RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 09 Septembre 2022
(n° , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/13212 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4LEN
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Septembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Bobigny RG n° 16-01279
APPELANTE
URSSAF ILE DE FRANCE venat aux droits du RÉGIME SOCIAL DES INDEPENDANTS
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par M. [Y] [M] en vertu d'un pouvoir général
INTIME
Monsieur [W] [D]
[Adresse 1]
[Localité 4]
non comparant, non représenté
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Pascal PEDRON, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Pascal PEDRON, Président de chambre
Mme Sophie BRINET, Président de chambre
M. Gilles REVELLES, Conseiller
Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats
ARRET :
- REPUTE CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par M. Pascal PEDRON, Président de chambre et par Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par l'Urssaf Ile de France (l'Urssaf) d'un jugement rendu le18 septembre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à M. [W] [D].
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par courrier recommandé avec accusé de réception adressé le 13 juin 2016, M. [D], affilié au RSI de 2008 au 26 mars 2013 en qualité d'artisan taxi, a formé opposition devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny à l'exécution d'une contrainte du RSI décernée le 17 mai 2016 puis signifiée le 06 juin 2016 pour la somme de 8 915 € en cotisations et majorations de retard.
Par jugement du 18 septembre 2017, le tribunal a déclaré M. [D] recevable en son opposition, rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance, constaté que la contrainte litigieuse ne respecte pas les conditions de forme, annulé ladite contrainte et condamné le RSI à payer à M. [D] la somme de 800 € au titre des frais irrépétibles au motif essentiel que la contrainte ne permet pas au cotisant d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation dès lors qu'elle vise une régularisation 2010 et une régularisation 2011 alors qu'aucune mention de régularisation n'apparaît sur les deux mises en demeure produites dont la date n'est pas celle mentionnée dans la contrainte.
L'Urssaf a le 23 octobre 2017 interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 26 septembre 2017.
Par les conclusions écrites déposées et soutenues oralement à l'audience par son représentant, l'Urssaf, venant aux droits du RSI, demande à la cour de :
-confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit non prescrite la procédure de recouvrement ;
-infirmer le jugement pour le surplus ;
-juger parfaite la contrainte en litige en ce que sa lecture permet à M. [D] d'avoir une pleine et entière connaissance de la cause, de la nature et de l'étendue de ses obligations ;
- valider la contrainte pour 8 360 € de cotisations et 555 € de majorations de retard, soit un total de 8 915 € ;
L'Urssaf fait valoir pour l'essentiel que :
-l'ajout du mot « REGUL » sur la contrainte n'était pas de nature à influer sur la validité de la contrainte, dès lors que les années concernées restaient les mêmes (2010 et 2011) et que les sommes réclamées étaient identiques à celles portées sur les mises en demeure.
-la date des mises en demeure portée sur la contrainte correspond à celle de leur envoi (11/10/2013) et non à celle de leur édition (09/10/2013), aucune divergence ne pouvant donc être sérieusement relevée.
-le cotisant ne pouvait donc pas se méprendre sur la cause, la nature et l'étendue de ses obligations quand il a reçu tant les mises en demeure que la contrainte;
-elle justifie à ses écritures du calcul des cotisations et majorations.
M. [D], intimé, régulièrement convoqué pour l'audience du 25 mai 2022 à 09h00 par courrier RAR dont il a signé l'accusé de réception le 17 février 2022 n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.
SUR CE, LA COUR
L'article 472 du code de procédure civile dispose : ' Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond.
Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.'
Face à un intimé non comparant ni représenté, le juge d'appel ne peut faire droit à la demande de l'appelant que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée, et il doit examiner, au vu des moyens d'appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'est déterminé.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance.
La mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de la mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause, et de l'étendue de son obligation.
En l'espèce, les deux mises en demeure, qui mentionnent qu'elles ont été éditées le 09 octobre 2013 et expédiées à M [D] le 11 octobre 2013 , lui ont été valablement notifiées par le RSI.
Chacune des deux mises en demeure (pièces n°1 et 2 de l'Urssaf) comporte de façon détaillée la cause, à savoir l'absence de versement, la nature des sommes dues (au titre notamment des différents régimes qui y sont détaillés) , l'étendue, à savoir « les périodes concernées » par le recouvrement (« année 2010 » pour la première, « année 2011 » pour la seconde) et le montant détaillé des sommes dues tant en principal, qu'en majorations de retard, ( 4312 € de cotisations et 232 € de majorations de retard, soit 4 544 € au total pour la première, 4048 € de cotisations et 323 € de majorations de retard, soit 4 371 € au total pour la seconde), et l'invite à régulariser sa situation dans le mois. La contrainte du 17 mai 2016 (pièce n°3 de l'Urssaf) fait référence aux deux mises en demeure du 11 octobre 2013, visant pour une période de « REGUL 10 » des montants de 4312 € de cotisations et 232 € de majorations de retard, soit 4 544 € au total au titre de la première mise en demeure, et pour une période de « REGUL 11 » des montants de 4048 € de cotisations et 323 € de majorations de retard, soit 4 371 € au total au titre de la seconde mise en demeure.
Le fait que la contrainte vise au titre des périodes « REGUL 10 » et « REGUL 11 » au lieu « année 2010 » et « année 2011 » portées sur les mises en demeure n'était pas de nature à créer en l'espèce dans l'esprit de M. [D] un doute ou une incompréhension quant à la connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation au titre des sommes réclamées dès lors que celles-ci étaient identiques à celles portées sur les mises en demeure auxquelles la contrainte renvoyait et que les années concernées restaient les mêmes.
Il en va de même du fait que la date des mises en demeure portée sur la contrainte correspond à celle de leur envoi et non à celle de leur édition, étant précisé que M. [D] avait motivé son opposition à contrainte du seul fait qu'il était radié depuis le 26 mars 2013.
Il sera ajouté qu' il ne résulte pas des productions que M. [D] était affilié au RSI autrement qu'au titre de sa seule activité de chauffeur de taxi.
Ainsi lesdites mises en demeure et la contrainte qui y faisait référence permettaient à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.
La contrainte doit donc être validée dans son principe.
En matière d'opposition à contrainte, il incombe à l'opposant de rapporter la preuve du caractère infondé de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l'organisme social, comme l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (Civ. 2ème 19 décembre 2013 n°12-28.075 ; Soc. 09 décembre 1993 n°91-11.402).
L'Urssaf fournit à ses écritures d'appel un décompte précis et cohérent des modalités de calcul, d'assiette, de bases et de taux mis en oeuvre dans le respect des règles applicables au regard des cotisations et majorations dues au titre des causes de la contrainte.
Le caractère infondé de la créance de l'Urssaf ne résulte d'aucune production ou mention du jugement.
En effet, si le jugement vise les incohérences pointés devant lui par M. [D] entre différents courriers reçus du RSI, ceux-ci visent d'autres périodes que celles concernées par la contrainte en litige, à savoir l'année 2012 et l'état du compte du cotisant lors de sa clôture en 2013 ; par ailleurs, l'accord de délais donné par le RSI à M. [D] le 1er mars 2011 au titre des cotisations dues pour les 2eme , 3eme et 4eme trimestres 2010 n'est nullement incompatible avec le montant des cotisations réclamées à la contrainte du 17 mai 2016 pour l'entière année 2010 ; enfin, la différence de « TI » figurant sur ces courriers relevée par le tribunal s'explique par le fait que le numéro de cotisant de M. [D] a été entretemps modifié dans le cadre d'une opération de renumérotation nationale des cotisants du RSI.
Par voie d'infirmation partielle du jugement déféré, la contrainte sera donc validée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DECLARE l'appel recevable.
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a dit non prescrite la procédure de recouvrement menée par L'Urssaf Ile de France venant aux droits du RSI
L'INFIRME pour le surplus.
ET statuant à nouveau des chefs infirmés :
VALIDE la contrainte du 17 mai 2016 pour son entier montant.
CONDAMNE M. [D] aux dépens d'appel.
La greffièreLe président