur ce
Les appelants étaient actionnaires minoritaires du groupe NOVACAP et regroupés dans des sociétés de managers, des MANCO et en particulier les MANCO ALCHIMIE II et III. Les vendeurs MANCOS ont été représentés par [U] [N] et [E] [Z] dans le cadre du processus de vente et en particulier pour la signature du Share Purchase Agrement du 8.04.2016 selon mandats donnés:
- par Monsieur [B] à Monsieur [N] le 25.03.2016
- par Monsieur [V] à Monsieur [Z] le 8.04.2016
- par Monsieur [G] à Monsieur [Z] le 8.04.2016
- par Monsieur [P] à Monsieur [Z] le 8.04.2016.
Aux termes de ces pouvoirs les mandataires disposaient d'un pouvoir général de négociation et de conclusion de tout accord au profit de leurs mandants dans le cadre de la cession.
Le SPA du 8.04.2016 a été signé par:
- AXA LBO FUND IV représenté par sa société de gestion ARDIAN représentée par Monsieur [Z] en qualité de cédant majoritaire,
- Monsieur [U] [N] à titre personnel,
- ANABASE représenté par Monsieur [Z],
- [ZC] [D], [X] [T], [O] [C], représentés par Monsieur [Z]
- [S] [M] représenté par Monsieur [N]
- les vendeurs MANCO I représentés par Monsieur [N],
- les vendeurs MANCO II, III et IV représentés par Monsieur [N] et Monsieur [Z]
en qualité de cédants minoritaires
- LEGENDRE HOLDING 48 en qualité d'acquéreur.
L'acte de cession du 8.04.2016 (SPA) prévoit le versement d'un prix de cession de 220.000 millions d'euros et 30 millions de complément de prix au Représentant des Vendeurs (pour le compte des fonds qu'il représente et gère) et aux Vendeurs qui réinvestissent une partie du produit résultat de la transaction dans l'Acquéreur sous réserve de conditions de performance financière.
Le document d'engagement d'adhésion au SPA aux termes duquel le signataire reconnaissait avoir eu communication du SPA a été signé:
- le 28.05.2016 par Monsieur [V].
- le 29.05.2016 par Monsieur [G]
- le 30.05.2016 par Monsieur [P]
- le 10.06.2016 par Monsieur [B]
Ceux ci ont donc pris connaissance des termes du SPA.
Au jour de la réalisation de la cession, le 22.06.2016, un avenant a été signé.
Aux termes de cet avenant seul AXA LBO FUND IV perçoit un complément de prix de 22 millions d'euros si l'EBITDA atteint un montant cible et il n'est plus prévu de complément de prix pour les actionnaires réinvestisseurs (aucune condition de réinvestissement d'AXA LBO FUND IV n'étant indiquée).
Cet avenant a été signé par les mêmes personnes que le SPA soit par Monsieur [Z] pour le fonds cédant et divers actionnaires minoritaires, par Monsieur [N] pour son compte et celui de divers actionnaires minoritaires et par le fonds acquéreur.
Dans la mesure où il avait été donné par les appelants mandat à messieurs [N] (pour Monsieur [B]) et [Z] (pour Messieurs [P], [G] et [V]) de signer en leur nom tout accord de cession, la signature de cet avenant par les mandataires est opposable aux mandants de telle sorte qu'ils ne peuvent écarter aujourd'hui l'application de l'avenant signé en leur nom.
L'avenant du 22.06.2016 supprimant tout versement de complément de prix aux actionnaires minoritaires, et étant opposable aux appelants, ceux ci sont mal fondés à demander à SGB l'exécution d'une clause mise à néant par un accord ultérieur entre les parties.
Il y a donc lieu de constater qu'aucun complément de prix n'a finalement été prévu dans le cadre de la cession des actions de la société NOVACAP INTERNATIONAL au profit des actionnaires minoritaires et en conséquence de débouter les appelants de leur demande de paiement articulée contre SGB, fondée sur l'exécution de la clause 4 du SPA.
Sur la demande de dommages et intérêts formées contre SEQENS GROUP BIDCO, ARDIAN France, AXA LBO FUND IV représenté par sa société de gestion ARDIAN France, Monsieur [E] [Z] et Monsieur [U] [N]
Les appelants indiquent que leur demande de dommages et intérêts vise à réparer le préjudice subi par les appelants si la Cour considère que l'avenant du 22 juin 2016 leur est opposable et que SEQENS GROUP BIDCO n'est pas condamnée au paiement des sommes réclamées en application du SPA du 8 avril 2016.
Ils fondent leur demande de condamnation des intimés:
- sur le terrain de la responsabilité délictuelle aux motifs de conditions de cession discriminatoires aux terme du SPA du 8 avril 2016, et et, in fine, d'une substitution frauduleuse du complément de prix dû à tous les cédants par un plan d'actions gratuites attribuées uniquement à quelques salariés du groupe et dont l'identité est inconnue.
- et, s'agissant particulierement des mandataires, sur le fondement de l'article 1992 du code civil.
Ils soutiennent que cette fraude aux droits des appelants a été rendue possible grâce aux comportements de Messieurs [E] [Z] et [U] [N] qui ont ouvertement outrepassé leurs mandats dans le but de permettre la réalisation de l'opération de cession aux préjudices des appelants et à la collusion frauduleuse entre ARDIAN FRANCE, son fonds AXA LBO FUND IV, et SEQENS GROUP BIDCO au préjudice des cédants minoritaires.
Ils déclinent la responsabilité des différents intimés de la façon suivante:
S'agissant d'ARDIAN, de son fonds et de SGB ils font valoir qu'il existe une collusion frauduleuse entre eux au préjudice des cédants minoritaires.
Plus particulièrement concernant ARDIAN ils font valoir que ARDIAN est intervenu en qualité de représentant des vendeurs et qu'elle devait négocier au nom et pour le compte de tous les vendeurs actionnaires minoritaires, que cependant elle a abusé de sa position d'actionnaire majoritaire et de représentant des vendeurs pour prévoir une clause de complément de prix à son seul profit et a soumis les appelants à un véritable chantage confinant à la violence économique en leur imposant les conditions de cession sous la menace d'abuser de son droit de cession forcée prévu par le pacte d'actionnaires qui aurait conduit à une valorisation moindre des titres des appelants puisqu'ils auraient perdu l'effet « ratchet » de leurs actions.
Ils exposent ainsi que la clause de complément de prix telle qu'elle figure au SPA les prive d'une partie de la valeur de leurs titres puisque le complément de prix est réparti différement entre les actionnaires ce qui revient à considérer que le prix n'est pas le même pour tous les actionnaires alors que le complément de prix étant une fraction du prix des titres cédés ne peut être décorrélé de la valeur unitaire de ces titres.
Ils indiquent qu'en application des dispositions de l'article 1844-1 du code civil le complément de prix ne peut pas dépendre d'une condition de réinvestissement des cédants imposée uniquement aux minoritaires alors qu'en l'espèce tel est le cas puisque l'article 4 du SPA du 8.04.2016 ne prévoit aucune condition de réinvestissement imposée à AXA LBO FUND IV et que ARDIAN ne rapporte pas la preuve que c'est bien le fonds AXA LBO FUND IV qui a réinvesti.
Ils exposent que cette situation discriminatoire est d'autant plus illicite qu'elle dépend, au surplus, exclusivement de la volonté de l'acquéreur.
Ils font valoir que la condition de réinvestissement est contraire aux pactes d'associés et aux contrats de souscription des ABSA de 2011 et 2014, et que l'acte de cession a violé les règles de valorisation des ABSA détenues par les appelants.
Ils concluent que ARDIAN a négocié les actes de cession en violation manifeste des pactes d'associés et des contrats d'émission des ABSA pour s'accaparer une quote-part du complément de prix à laquelle elle n'a pas le droit puisque sa quote-part devait être de 19.105.016,90 euros et non pas 22 millions « tout rond ».
Ils font valoir que la condition de réinvestissement négociée par ARDIAN est en outre purement potestative puisque le réinvestissement dans SEQENS GROUP BIDCO dépend uniquement du bon vouloir de cette société, et est donc nulle.
Ils retiennent en conséquence que la faute d'ARDIAN et du fonds AXA LBO FUND IV apparaît de manière très évidente et est constitué par un abus de représentation des vendeurs et un abus de la position d'actionnaire majoritaire du fonds sortant et pour consentir à SEQENS GROUP BIDCO des conditions de cession des minoritaires dégradées afin d'obtenir corrélativement une amélioration des conditions financières de sortie d'AXA.
S'agissant de SGB ils avaient développé, au titre de leur demande de paiement en exécution du SPA, le fait qu'une proposition de réinvestissement devait être faite par SEQENS préalablement à leur acceptation mais que SEQENS GROUP BIDCO ne leur a jamais proposé de réinvestir puisqu'il n'est versé aux débats aucune justification de proposition de réinvestissement de la part de SEQENS, qu'en conséquence SEQENS a fait sciemment obstacle à l'exécution de bonne foi du SPA du 8.04.2016.
Ils concluent ainsi que ARDIAN et SEQENS GROUP BIDCO ont commis une faute en détournant le complément de prix par un plan d'actions gratuites réservé à certaines personnes anonymes qui s'est substitué au complément de prix.
S'agissant des fautes commises par Messieurs [N]et [Z], ils exposent que ceux ci ont commis des fautes :
- en leur qualité d'organisateurs de l'opération de cession:
Monsieur [U] [N] qui était à la fois dirigeant de NOVACAP INTERNATIONAL, de la société SEQENS GROUP BIDCO et de la société SEQENS GROUP HOLDING qui est la société mère de SGB, était de ce fait juge et partie puisqu'il était à la fois le plus important actionnaire minoritaire cédant et le représentant légal de l'acquéreur, et que cette double qualité lui a permis de négocier ses intérêts personnels au préjudice de ceux des autres actionnaires minoritaires, qu'en particulier c'est lui qui a décidé du plan d'attribution d'actions gratuites qui s'est substitué au complément de prix,
Monsieur [E] [Z] (salarié d'ARDIAN) a représenté ARDIAN tout au long des négociations de la cession, a été chargé de la négociation du complément de prix et sa fixation (par une formule de calcul que les parties ignorent toujours) à la somme de 22 millions d'euros, a mandaté pour cabinet GRAND THORTON qui a fixé le complément de prix au montant maximal de 30 millions d'euros, et a signé l'avenant du 22 juin 2016.
Messieurs [E] [Z] et [U] [N] sont donc directement responsables de l'organisation et de la mise en 'uvre de la fraude aux droits des appelants
- et en leur qualité de mandataires des appelants:
Ils ont à ce titre dévoyé les mandats qui leur avaient été confiés et ont supris le consentement des appelants qui ignoraient que les pouvoirs remis allaient servir à la signature d'actes autres que le SPA du 8 avril, ils ont également manqué à leur obligation de rendre compte de l'exercice de leur mandat puisqu'ils n'ont pas informé les appelants de l'existence d'une négociation postérieure au SPA du 8.04.2016, ils n'ont jamais transmis les actes négociés, ils n'ont pas interrogé les appelants pour savoir s'ils acceptaient de signer les actes postérieurs au 8.04.2016 et ne leur ont pas demandé leur autorisation et ont donc violé les dispositions de l'article 1993 du code civil.
SGB et Monsieur [N] contestent le fait que le plan d'attribution gratuite d'actions se soit substitué au complément de prix initialement prévu exposant que les deux mécanismes relèvent de régime et d'objectif différents, que SGB n'a pas jugé utile de mentionner la mise en place du plan d'AGA puisque les appelants n'étaient pas concernés et qu'il n'y a eu aucun versement d'un complément de prix aux anciens actionnaires managers du groupe ou même à ceux qui réinvestissaient, qu'aucun détournement n'a donc été opéré.
Monsieur [N] conclut qu'il a parfaitement rempli sa mission de mandataire à titre gratuit indiquant et n'a commis aucune faute. Il explique qu'en qualité de dirigeant il a représenté les actionnaires minoritaires dans le cadre des discussions entre le vendeur principal et l'acquéreur potentiel au regard du caractère confidentiel des discussions et du nombre important d'actionnaires minoritaires mais qu'il n'avait pas de marge de négociation dans le cadre de ce mandat.
Il conteste les accusations portées contre lui en soulignant qu'en qualité de principal actionnaire minoritaire du groupe il aurait bénéficié d'un important complément de prix si la clause de complément de prix avait été maintenu et que l'attribution gratuite d'actions pour le cas où il en aurait bénéficié ne remplace pas ce complément de prix dans la mesure où la perception d'un produit pour le bénéficiaire est conditionnée à la prise de valeur des actions dans l'intervalle de l'attribution et de la cession.
Il indique qu'il ressort du pouvoir qui lui a été donné que Monsieur [B] était parfaitement au courant des conditions de l'opération et il soutient avoir continuellement informé son mandant à compter de la signature du pouvoir, qu'en particulier il a expliqué à Monsieur [B] lors de son entretien avec lui le 6 mai 2016 que des discussions étaient en cours entre l'actionnaire majoritaire entrant et l'actionnaire majoritaire sortant en vue de supprimer le bénéfice du supplément de prix aux minoritaires, ce qui avait pour conséquence des conditions de sortie pour ceux ci très en dessous de leurs espérances, que Monsieur [B] suite à cet entretien, y a fait référence dans un email envoyé à Monsieur [W]. Il conteste donc les allégations de Monsieur [B].
ARDIAN, AXA LBO FUND IV représenté par sa société de gestion ARDIAN et Monsieur [Z] contestent toute opacité ayant entouré l'opération de cession et revendiquent la parfaite transparence des négociations qui ont mené à la signature du SPA du 8 avril 2016 soulignant que l'opération s'est faite de gré à gré et que les appelants étaient libres de ne pas y participer.
Ils exposent qu'ARDIAN n'a pas été mandaté pour représenter les appelants en l'absence de mandat signé avant et après le SPA, alors que ce mandat doit être exprès, et concluent qu'aucun mandat n'existant celui ci ne peut avoir été dévoyé.
Ils font valoir que les appelants ont reçu paiement du prix de leurs actions tel que prévu par l'article 3 du SPA et indiquent que rien n'interdit de procéder à un traitement différencié des actionnaires, qu'au contraire le droit des sociétés autorise l'application d'une décôte de minorité aux actions vendues par les minoritaires dès lors que ces titres ne confèrent pas le même degré de contrôle sur la société que les titres du majoritaire et s'agissant de l'application du SPA soutiennent que le seul critère était celui d'un réinvestissement d'une partie du produit résultant de la transaction et que ARDIAN répondait à ce critère puisque la société a réinvesti et est actionnaire à hauteur de 18% dans le capital de NOVACAP, qu'il en ressort que tous les actionnaires ont été traités de la même manière à savoir que si ils souhaitaient bénéficier de l'Earn Out il leur appartenait de réinvestir.
Ils contestent toute violation du pacte d'associés, les articles visés par les appelants s'appliquant en cas de cession forcée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, et font valoir qu'il est contradictoire d'engager une demande de condamnation fondée sur le terrain de la responsabilité delictuelle sur la base d'une violation du pacte d'associé. Ils contestent également toute violation des contrats d'émission des ABSA.
S'agissant de la condition de réinvestissement ils exposent qu'il ne s'agit pas d'une clause potestative mais d'une condition prélable de l'obligation de paiement de l'Earn Out si les conditions de performance sont remplies, s'agissant de réserver ce complément de prix aux associés qui réinvestissent. Ils soutiennent à ce titre qu'il n'appartenait pas aux intimés de proposer aux appelants de réinvestir mais aux appelants de manifester leur souhait de le faire puisqu'ils avaient le droit d'opter pour l'apport et qu'il leur appartient donc de rapporter la preuve qu'ils ont réclamé l'application de l'option "apport".
Ils exposent que la mise en oeuvre d'un plan d'AGA par l'acquéreur ne concerne pas les intimés qu'ils sont, et ne saurait caractériser une quelconque faute délictuelle commise par eux et qu'en conséquence les appelants sont mal fondés à leur reprocher la substitution du complément de prix en plan d'AGA.
S'agissant du mandat de Monsieur [Z] ils soutiennent qu'aucune faute ne peut lui être reprochée, qu'en effet les allégations proférées s'agissant pour Monsieur [Z] d'avoir méconnu les intérêts de ses mandataires pour privilégier celui de l'actionnaire majoritaire ne sont établies par aucune pièce, que par ailleurs le fait que Monsieur [Z] soit salarié d'ARDIAN ne constitue pas une preuve de ce que les appelants soutiennent, qu'enfin il est reproché à Monsieur [Z] une faute délictuelle en citant uniquement les dispositions concernant le contrat de mandat, que par ailleurs Monsieur [Z] était en contact avec ses mandants et les a informé de la teneur du projet de cession, a recueilli leur accord et n'était mandaté que pour signer les documents contractuels, qu'enfin l'avenant n'avait vocation à régir que les relations entre l'acheteur et les actionnaires réinvestisseurs et qu'il est donc inopérant de faire grief à Monsieur [Z] d'avoir tu aux appelants l'existence de cet avenant qui ne les concernait pas.
Sur ce
La cession a fait intervenir:
- en qualité d'acquéreur LEGENDRE HOLDING 48 devenue NOVACAP GROUP BIDCO devenue SEQENS GROUP BIDCO
- et en qualité de vendeurs le fonds d'investissement AXA LBO FUND IV représenté par sa société de gestion ARDIAN France elle même représentée par Monsieur [Z], et les actionnaires minoritaires.
Le SPA du 8.04.2016 a été ainsi signé s'agissant des vendeurs, par:
- AXA LBO FUND IV représenté par sa société de gestion ARDIAN représentée par Monsieur [Z] en qualité de cédant majoritaire,
- Monsieur [U] [N] à titre personnel,
- ANABASE représenté par Monsieur [Z],
- [ZC] [D], [X] [T], [O] [C], représentés par Monsieur [Z]
- [S] [M] représenté par Monsieur [N]
- les vendeurs MANCO I représentés par Monsieur [N],
- les vendeurs MANCO II, III et IV représentés par Monsieur [N] et Monsieur [Z]
en qualité de cédants minoritaires.
Les cédants ont donc tous été représentés par Messieurs [N] et [Z].
Par ailleurs il y a lieu de rappeler que Monsieur [N], PDG de la société cédée, NOVACAP INTERNATIONAL, au moment de la cession, en est resté PDG après la cession de la société.
En outre le 22.06.2016 jour de la cession de NOVACAP INTERNATIONAL, et de la signature de l'avenant litigieux, il est devenu président:
- de la holding d'acquisition de NOVACAP INTERNATIONAL: LEGENDRE HOLDING 48 devenue NOVACAP GROUP BIDCO devenue SEQENS GROUP BIDCO
- mais également de la société mère de SGB, la société NOVACAP HOLDING GROUP regroupant les différents actionnaires: EURAZEO intervenant par sa société dédiée LH NOVACAP, Merieux Participation, Ardian Nobel SCS représentée par ARDIAN Co-Investment IV GP, ManArgon, ManHelium et ManNéon, trois sociétés de managers, dont Monsieur [N] était également président.
Sur l'intervention des deux personnes physiques
Monsieur [Z] est donc intervenu tant pour l'actionnaire majoritaire sortant que pour certains des actionnaires minoritaires.
Or les intérêts du fonds majoritaire sortant ne sont pas obligatoirement les mêmes que ceux des actionnaires minoritaires qu'ils soient ou non réinvestisseurs. En l'espèce cette absence de concordance d'intérêt relève de la seule lecture du SPA qui a confirmé le versement d'un earn-out pour le fonds cédant à hauteur de 22 millions d'euros et l'a supprimé pour les actionnaires minoritaires.
Monsieur [N] est intervenu dans le processus de cession à titre personnel compte tenu de sa qualité de premier actionnaire minoritaire, et en qualité de mandataire de certains actionnaires minoritaires.
PDG de la société cédée, il est devenu président de la société cessionnaire, de la holding d'acquisition et des nouvelles MANCO. Il ressort par ailleurs des éléments versés aux débats qu'il est devenu actionnaire minoritaire de NOVACAP GROUP HOLDING par l'apport de ses titres de NOVACAP INTERNATIONAL comme en rapporte la preuve le PV d'AG de NGH en date du 22.06.2016.
Le jour de la cession, du fait de la nomination de Monsieur [N], PDG de la société cédée, aux postes de président de la cessionnaire et de la société mère de la cessionnaire et du fait de l'apport des titres intervenus, les intérêts financiers de Monsieur [N] se sont donc alignés avec les intérêts de la société cessionnaire. Or les intérêts des cédants et du cessionnaire sont contraires: si l'intérêt partagé des parties est de conclure la cession, leurs intérêts divergent concernant les conditions financières de cette cession. Or les intérêts de Monsieur [N] concordaient avec ceux du fonds cessionnaire à partir du moment où il prenait la tête des sociétés acquéreurs et où il réinvestissait massivement dans celles ci et la divergence d'intérêts entre lui et les cédants minoritaires non réinvestisseurs s'est concrétisée dans la conversion de l'earn-out en plan d'attribution gratuite d'actions.
Sur la transformation du complément de prix en plan d'attribution gratuite d'actions
Il ressort de l'aveu même d'ARDIAN, AXA et Monsieur [Z] que la diminution du complément de prix de 8 millions d'euros est en correlation avec la mise en place d'un plan d'attribution gratuite d'action par la société cessionnaire. Les intimés indiquent ainsi en page 11 de leurs conclusions que dans le courant du mois de juin 2016, quelques jours avant la réalisation de l'opération Eurazeo et les actionnaires réinvestisseurs -dont ne font pas partie les appelants - ont négocié que les 8 millions d'euros qui pouvaient leur revenir au titre de l'Earn Out leur soient distribués sous une autre forme. Il a été indiqué à Ardian que cette distribution pourrait prendre la forme d'une participation au capital du groupe Novacap; Dans ce cadre il a été demandé à Ardian de signer un avenant, rédigé par l'acheteur et soumis à Ardian, qui conservait uniquement la mention de la quote-part de 22 millions d'euros pouvant lui revenir.
Cet aveu des intimés est confirmé par:
- la concommitance des opérations: le 22.06.2016 l'avenant litigieux supprime l'Earn-out pour les actionnaires minoritaires réinvestissant et le même jour à 7h les actionnaires de NOVACAP HOLDING GROUP société mère de la société cessionnaire, SGB, qui sont alors LH Novacap (à hauteur de 90%) et Merieux Participation 2 (à hauteur de 10%) décident en assemblée générale d'un plan d'attribution gratuite d'actions ne pouvant excéder 10% du capital social de la société (apprécié au jour de la décision d'attribution par le Président, sur une base non diluée)
- la quasi équivalence des sommes: l'Earn Out supprimée est de 8 millions d'euros et il résulte du règlement du plan d'attribution d'actions gratuites en date du 22 juin 2016 (pièce 26 ARDIAN) que ce plan a concerné la distribution de 7.000.000 actions de préférence de catégorie 3 d'une valeur nominale de 1 euro chacune.
Par ailleurs l'intérêt de cette modification pour le cessionnaire était:
- d'une part de ne pas débourser la somme de 8 millions d'euros, au profit d'une dilution modeste de son capital (du fait de l'augmentation du capital associée à la création de nouvelles actions),
- d'autre part et surtout de mettre en place un dispositif d'incitation à la création de valeur pour l'entreprise, au profit de certains salariés clés, en lieu et place de la rémunération d'actionnaires cédants.
Sur l'absence de réinvestissement des appelants
Les intimés font valoir que les appelants ne peuvent en tout état de cause, pas prétendre à l'application de la clause 4 du SPA dans la mesure où ils n'étaient pas réinvestisseurs et concluent qu'ils n'ont donc été privés d'aucun droit si la conversion Earn-Out-AGA était retenue.
La clause 4 prévoyant le complément de prix est rédigée de la façon suivante:
Contrepartie Supplémentaire
En outre l'Acquéreur paye au Représentant des Vendeurs (pour le compte des fonds qu'il représente et gère) et aux Vendeurs qui réinvestissent une partie du produit résultant de la Transaction dans l'Acquéreur, une contrepartie différée d'un montant maximum de 30.000.000 euros (trente millions d'euros) (la "contrepartie supplémentaire") sous réserve des modalités et conditions énoncées en Annexe 8 (rémunération au titre de la contrepartie conditionnelle) et conformément à celles-ci. La rémunération au titre de la contrepartie conditionnelle est payée par l'acquéreur conformément à l'article 20(a).
Il résulte de la rédaction de la clause que le réinvestissement n'est pas réservé aux actionnaires salariés travaillant dans les sociétés du groupe cédé mais est ouvert à tous les actionnaires sortants.
Par ailleurs cette clause 4 est totalement taisante sur l'organisation du processus de réinvestissement:
-il n'est pas précisé l'identité de la personne morale ou physique devant mettre en oeuvre la clause de réinvestissement: en particulier il n'est pas indiqué si ce sont les vendeurs qui doivent spontanément exprimer leur souhait de réinvestir,
- aucune modalité de consultation ou de notification du souhait de réinvestir n'est prévue (mail, lettre recommandée ...): en particulier aucun document n'est proposé en annexe du SPA pour formaliser une demande de réinvestissement alors même que le SPA a été remis aux différents actionnaires minoritaires qui avaient donné pouvoir à Messieurs [Z] ou [N] postérieurement à sa signature (le 28.05.2016 par Monsieur [V], le 29.05.2016 par Monsieur [G], le 30.05.2016 par Monsieur [P], le 10.06.2016 par Monsieur [B]).
- aucun planning n'est prévu: il n'est pas indiqué de date butoir pour que les actionnaires minoritaires expriment leur demande de réinvestissement.
Le SPA comprend pour sa part plusieurs dates de réalisation s'agissant de la plus tardive des deux dates suivantes; le 19 mai 2016 ou le dixième jour ouvré après que les conditions sont toutes satisfaites ou ont fait l'objet d'une renonciation, ou à toute autre date pouvant être convenue par écrit par le représentant des vendeurs et de l'acquéreur de telle sorte que les actionnaires souhaitant réinvestir, qui ne connaissaient pas la date limite pour notifier leur demande (pour autant que l'on considère qu'il leur appartenait d'effectuer une démarche volontaire), à qui le SPA a été notifié postérieurement à la date de réalisation fixée au 16.05.2016, étaient dans l'impossibilité de connaitre la date de réalisation de la cession et donc d'anticiper pour exprimer leur demande de réinvestissement, voire même pouvaient penser que la cession s'était déjà réalisée au jour où le SPA leur a été notifié.
- l'annexe 8 relative au complément de rémunération ne prévoit aucunement le mode de répartition de l'éventuel complément et en particulier ne précise pas si celui ci doit être réparti au prorata du réinvestissement ou au prorata de la répartition initiale dans le capital social.
Cette absence de précision est à mettre en relation avec l'extrême précision des autres clauses du contrat comme par exemple la clause de transferts de titres avant réalisation qui organise de façon précise le planning de réalisation et notification desdits transferts.
Le SPA organise les opérations de réinvestissement concernant les vendeurs MANCO à l'article 7.3 de la façon suivante:
(a) Sans préjudice des stipulations de l'Article 7.3 (d) ci dessous, chacun des vendeurs MANCO avec l'approbation préalable de l'acquéreur, a le droit d'opter pour l'apport (plutôt que la cession) à l'acquéreur (ou à tout véhicule ad'hoc désigné par l'Acquéreur et mis en place pour détenir directement ou indirectement, des titres de l'Acquéreur), à la date de réalisation, sous réserve de l'acquisition par l'Acquéreur des autres titres acquis et concommitament à celle-ci, de tout ou partie des titres Manco qu'il ou elle détient en propriété (et/ou des Titres de la Société que Monsieur [U] [N] et Monsieur [S] [M] détiennent chacun, en propriété) (les Titres apportés)en contrepartie d'actions et/ou autres titres à émettrepar l'acquéreur, ou du véhicule ad'hoc désigné par l'acquéreur à la date de réalisation, à une valeur d'apport par Titre Manco (et/ou Titre de la Société détenu par Monsieur [U] [N] et Monsieur [S] [M]) égaux en valeur au prix d'achat applicable à ce titre au terme de l'article 3(b)
(b) Monsieur [U] [N] agissant en qualité de représentant de tous les vendeurs MANCO désireux d'apporter les titres apportés, notifiera au Représentant des Vendeurs et à l'Acquéreur le nombre de titres apportés pour chaque vendeur MANCO concerné au plus tard 10 jours ouvrés avant la date de réalisation. Chaque vendeur effectuant un apport convient par la présente de conclure une convention d'apport (suivant un modèle à convenir entre M. [U] [N] et l'Acquéreur) (la "Convention d'apport") avec l'Acquéreur ou le véhicule ad hoc désigné par l'Acquéreur au plus huit (8) jours ouvrés avant la date de réalisation.
Ces dispositions ne font cependant pas référence à l'article 4 prévoyant la clause de Earn-Out qui dispose que le complément de prix sera versé aux actionnaires minoritaires réinvestisseurs.
Il ne peut qu'être constaté par ailleurs, de façon identique à l'article 4, l'extrême imprécision de la clause s'agissant tant des modalités de mise en oeuvre de la demande de réinvestissement que du planning: en particulier il n'est pas indiqué qui doit mettre en place le processus de consultation ou d'information des actionnaires MANCO, aucun planning d'information/consultation/réponse/approbation n'est organisé et la seule date indiquée est celle de la notification par Monsieur [N] au représentant des vendeurs et à l'acquéreur du nombre de titres apportés par chacun des actionnaires MANCO, date imprécise puisque dépendant de la date de réalisation elle même imprécise.
La cour constate par ailleurs:
- qu'aucun élément n'est versé aux débats concernant la mise en oeuvre de la clause 4: aucune liste d'actionnaires réinvestisseurs n'est versée aux débats, ni même aucun mail de certains actionnaires ayant exprimé leur souhait de réinvestir
- qu'aucun élément n'est versé aux débats concernant la mise en oeuvre de la clause 7.3: aucune liste d'actionnaires réinvestisseurs n'est versée aux débats, aucun document concernant l'approbation de l'acquéreur aux demandes des actionnaires minoritaires souhaitant réinvestir n'est versé aux débats, et ce alors même que Monsieur [N] en qualité de représentant de tous les vendeurs MANCO désireux d'apporter les titres apportés devait notifier au représentant des vendeurs et à l'acquéreur le nombre de titres apportés pour chaque vendeur MANCO.
Or il résulte des statuts des nouvelles MANCO: ManNEON, ManARGON et ManHELIUM et des traités d'apports de titres, que des personnes physiques ont apportées les titres des anciennes MANCO ALCHEMIE 2, 3 et 4 aux nouvelles MANCO, et du PV d'AG de la société NOVACAP GROUP HOLDING du 22.06.2016 que les nouvelles MANCO lui ont fait apport des actions NOVACAP INTERNATIONAL (obtenus par l'apport des titres des anciennes MANCO) en contrepartie d'actions de la société NOVACAP GROUP HOLGING.
Enfin on comprend mal, si seuls les actionnaires réinvestisseurs étaient en droit d'accepter l'avenant du 22.06.2016 ayant supprimé le complément de prix initialement prévu, comme le soutiennent Monsieur [Z], ARDIAN et AXA LBO FUND IV, pourquoi l'ensemble des signataires du SPA du 8.04.2016 sont intervenus à la signature de l'avenant, dont Messieurs [Z] et [N] pour le compte des vendeurs MANCO sans que cette intervention ne soit limitée par des indications précises, aux actionnaires réinvestisseurs.
Il résulte de ces différentes constatations que les clauses 4 et 7.3 qui prévoyait pour la première la condition de réinvestissement pour percevoir l'Earn Out et pour la seconde organisation les modalités de l'apport en titres pour les vendeurs MANCO sortants, sont marquées par leur imprécision qui interdit toute application effective spontanée par les cédants.
Par ailleurs le processus de réinvestissement s'est déroulé dans des conditions de dissimulation par rapport aux actionnaires minoritaires cédants, contraires à la loyauté et à la transparence qui doivent présider à l'exécution d'un contrat.
Sur l'exécution du mandat par les mandataires
L'article 1993 dispose que tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eut point été dû au mandant.
En l'espèce aucun élément n'est versé aux débats rapportant la preuve que Messieurs [N] et [Z] aient communiqué à leurs mandants l'avenant du 22.06.2016 avant l'introduction de l'instance au cours de laquelle cette communication a été réalisée pour la première fois.
Les mandataires ont donc commis une faute en ne rendant pas compte de leur gestion à leurs mandants.
Sur la collusion frauduleuse
Il ressort de l'ensemble des éléments rappelés ci dessus:
- que Messieurs [N] et [Z] intervenaient à plusieurs titres dans l'opération de cession, leurs interventions relevant d'intérêts divergents comme il a été rappelé ci dessus
- que dans le cadre de la cession le cessionnaire s'est engagé au versement d'un complément de prix sous certaines conditions, dont une condition de réinvestissement
- que dans le cadre de l'exécution du SPA la clause de réinvestissement n'a pas pu être mise en oeuvre de façon spontanée par les actionnaires minoritaires cédants au regard de son imprécision, et sa mise en oeuvre par le cessionnaire et Monsieur [N] PDG de la société cédée et représentant des actionnaires minoritaires s'est faite dans des conditions obscures, contraires à la transparence et à la loyauté contractuelle
- que le jour de la cession les conditions de prix ont été modifiées sur demande de SGB et avalisées par les mandataires au détriment des droits des actionnaires minoritaires réinvestisseurs.
Cette absence d'exécution de bonne foi du contrat signé le 8.04.2016, s'agissant de la clause de réinvestissement déclenchant le versement de l'Earn Out, et cette modification au jour de la cession dudit contrat par le cessionnaire n'ont pu se réaliser que du fait d'une entente entre les trois seules personnes qui ont participé à la cession: SGB, Monsieur [Z], Monsieur [N].
Il convient de retenir la responsabilité de Monsieur [Z] et de Monsieur [N] sur le fondement de l'article 1992 qui dispose que le mandataire répond non seulement du dol mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion: Monsieur [Z] et Monsieur [N] ont accepté une modification du contrat, cette modification préjudicie aux droits de leurs mandants puisque ceux ci sont privés de tout complément de prix alors que le contrat de cession dont ils ont eu copie prévoyait un tel complément de prix. Certes le mandat les autorisait à signer au nom de leurs mandants tout accord de cession. Pour autant il leur appartenait s'agissant d'une modification substantielle des conditions de cession puisque relative au prix, d'informer lesdits mandants de cette modification, voire de recueillir leur avis et à tout le moins de porter à leur connaissance l'avenant modificatif signé le jour même de la cession.
Le fait que le SPA prévoyait une clause de réinvestissement ne peut être opposé par les intimés pour soutenir une absence de faute de leur part. En effet d'une part la mise en oeuvre de celle a été viciée, ce qui interdit de l'opposer aux appelants. D'autre part les mandataires ont signé l'avenant au nom des mandants reconnaissant par la même que ceux ci étaient susceptibles d'être concernés par la clause de Earn-Out supprimée.
S'agissant du mandat donné par Monsieur [B] à Monsieur [N] celui ci soutient que Monsieur [B] a été informé de la suppression du complément de prix lors de l'entretien qu'ils ont eu ensemble le 6 mai.
Cependant d'une part on ne peut que s'étonner du fait que cette information de suppression du complément de prix n'ait pas été portée à la connaissance des minoritaires cédants, si l'on retient comme le soutient Monsieur [N] que la décision de modifier le SPA sur cet élément essentiel était déjà prise début mai. Cela démontre l'absence de transparence qui a présidé à l'exécution du SPA.
D'autre part aucun élément ne rapporte la preuve de la teneur de l'entretien entre Monsieur [B] et Monsieur [N] et donc la preuve que celui ci, comme il le soutient, aurait informé son mandant de la suppression du complément de prix. Le fait que Monsieur [B] ait adressé à un email à Monsieur [W] en indiquant que les conditions de sortie probable du LBO2 étaient très en dessous de ses espoirs peut parfaitement faire réference au prix total (et donc comprenant l'Earn out) proposé par EURAZEO tel qu'indiqué dans le SPA dont au jour de l'entretien Monsieur [B] n'avait pas eu communication.
La demande de Monsieur [B] de bénéficier à son départ à la retraite d'une participation exceptionnelle fait référence au fait qu'à cette date il ne serait plus actionnaire, ni salarié de la société et donc ne pourrait bénéficier de la valorisation futur du groupe. Cette demande, s'agissant du fait qu'il ne serait plus actionnaire, rapporte uniquement la preuve qu'il a été écarté du processus de réinvestissement et non qu'il a choisi de ne pas réinvestir en toute connaissance de cause des modalités prévues par le SPA. En effet, à la date de l'entretien il n'avait pas connaissance du SPA qui ne lui a été remis que le 10 juin, et aucun élément ne rapporte la preuve qu'il était informé qu'il aurait pu demander à réinvestir une partie de ses titres dans la nouvelle société.
Enfin le quitus que Monsieur [B] a donné à Monsieur [N] par le mandat signé le 10 juin 2016 concerne uniquement la gestion passée, et donc la signature du SPA le 8.04.2016, mais ne concerne bien évidemment pas la signature de l'avenant qui est intervenu postérieurement.
Par ailleurs il ressort des faits tels que rappelés que Monsieur [Z] et Monsieur [N] ont en réalité défendu des intérêts autres que ceux des mandants, voire contraires, s'agissant pour Monsieur [Z] d'être le principal représentant salarié d'ARDIAN société de gestion du fonds cédant et pour Monsieur [N] d'assurer le succès de l'entrée au capital du nouvel actionnaire, quand bien même ce succès se construirait au détriment des actionnaires cédants minoritaires.
Il leur appartenait alors de faire le constat de cette divergence d'intérêts et de renoncer à leurs mandats qu'ils ne pouvaient, et n'ont pas pu exécuter loyalement.
Il convient donc de retenir la faute de Messieurs [Z] et [N] dans l'exercice de leurs mandats.
S'agissant de la société SGB celle ci s'est engagée à verser un complément de prix aux actionnaires réinvestisseurs.
A ce titre elle a participé à la rédaction de clauses s'agissant dudit réinvestissement. Or la rédaction de ces clauses sont à ce point imprécises que leur mise en oeuvre spontanée de la part des actionnaires n'était pas possible.
Par ailleurs elle n'a pas exécuté loyalement la clause de réinvestissement et n'a pas veillé à ce que la mise en oeuvre de ladite clause par Monsieur [N] à l'égard de l'ensemble des actionnaires minoritaires s'organise de façon tranparente et loyale.
Elle a au jour de la cession, finalement supprimé la clause de complément de prix pour la transformer en un plan d'attribution gratuite d'actions au profit de managers choisis par Monsieur [N], modifiant de façon substantielle le SPA signé et notifié aux actionnaires minoritaires cédants, alors qu'elle était parfaitement au courant que du fait de la date de signature de l'avenant le jour de la cession, des modalités de représentation des actionnaires minoritaires (par le PDG de la société cédée et le représentant du fond cédant) ceux ci n'avaient pas été consultés, ni même informés du changement opéré dans son seul intérêt.
A ce titre il convient de souligner le rôle central de Monsieur [N] qui a orchestré l'ensemble de la cession, en occupant différents rôles clés dans le cadre de la négociation, de la signature du SPA, de son exécution, du choix des actionnaires pouvant réinvestir, du choix des salariés pouvant bénéficier du plan d'AGA. Or la divergence d'intérêt existant entre les différentes parties au contrat, au delà de leur accord de principe sur la cession même, nécessitait, pour que le principe de loyauté contractuelle posé par l'article 1134 du code civil soit respecté, une répartition des mandats entre différents interlocuteurs et non une concentration sur une même personne de ceux ci au risque, réalisé en l'espèce, de décisions prises au bénéfice de certaines parties et au détriment d'autres.
Il convient donc de retenir la responsabilité du cessionnaire, la société SGB, qui a fait preuve de déloyauté dans l'exécution du contrat.
S'agissant de la société de gestion du cédant, ARDIAN, et du fonds sortant, AXA LBO FUND IV, il n'apparait pas qu'ils aient commis une faute dans la rédaction ou la mise en oeuvre du SPA en signant l'avenant: ARDIAN n'était pas la représentante des actionnaires minoritaires et n'avait pas à défendre leurs droits, la mise en oeuvre de la clause de réinvestissement ne la concernait pas.
En conséquence il convient de retenir les fautes de:
- Monsieur [N] et [Z] dans l'exercice de leurs mandats de gestion
- la société SGB pour ne pas avoir exécuté de bonne foi le contrat signé le 8.04.2016.
Sur les sommes réclamées
Les appelants demandent la condamnation solidaire de tous les intimés en exposant qu'ils ont tous participé de concert au détournement du complément de prix vers certaines personnes anonymes du fait de la substitution du plan d'attribution gratuite d'actions au complément de prix initialement prévu
Ils indiquent qu'il ne s'agit pas d'une perte de chance dans la mesure où les bénéficiaires du plan d'actions gratuites ont été choisis arbitrairement par SEQENS et Monsieur [N] et que le choix d'investir ne leur appartenait pas, qu'en outre il suffisait d'investir pour avoir le droit au complément de prix même une somme symbolique selon les dires des intimés.
Monsieur [N] et SEQENS exposent:
- que du fait de l'existence de l'avenant aucun minoritaire réinvestisseur ne s'est vu offert le bénéfice du supplément de prix de telle sorte que les appelants, à supposer qu'ils aient voulu réinvestir et que cette opportunité leur ait été déniée, n'ont subi aucun préjudice,
- que leur préjudice doit donc être évalué sous l'angle de la notion de perte de chance
- qu'il s'agirait pour les appelants d'avoir été privé de la possiblité de vendre les titres à un meilleur prix, que cependant cette probabilité est nulle compte tenu de l'existence de l'avenant supprimant la possibilité offerte aux minoritaires de bénéficier du supplément de prix et des circonstances propres à chaque appelant.
Ils exposent que le préjudice a été calculé sur la base de 30 millions d'euros alors que l'avenant a diminué le complément de prix à 22 millions d'euros, que par ailleurs la détention capitalistique des appelants ne leur auraient pas permis de percevoir une somme supérieure à 2.598.801,75 euros et que les demandes articulées sont donc abusives et infondées, que s'agissant de Monsieur [B] sa détention capitalistique ne lui aurait pas permis de percevoir un complément de prix supérieur à 366.415,23 euros, que les appelants ne justifient pas sur quel fondement légal ou conventionnel leur demande de solidarité pourrait prospérer et enfin que la demande indemnitaire s'agissant des intérêts au taux légal est irrecevable dans la mesure où la date retenue par les appelants ne correspond pas à l'envoi d'une lettre recommandée de mise en demeure.
ARDIAN, AXA et Monsieur [Z] exposent que les appelants écartent la notion de perte de chance aux motifs que le fait qu'ils aient réinvesti ou non n'aurait rien changé puisque les bénéficiaires du plan d'actions gratuites ont été choisis arbitrairement par SGB et Monsieur [U] [N], que les appelants reconnaissent ainsi que ARDIAN, AXA LBO FUND IV et Monsieur [Z] ne sont pas responsables du préjudice subi, qu'en outre la faute que les appelants leur imputent ne peut être la source que d'une perte de chance pour eux de percevoir la part de l'Earn Out à laquelle chacun prétend, qu'à ce titre il existe une incertitude d'une part s'agissant de déterminer si ils auraient réinvesti si ils en avaient eu l'opportunité et d'autre part s'agissant de déterminer si, informés de tous les termes et conditions de l'opération, ils auraient refusé de signer et auraient re-négocié avec succès les termes et conditions de l'opération, que les appelants se dispensent de toute démonstration sur la valeur de cette chance et de tout calcul de probabilité et qu'il n'appartient pas à la cour de suppléer les appelants dans leur carence, qu'en tout état de cause ni ARDIAN, ni AXA LBO FIND IV ni Monsieur [Z] ne peuvent être débiteurs de ces sommes dont le fondement est l'absence de versement d'Earn out dont était seul redevable SGB.
Enfin ils contestent l'application d'un taux d'intérêt en l'absence de mise en demeure et l'application d'une clause de solidarité qui ne se présume pas et résulte soit de la loi, soit d'une stipulation expresse du contrat, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Sur ce
La base du complément de prix est la somme de 8 millions d'euros, dont on sait aujourd'hui que les conditions de performance financière ayant été atteintes elle aurait été versée.
Sur cette somme la part des appelants doit être calculée proportionnellement à leurs parts dans l'actionnariat minoritaire: il résulte des conclusions de la société SGB et de Monsieur [N] que Monsieur [V] a perçu 2,61% du prix de cession total de 183.950.060 euros, que Monsieur [G] a perçu 2,42% comme Monsieur [P] et que Monsieur [B] a perçu 1,22%.
Les conclusions des parties établissent dans le prix de cession total la part d'AXA à 95,6% et la part des actionnaires minoritaires à 4,4%
Au regard de ces éléments Monsieur [V] aurait pu percevoir 11,484% (2,61%x4,4%) du complément de prix réservé aux actionnaires minoritaires, Messieurs [G] et [P] 10,648% chacun (2,42% x 4,4%), et Monsieur [B] 5,368% (1,22% x 4,4%) du complément de prix de 8 millions d'euros, soit:
Les consorts [V]: 11,484% x 8 millions d'euros= 910.720 euros
Monsieur [G] et sa société: 10,648% x 8 millions d'euros = 851.840 euros
Monsieur [P] et sa société: 10,648% x 8 millions d'euros = 851.840 euros
Monsieur [B]: 5,368% x 8 millions d'euros = 429.440 euros.
Ces sommes constituent l'assiette sur la base de laquelle la perte de chance doit être calculée.
En effet le montant des dommages et intérêts est constitué par une perte de chance de ne pas avoir pu percevoir le complément de prix, étant précisé que la cour n'est pas tenue par l'évaluation des appelants et par le fait que ceux ci ont conclu qu'il ne convenait pas de faire application d'une perte de chance.
Cette perte de chance doit être évaluée à 50% en prenant en compte les éléments suivants:
- le SPA ne prévoit aucun réinvestissement minimim pour bénéficier de l'earn-out et est taisant sur la répartition de celui ci entre une répartition au prorata du réinvestissement ou au prorata de la participation initiale dans le capital social, de telle sorte qu'au regard de cette absence de précision il est certain que les appelants auraient réinvesti ne serait ce qu'une action, en tablant sur une répartition de l'earn-out au prorata de la participation initiale dans le capital social
- les appelants n'ont pas été sollicités pour réinvestir par le cessionnaire et le PDG de la société cédée, ce qui diminuait leur chance de pouvoir réinvestir au regard de la clause d'approbation de l'acquéreur,
- les appelants n'ont pas pu exprimer spontanément leur souhait de réinvestir compte tenu de l'imprécision de la clause et en conséquence le fait qu'ils n'aient pas manifesté leur souhait de réinvestir ne peut être retenu comme la preuve qu'ils n'auraient pas réinvesti.
Il convient donc de condamner Monsieur [N], Monsieur [Z] et la société SGB à payer:
aux consorts [V]: 50% de 910.720 euros= 455.360 euros
à Monsieur [G] et sa société: 50% de 851.840 euros= 425.920 euros
à Monsieur [P] 50% de 851.840 euros= 425.920 euros
à Monsieur [B]: 50% de 429.440 euros= 214.720 euros.
Cette condamnation est prononcée in solidum entre les trois parties condamnées compte tenu du fait qu'ils ont tous les trois commis une faute qui a participé à la réalisation des faits ayant été à l'origine du préjudice subi par les appelants.
Enfin le courrier adressé par le conseil des appelants demande expressément le versement du complément de prix de telle sorte que bien que n'utilisant pas les termes de "mise en demeure" il doit au regard de son contenu être considéré comme étant une demande de paiement.
Les sommes allouées porteront donc intérêt au taux légal à compter du 30.03.2018.
Sur la demande d'infirmation du jugement de première instance concernant l'article 700
Les demandeurs demandent l'infirmation du jugement rendu le 6 novembre 2020 en ce qu'il a condamné in solidum les appelants à payer une somme totale de 40.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens d'instance.
Le jugement de première instance ayant été annulé les condamnations prononcées sont mises à néant de telle sorte que la somme mise à la charge des demandeurs sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile doit être remboursée.
Sur la demande de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Il apparait inéquitable de laisser les appelants supporter les frais irrépétibles engagés pour assurer leur défense et il convient d'allouer la somme de 10.000 euros:
- aux consorts [V]
- à Monsieur [P] et sa société
- à Monsieur [G] et sa société
- à Monsieur [B].
Sur les dépens
Les dépens seront mis à la charge de Monsieur [N], de Monsieur [Z] et de SGB.
PAR CES MOTIFS
Rejette la demande tendant à voir prononcer la nullité du jugement du tribunal de commerce de PARIS du 3.07.2020
Prononce la nullité du jugement du tribunal de commerce de PARIS du 6.11.2020
Et statuant à nouveau
Déclare irrecevables les demandes de communication de pièces comme formées devant la cour,
Rejette l'exception d'incompétente articulée par Monsieur [U] [N]
Rejette la demande de mise hors de cause de la société de gestion ARDIAN
Déboute les appelants de leur demande de condamnation de la société SEQENS GROUP BIDCO en paiement du complément de prix en exécution de l'acte de cession du 8 avril 2016
Condamne in solidum Monsieur [Z], Monsieur [N] et la société SEQENS GROUP BIDCO à payer à titre de dommages et intérêts à:
- Monsieur [J] [V], Madame [R] [V] et Madame [Y] [V] la somme de 455.360 euros
- Monsieur [K] [P] et la société H2M INVEST la somme de 425.920 euros
- Monsieur [A] [G] et la société Diverre la somme de 425.920 euros
- Monsieur [F] [B] la somme de 214.720 euros
Condamne in solidum Monsieur [Z], Monsieur [N] et la société SEQENS GROUP BIDCO à payer à:
- Monsieur [J] [V], Madame [R] [V] et Madame [Y] [V] la somme de 10.000 euros
- Monsieur [K] [P] et la société H2M INVEST la somme de 10.000 euros
- Monsieur [A] [G] et la société Diverre la somme de 10.000 euros
- Monsieur [F] [B] la somme de 10.000 euros
sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne Monsieur [Z], Monsieur [N] et la société SEQENS GROUP BIDCO aux dépens.
La greffière La présidente