La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/09/2022 | FRANCE | N°19/13446

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 4, 20 septembre 2022, 19/13446


Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le :Au nom du peuple français





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 4





ORDONNANCE DU 20 SEPTEMBRE 2022

(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13446 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAIAS



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 01 Juillet 2019 Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY



Nature de la décision : Réputée contradictoire



NOUS, Anne-Laure ME

ANO, Présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Sonia DAIRAIN, Greffière.



Statuant sur le recours formé par :





DEMANDEURS
...

Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le :Au nom du peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 4

ORDONNANCE DU 20 SEPTEMBRE 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/13446 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAIAS

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 01 Juillet 2019 Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY

Nature de la décision : Réputée contradictoire

NOUS, Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Sonia DAIRAIN, Greffière.

Statuant sur le recours formé par :

DEMANDEURS

Monsieur [W] [P]

[Adresse 5]

[Localité 13]

Monsieur [Y] [B]

[Adresse 1]

[Localité 10]

Mademoiselle [K] [B]-[U]

[Adresse 12]

[Localité 11]

Mademoiselle [C] [B]-[D]

[Adresse 4]

[Localité 7]

Mademoiselle [N] [B]-[E]

[Adresse 6]

[Localité 8]

Représentés par Me Sonia EL MIDOULI, avocat au barreau de VAL D'OISE, toque : 71

contre

DEFENDEURS

Monsieur [M], expert,

[Adresse 2]

[Localité 9]

Société LCL

[Adresse 3]

[Localité 8]

Défaillants - AR de convocations signés

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 20 Juin 2022 :

Vu l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny le 10 octobre 2014, ayant désigné en qualité d'expert M. [V] [M], dans le cadre d'un litige opposant M. [P] et les consorts [B] à la société LCL, ayant fixé à 3.500 euros le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, mise à la charge de M. [P] et des consorts [B], et au 30 juin 2015 le délai de dépôt du rapport d'expertise définitif dans lequel l'expert devra déposer son rapport ;

Vu le dépôt de son rapport d'expertise par M. [V] [M] le 20 octobre 2018;

Vu l'ordonnance rendue le 1er juillet 2019 par le juge taxateur au tribunal de grande instance de Bobigny qui a fixé à 4911 euros TTC la rémunération définitive de M. [M];

Vu le recours formé par M. [P] et les consorts [B] et enregistré au greffe de la cour d'appel le 22 juillet 2019, tendant à contester le montant des honoraires d'expertise ;

Vu les actes de dénonciation de ce recours aux parties ;

Vu les convocations des parties pour l'audience du 3 janvier 2022;

Vu les observations orales à l'audience du 3 janvier 2022, par lesquelles le conseil de M. [P] et des consorts [B] a repris ses conclusions tendant à voir réduire les honoraires de l'expert à la somme de 1.568 euros TTC pour les motifs suivants :

- l'expert ne justifie pas des diligences accomplies ;

- l'expert a déposé son rapport dans un délai de trois ans sans justification ;

- aucune réponse n'a été apportée par l'expert aux parties malgré la précision de sa mission et aucune analyse n'a été faite des devis produits ;

Vu les observations orales de l'expert à cette audience, lequel a reconnu qu'il n'avait "pas pu répondre techniquement"aux questions posées, que les "locaux étant très anciens, laissés en déshérence" de sorte qu'il "n'arrivait pas à répondre", "le chiffrage de la remise en état était techniquement difficile" et que le rapport d'expertise était "raté".

Par ordonnance du 7 mars 2022, la réouverture des débats a été ordonnée, au visa de l'article 284 du code de procédure civile afin que M. [P] et les consorts [B], qui contestent le montant de la rémunération de l'expert, produisent la demande détaillée que celui-ci a présenté au juge taxateur du tribunal de grande instance de Bobigny, cet élément étant indispensable pour statuer sur leur demande.

Par message au RPVA du 16 juin 2022, le conseil de M. [P] et les consorts [B] a produit la pièce demandée, datée du 14 octobre 2018, et a justifié de sa communication contradictoire à l'expert; il a exposé solliciter une dispense de comparution et se référer à ses précédentes écritures et déclarations, étant dans l'impossibilité de se présenter à l'audience du 20 juin 2022, l'expert étant averti.

À l'audience du 20 juin 2022 à 9h30, les parties ne se sont pas présentées ; il conviendra de se référer aux écritures déjà déposées et observations faites lors de l'audience précédante.

MOTIFS

En application de l'article 284 alinéa 1er du code de procédure civile, le juge fixe la rémunération de l'expert en fonction notamment des diligences accomplies, du respect des délais impartis et de la qualité du travail fourni.

L'article 724 du code de procédure civile dispose que les décisions mentionnées aux articles 255, 262 et 284, émanant d'un magistrat d'une juridiction de première instance ou de la cour d'appel, peuvent être frappées de recours devant le premier président de la cour d'appel dans les conditions prévues aux articles 714 (alinéa 2) et 715 à 718. Si la décision émane du premier président de la cour d'appel, elle peut être modifiée dans les mêmes conditions par celui-ci.

Le délai court, à l'égard de chacune des parties, du jour de la notification qui lui est faite par le technicien.

Le recours et le délai pour l'exercer ne sont pas suspensifs d'exécution. Le recours doit, à peine d'irrecevabilité, être dirigé contre toutes les parties et contre le technicien s'il n'est pas formé par celui-ci.

En l'espèce, le recours formé apparaît recevable.

Il y a lieu de relever les éléments suivants.

La société Le Crédit Lyonnais (LCL), qui occupait des locaux commerciaux constitués d'une série de lots appartenant pour certains à l'indivision [B] et pour d'autres à M. [W] [P], a donné congé aux bailleurs, après avoir procédé à des travaux de réunion des lots.

Les bailleurs, estimant que les lieux étaient restitués dans un état dégradé et nécessitaient des travaux de remise en état autres que ceux déjà effectués par le preneur ont saisi le juge des référés pour voir ordonner une expertise. C'est dans ce contexte, au constat du désaccord des parties quant à la nature et à l'étendue des travaux à réaliser, que le juge des référés a, par ordonnance précitée du 10 octobre 2014, ordonné une expertise afin de dresser l'état des lieux, de déterminer les travaux nécessaires à la remise aux normes, de les chiffrer et de fournir tous éléments techniques et de fait permettant la juridiction éventuellement saisie au fond de déterminer les responsabilités encourues et d'évaluer les préjudices subis.

Le délai de remise du rapport était fixé au 30 juin 2015.

La mission a été acceptée par l'expert par lettre du 14 octobre 2014; en décembre 2014 les parties ont été convoquées pour un rendez-vous d'expertise sur les lieux qui a eu lieu en janvier 2015 (voir ci-après).

Il résulte des éléments du dossier :

- que dès le début du mois de janvier 2015, les parties ont transmis des pièces nécessaires et notamment des devis de travaux,

- qu'une seule réunion sur place a eu lieu, le 28 janvier 2015,

- que si le rapport d'expertise indique qu'une note aux parties a été rédigée le 10 février 2015 à la suite de cette réunion, l'expert n'en produit toutefois aucune copie alors que les requérants contestent d'ailleurs l'avoir reçue.

Le rapport d'expertise décrit les lieux tels qu'observés lors de cette réunion (pages 8 à10); il indique en outre que des courriers lui ont été adressés par les parties, faisant part à l'expert de leurs observations suite à cette visite ( 20 février et 17 septembre 2015 , 15 septembre 2016...); il ne résulte pas du rapport ni des pièces du dossier qu'il y ait répondu; de fait les requérants indiquent qu'après la réunion précitée, l'expert ne leur a plus donné de nouvelles.

En annexe du rapport sont rassemblés des photos prises lors de l'unique déplacement sur les lieux, des devis de travaux communiqués par les parties.

Il est constant que le délai de dépôt du rapport a été prorogé à la demande de l'expert au 31 décembre 2016; cette ordonnance de prorogation et les autres, dont se prévaut l'expert, ne sont pas produites aux débats (ni annexées au rapport).

En outre, il convient de relever :

-qu'aucune note n'a été adressée aux parties,

-qu'aucun pré-rapport n'a été réalisé ce qui n'a pas permis aux parties de répondre à d'éventuelles demandes de l'expert ou de lui adresser des dires,

-qu'après des réclamations des parties auprès du juge chargé du contrôle des expertises (courriers du 30 mai 2017) et auprès de l'expert (courriers du 6 septembre 2016, des 30 mai et 10 août 2017, des 7 mars et 28 août 2018), le rapport a été déposé en octobre 2018,

Le rapport comporte 19 pages, en bonne partie relatives au rappel factuel de la mission et de son contexte ; sur deux pages finales, l'expert indique qu' "un certain nombre de remarques ont été faites sur place quant aux travaux de reprise qui avait déjà été réalisés par la société LCL pour la remise en état des lieux (' ) ainsi que les travaux restent encore à réaliser pour la remise en état des locaux. Notamment des travaux de finition en lot plâtrerie avec des coffrages de gaines techniques et en lot peinture avec des mises en peinture des nouveaux cloisonnements et d'autres coffrages" ; les travaux en question ne font ainsi l'objet d'aucune description précise et chiffrée.

Le rapport conclut que l'expert :

-n'a pu vérifier "le degré coupe-feu des différents locaux rendus indépendants les uns des autres comme à l'origine par de de nouvelles cloisons",

- n'a pu vérifier la conformité de l'installation électrique, les questions étant restées "sans réponse",

-n'a " pas été en mesure d'évaluer les préjudices réellement subis, ni de faire les comptes entre les parties, faute d'éléments techniques correspondant "

Ainsi l'expert n'a que très insuffisamment répondu à sa mission, ce qu'il admet d'ailleurs à l'audience; si le rapport fait état du fait qu'il n'a pas pu obtenir d'autres devis de travaux de la part des parties , il convient de noter que cette mission était précisément celle incombant à l'expert; en tout état de cause il ne s'explique pas sur la particularité de la mission ou sur une difficulté particulière justifiant cette incohérence. Il n'a pas alerté le juge du contrôle de l'expertise sur une difficulté particulière, ni sollicité un sapiteur.

Aucune analyse n'est faite de la première série de devis produits, ni des pièces produites faisant débats entre les parties (devis électrique de Covelec).

Au regard de ces éléments relatifs aux diligences accomplies, au respect des délais impartis et à la qualité du travail fourni, la rémunération sollicitée, à hauteur de 4911 euros TTC et accordée par l'ordonnance entreprise est excessive et doit être réduite.

Il convient ainsi de retirer des frais détaillés dans la note de demande de frais de l'expert produite après réouverture des débats:

-240 euros de frais de "notes aux parties", dont l'existence n'est pas avérée,

-480 euros au titre du temps passé à la rédaction de courriers et du rapport, qui doit être ramené à 5 heures au lieu de 9h (soit réduction de 120 euros x 4),

-480 euros au titre des "Etudes du dossier et recherches", ramenées à 5h au lieu de 9h (soit réduction de 120 euros x 4),

-35 euros pour une copie du rapport, puisque seules 9 copies ont été faites et non 10, comme cela résulte du rapport lui même (p 20) (donc une copie à 35 euros non justifiée).

-380 euros de "frais de secrétariat" et de "temps passé, frappe de courrier, notes et classements", évalués par l'expert à un total de 16 h à 38 euros chacune, qui se superposent en partie et ne sont pas justifiées; le temps retenu sera ramené à 6h (à retirer donc 38 euros x 10h),

soit 1615 euros de sommes non justifiées.

En outre, il conviendra de tenir compte de l'absence de réalisation complète de la mission et du manque de diligence constaté.

Ainsi, au regard de l'ensemble de ces éléments, la rémunération de l'expert sera fixée à la somme de 1.700 euros TTC, dans les conditions indiquées au dispositif et l'ordonnance entreprise qui a fixé cette rémunation à 4911 euros TTC doit être infirmée.

La présente ordonnance constituant le titre exécutoire établissant la créance des appelants il n'y a pas lieu d'ordonner le remboursement par la Régie des avances et recette, ou la restitution des sommes trop versées éventuellement déconsignées, qui relèvent de l'exécution de la présente décision.

Il sera alloué aux consorts [B] et à M. [P] la somme globale de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

INFIRMONS l'ordonnance de taxe entreprise ;

Statuant à nouveau,

FIXONS la rémunération totale de M. [V] [M], expert, à la somme de 1.700 euros TTC, étant rappelé que la somme de 3500 euros a initialement été consignée et que par ordonnance du 1er juillet 2019 la régie d'avances et recettes a été autorisée à régler cette somme à l'expert ;

CONDAMNONS M. [V] [M] à payer à M. [W] [P] et à M. [Y] [B], Mme [K] [B]-[U], Mme [C] [B]-[D] et Mme [N] [B]-[E] la somme globale de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

CONDAMNONS M. [V] [M] aux dépens de l'instance.

ORDONNANCE rendue par Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre, assistée de Mme Sonia DAIRAIN, greffière lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/13446
Date de la décision : 20/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-20;19.13446 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award