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15/09/2022 | FRANCE | N°21/174337

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 15 septembre 2022, 21/174337


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/17433 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEN3G

Décision déférée à la cour : jugement du 09 septembre 2021-juge de l'exécution de Paris -RG no 21/81007

APPELANTE

S.N.C. PIERRE ET FILS [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Représentée par Me Anne COLONNA DURAN, avocat au barreau

de PARIS, toque :
B1100

INTIMÉES

SYNDICAT PATRONAL DE LA BOULANGERIE ET DE LA BOULANGERIE PATISSERIE DE [Localité 5] ET DE LA SEINE
[Adr...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/17433 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEN3G

Décision déférée à la cour : jugement du 09 septembre 2021-juge de l'exécution de Paris -RG no 21/81007

APPELANTE

S.N.C. PIERRE ET FILS [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 6]

Représentée par Me Anne COLONNA DURAN, avocat au barreau de PARIS, toque :
B1100

INTIMÉES

SYNDICAT PATRONAL DE LA BOULANGERIE ET DE LA BOULANGERIE PATISSERIE DE [Localité 5] ET DE LA SEINE
[Adresse 4]
[Localité 5]

Représentée par Me Karine ALTMANN de la SELEURL AL-TITUDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E2070

S.A.S.U. LE GRENIER A PAIN BELLES FEUILLES
[Adresse 3]
[Localité 5]

Représentée par Me Karine ALTMANN de la SELEURL AL-TITUDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E2070

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 juin 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****
Un arrêté du préfet de police de [Localité 5] en date du 21 janvier 1997 a prévu que les boulangeries parisiennes doivent fermer un jour par semaine et que, lorsque la vente du pain n'a qu'un caractère accessoire, seule la partie concernée de l'établissement sera fermée.

Suivant ordonnance de référé en date du 4 mars 2021, qui sera signifiée le 7 avril suivant, actuellement frappée d'appel, le président du Tribunal judiciaire de Paris a, sur la demande du syndicat patronal de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie de Paris et de la Seine et de la société par actions Le grenier à pain belles feuilles, condamné la société Pierre et fils [Localité 6], qui exploitait une boulangerie sise [Adresse 1], à se conformer à cet arrêté en fixant un jour de fermeture par semaine, et ce dès la signification de la décision, sous astreinte de 1 500 euros par infraction.

Par jugement daté du 9 septembre 2021, le juge de l'exécution de Paris, après avoir relevé d'une part que la preuve de la cession du fonds de commerce par la société Pierre et fils [Localité 6] n'était pas rapportée et que l'intéressée l'exploitait toujours, puisqu'un contrat en date du 25 mars 2021 stipulait qu'il lui était donné en location-gérance et que l'avenant prévoyant que celle-ci prendrait fin n'avait pas été enregistré auprès de l'administration fiscale, d'autre part, qu'un huissier de justice avait constaté que la boulangerie litigieuse annonçait être ouverte du lundi au dimanche, a liquidé cette astreinte à 3 000 euros et a condamné la société Pierre et fils [Localité 6] au paiement de pareille somme, outre 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon déclaration en date du 5 octobre 2021, la société Pierre et fils [Localité 6] a relevé appel de ce jugement.

En ses conclusions notifiées le 4 mai 2022, elle a exposé :

- que la société Meunier Victor Hugo avait acquis de la société Victor Hugo By Huré 100% du capital de la société Victor Hugo Longchamp, propriétaire du fonds de commerce de boulangerie, suite à une promesse de vente datée du 27 juin 2019 ;
- que cette cession était intervenue le 25 mars 2021 et mentionnée sur les extraits kbis ;
- que le fait que l'avenant du 1er juillet 2020 n'y ait pas été annexé était dépourvu d'incidence ;
- qu'il n'y avait pas lieu d'informer les deux intimées de cette cession ;
- qu'à ce jour, la société Pierre et fils [Localité 6] n'exploite plus la boulangerie ;
- qu'en outre, seule la période postérieure au 7 avril 2021, date de signification de l'ordonnance de référé, était en jeu ;
- que le second procès-verbal de constat n'avait relevé qu'une ouverture de la boulangerie sur 6 jours consécutifs et non pas 7 ;
- subsidiairement, que seule une infraction par semaine pouvait être établie.

La société Pierre et fils [Localité 6] a demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de rejeter les demandes adverses, subsidiairement de limiter la liquidation de l'astreinte à 1 500 euros, et de condamner solidairement les intimés au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel.

Dans leurs conclusions notifiées le 1er décembre 2021, le syndicat patronal de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie de [Localité 5] et de la Seine et la société par actions Le grenier à pain belles feuilles ont répliqué :

- que l'ordonnance de référé du 4 mars 2021 étant frappée d'appel, la Cour d'appel de Paris avait, le 17 novembre 2021, ordonné un sursis à statuer dans l'attente de la décision du Tribunal administratif devant trancher la question de la validité de l'arrêté du 21 janvier 1997 ;
- que par jugement du 18 novembre 2021, ledit Tribunal avait rejeté le recours formé à l'encontre dudit arrêté ;
- qu'il était constant que la boulangerie ouvrait tous les jours ;
- que le juge de l'exécution avait omis de prendre en compte un deuxième procès-verbal de constat en date des 16, 17, 18, 19, 20, 21 et 22 juin 2021 établissant le défaut d'exécution de l'ordonnance de référé ;
- que la société Pierre et fils [Localité 6] restait bien débitrice de l'obligation de fermer un jour par semaine ;
- que si le contrat de location-gérance prévoyait qu'il cesserait ses effets le 30 juin 2021, une convention datée du 30 juillet 2020 avait stipulé que ladite location-gérance prendrait fin dès lors que le fonds de commerce serait acquis par une société du groupe Eric [F] ;
- que le 25 mars 2021, soit juste après le prononcé de l'ordonnance de référé, une SARL à associé unique, la société Meunier Victor Hugo, dont le gérant n'était autre que M. [F], avait acquis le fonds, sans que le syndicat patronal de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie de [Localité 5] et de la Seine et la société par actions Le grenier à pain belles feuilles n'en soient informés.

Le syndicat patronal de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie de [Localité 5] et de la Seine et la société par actions Le grenier à pain belles feuilles ont demandé à la Cour d'infirmer le jugement, de liquider l'astreinte à 3 x 1500 euros, et de leur allouer à chacun la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

L'ordonnance de référé contenant l'ordre judiciaire décerné à la société Pierre et fils [Localité 6] a été signifiée le 7 avril 2021 et ne prévoyait pas de délai entre cet acte et le point de départ de l'astreinte, si bien que la période en litige débute au 7 avril 2021.

L'article L 131-4 du Code des procédures civiles d'exécution énonce que le montant de l'astreinte est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.

Il convient toutefois au préalable de trancher la question de savoir si, sur la période considérée, la société Pierre et fils [Localité 6] était tenue d'exécuter l'ordonnance de référé susvisée ou non.

La société Pierre et fils [Localité 6] n'est pas propriétaire du fonds de commerce : selon acte sous seing privé en date du 27 juin 2019, la société Victor Hugo By Huré I, propriétaire dudit fonds, et qui l'avait confié en location-gérance à la société Victor Hugo By Huré par contrat daté du 31 janvier 2013, l'a loué à la société Pierre et fils [Localité 6] pour une durée de deux années devant se terminer le 30 juin 2021. Le locataire gérant était tenu d'exploiter le fonds en bon gestionnaire, et de le tenir ouvert et achalandé selon les usages de la profession et selon les conditions d'ouverture actuelles. Le locataire-gérant sortant n'exploitait plus, en conséquence, ce fonds.

Le 27 juin 2019, soit le même jour, a été conclu entre la société Victor Hugo By Huré et M. [F] une promesse de vente et d'achat de parts sociales de la société Victor Hugo By Huré I (propriétaire du fonds) ; M. [F] s'engageait ainsi à acquérir les 500 parts de cette société pour la somme de 1 939 078 euros.

Le 1er juillet 2020, un avenant au contrat de location-gérance a stipulé que le groupe [F], dont la société Pierre et fils [Localité 6] faisait partie, envisageait d'acquérir dans les mois à venir le fonds de commerce ou les actions de la société Victor Hugo By Huré I, si bien que la location-gérance précitée prendrait fin de manière automatique et anticipée, sans formalité, le jour de l'acquisition par une société du groupe [F] du fonds ou des actions de la société Victor Hugo By Huré I.

Et le 25 mars 2021, la cession des parts de la société Victor Hugo By Huré I par la société Victor Hugo By Huré à la société Pierre et fils [Localité 6] a été régularisée, précision étant faite que M. [F] est le représentant légal de celle-ci. Le président de la société AXEE formalités a attesté le 28 juin 2021 de ce que les formalités relatives à la modification du locataire-gérant et à sa suppression étaient en cours de traitement au greffe du Tribunal de commerce de Paris.

Le fait que l'avenant du 1er juillet 2020 ne soit pas enregistré auprès de l'administration fiscale ne le prive pas d'effet, l'article 791 du code général des impôts ne prévoyant aucunement cette sanction, et il ne saurait être qualifié de prétendu avenant pour ce seul motif. Et s'agissant de l'acte de cession du 25 mars 2021, contrairement à ce qu'a estimé le juge de l'exécution, l'appartenance de la société Pierre et fils [Localité 6] au groupe [F] est démontrée par le seul fait que M. [F] est son gérant. Du reste, la circonstance que l'avenant ait indiqué que le groupe [F], dont la société Pierre et fils [Localité 6] faisait partie, envisageait d'acquérir dans les mois à venir le fonds de commerce ou les actions de la société Victor Hugo By Huré I, le conforte.

Le premier juge a tiré argument de ce qu'en page 5 du contrat de cession d'actions du 25 mars 2021, il était mentionné que le fonds de commerce était donné en location-gérance à la société Pierre et fils [Localité 6], et que cette mention était incompatible avec l'avenant du 1er juillet 2020, lequel stipulait qu'en cas de cession du fonds ou des actions de la société Victor Hugo By Huré I, ladite location-gérance prendrait fin. Lorsque le contrat du 25 mars 2021 a été rédigé, la location-gérance était toujours en cours, et ce n'est qu'après sa signature qu'elle a pris fin. Il n'y a dès lors nulle contradiction entre les deux conventions.

Dans ces conditions, il faut considérer que la société Pierre et fils [Localité 6] n'exploitait plus le fonds de commerce litigieux sur la période couverte par l'astreinte, si bien que celle-ci ne saurait être liquidée à son encontre. Le jugement sera infirmé et le syndicat patronal de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie de [Localité 5] et de la Seine et la société par actions Le grenier à pain belles feuilles seront déboutés de leurs prétentions.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Pierre et fils [Localité 6].

Le syndicat patronal de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie de [Localité 5] et de la Seine et la société par actions Le grenier à pain belles feuilles seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de l'appel,

- INFIRME le jugement en date du 9 septembre 2021 ;

et statuant à nouveau :

- DEBOUTE le syndicat patronal de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie de [Localité 5] et de la Seine et la société par actions Le grenier à pain belles feuilles de leurs prétentions ;

- REJETTE la demande de la société Pierre et fils [Localité 6] en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE in solidum le syndicat patronal de la boulangerie et de la boulangerie pâtisserie de [Localité 5] et de la Seine et la société par actions Le grenier à pain belles feuilles aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/174337
Date de la décision : 15/09/2022
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-09-15;21.174337 ?
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