Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRET DU 19 SEPTEMBRE 2022
(n° , 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/18119 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCZND
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Novembre 2020 -TJ de PARIS - RG n° 17/15014
APPELANTES
S.C. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
Ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 4]
SIRET n° 775 652 126,
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034, Me Guillaume REGNAULT de la SCP RAFFIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, Me Violaine ETCHEVERRY, avocat au barreau de PARIS
S.A. MMA IARD
Ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 4]
SIRET N° 440 048 882,
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034, Me Guillaume REGNAULT de la SCP RAFFIN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, Me Violaine ETCHEVERRY, avocat au barreau de PARIS
INTIME
Monsieur [D] [Y]
Domicilié [Adresse 3]
[Localité 5]
né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 6]
Représenté par Me Rémi BAROUSSE de la SELASU TISIAS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2156
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère
Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Edouard LOOS,Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 28 septembre 2010, M. [D] [Y], par l'intermédiaire de son conseiller en investissement financier, a placé 31.122 euros dans un produit « SEP sunra » commercialisé par la société à responsabilité limitée Gesdom, lequel était réparti aux comptes courants de 3 à 6 sociétés en participation ayant pour objet l'acquisition de matériels photovoltaïques à la Réunion destinés à la location pour l'exploitation de centrales électriques.
Cette souscription a été réalisée dans le but de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu prévue par la loi Girardin, et par l'article 199 undecies B du code général des impôts.
Il a souscrit aussi un contrat d'assistance administrative et fiscale nommé « Simpladmi » auprès de la société à responsabilité limitée Diane et lui a réglé les frais de dossier.
La société Diane lui a adressé le 17 mai 2011 une attestation fiscale certifiant la souscription de parts des sociétés en participation Sunra fluide 1016, Sunra fluide 1017 et Sunra fluide 1018, afin de reporter sur sa déclaration une réduction d'impôt sur les revenus perçus en 2010 de 39.900 euros.
Le 25 avril 2013, l'administration fiscale a notifié à l'intéressé une proposition de rectification de son impôt sur le revenu perçu en 2010 à concurrence de 39.900 euros en principal, 3.511 euros d'intérêts moratoires et 3.990 euros de majoration, au total 47.401 euros, au motif que l'avantage n'était éligible qu'à partir du moment où l'investissement conduisait à une exploitation effective des centrales photovoltaïques, cette condition étant réputée remplie lors du dépôt du dossier complet de raccordement auprès de l'Electricité de France dans l'année de l'investissement, et que ces demandes n'avaient pas été déposées avant le 31 décembre 2010. Précision lui a été donnée que la loi de finances avait exclu de l'avantage recherché, pour 2011, les investissements faits par l'intermédiaire de sociétés en participation.
Le contribuable a réglé et le tribunal administratif de Melun du 18 mai 2017 a rejeté sa requête en décharge de cette imposition, y compris par voie de report l'année suivante.
Toutefois, le 18 juillet 2017, l'administration fiscale et le contribuable ont transigé, la première renonçant à percevoir la majoration de 3.990 euros, et maintenant le surplus.
Par jugement du 24 juillet 2014, le tribunal de commerce de Paris a placé la société Diane en redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire le 19 août suivant.
Par jugement du 26 avril 2017, le tribunal mixte de Saint-Pierre de la Réunion a placé en redressement judiciaire la société Gesdom, converti en liquidation judiciaire le 26 septembre 2019.
Le 25 octobre 2017, M. [D] [Y] a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris la société anonyme MMA Iard, en sa qualité d'assureur des sociétés Diane et Gesdom, en réparation de son préjudice, né du redressement fiscal.
Par conclusions remises au greffe le 23 mai 2018, la société d'assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles est intervenue volontairement au litige.
Par jugement du 5 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Paris a statué comme suit :
- Reçoit l'intervention volontaire de la société d'assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles aux droits de la compagnie Covea risks ;
- Constate que la société à responsabilité limitée Diane a engagé sa responsabilité contractuelle
- Dit applicables à la cause les polices n 112.788.909 et n°120.137.363 ;
- Constate que le sinistre résultant de la commercialisation des produits montés par la société Diane afférents à l'acquisition de centrales photovoltaïques sur l'île de la Réunion par mise en commun au travers de sociétés de portage pour bénéficier des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans lesquels le dommage a la même cause technique, qu'au final l'équipement industriel n'était pas productif l'année de l'investissement, 2010, présente un caractère sériel ;
- Condamne in solidum la société anonyme MMA Iard et la société d'assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles dans les limites de la garantie prévue à la police n 112.788.909 et à la police n°120.137.363 comprenant, la première, un plafond de garantie de 3.000.000 d'euros, et une franchise de 15.000 euros, la seconde, un plafond de garantie de 1.250.000 euros, et une franchise de 20.000 euros, à payer à M. [D] [Y] 31.122 euros de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel, au titre de son investissement fait le 28 septembre 2010 du produit monté par la société à responsabilité limitée Diane, avec intérêts au taux légal dès le 25 octobre 2017 ;
- Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
- Rejette le surplus des demandes en dommages-intérêts formées par M. [D] [Y] ;
- Rejette la demande de séquestre formée par la société anonyme MMA Iard et la société d'assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles ;
- Ordonne l'exécution provisoire ;
- Condamne in solidum la société anonyme MMA Iard et la société d'assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles à payer à M. [D] [Y] 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Autorise Me Rémi Barousse à recouvrer directement contre elles les frais compris dans les dépens dont il aurait fait l'avance sans en avoir reçu provision ;
- Condamne in solidum la société anonyme MMA Iard et la société d'assurance mutuelle MMA Iard assurances mutuelles aux dépens.
Par déclaration du 11 décembre 2020, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles venant aux droits de la compagnie Covéa Risks ont interjeté appel du jugement.
Par dernières conclusions signifiées le 8 septembre 2021, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles venant aux droits de la compagnie Covéa Risks demandent à la cour :
Vu les articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction antérieure, L. 112-6, L. 113-1, L. 124-1-1, L. 124-3 et L. 124-5 du code des assurances,
- Réformer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 5 novembre 2020.
Et statuant à nouveau :
A titre principal :
- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a écarté la responsabilité de la société Gesdom ;
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté l'investisseur de ses demandes au titre d'un prétendu manque à gagner, des intérêts de retard,
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté l'investisseur de sa demande au titre d'une prétendue résistance abusive ;
- Réformer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il n'a pas retenu l'existence d'une perte de chance.
A titre subsidiaire :
- Réformer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a retenu l'application du contrat souscrit par la Cncif auprès de Covéa Risks (police n°112.788.909) qui n'a nullement vocation à s'appliquer dans le cas présent, ni la société Diane, ni la société Gesdom n'ayant exercé une activité de conseiller en investissements financiers ;
- Juger que, dans la mesure où le plafond de garantie de 1.250.000 euros de la police n°120.137.363 est épuisé, aucune condamnation nouvelle ne peut être prononcée au titre de cette police (ni directement entre les mains de l'intimé, ni par voie de consignation),
- Condamner l'investisseur à restituer la part des condamnations qui lui ont été versées en exécution du jugement dont appel, au titre de la police n° 111.788.909, soit la somme de 18.894,10 euros, sauf à parfaire,
A titre infiniment subsidiaire, et si la cour retenait l'application de la police Cncif (police n° 112.788.909) et de la police monteur (police n° 120.137.363) :
En ce qui concerne l'ensemble des polices,
- Réformer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a limité l'application des plafonds de garanties aux seules réclamations résultant des investissements commercialisés en 2010 ;
- Juger qu'il convient d'appliquer un même et seul plafond de garantie à l'ensemble des réclamations, et ce, quelle que soit l'année de l'investissement ;
- Juger que le plafond de garantie unique applicable est celui en vigueur au jour de la première réclamation
En ce qui concerne la police n°112.788.909,
- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a estimé que l'activité de la société Diane était couverte par le plafond de garantie ;
- Juger que les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles assurent la responsabilité civile professionnelle de la société Diane et/ou de la société Gesdom au titre du contrat Cncif dans la limite globale de 3.000.000 euros dans le cadre du sinistre sériel résultant de la souscription des produits de défiscalisation que Diane a montés et ce après déduction du montant des règlements qui auraient pu être effectués par les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles au titre des autres réclamations répondant de ces deux sinistres distincts ;
- Désigner tel séquestre qu'il plaira à la cour avec pour mission qui n'excédera pas une période de 5 ans de conserver les fonds dans l'attente des décisions définitives tranchant les différentes réclamations formées à l'encontre de la société Diane et/ou Gesdom concernant le même sinistre et pour, le cas échéant, procéder à une répartition au marc le franc des fonds séquestrés ;
- Juger subsidiairement que la somme correspondant à la franchise par sinistre, soit 15.000 euros, à la charge de la société Diane et/ou Gesdom, doit être déduite du montant de la condamnation éventuellement prononcée à l'encontre des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles dans le cas où la cour devrait retenir la responsabilité de la société Diane et/ou Gesdom et/ou si la cour ne retenait pas l'existence d'un sinistre sériel.
En ce qui concerne la police n°120.137.363,
- Juger que, dans la mesure où le plafond de garantie de 1.250.000 euros de la police n°120.137.363 est épuisé, aucune condamnation nouvelle ne peut être prononcée au titre de cette police (ni directement entre les mains de l'intimé, ni par voie de consignation) ;
- Condamner l'investisseur à restituer la part des condamnations qui lui ont été versées en exécution du jugement dont appel, au titre de la police n°112.788.909, soit la somme de 18.894,10 euros, sauf à parfaire.
- Subsidiairement : désigner tel séquestre qu'il plaira à la cour avec pour mission qui n'excédera pas une période de 5 ans de conserver les fonds dans l'attente des décisions définitives tranchant les différentes réclamations formées à l'encontre de la société Diane concernant le même sinistre et pour, le cas échéant, procéder à une répartition au marc le franc des fonds séquestrés ;
- Juger encore plus subsidiairement que la somme correspondant à la franchise par sinistre, soit 20.000 euros, à la charge de la société Diane et/ou Gesdom, doit être déduite du montant de la condamnation éventuellement prononcée à l'encontre des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles dans le cas où la cour devrait retenir la responsabilité de la société Diane et/ou si la cour ne retenait pas l'existence d'un sinistre sériel.
En ce qui concerne la police n°114.247.742,
- Juger que la compagnie MMA Iard assure la responsabilité civile professionnelle de la Sarl Gesdom dans la limite globale de 4.000.000 euros dans le cadre du sinistre sériel résultant de la souscription des produits de défiscalisation qu'elle a commercialisés, et ce après déduction du montant des règlements qui auraient pu être effectués par les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles au titre des autres réclamations répondant de ces deux sinistres distincts
- Désigner tel séquestre qu'il plaira à la cour avec pour mission qui n'excédera pas une période de 5 ans de conserver les fonds dans l'attente des décisions définitives tranchant les différentes réclamations formées à l'encontre de la Sarl Gesdom concernant le même sinistre et pour, le cas échéant, procéder à une répartition au marc le franc des fonds séquestrés ;
- Subsidiairement : juger que la réclamation est intervenue au-delà de la période de garantie et que le contrat n°114.247.742 n'a pas vocation à s'appliquer ;
- Juger que la somme correspondant à la franchise par sinistre, soit 20.000 euros, à la charge de la Sarl Gesdom, doit être déduite du montant de la condamnation éventuellement prononcée à l'encontre des compagnies MMA Iard, dans le cas où la cour devait retenir la responsabilité de la Sarl Gesdom ;
En tout état de cause,
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté l'investisseur de sa demande fondée sur une prétendue résistance abusive de l'assureur
- Débouter l'investisseur de son appel incident
- Débouter l'investisseur de sa demande au titre d'un prétendu appel abusif
- Condamner M. [Y] à payer aux sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner M. [Y] aux entiers dépens de la présente instance, qui seront recouvrés par Me Baechlin, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions du 13 mars 2022, M. [D] [Y] demande à la cour :
- Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 5 novembre 2020 en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Diane et le réformer en ce qu'il a exclu celle de la société Gesdom, et, statuant à nouveau, déclarer que M. [D] [Y] dispose d'une créance de responsabilité à l'encontre de la société Diane et de la société Gesdom ;
- Le reformer s'agissant des préjudices subis, et, statuant à nouveau, fixer les préjudices subis par M. [D] [Y] à 43.411 euros pour le préjudice matériel au titre de l'investissement 2010 et à 3.000 euros pour le préjudice immatériel ;
- Le confirmer en ce qu'il a condamné les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à garantir la responsabilité de la société Diane au titre de la police CNCIF n° 112.788.909 et de la police n° 120.137.363, le reformer en qu'il a jugé que le plafond de la police n° 112.788.909 était opposable à l'investisseur, y ajouter, la garantie de la responsabilité de la société Gesdom, et, statuant à nouveau,
Condamner in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à M. [D] [Y] les sommes suivantes :
43.411 euros pour le préjudice matériel au titre de l'investissement 2010,
3.000 euros pour le préjudice immatériel,
en garantie de la responsabilité de :
- la société Gesdom en application de la police CNCIF n° 112.788.909 et de la police Gesdom n°114.247.742,
- la société Diane en application de la police CNCIF n° 112.788.909 et de la police Diane n° 120.137.363,
Et ce, sans que le plafond de la police CNCIF n° 112.788.909 soit opposable à M. [D] [Y] et, pour la police n° 112.788.909, avec un plafond de 3 millions euros pour les montages 2008 et de 4 millions euros pour les montages 2009 et 2010 ;
- Le confirmer s'agissant des intérêts de retard en ce qu'il a déclaré que les indemnités allouées porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soit le 25 octobre 2017, et seront capitalisés conformément à l'article 1343-2 du code civil ;
- Le confirmer en ce qu'il a ordonné la globalisation des sinistres par année ;
- Dire que les indemnités allouées à M. [D] [Y] s'imputeront d'abord sur la police n° 114.247.742 (Gesdom) puis sur la police n° 112.788.909 (CNCIF), et enfin sur la police n° 120.137.363 (Diane) ;
- Confirmer le premier juge en ce qu'il a refusé d'ordonner un séquestre ;
- Le réformer en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive, et, statuant à nouveau, condamner in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à M. [D] [Y] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
- Condamner in solidum les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à M. [D] [Y] la somme de 2.000 euros pour appel abusif ;
- Le confirmer en ce qu'il a condamné l'assureur à payer une indemnité pour les frais irrépétibles et, pour la procédure d'appel, condamner in solidum la société MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à payer à M. [D] [Y] la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner in solidum la société MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 11 avril 2022.
SUR CE, LA COUR
Sur la révocation d'ordonnance de clôture
Par conclusions signifiées le 5 mai 2022, au soutien de sa demande de révocation , l'investisseur invoque une cause grave portant sur la question des contrats d'assurances applicables. Il vise les dernières décisions rendues par la chambre de cette cour, concernant l'atteinte du plafond de garantie pour la police d'assurance Diane n°120 137 363 et la non appliccation de la police CNCIF qui bouleverserait la situation. Il invoque également le dépôt d'un pourvoi en cassation et demande le sursis à statuer en l'attente des pourvois formés.
Les sociétés MMA n'ont pas conclu en réponse.
Ceci étant exposé
Il sera rappelé que les décisions rendues par la chambre 10 du pôle 5 de la cour d'appel de Paris ont de façon constante depuis 2020, retenu que la police garantissant l'activité de CIF n'avait pas lieu d'être appliquée dans le cadre de ce contentieux de masse, que certaines de ces décisions soumises au contrôle de la Cour de Cassation, n'ont pas été censurées.
S'agissant de la question du plafond de garantie de la police d'assurance Diane n°120 137 363, cette chambre a retenu que le plafond était atteint, au regard des éléments de preuve communiqués. Les dernières décisions rendues en 2022, ont confirmé la solution retenue sur le fondement des moyens de preuve apportés. Ces motifs relèvent du pouvoir d'appréciation du juge. De même, l'argumentation relative aux contradictions de décisions n'est pas de nature à remettre en cause la ligne jurisprudentielle librement dégagée. Il s'en déduit qu'aucune cause grave n'étant justifiée depuis le prononcé de l'ordonnance de clôture, la demande de révocation sera rejetée.
Sur la responsabilité civile des sociétés Gesdom et Diane
Les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles font valoir que M. [D] [Y] ne détient aucune créance de responsabilité à l'encontre des sociétés Diane et Gesdom au motif qu'aucune faute de leur part n'est rapportée. S'agissant de la société Diane, le montage était valide au motif que les conditions d'éligibilité au bénéfice de la loi Girardin étaient réunies au moment où la société Diane a monté le produit fiscal litigieux. Les demandes de raccordement ont été reportées par EDF suite au moratoire imposé par le législateur. M. [D] [Y] a bénéficié de la réduction d'impôt attendue sur son imposition concernant ses revenus 2010. Il n'est pas démontré que le caractère partiel de la réduction reportée serait lié à une faute de la société Diane. S'agissant de la société Gesdom, sa responsabilité ne peut être recherchée au motif qu'elle n'a pas contracté avec M. [D] [Y].
M. [D] [Y] fait valoir, au visa de l'ancien article 1147 du code civil, que la responsabilité civile des sociétés Diane et Gesdom est engagée. Leurs rôles dans le montage étaient interdépendants et elles ont méconnu leur obligation contractuelle principale tenant à s'assurer de la solidité juridique du montage, en raison de l'absence de dépôt auprès d'EDF d'un dossier complet de demande de raccordement au réseau le 31 décembre au plus tard de l'année de l'investissement. Les sociétés Diane et Gesdom ont empêché M. [D] [Y] d'obtenir l'intégralité de l'avantage fiscal espéré l'année pour laquelle elle avait contracté. Aucune clause ne saurait exonérer ou limiter la responsabilité des sociétés Diane et Gesdom. L'administration n'a pas opéré un revirement soudain de sa jurisprudence, fruit d'une évolution impropre à caractériser un fait exonératoire.
Ceci étant exposé,
La responsabilité de la société Diane est recherchée sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil.
Le tribunal a jugé que la société à responsabilité limitée Diane avait engagé sa responsabilité contractuelle, au motif que que le sinistre résultant de la commercialisation des produits montés par la société Diane afférents à l'acquisition de centrales photovoltaïques sur l'île de la Réunion pour bénéficier des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts résidait dans le fait que l'équipement industriel n'était pas productif l'année de l'investissement, en 2010.
Les premiers juges ont reproché à la société Diane de ne pas avoir satisfait aux conditions de raccordement de l'installation EDF au 31 décembre de l'année d'investissement, au visa des arrêts de la cour administrative d'appel de Paris en date du 21 septembre 2016 et du Conseil d'Etat en date du 26 avril 2017. Or, il convient de se placer au moment de la soucription des investissements litigieux pour apprécier la faute éventuelle du monteur.
En l'espèce, la société Diane est intervenue en qualité de monteur de l'opération en défiscalisation . Elle présenté le montage de l'opération de déficalisation en indiquant la condition de réalisation de l'investissement et en s'engageant à réaliser le suivi administratif et fiscal.
Les contrats litigieux ont été souscrits en septembre 2010, l'article 199 undecies B du code général des impôts prévoyait une réduction d'impôt sur le revenu en raison d'investissement productif. A cette période, l'instruction fiscale 5 B-2-07 du 30 janvier 2007 applicable fixait la date de la réalisation de l'investissement, l'année au cours de laquelle l'immobilisation était créée, achevée ou livrée, au sens de l'article 1604 du code civil.
La rectification fiscale qui est intervenue en 2013 s'est fondé sur de nouvelles conditions pour pouvoir bénéficier de l'avantage fiscal. L'administration a exigé une exploitation effective et notamment le raccordement des équipements auprès d'EDF, en invoquant une décision du conseil d'Etat, isolée et ne correspondant pas à l'objet du litige
La condition nouvelle ne figurant ni dans le texte de loi, ni dans l'instruction précitée il ne peut être reprochée à la société Diane de ne pas avoir satisfait à ses obligations en 2010.
L'administration se prévaut également dans sa rectification, d'une absence de dépôt des demande de raccordement au 31 décembre 2010 , en produisant les attestations de la société EDF indiquant un dépôt de demandes le 11 mars 2011.
La société Diane était également en charge du suivi des demandes de raccordement. A ce titre, elle a adressé à l'investisseur une attestation fiscale, le 17 mai 2011, indiquant qu'il bénéficiait d'une réduction fiscales de 39 900 euros pour l'année 2010. Or, la demande de réduction d'impôt de M. [D] [Y] a été rejetée.
Le fait dommageable imputable à la société Diane consiste à avoir délivré une attestation fiscale sans s'être assurée du dépôt des demandes de raccordement, avant le 31 décembre 2010 comme elle s'y était engagée. Il ne s'agit pas d d'une perte de chance, mais d'un préjudice matériel résultant d'une négligence fautive la conduisant à délivrer une attestation erronée.
Il s'ensuit que, par des motifs qui divergent de ceux du tribunal , le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la faute de la société Diane et alloué au titre du préjudice la somme de 31 112 euros, correspondant au montant de l'investissement.
Le tribunal a retenu à juste titre que l'avantage fiscal escompté ne constituait pas un préjudice dans la mesure où le contribuable a payé l'impôt auquel il était tenu. De même, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les intérêts de retard et écarté le préjudice moral.
S'agissant de la responsabilité de la société Gesdom, la cour adopte les motifs des premiers juges qui ont retenu que si son nom apparaît en en tête sur le contrat ' Simpladmi', le prestataire est la société Diane et non Gesdom, aucun élément ne venant démontrer qu'elle ait été en contact avec le souscripteur, ni qu'elle était en charge de l'opération de montage et de son suivi.
L'investisseur recherche également la responsabilité délictuelle de la société Gesdom. Mais la société Gesdom étant intervenue en qualité de commercialisateur, sa mission d'intermédiaire s'est achevée au moment de la souscription de l'investissement. En l'espèce, aucun élément de preuve ne vient caractériser une faute délictuelle de la société Gesdom . Il y a lieu de confirmer le jugement déféré de ce chef.
Sur les garanties
Il résulte de la solution adoptée que la police d'assurance garantisant les activités de la société Gesdom n'est pas mobilisable.
M. [D] [Y] sollicite les garanties accordées par les sociétés MMA au titre des polices n° 112 788 909 et n° 120 137 363 pour les activités de Diane.
La demande d'application de la police n° 112 788 909 relative à l' activité de conseillers en investissements financiers (CIF) se fonde sur le fait la société Diane est inscrite en cette qualité auprès de la chambre des conseillers en investissements financiers (CIF) et qu'elle a souscrit ladite police.
La police n° 112 788 909 vise l'activité d'ingénierie financière. Le contrat précise que sont assurées à ce titre les activités se rattachant à une activitéde CIF et la liste des activités vise en substance : l'ingénierie financière, les démarcheurs bancaires et financiers, intermédaires en opérations de banque. Elle n'inclut pas l'activité de montage d'opération en déficalisation.
En l'espèce, la société Diane est intervenue en qualité de monteur de produit en défiscalisation et au titre de son suivi administratif et fiscal, ce qui écarte l'application de la police susmentionnée dès lors que cette'activité ne répond pas à la défiinition d'ingénierie financière et en tout état de cause, ne revêt aucun caractère bancaire ou financier.
Le jugement sera infirmé de ce chef .
En revanche, il y a lieu de confirmer que la police n° 120 137 363 relative à l'activité de monteur s'applique.
Sur les limitations de garantie
Les sociétés MMA invoquent à bon droit la globasiation en application de l'article L124-1-1 du code des assurances, dès lors que les sinistres ont tous une même cause. Il convient de confirmer que le sinistre présente un caractère sériel.
Le contrat prévoit une limite de garantie fixée à 1 250 000 euros par sinistre, opposable aux tiers.
A cet égard, l'allégation d'un plafond par année d'assurance est injustifiée dès lors que cette condition n'a pas été prévue dans le contrat.
Les MMA opposent que la garantie au titre de la police n° 120 137 363 est épuisée. Au regard des éléments de preuve apportés, il y a lieu de constater l'épuisement de la garantie de la police n° 120 137 363 et de rejeter les demandes de M. [Y] à ce titre. Le jugement sera infirmé de ce chef.
La solution du litge commande de rejeter la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.
M. [D] [Y], partie perdante, au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamné aux dépens.
Il paraît équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qui ont été exposés.
PAR CES MOTIFS
La cour,
REJETTE la demande de révocation d'ordonnance de clôture ;
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a écarté la responsabilité de la société Gesdom, retenu une faute de la société Diane mais dit que la faute réside dans la délivrance d'une attestation fiscale erronée ; fixé le préjudice subi à la somme de 31 112 euros ; rejeté les demandes de l'investisseur au titre d'un manque à gagner, des intérêts de retard, d'une résistance abusive ; infirme le jugment pour le surplus
Et statuant à nouveau :
DIT que la police n° 112 788 909 n'a pas vocation à s'appliquer au présent litige ;
DIT que la police n° 120 137 363 s'applique, en raison de l'épuisement du plafond de garantie rejette toute demande en paiement à ce titre ;
REJETTE toutes les autres demandes
CONDAMNE [D] [Y] aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
S.MOLLÉ E.LOOS