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15/09/2022 | FRANCE | N°18/05376

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 15 septembre 2022, 18/05376


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022



(n° 2022/ , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05376 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5QFQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F 17/00931





APPELANT



Monsieur [F] [J]

Chez Monsieur [H]

[D]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représenté par Me Daniel SAADAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0392



INTIMEE



Me [G] [K] (SARL MS BATIMENT) - Mandataire de Société MS BA...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022

(n° 2022/ , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05376 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5QFQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F 17/00931

APPELANT

Monsieur [F] [J]

Chez Monsieur [H] [D]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Daniel SAADAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0392

INTIMEE

Me [G] [K] (SARL MS BATIMENT) - Mandataire de Société MS BATIMENT

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Hervé roméo WATAT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nelly CAYOT, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie Christine HERVIER, Présidente de chambre,

Madame Nelly CAYOT, Conseillère

Madame Lydie PATOUKIAN, Conseillère

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour,

- signé par Madame Marie Christine HERVIER, Présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

La SARL MS Bâtiment a pour activités principales la rénovation, la peinture, le ravalement, le carrelage et la petite maçonnerie ; elle a conclu un contrat de sous-traitance avec la société Bechet le 3 aout 2016 pour la mise en peinture du plafond et des murs d'un chantier situé à [Localité 7] (95). La prestation était exécutée au [Adresse 6] situé sur cette commune.

Le 11 août 2016, alors que M. [F] [J], ressortissant égyptien, se trouvait sur ce chantier, il a été victime d'un accident en tombant d'un échafaudage. Les secours sont intervenus et ont transporté le blessé vers l'hôpital [5] sous la fausse identité communiquée par M. [T] [U], salarié de la société MS Bâtiment, à savoir sous le nom de M. [N] [S], autre employé de la société MS Bâtiment et associé fondateur de celle-ci.

Le bilan lésionnel mentionne:

- une fracture de la rotule droite ;

- une fracture comminutive du poignet gauche ;

- une fracture du scaphoïde ;

- une impotence fonctionnelle du membre inférieur droit.

Le 12 août 2016, M. [J] a subi plusieurs interventions chirurgicales et est resté hospitalisé jusqu'au 20 août 2016. Il a fait l'objet de divers arrêts de travail depuis cette date, ayant subi plusieurs autres opérations et se trouvait toujours sous surveillance médicale le 16 octobre 2020 et en arrêt de travail jusqu'au 31 janvier 2021.

Considérant que M. [J] ne faisait pas partie de son effectif salarié, la société MS Bâtiment n'a pas déclaré l'accident dont ce dernier a été victime sur le chantier, en accident du travail et ne lui a versé aucun salaire.

Le 26 octobre 2016, M. [J] a adressé une mise en demeure à la société MS Bâtiment afin d'obtenir la régularisation de sa situation auprès de l'URSSAF, la déclaration de son accident auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie, ainsi que le paiement de l'intégralité des heures de travail accomplies depuis son embauche. Il indiquait n'avoir perçu pour seul salaire depuis le 1er juin 2016 qu'une somme de 300 euros. La société MS Bâtiment a refusé de répondre favorablement à cette demande motif pris de ce qu'elle n'avait jamais embauché M. [J] dont elle n'avait par ailleurs pas connaissance de la présence sur son chantier.

Par requêtes des 13 décembre 2016 et 6 janvier 2017, M. [J] a saisi le tribunal administratif de Paris aux fins d'annulation des avis de sommes à payer délivrés à son encontre par l'Assistance publique des hôpitaux de Paris (APHP), s'agissant des frais de santé liés à son accident du travail survenu le 11 août 2016.

Par jugement du 14 février 2019, le tribunal administratif de Paris a annulé les titres exécutoires de l'APHP à l'encontre de M. [J] en rappelant que ce dernier était déchargé de l'obligation de payer les sommes correspondantes, le ministère de la solidarité et de la santé étant volontairement intervenu à l'instance pour rappeler les faits subis par M. [J], évoquer l'existence possible d'un travail dissimulé et retenir la responsabilité de la société MS Bâtiment.

Estimant ne pas être rempli de ses droits, M. [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny par requête du 27 mars 2017 enregistrée au greffe le 28 mars 2017, aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et de condamnation de la société MS Bâtiment à lui verser diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

La société MS Bâtiment occupait moins de 11 salariés lors de la rupture des relations contractuelles et est soumise à la convention collective des ouvriers du bâtiment de la région parisienne.

Par jugement du 14 mars 2018, auquel il convient de se reporter pour l'exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de Prud'hommes de Bobigny, section industrie, a :

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date du prononcé du jugement soit le 14 mars 2018 ;

- condamné la société MS Bâtiment à verser à M. [J] les sommes suivantes :

* 72,70 euros à titre de rappel de salaire du 11 août 2016,

* 7,27 euros à titre de congés payés afférents,

avec intérêts de droit à compter du 12 avril 2017, date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation ;

* 8 724 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

* 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement ;

- ordonné à la SARL MS Bâtiment de remettre à M. [J] les documents sociaux conformes au jugement ;

- débouté M. [J] du surplus de ses demandes ;

- débouté la SARL MS Bâtiment de ses demandes reconventionnelles ;

- condamné la SARL MS Bâtiment aux dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile.

M. [J] a régulièrement relevé appel du jugement le 13 avril 2018.

Il faisait pratiquer le 10 octobre 2018 une saisie attribution sur le compte de la société MS Bâtiment pour un montant de 4 441 euros, laquelle saisie a été acquiescée par l'intéressée et les parties ont, à cette occasion, convenu que le solde de la dette serait réglé par la société MS Bâtiment en trois mensualités, ce qui fut fait.

Le 31 décembre 2019, à l'issue d'une procédure de liquidation amiable selon procès-verbal d'assemblée générale en date du 28 décembre 2019, la société MS Bâtiment a été dissoute.

Par requête déposée auprès du greffe du tribunal de commerce de Bobigny, M. [J] a sollicité la désignation d'un mandataire ad litem pour représenter la société MS Bâtiment dans le cadre de la procédure pendante devant la cour. Suivant ordonnance du 10 avril 2020, le président du tribunal de commerce de Bobigny a désigné M. [K] [G] en qualité de mandataire ad litem de la société MS Bâtiment.

Par acte d'huissier de justice du 2 juillet 2020, ce dernier a été assigné en intervention forcée.

Aux termes de ses dernières conclusions d'appelant, transmises par voie électronique le 19 octobre 2020, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l`article 455 du code de procédure civile, M. [J] prie la cour de :

- confirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de rappel de salaire pour la période du 1er juin au 10 août 2016 et des congés payés afférents, de dommages et intérêts correspondant à la garantie de maintien de salaire, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés sur préavis, de dommages intérêts pour rupture abusive et de régularisation de la relation de travail auprès de tous les organismes sociaux et notamment, la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) et la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) ;

- condamner la société MS Bâtiment représentée par son mandataire ad litem, M. [K] [G], à lui verser les sommes suivantes :

* 3 161,54 euros à titre de rappel de salaires pour la période du 1er juin au 11 août 2016,

* 316,15 euros au titre des congés payés afférents au rappel de salaires,

* 4 362 euros à titre de dommages intérêts correspondant à la garantie de maintien de salaire,

* 1 454 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 145,40 euros au titre des congés payés sur préavis,

* 8 724 euros nets à titre de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

* 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner à la société MS Bâtiment, représentée par son mandataire ad hoc, M. [K] [G], de régulariser la relation de travail auprès de tous les organismes sociaux et notamment, la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) et la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) ;

- condamner la société MS Bâtiment représentée par son mandataire ad hoc, M. [K] [G], au paiement des intérêts légaux au jour de la saisine avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens et des éventuels frais d'exécution ;

- dire et juger qu'en cas d'exécution forcée de la décision à intervenir les sommes relevant du droit proportionnel prévu à l'article 10 du décret du 12 décembre 1996 seront remis à la charge de la société MS Bâtiment représentée par son mandataire ad hoc, M. [K] [G] et s'ajouteront aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions d'intimé, transmises par voie électronique le 11 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l`article 455 du code de procédure civile, M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem de la société MS Bâtiment, prie la cour de :

A titre liminaire,

- dire et juger fondé l'appel en garantie de l'AGS île de France est,

A titre principal,

- infirmer le jugement :

* en ce qu'il a reconnu l'existence d'une relation de travail entre M. [J] et elle,

* en ce qu'il l'a condamnée au paiement d'une indemnité de 8 724 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

* en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 72,70 euros à titre de rappel de salaire et de 7,20 au titre de l'indemnité de congés payés,

* en ce qu'il a ordonné la régularisation de la situation de travail auprès des organismes sociaux,

- dire et juger qu'en l'absence de contrat de travail, les demandes de M. [J] concernant la rupture abusive du contrat sont sans objet ;

- débouter M. [J] de toutes ses autres demandes ;

- condamner M. [J] au paiement de la somme de 2 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [J] aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 mars 2022.

MOTIVATION

Sur l'appel en garantie de l'AGS :

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités, indique qu'elle entend attraire en garantie l'AGS île de France est afin que celle-ci puisse se substituer à elle.

M. [J] s'oppose à la demande au visa des dispositions de l'article L. 3253-16 du code du travail.

La cour observe que la société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités, s'est abstenue de tout appel en garantie à l'encontre de L'AGS et que l'article L. 3253-16 du code du travail réserve en tout état de cause cette faculté aux procédures collectives alors que la société MS Bâtiment a fait l'objet d'une dissolution amiable.

Dans ces conditions, la cour rejette la demande de la société MS Bâtiment.

Sur l'existence d'un contrat de travail :

M. [J] soutient qu'il a bénéficié d'un contrat de travail à durée indéterminée avec la société MS Bâtiment à compter du 1er juin 2016, au visa des articles L. 1221-2 et L. 1245-1 du code du travail et qu'il se trouvait dans ce cadre sur le chantier du site [Adresse 8] le 11 août 2016. Il fait valoir que la société MS Bâtiment reconnaît cette situation dans la mesure où elle admet qu'elle avait la charge du chantier dans le cadre d'un contrat de sous-traitance, qu'il était bien présent sur un échafaudage le jour de l'accident, que l'un de ses salariés a donné une fausse identité aux équipes de secours lors de son transport à l'hôpital et que ledit salarié, M. [U] a reconnu l'avoir recruté à l'insu de son employeur.

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités, conteste l'existence d'un contrat de travail conclu entre elle et M. [J] ainsi que tout lien de subordination entre eux et allègue que ce dernier ne justifie pas de la matérialité de son embauche, en l'absence de tout bulletin de paie ou de tout écrit. Elle souligne que le chantier situé sur le site de [Adresse 8] a démarré le 3 août 2016, de sorte que M. [J] qui prétend avoir été recruté sur ce dernier, ne peut se prévaloir d'une embauche antérieure à cette date. Elle s'étonne en outre que M. [J] n'ait formé aucune revendication de salaire depuis le mois de juin 2016 et relève que ce dernier ne fournit aucune précision quant à son lieu de travail entre le 1er juin 2016 et le 3 août 2016.

De surcroît, l'intimée soutient que sa responsabilité ne peut être retenue. Elle rappelle que M. [J] reconnaît lui-même avoir été recruté par M. [U] et soutient que ce dernier a profité des congés du gérant le jour des faits pour introduire M. [J] sur le chantier ; elle affirme que cet état de fait est corroboré par l'ignorance des autres salariés de l'entreprise de la présence de l'intéressé sur le site.

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités, excipe ainsi de l'abus de fonction commis par le salarié, dès lors qu'il n'entrait pas dans ses attributions de recruter du personnel, fait commis hors de son lieu de travail et dans un intérêt personnel ; elle se prévaut également de la faute imputable à M. [J] en soutenant qu'il avait conscience de ne pas avoir été en relation avec les responsables de la société, qu'il n'a pris aucune mesure pour régulariser sa situation auprès de ces derniers, qu'il ne s'est jamais rapproché d'elle pour obtenir la reconnaissance de son embauche, ni même obtenir le paiement de ses salaires et qu'il était complice de M. [U] quant à son introduction frauduleuse sur le chantier et à l'usage d'une fausse identité lors de son hospitalisation.

Enfin, s'agissant de la reconnaissance par le tribunal administratif de l'existence d'un contrat de travail, elle invoque l'irrégularité d'une procédure à laquelle elle n'a pas été appelée.

Le contrat de travail suppose l'existence concomitante d'une prestation de travail, d'une contrepartie financière et d'un lien de subordination entre les parties.

En application des dispositions de l'article 1353 du code civil, c'est à celui qui se prévaut d'un contrat de travail d'en établir l'existence, la preuve étant libre. Il incombe dès lors à M. [J] de justifier de l'existence du contrat dont il se prévaut.

En l'espèce, la cour observe qu'il est établi que M. [J] se trouvait sur un échafaudage lors de la survenance de son accident le 11 août 2016, lequel était situé sur un chantier objet d'un contrat de sous-traitance de travaux de peinture sur la façade d'un immeuble sur le site [Adresse 8], conclu le 3 août 2016 entre la société Bechet, entrepreneur principal et la société MS Bâtiment, sous-traitante, et versé aux débats.

Il résulte du témoignage de M. [K] [A] [Y], ami et voisin de l'appelant, que M. [J] travaillait pour la société MS Bâtiment depuis le 1er juin 2016 sur différents chantiers, que tous les matins, il avait rendez-vous au métro Aubervilliers-4 saisons, lieu où un membre de la société MS Bâtiment venait le chercher pour l'emmener travailler sur les chantiers.

De même, M. [E] [O], ami et voisin de M. [J], indique que ce dernier travaillait avec M. [U] pour une période de trois mois dans l'entreprise MS Bâtiment 'au [Adresse 8] dans la ville de [Localité 7]', ledit témoignage étant corroboré par celui de M. [M] [C], ami de M. [J] et par le frère de l'appelant, M. [L] [J].

La société MS Bâtiment communique quant à elle :

- une attestation établie par M. [K] [G], le 24 avril 2017 en sa qualité de gérant de la société MS Bâtiment, dont il résulte qu'il n'a eu connaissance de l'existence de M. [J] que le lendemain de l'accident ;

- le témoignage de M. [T] [U], peintre, daté du 4 avril 2017, dont il résulte que M. [J] a travaillé la seule journée au cours de laquelle l'accident est survenu et qu'il devait apporter ses papiers ce jour là afin de régulariser sa situation, M. [U] précisant que M. [G] n'était pas informé de sa présence ;

- les attestations de deux autres salariés de la société MS Bâtiment, M. [N] [S], peintre et associé à parts égales avec M. [G], et M. [B] [R], plaquiste, M. [S] précisant qu'il était sur le chantier jusqu'au 5 août 2016 et n'avoir jamais 'connu' M. [J] 'sur aucun chantier' et M. [R] mentionnant n'avoir jamais 'connu auparavant' M. [J] 'ni sur aucun chantier'.

Cependant, la cour observe que la force probante de ces témoignages émanant de membres de la société ayant un intérêt personnel direct avec elle ou un lien de subordination, est insuffisante dès lors qu'ils sont contredits par les attestations communiquées aux débats par M. [J].

Par ailleurs, aux termes de l'article 1242 du code civil, on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde ; les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés.

L'employeur est par principe responsable des actes accomplis par le salarié au sein du lieu de travail ainsi que des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions.

En outre, le commettant peut s'exonérer de toute responsabilité qu'à la triple condition que son préposé ait agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions.

En l'espèce, la cour relève que ce n'est qu'à compter du 5 août 2016 que M. [S], associé de M. [G], ne travaillait plus sur le site [Adresse 8], de sorte qu'étant présent le 3 août 2016, il était nécessairement avisé de l'existence de M. [J], les témoignages produits par ce dernier établissant qu'il se trouvait lui-même sur le chantier à cette date. En outre, eu égard au départ de M. [S], un autre peintre était nécessaire pour le remplacer, le contrat de sous-traitance requérant un strict respect des délais contractuellement prévus.

Par ailleurs, la société MS Bâtiment ne peut se prévaloir utilement du fait que M. [U] aurait recruté seul M. [J] en abusant de ses fonctions, dès lors que le témoignage de M. [K] [A] [Y] établit le contraire et qu'en tout état de cause, ce n'est pas dans l'intérêt personnel de M. [U] mais dans l'intérêt de la société MS Bâtiment que M. [J] a été embauché, de sorte que les conditions cumulatives requises pour justifier d'une exonération de la responsabilité de la société MS Bâtiment ne sont pas réunies.

S'agissant de la faute de la victime, la cour relève que ce moyen est en contradiction avec l'absence de contrat de travail alléguée par la société MS Bâtiment et avec son affirmation selon laquelle M. [J] aurait été irrégulièrement embauché le 11 août 2016, jour de l'accident.

De surcroît, il résulte notamment du certificat médical établi le 16 septembre 2016 par le Dr [Z], de l'hôpital [5], que M. [J] ne parlant pas français, a été admis sous 'une identité incertaine, Monsieur [S] [N], relevée par mes Collègues Réanimateurs', mais que 'ce jour, il peut justifier de sa réelle identité par son passeport'.

En outre, il résulte tant des témoignages versés aux débats par M. [J] que de sa déclaration de main-courante du 17 septembre 2016, d'une part, que l'identité sous laquelle il a été admis à l'hôpital a été communiquée par M. [U], afin d'éviter toute difficulté et que lui-même a contacté M. [Y] le jour même afin que ce dernier lui apporte son passeport, d'autre part, que ses proches et lui-même ont fait l'objet de menaces de représailles s'ils dévoilaient l'irrégularité de son embauche.

Au surplus, c'est à juste titre que M. [J] rappelle que dès le 26 octobre 2016, son conseil a pris attache avec la société MS Bâtiment pour lui exposer les faits et solliciter la régularisation de sa situation dans les plus brefs délais et notamment de :

- déclarer son embauche auprès de l'URSSAF compétente ;

- le rémunérer de l'intégralité des heures de travail accomplies depuis son embauche ;

- déclarer l'accident de travail survenu le 11 août 2016 auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) ;

et que ne parlant, n'écrivant et ne comprenant pas le français, il n'a pas été en mesure d'écrire à son employeur pour solliciter la régularisation de sa situation autrement que par l'intermédiaire de son avocat.

Dès lors, la cour retient que la société MS Bâtiment n'établit pas l'existence d'une complicité entre M. [J] et M. [U] dans les agissements frauduleux reprochés à ce dernier.

Enfin, la cour rappelle qu'elle n'est pas juge de la procédure administrative et qu'il appartenait à la société MS Bâtiment d'introduire les recours prévus à cette fin pour contester le jugement litigieux.

En définitive, en considération de l'ensemble des éléments qui précèdent, la cour retient que M. [J] rapporte la preuve qu'il a bénéficié d'un contrat de travail à durée indéterminée verbal avec la société MS Bâtiment à compter du 1er juin 2016. En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a retenu l'existence dudit contrat de travail mais infirmé quant à son point de départ.

Sur l'exécution du contrat de travail :

Sur les rappels de salaire :

M. [J] sollicite les sommes de 72,70 euros à titre de rappel de salaire pour la journée du 11 aout 2016, de 7,27 euros au titre des congés payés afferents et de 3 161,54 euros à titre de rappel de salaires pour la période du 1er juin au 11 août 2016, outre 316,15 euros au titre des congés payés afférents. Il affirme n'avoir perçu qu'une somme de 300 euros en espèces entre son embauche le 1er juin 2016 et la survenance de son accident de travail le 11 août 2016.

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, s'oppose à la demande et soutient que M. [J] ne peut prétendre au versement de rappel de salaires entre le 1er juin et le 11 aout 2016 en l'absence de preuve formelle de la durée de la relation de travail et d'élément permettant de déterminer la date du premier jour de travail à son profit.

La cour a précédemment retenu que le point de départ du contrat de travail s'établissait au 1er juin 2016.

Par ailleurs, l'avenant N°30 du 2 décembre 2013 relatif aux salaires minimaux annexé à la convention collective prévoit en son article 2, pour les ouvriers d'exécution, un salaire mensuel de 1 454 euros.

L'employeur, qui doit rapporter la preuve du paiement du salaire, ne justifie d'aucun versement de salaire pour la période litigieuse, M. [J] reconnaissant avoir perçu la seule somme de 300 euros.

En conséquence, au vu des éléments qui précèdent, la société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, sera condamnée à verser à M. [J] la somme de 3 141,13 euros au titre du rappel de salaire pour la période du 1er juin 2016 au 11 août 2016 inclus, outre 314,11 euros au titre des congés payés incidents.

Sur la garantie de salaire :

M. [J] sollicite la somme de 4 362 euros à titre de dommages intérêts correspondant à la garantie de maintien de salaire. Il soutient qu'il n'a pas pu reprendre son poste de manière effective au sein de la société MS Bâtiment depuis son accident de travail, étant toujours en arrêt maladie et dans l'impossibilité de travailler et qu'il est en droit de revendiquer l'indemnité dont il a été injustement privé, faute pour l'employeur d'avoir déclaré l'accident de travail survenu le 11 août 2016 à la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM).

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, s'oppose à la demande au visa des articles L. 1226-1 et D. 1226-1 à D. 1226-8 du code du travail, en soutenant que l'employeur n'est tenu au versement d'un complément de salaire que pour les salariés d'un an d'ancienneté au jour de l'arrêt et que l'article 1.7.1 a de la convention collective prévoit une période d'ancienneté de 3 mois dans l'entreprise au jour de l'accident. Elle allègue que M. [J] ne remplissait pas les conditions d'ancienneté requises et souligne que cette garantie est subordonnée à la production d'arrêts de travail justifiant la situation de l'employé vis-à-vis de l'employeur. Elle fait valoir que les documents médicaux produits par l'intéressé sont consécutifs à une intervention sans lien avec l'accident dont il a été victime sur son chantier et qu'il ne justifie pas d'une incapacité d'exercer une activité professionnelle depuis son accident.

Il résulte des stipulations de la convention collective en ses articles 1.7.1. à 1.7.1.e que pour pouvoir bénéficier de l'indemnisation, les conditions suivantes doivent être réunies :

- sauf cas de force majeure, l'intéressé doit informer dans les plus brefs délais le chef d'entreprise ou son représentant du motif de son absence et lui faire parvenir un certificat médical dans les 48 heures, le cachet de la poste faisant foi ;

- les ouvriers seront indemnisés s'ils justifient de 3 mois d'ancienneté dans l'entreprise au moment de l'arrêt de travail ;

- l'ouvrier doit avoir justifié de son absence par la production du certificat médical visé à l'article 1.7.1. et

justifier qu'il est pris en charge par la sécurité sociale ou la mutualité sociale agricole.

- la garantie de salaire s'applique en cas d'accident couverts par la législation de sécurité sociale relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles pour une indisponibilité supérieure à 30 jours jusqu'à concurrence de 100 % du salaire de l'intéressé du 1er au 90e jour de l'arrêt de travail.

S'agissant de l'ancienneté du salarié, la cour observe qu'au jour de l'arrêt de travail, M. [J] ne justifiait pas de trois mois d'ancienneté. Dès lors, il ne peut bénéficier de la garantie de salaire prévue par la convention collective et sera débouté de ce chef de prétention, le jugement étant confirmé à cet égard.

Sur le travail dissimulé :

M. [J] sollicite la somme de 8 724 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé en arguant de ce que la société MS Bâtiment n'avait ni déclaré son embauche à l'URSSAF, ni ne lui avait fourni des bulletins de paie conformes aux heures de travail effectivement réalisées.

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, s'oppose à la demande en faisant valoir l'absence de tout contrat de travail conclu entre elle-même et M. [J]. Elle rappelle qu'elle n'avait pas connaissance de la présence de ce dernier sur son chantier et qu'elle n'a donc pas pu dissimuler intentionnellement son embauche en qualité de salarié et ne pouvait raisonnablement procéder à quelque déclaration que ce soit, puisque la présence de M. [J] sur son chantier n'était ni autorisée, ni portée à sa connaissance, ce dernier ayant été introduit frauduleusement sur le chantier à l'insu des gérants.

Aux termes de l'article L. 8221-5, en sa version applicable au litige, 'Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3°Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'

Il résulte par ailleurs de l'article L. 8223-1 du code du travail, en sa version applicable au litige, qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l'espèce, la cour a retenu l'existence d'un contrat de travail entre M. [J] et la société MS Bâtiment. En outre, au vu de la durée du contrat de travail, la société MS Bâtiment ne peut utilement se prévaloir de son ignorance de la présence de M. [J] dans ses effectifs et tenter de justifier ainsi de sa carence.

Enfin, les premiers juges ont relevé à juste titre que c'est, malheureusement l'accident du travail dont M. [J] a été victime qui a mis au grand jour la dissimulation de son emploi a l'egard des organismes sociaux.

Il résulte ainsi de l'ensemble des éléments qui précèdent que la société MS Bâtiment, en s'abstenant d'accomplir régulièrement les déclarations préalables à l'embauche de M. [J], d'établir des bulletins de paie et en se soustrayant intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales, a délibérément méconnu les dispositions de l'article L. 8221-1 du code du travail précité par la dissimulation volontaire de l'emploi du salarié.

En conséquence, il sera fait droit à la demande de M. [J], la cour condamnant la société MS Bâtiment prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, au paiement de la somme de 8 724 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé et confirmant le jugement de ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail :

Sur le caractère abusif de la rupture :

M. [J] sollicite le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur en invoquant les manquements suivants :

- son maintien dans une situation de travail dissimulé, lui causant un préjudice en terme notamment de droits à la retraite ;

- le fait qu'il ait été contraint de travailler pendant plus de deux mois sans être rémunéré ;

- le fait de s'être délibérément abstenu de déclarer son accident de travail ;

- le fait de l'avoir fait hospitaliser sous une fausse identité ;

- le fait de l'avoir menacé de mort s'il dénonçait sa situation aux autorités compétentes.

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, s'oppose à la demande en invoquant l'absence de contrat de travail et réfute tout manquement de sa part. Elle conteste l'existence d'un travail dissimulé et soutient que seul M. [U] est responsable de la présence de M. [J] sur le chantier.

Aux termes de l'article L. 1231-1 du code du travail, ' Le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre. Ces dispositions ne sont pas applicables pendant la période d'essai.'.

Tout salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas d'inexécution par l'employeur de ses obligations contractuelles conformément aux dispositions de l'article 1184 du code civil, en sa version applicable au litige. Il appartient au salarié de rapporter la preuve des faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur à l'appui de sa demande et les manquements de l'employeur à ses obligations doivent être d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail. Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur tout en continuant à travailler à son service et que ce dernier le licencie ultérieurement comme c'est le cas en l'espèce, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée et, si tel est le cas, fixer la date de la rupture à la date d'envoi de la lettre de licenciement.

En l'espèce, la cour a retenu l'existence d'un contrat de travail et la dissimulation délibérée par la société MS Bâtiment de l'embauche de M. [J] ainsi que l'absence de paiement de tout salaire, à l'exception de la somme de 300 euros.

De même, il est établi que M. [J], à la suite de sa chute d'un échafaudage, a été hospitalisé sous une fausse identité et a été contraint d'engager une procédure devant le tribunal administratif pour bénéficier d'une exonération de ses frais de santé, en l'absence de déclaration incombant à l'employeur.

La cour considère en conséquence que les manquements de l'employeur invoqués par M. [J] sont avérés et qu'ils sont de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail au vu de leur gravité. Dès lors, la cour prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, le jugement étant confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date de son prononcé, soit au 14 mars 2018.

Sur les conséquences financières de la rupture du contrat de travail :

La résiliation judiciaire ayant été prononcée aux torts de l'employeur, la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [J] de ses demandes en découlant.

- sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés incidents :

M. [J] sollicite les sommes de 1 454 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, soit un mois de salaire et de 145,40 euros au titre des congés payés sur préavis.

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, s'oppose à la demande.

L'article 1.1.9. de la convention collective prévoit un délai de préavis de un mois pour une ancienneté de 6 mois à 2 ans.

Aux termes de l'article L. 1234-1 du code du travail, le salarié a droit à un préavis d'une durée de un mois pour une ancienneté de 6 mois à moins de deux ans.

Au jour du prononcé de la résolution judiciaire, soit au 14 mars 2018, M. [J] justifiait d'une ancienneté d'au moins 6 mois et inférieure à 2 ans ; dès lors, la cour fait droit à sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis égale à un mois de salaire, soit la somme de 1 454 euros et des congés payés afférents à celle-ci, soit 145,40 euros et condamne la société MS Bâtiment prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, au paiement desdites sommes.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a débouté M. [J] de ces prétentions.

- sur l'indemnité pour rupture abusive du contrat de travail :

M. [J] sollicite la somme de 8 724 euros nets à titre de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail. Il invoque sa situation particulièrement précaire dès lors que, depuis son accident de travail, il n'est plus physiquement apte à travailler et n'est actuellement pris en charge ni au titre de la perte involontaire de son emploi, ni au titre de la législation sur les accidents de travail en raison des manquements de son employeur.

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, s'oppose à la demande. Elle allègue que M. [J] ne produit qu'un arrêt de travail de 15 jours sans aucun rapport avec son accident du 11 août 2016 et n'apporte pas la preuve de son impossibilité de travailler et encore moins du lien de causalité entre cet accident et son état actuel. Elle relève qu'aucun arrêt maladie n'est versé aux débats pour la période de septembre 2016 jusqu'au début du mois de mars 2017 ainsi que pour la période d'avril 2017 à ce jour. Elle conteste la force probante du certificat médical établi par le docteur [P] indiquant que M. [J] a été « victime d'un grave accident ayant entraîné plusieurs interventions chirurgicales' », sans qu'il ne soit précisé qu'il s'agit d'un accident de travail, ni même la date de celui-ci ou encore la nature des interventions subies et à venir et souligne que ce certificat n'est accompagné d'aucun arrêt de travail.

Elle affirme enfin que le fait d'avoir engagé des démarches auprès de la MDPH n'induit pas une impossibilité de travailler et que le document produit en ce sens n'est qu'un simple accusé de réception, qui n'est constitutif d'aucun droit et ne reconnaît aucun handicap à M. [J].

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, en sa version applicable au litige, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau prévu audit article. Cependant, en cas de licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les montants minimaux fixés par le texte sont applicables, par dérogation à ceux fixés à l'alinéa précédent.

Ainsi, pour une ancienneté inférieure à 2 ans, le montant minimal s'élève à un demi mois de salaire brut.

En considération de l'effectif de l'entreprise inférieur à 11 salariés, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [J], de son âge à la date de la rupture du contrat de travail, soit 30 ans, de son ancienneté au jour de la rupture du contrat ( 21 mois), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et aux diverses interventions chirurgicales et séquelles de son accident survenu le 11 août 2016, telles qu'elles résultent des pièces médicales versées aux débats, M. [J] ne justifiant pas toutefois de la réponse apportée à sa démarche effectuée auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), en date du 26 juillet 2017, la cour condamne la société MS Bâtiment prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, à payer à M. [J] la somme de 2 900 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail, suffisant à réparer son entier préjudice, le jugement étant infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de cette prétention.

Sur le cours des intérêts :

La cour dit qu'en application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les intérêts au taux légal portant sur les créances salariales sont dus à compter de la date de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les intérêts au taux légal portant sur les créances de nature indemnitaire sont dus à compter de la décision qui les prononce.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Par ailleurs, la cour ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière en application de l'article 1343-2 du code civil.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a débouté M. [J] de ce chef de demande.

Sur la remise des pièces :

M. [J] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a ordonné à la société MS Bâtiment de lui remettre les documents conformes à la décision ; il revendique également la régularisation par la société MS Bâtiment de la relation de travail auprès de tous les organismes sociaux et notamment, la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) et la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV).

Au vu de la solution du litige, il sera fait droit à la demande du salarié et le jugement confirmé en ce qu'il a ordonné la remise des documents conformes à la décision mais infirmé en ce qu'il a débouté M. [J] du surplus de sa demande.

Sur les mesures accessoires :

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, succombant à l'instance sera condamnée aux dépens d'appel, le jugement étant confirmé quant à la charge des dépens de première instance.

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem,, sera condamnée au paiement de la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par M. [J], le jugement étant confirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 1 200 euros sur ce fondement.

La société MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, sera déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et le jugement confirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a fixé le point de départ du contrat de travail à la date du 11 août 2016, en ce qu'il a limité à 72,70 euros le rappel de salaires et à 7,27 euros les congés payés incidents, en ce qu'il a débouté M. [F] [J] de ses demandes en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés incidents et de dommages et intérêts pour rupture abusive, de sa demande de capitalisation des intérêts, de sa demande de régularisation par la SARL MS Bâtiment de la relation de travail auprès de tous les organismes sociaux et notamment, la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) et la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV),

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

REJETTE la demande de la SARL MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, tendant à la mise en cause de l'AGS île de France est,

DIT que le contrat de travail à durée indéterminée conclu entre M. [F] [J] et la SARL MS Bâtiment a couru à compter du 1er juin 2016,

CONDAMNE la SARL MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, à payer à M. [F] [J] les sommes suivantes :

- 3141,13 euros au titre du rappel de salaire pour la période du 1er juin 2016 au 11 août 2016 inclus, outre 314,11 euros au titre des congés payés incidents ;

- 1454 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 145,40 euros au titre des congés payés afférents ;

- 2 900 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

ORDONNE la régularisation par la SARL MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, de la relation de travail auprès de tous les organismes sociaux et notamment, la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) et la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV),

CONDAMNE la SARL MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, à payer à M. [F] [J] une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la SARL MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

CONDAMNE la SARL MS Bâtiment, prise en la personne de M. [K] [G], ès qualités de mandataire ad litem, aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 18/05376
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;18.05376 ?
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