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15/09/2022 | FRANCE | N°21/175007

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 15 septembre 2022, 21/175007


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/17500 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEOAC

Décision déférée à la cour :
Jugement du 22 septembre 2021-juge de l'exécution de Bobigny-RG no 21/02847

APPELANTE

S.A.S SKY ACCES
[Adresse 1]
[Localité 4]

Représentée par Me Denis HUBERT de l'AARPI KADRAN AVOCATS, avocat au barr

eau de PARIS, toque : K0154

INTIMÉE

S.A. CRÉDIT DU NORD
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représentée par Me Marie-Christine FOURNIER GILLE du LLP...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/17500 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEOAC

Décision déférée à la cour :
Jugement du 22 septembre 2021-juge de l'exécution de Bobigny-RG no 21/02847

APPELANTE

S.A.S SKY ACCES
[Adresse 1]
[Localité 4]

Représentée par Me Denis HUBERT de l'AARPI KADRAN AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0154

INTIMÉE

S.A. CRÉDIT DU NORD
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représentée par Me Marie-Christine FOURNIER GILLE du LLP KRAMER LEVIN NAFTALIS et FRANKEL LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J008

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Agissant en vertu d'un jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bobigny le 21 novembre 2019, la société Sky Acces a, le 6 mars 2020, fait signifier à la société Crédit du Nord un procès-verbal de saisie-attribution sur les comptes bancaires de la SAS Groupe Technique Peinture et Ravalement pour un montant de 16 144,63 euros.

Par une lettre du 23 mars 2020, le Crédit du Nord a indiqué à l'huissier de justice instrumentaire que le solde saisissable des comptes courants s'élevait à la somme de 15 764,38 euros. Une seconde lettre du 25 mars 2020 est venue annuler et remplacer la dernière précitée, informant que le solde saisissable des comptes courants s'élevait à -4 782,28 euros. Le 2 juillet 2020 sera signifié à la société Crédit du Nord, en tant que tiers saisi, un certificat de non contestation.

C'est dans ces conditions que par acte d'huissier du 10 mars 2021, la société Sky Acces a fait assigner la société Crédit du Nord devant le Juge de l'exécution de Bobigny afin de la voir condamner à lui payer la somme de 15 764,38 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2020 en qualité de tiers saisi, la somme de 5 000 euros à titre de dommages-inte rêts, et celle de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Le juge de l'exécution de Bobigny a, suivant jugement daté du 22 septembre 2021 :

rejeté les demandes de la société Sky Acces tendant à se voir payer la somme de 15 764,38 euros en qualité de tiers saisi ;
condamné la société Sky Acces à payer à la société Crédit du Nord la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné la société Sky Acces aux entiers dépens.

Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a retenu que le compte du tiers saisi était en réalité débiteur, et que l'absence de décaissement des fonds par ce dernier ne résultait donc pas d'un refus injustifié.

Selon déclaration en date du 6 octobre 2021, la société Sky Acces a relevé appel de ce jugement.
En ses conclusions notifiées le 11 mai 2022, la société Sky Acces a exposé :
que le Crédit du Nord, tiers saisi, avait refusé de justifier le non versement des fonds à l'huissier de justice après la signification du certificat de non-contestation, ce qui rend la banque fautive, justifiant ainsi l'obtention d'un titre exécutoire pour la société Sky Acces et sa condamnation à lui verser 15 764,38euros ;
que le Crédit du Nord avait répondu à l'huissier de justice instrumentaire 15 jours après, alors que sa réponse devait être spontanée, que ladite réponse était erronée, et qu'il n'avait pas justifié du solde qu'il avait énoncé ni de celui rectifié. Son manquement constitue une faute, si bien que la société Sky Acces est fondée à lui demander le paiement de cette somme ;
que la société Crédit du Nord ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle a rectifié ses déclarations auprès de l'huissier de justice, en se contentant simplement de produire un mail non signé ainsi qu'une lettre simple, aucun des deux n'ayant été réceptionné par l'huissier de justice ;
que ladite société a fait preuve d'une résistance abusive, causant ainsi un préjudice à la société Sky Acces, qui a perdu une chance de procéder à une nouvelle saisie du fait que l'huissier de justice n'a pas eu connaissance du mail rectificatif du 25 mars 2020, qui a alors entraîné la signification d'un certificat de non-contestation.

La société Sky Acces a demandé à la Cour de la déclarer recevable et bien fondée en son appel, d'infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau, de condamner la société Crédit du Nord à :
payer la somme de 15 764,38 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2020, date du procès-verbal de signification du certification de non-contestation ;
lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
aux entiers dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées le 5 avril 2022, la société Crédit du Nord a soutenu :
que le délai de 15 jours pour répondre s'explique par la période de la saisie-attribution qui était concomitante à la mise en place du premier confinement consécutif à l'épidémie de Covid 19, et qu'elle avait eu besoin de temps pour mettre en place des autorisations dérogatoires pour ses salariés, ce qui avait généré une période globale de carence ;
que le procès-verbal de saisie-attribution a été véritablement réceptionné le 23 mars 2020, et suite à un manque de vigilance, il a été retenu cette date plutôt que celle du 6 mars 2020, justifiant l'erreur, la situation du compte étant différente à ces deux dates ;
qu'elle s'est rapidement aperçue de son erreur et en a fait part à l'huissier de justice, lui adressant alors un mail en lui communiquant un courrier rectificatif annulant et remplaçant celui du 23 mars 2020 ;
qu'elle justifie de l'envoi d'un mail à l'étude de l'huissier, en en rapportant la preuve, une collègue mise en copie en ayant assuré bonne réception, l'absence de signature étant due uniquement au télétravail du fait du confinement ce qui ne lui permettait pas de mentionner sa signature électronique en bas de page ;
qu'elle a déféré à son obligation de renseignement dans les meilleurs délais possibles compte tenu de la crise sanitaire et du confinement qui venait d'être ordonné, et ayant informé l'huissier de justice dès le lendemain de son erreur, de sorte qu'elle ne saurait être condamnée au paiement de dommages-intérêts.

Le Crédit du Nord a demandé à la Cour de déclarer la société Sky Acces mal fondée en son appel, et en conséquence la débouter de ses prétentions à toutes fins qu'elles comportent, de confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution de Bobigny le 22 septembre 2021 en toutes ses dispositions, et de condamner la société Sky Acces à lui verser une indemnité de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS

En vertu de l'article R 211-4 du code des procédures civiles d'exécution, le tiers saisi est tenu de fournir sur-le-champ à l'huissier de justice les renseignements prévus à l'article L 211-3 (c'est à dire l'étendue de ses obligations vis à vis du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et s'il y a lieu, les cessions de créances, délégations ou saisies antérieures), et de lui communiquer les pièces justificatives.

Il en est fait mention dans l'acte de saisie.

(...)

Si l'acte de saisie est signifié par voie électronique, le tiers saisi est tenu de communiquer à l'huissier de justice, par la même voie, les renseignements et pièces justificatives mentionnés au premier alinéa. Cette communication doit être effectuée au plus tard le premier jour ouvré suivant la signification, sous réserve des dispositions prévues à l'article 748-7 du code de procédure civile.

Il s'avère que :

- la saisie-attribution a été régularisée le 6 mars 2020 ; l'intimée ne peut raisonnablement soutenir qu'elle a eu en possession cet acte plusieurs jours après car il lui a été signifié par un huissier de justice ;
- le 23 mars 2020, la société Crédit du Nord a déclaré que le compte était créditeur à hauteur de 15 764,38 euros ;
- le 25 mars 2020, la société Crédit du Nord a indiqué à l'huissier de justice instrumentaire qu'en réalité, le compte était débiteur à concurrence de 4 782,28 euros.

La déclaration de la société Crédit du Nord en tant que tiers saisi a été faite largement hors délais, puisqu'elle devait intervenir au plus tard le 7 mars 2020, et aucun texte ne permet de déroger à la règle selon laquelle la communication du tiers saisi doit être effectuée au plus tard le premier jour ouvré suivant la saisie-attribution. Cela équivaut à une absence de réponse. Il faut donc considérer que l'intimée a failli à son obligation d'information si bien que la sanction de l'article R 211-5 du code des procédures civiles d'exécution, qui prévoit que le tiers saisi doit être condamné, à la demande du créancier, à payer les sommes dues à ce dernier sans préjudice de son recours contre le débiteur, est encourue.

Toutefois, il est de jurisprudence constante que cette sanction est écartée quand il apparaît que le tiers saisi n'avait pas la qualité de débiteur vis à vis du débiteur. C'est au 6 mars 2020, date de la saisie-attribution, qu'il faut apprécier cette question. A cette date, au vu des diverses opérations de crédit et de débit antérieures, le compte accusait un solde débiteur de 3 407,48 euros. En application de l'article L 162-1 du Code des procédures civiles d'exécution, les opérations de crédit et de débit dont la date est antérieure à la saisie attribution et qui apparaissent sur le compte dans les quinze jours de celle-ci n'affectent le solde saisi attribué que si leur résultat cumulé est négatif, si bien que celles-ci ne pouvaient pas accroître les effets de la saisie-attribution. Au jour de la mise en place de cette mesure d'exécution, la société Crédit du Nord n'était donc tenue à aucune obligation envers la société groupe Technique Peinture Ravalement. Aucune sanction ne pouvant être prononcée, le créancier saisissant doit être débouté de ses prétentions et le jugement sera confirmé en ce sens.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Crédit du Nord, dans la mesure où c'est son retard et son erreur dans la rédaction de sa déclaration en tant que tiers saisi qui constituent l'origine du présent litige.

La société Sky Acces sera condamnée aux dépens d'appel, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de l'appel,

- CONFIRME le jugement en date du 22 septembre 2021 ;

- REJETTE la demande de la société Crédit du Nord en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE la société Sky Acces aux dépens d'appel, qui seront recouvrés par Maître Fournier Gille conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/175007
Date de la décision : 15/09/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-09-15;21.175007 ?
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