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15/09/2022 | FRANCE | N°21/22045

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 15 septembre 2022, 21/22045


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/22045 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CE3OX



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Novembre 2021 -Président du TJ de Paris - RG n° 19/59680





APPELANTE



LA VILLE DE [Localité 4], prise en la personne de Madame la Maire d

e [Localité 4], Mme [C] [R], domiciliée en cette qualité audit siège



[Adresse 5]

[Localité 4]



représentée et assistée par Me Colin MAURICE de la SARL CM & L AVOCATS,...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/22045 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CE3OX

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Novembre 2021 -Président du TJ de Paris - RG n° 19/59680

APPELANTE

LA VILLE DE [Localité 4], prise en la personne de Madame la Maire de [Localité 4], Mme [C] [R], domiciliée en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée et assistée par Me Colin MAURICE de la SARL CM & L AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1844

INTIMEE

Madame [V] [N]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée et assistée par Me Grégory LEPROUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C2303

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 juin 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Hélène MASSERON, présidente de chambre et par Saveria MAUREL, greffière présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par assignation en date du 10 octobre 2019, la Ville de [Localité 4] a fait assigner Mme [V] [N] devant le tribunal de grande instance de Paris saisi selon en la forme des référés, sur le fondement notamment des dispositions de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, concernant l'appartement situé [Adresse 1]) (lot n°30).

Par ordonnance du 13 janvier 2020, le tribunal a sursis à statuer sur les demandes de la Ville de [Localité 4] dans l'attente d'une décision de la Cour de justice de l'Union européenne appelée, sur renvoi préjudiciel de la Cour de cassation (Civ. 3ème, 15 nov. 2018, n°17-26.156), à apprécier la compatibilité de la réglementation nationale, telle que celle prévue par l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, à la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006.

La Cour de justice de l'Union européenne a statué par un arrêt du 22 septembre 2020 par lequel elle considère la réglementation nationale conforme aux dispositions de la directive 2006/123/CE (CJUE, 22 sept. 2020, Cali Apartments, affaires joints C-724/18 et C-727/18).

Par cinq arrêts en date du 18 février 2021, la Cour de cassation a tiré les conséquences de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne. Elle a notamment jugé que la réglementation locale de la Ville de [Localité 4] sur le changement d'usage est conforme à la réglementation européenne.

L'affaire a été rétablie à l'audience du 08 octobre 2021.

Par conclusions déposées et soutenues à l'audience, la Ville de [Localité 4] demandait de voir :' condamner Mme [N] à payer à la Ville de [Localité 4] une amende civile de 50.000 euros,

' condamner Mme [N] à payer à la Ville de [Localité 4] une amende civile de 10.000 euros,

' condamner Mme [N] à payer à la Ville de [Localité 4] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamner Mme [N] aux entiers dépens.

En réplique, Mme [N] sollicitait le rejet des demandes, subsidiairement la réduction des amendes à un euro, le rejet des demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la condamnation de la ville aux dépens.

Par ordonnance contradictoire du 12 novembre 2021, le magistrat saisi a :

- condamné Mme [N] à payer une amende civile de 42.000 euros, dont le produit sera versé à la Ville de [Localité 4] ;

- rejeté la demande de la Ville de [Localité 4] fondée sur les dispositions de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme ;

- condamné Mme [N] à payer à la Ville de [Localité 4] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [N] aux dépens ;

- rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de plein droit.

Par déclaration du 14 décembre 2021, la Ville de [Localité 4] a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a rejeté sa demande fondée sur les dispositions de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme.

Dans ses conclusions remises le 28 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la Ville de [Localité 4] demande à la cour, au visa de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 modifié par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014, de l'article 492-1 du code de procédure civile, de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, de l'article L. 632-1 du code de la construction et de l'habitation, de l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation modifiée par la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, des articles L. 324-1-1, L.324-2 et L. 324-2-1 du code du tourisme, des articles L. 131-1 et suivant du code des procédures civiles d'exécution, de :

- juger celle-ci, prise en la personne de Mme la Maire de [Localité 4], recevable et bien fondée en son appel ;

- confirmer l'ordonnance rendue en la forme des référés le 12 novembre 2021 (RG 19/59680) en ce que le juge a :

' condamné Mme [N] à payer une amende civile de 42.000 euros, dont le produit lui sera versé,

' condamné Mme [N] à lui payer la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamné Mme [N] aux dépens ;

- rejeter en conséquence l'appel incident de Mme [N] ainsi que ses demandes, fins et prétentions ;

- infirmer l'ordonnance rendue en la forme des référés le 12 novembre 2021 (RG 19/59680) en ce que le juge a rejeté sa demande fondée sur les dispositions de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme ;

et statuant de nouveau,

- juger que Mme [N] a enfreint les dispositions de l'article L. 324-1-1 IV du code du tourisme en ne transmettant pas le nombre de jours au cours desquels l'appartement a été loué dans le mois qui a suivi le demande ;

- et condamner Mme [N] à payer une amende civile de 10.000 euros sur le fondement de l'article L. 324-1-1 V du code du tourisme et ordonner que le produit de cette amende lui soit intégralement versé ;

en tout état de cause,

- rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de Mme [N] ;

- condamner Mme [N] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à son profit ;

- la condamner aux entiers dépens.

La Ville de [Localité 4] soutient en substance :

- que dans le cadre d'une opération de contrôle de l'occupation des locaux d'habitation, une présomption d'infraction (location meublée de courte durée dans un local à usage d'habitation) a été détectée concernant un appartement situé au 2ème étage porte gauche de l'immeuble du [Adresse 1]) (constituant le lot n°30) ;

- que suite à ce contrôle, les recherches effectuées ont permis de déterminer que Mme [N] était propriétaire de cet appartement ;

- que la fiche H2 produite aux débats par la Ville de [Localité 4] montre qu'elle a été remplie le 13 octobre 1970 par le propriétaire du bien, Mme [W] pour l'année fiscale 1970 et loué par Mme [D] ;

- qu'il est établi qu'au 1er janvier 1970, Mme [D] louait à Mme [W] l'appartement pour un montant mensuel de 861 francs ;

- que la situation au 1er janvier 1970 est parfaitement établie, le bien était à usage exclusif d'habitation ;

- que contrairement aux dires du défendeur, le fait que ladite déclaration a pu être remplie postérieurement ou à une date non précisée ne saurait en soi la priver de sa valeur probante de l'usage de ce bien au 1er janvier 1970 alors qu'elle a pour objet de décrire l'usage du bien à cette date ;

- que le bien litigieux n'est pas la résidence principale du loueur puisque selon la DRFIP, la domiciliation fiscale de Mme [N] est au [Adresse 2]) ;

- que Mme [N] met son bien en locations de courtes durées via une annonce consultable sur le site Airbnb, qu'elle comporte 218 commentaires de touristes depuis le mois de septembre 2017;

- que l'appartement a fait l'objet d'une déclaration en ligne de location meublée en date du 16 novembre 2017 en application de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme ;

- qu'ainsi, les locaux à usage d'habitation ont été utilisés à usage de meublé touristique loués pour de courte durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile, en infraction à la réglementation du changement d'usage définie dans les articles L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation ;

- que Mme [N] a enfreint les dispositions des articles L. 324-1-1 du code du tourisme en ne transmettant pas le nombre de jours au cours desquels les locaux ont été loués ;

- que la gain illégal estimé serait de l'ordre de 46.179 euros depuis le mois de septembre 2017;

- que la Ville de [Localité 4] a demandé à Mme [N] de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué et qu'il n'a pas été donné suite à cette demande.

Dans ses conclusions remises le 25 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, Mme [N] demande à la cour, au visa des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation, de l'article L.324-1-1 du Code du tourisme, de :

- juger celle-ci recevable et bien fondée en son appel incident ;

- confirmer l'ordonnance du 12 novembre 2021 en ce qu'elle a :

' rejeté la demande de la Ville de [Localité 4] fondée sur les dispositions de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme ;

- infirmer l'ordonnance du 12 novembre 2021 en ce qu'elle a :

' condamné celle-ci à payer une amende civile de 42.000 euros, dont le produit sera versé à la Ville de [Localité 4],

' condamné celle-ci à payer à la Ville de [Localité 4] la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamné celle-ci aux dépens ;

et statuant à nouveau,

à titre principal,

- débouter la Ville de [Localité 4] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

à titre subsidiaire,

- dire que compte tenu de sa bonne foi, des diligences et de sa coopération, elle est fondée à n'être condamnée qu'à une amende symbolique ;

- fixer le montant de l'amende civile à la somme symbolique de 5.000 euros ;

- dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la Vile de [Localité 4] aux dépens.

Mme [N] soutient en substance :

- que le local situé [Adresse 1]) ne constitue pas la résidence principale de Mme [N] ;

- qu'aucun relevé de propriété n'est communiqué qui pourrait mentionner qu'elle est propriétaire du bien et que ce dernier est à usage d'habitation ;

- qu'en tout état de cause, ce document ne permet pas de déduire l'usage des lieux au 1er janvier 1970 ;

- que la fiche H2 produite est datée du 19 octobre 1970 mais ne permet pas d'établir l'usage d'habitation du bien au 1er janvier 1970 dans la mesure où il n'est pas mentionné le numéro du lot du bien concerné, ou il n'est pas mentionné la porte gauche, face ou droite ;

- qu'il n'est pas démontré que le locataire soit occupant des lieux avant le 1er janvier 1970 ;

- que ces dispositions de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme, ne sont pas applicables à Mme [N] dès lors qu'il n'est ni démontré ni allégué par la Ville de [Localité 4] que le bien loué constitue sa résidence principale, Mme [N] ayant de surcroît déclaré le bien comme sa résidence secondaire ;

- qu'il s'agit de l'unique bien immobilier de Mme [N] qui est par ailleurs locataire de sa résidence principale ;

- qu'entre septembre 2018 et mai 2019, elle a perçu 36.562,37 euros de revenus issus des locations sur Airbnb et non 46.179 euros ;

- qu'elle a désactivé l'annonce sur le site Airbnb de sorte que la demande de retour à l'habitation sous astreinte est sans objet.

SUR CE LA COUR

Sur le changement illicite de l'usage d'habitation (article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation)

L'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation dispose que toute personne qui enfreint les dispositions de l'article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50.000 euros par local irrégulièrement transformé.

Selon l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, un local est réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. Cette affectation peut être établie par tout mode de preuve. Les locaux construits ou faisant l'objet de travaux ayant pour conséquence d'en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés.

Toutefois, lorsqu'une autorisation administrative subordonnée à une compensation a été accordée après le 1er janvier 1970 pour changer l'usage d'un local mentionné à l'alinéa précédent, le local autorisé à changer d'usage et le local ayant servi de compensation sont réputés avoir l'usage résultant de l'autorisation.

Sont nuls de plein droit tous accords ou conventions conclus en violation du présent article.

Le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile constitue un changement d'usage au sens du présent article.

Pour l'application des dispositions susvisées, il y a donc lieu d'établir :

- l'existence d'un local à usage d'habitation, un local étant réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, sauf pour les locaux construits ou faisant l'objet de travaux ayant pour conséquence d'en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 qui sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés, le formulaire administratif de type H2 rempli à cette époque dans le cadre de la législation fiscale permettant de préciser l'usage en cause ;

- un changement illicite, sans autorisation préalable, de cet usage, un tel changement étant notamment établi par le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile.

Il est en outre constant que, s'agissant des conditions de délivrance des autorisations, la Ville de [Localité 4] a adopté, par règlement municipal et en application de l'article L. 631-7-1 du code de la construction et de l'habitation, le principe d'une obligation de compensation par transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage, obligation de compensation qui n'apparaît pas voir été respectée dans le cadre de la présente procédure.

En l'espèce, il sera relevé :

- que le formulaire H2 produit a été rempli par la propriétaire le 13 octobre 1970 et précise qu'au 1er janvier 1970, le bien était loué pour un loyer mensuel de 861 francs, le document mentionnant aussi une superficie de 27 mètres carrés affectée exclusivement à l'habitation, la fiche R en date du 19 octobre 1970 venant d'ailleurs confirmer la présence de ladite locataire ;

- qu'il s'en déduit que l'usage d'habitation du bien au 1er janvier 1970 est parfaitement établi, étant indifférent, contrairement à ce qu'indique l'intimée, que le document ait été rempli après cette date, dans la mesure où la mention d'un locataire au 1er janvier 1970 permet de démontrer l'usage d'habitation à cette date ;

- qu'il est constant que le bien n'est pas la résidence principale de Mme [N], ce qui ressort des écritures des deux parties ;

- que le procès-verbal établi par l'agent assermenté de la Ville de [Localité 4] montre que l'appartement en cause a été offert à la location de courte durée à une clientèle de passage au moyen d'une annonce sur le site de la société airbnb, étant rappelé qu'il a été constaté que l'annonce comportait 218 commentaires de touristes et que Mme [N], présente lors d'une visite du contrôleur, a reconnu l'activité de location touristique de courte durée ; que le contrôleur a d'ailleurs finalement observé que l'annonce avait été transformé en bail mobilité le 5 juillet 2019 ;

- que, dès lors, en l'absence d'autorisation, l'infraction de changement illicite de l'usage d'habitation est parfaitement caractérisée en tous ses éléments, peu important la circonstance alléguée que Mme [N] n'aurait pas comme langue maternelle le français et ignorait le caractère illicite de son activité ; qu'il importe également peu qu'elle ait réglé ses impôts ou qu'elle ait procédé à la déclaration requise, la location en cause apparaissant toujours illicite au sens du code de la construction et de l'habitation ;

- que, s'agissant du montant de l'amende civile, le contrôleur de la ville, prenant en compte un taux d'occupation estimé à 75 % et le coût moyen d'une nuit à 130 euros, puis relevant un loyer de référence pour un bail classique à 726 euros, a pu à juste titre calculer un gain illégal de 46.179 euros depuis le mois de septembre 2017, étant observé que la location de courte durée s'est poursuivie jusqu'en juillet 2019 et que le chiffre des gains obtenus auprès d'airbnb selon l'intimée (36.562,37 euros entre septembre 2018 et mai 2019) n'apparaît pas incompatible avec l'estimation totale de la Ville de [Localité 4] ;

- qu'ainsi, Mme [N], propriétaire du bien, apparaît avoir été condamnée à une amende civile de 42.000 euros qui correspond au profit réalisé, chiffre tenant compte aussi du caractère d'intérêt général de la législation applicable dans une ville connaissant de graves difficultés sur le plan du logement ainsi que du coût éventuel de la compensation qui aurait dû être payé, nonobstant le fait que Mme [N] ait répondu à la ville lors de la procédure d'enquête.

Il y a donc lieu de confirmer l'ordonnance entreprise sur ce point, le premier juge ayant parfaitement estimé le montant de l'amende civile à prononcer.

Sur la non-transmission du nombre de jours de location d'un meublé de tourisme (article L.324-1-1 IV du code du tourisme)

L'article L. 324-1-1 du code du tourisme dispose notamment que :

II.-Toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme, que celui-ci soit classé ou non au sens du présent code, doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé.

Cette déclaration préalable n'est pas obligatoire lorsque le local à usage d'habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

III.-Par dérogation au II, dans les communes où le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est soumis à autorisation préalable au sens des articles L. 631-7 à L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation une délibération du conseil municipal peut décider de soumettre à une déclaration préalable soumise à enregistrement auprès de la commune toute location d'un meublé de tourisme.

La déclaration indique si le meublé de tourisme offert à la location constitue la résidence principale du loueur au sens de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée.

IV.-Dans les communes ayant mis en 'uvre la procédure d'enregistrement de la déclaration préalable mentionnée au III, toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme qui est déclaré comme sa résidence principale ne peut le faire au-delà de cent vingt jours au cours d'une même année civile, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure.

La commune peut, jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué. Le loueur transmet ces informations dans un délai d'un mois, en rappelant l'adresse du meublé et son numéro de déclaration.

V.- Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du III est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 5.000 euros.

Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du IV est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 10.000 euros.

En l'espèce, s'agissant de l'infraction aux dispositions de l'article L.324-1-1 IV du code du tourisme, à savoir le défaut de transmission relative au nombre de jours loués, il sera relevé que l'obligation de transmission de l'article L.324-1-1 IV alinéa 2 du code du tourisme ne peut concerner que les locations visés à l'article L.324-1-1 IV alinéa premier, à savoir les locations d'un meublé de tourisme déclaré comme résidence principale, étant rappelé que les textes relatifs à une infraction civile, pouvant conduire au prononcé d'une amende, doivent s'interpréter strictement, l'article en cause devant s'analyser en son ensemble.

Le logement en cause n'est pas ici la résidence principale de Mme [N], ce qui n'est contesté par aucune des parties.

Les conditions pour prononcer une amende en application de l'article L.324-1-1 IV du code du tourisme ne sont donc pas remplies, comme l'a justement indiqué le premier juge.

Ainsi, au regard de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, en ce compris le sort des frais et dépens de première instance exactement réglé par le premier juge.

Compte tenu de la décision prise par la cour, il sera dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure appel à hauteur d'appel, chacune des parties conservant la charge de ses dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel ;

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 21/22045
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;21.22045 ?
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