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08/09/2022 | FRANCE | N°21/01736

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 08 septembre 2022, 21/01736


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 08 SEPTEMBRE 2022



(n° , 20 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01736

N° Portalis 35L7-V-B7F-CC755



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Décembre 2020 -TJ de PARIS - RG n° 19/04090



APPELANTS



Madame [R] [P]

[Adresse 3]

[Localité 10]

représentée par

Me Cyril IRRMANN de la SELARL IRRMANN FEROT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0778

assistée de Me Stéphanie FEROT, avocate au barreau de Paris



Monsieur [S] [P]

[Adresse 3]

[Loca...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 08 SEPTEMBRE 2022

(n° , 20 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01736

N° Portalis 35L7-V-B7F-CC755

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Décembre 2020 -TJ de PARIS - RG n° 19/04090

APPELANTS

Madame [R] [P]

[Adresse 3]

[Localité 10]

représentée par Me Cyril IRRMANN de la SELARL IRRMANN FEROT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0778

assistée de Me Stéphanie FEROT, avocate au barreau de Paris

Monsieur [S] [P]

[Adresse 3]

[Localité 10]

représenté par Me Cyril IRRMANN de la SELARL IRRMANN FEROT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0778

assisté de Me Stéphanie FEROT, avocate au barreau de Paris

Monsieur [Z] [P]

[Adresse 3]

[Localité 10]

représenté par Me Cyril IRRMANN de la SELARL IRRMANN FEROT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0778

assisté de Me Stéphanie FEROT, avocate au barreau de Paris

Monsieur [T] [P]

[Adresse 3]

[Localité 10]

représenté par Me Cyril IRRMANN de la SELARL IRRMANN FEROT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0778

assisté de Me Stéphanie FEROT, avocate au barreau de Paris

INTIMEES

Société XL INSURANCE COMPANY SE venant aux droits d'AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

[Adresse 4]

[Localité 8]

représentée par Me Jérôme CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1216

CAISSE DE COORDINATION D'ASSURANCE MALADIE RATP

[Adresse 2]

[Localité 9]

N'a pas constitué avocat

CAISSE DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA RATP

[Adresse 1]

[Localité 11]

N'a pas constitué avocat

MUTUELLE DU PERSONNEL DU GROUPE RATP

[Adresse 5]

[Localité 7]

N'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre, chargée du rapport, et devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre assesseur.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Sophie BARDIAU, conseillère

Greffière lors des débats : Mme Florence GREGORI

Greffière lors de la mise à disposition : Mme Roxanne THERASSE

ARRÊT :

- Défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 9 septembre 2013, alors qu'elle circulait en scooter, Mme [R] [P], agent de la Régie autonome des transports parisiens (la RATP), a été victime d'un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la société Axa Corporate Solutions (la société Axa), aux droits de laquelle est venue la société XL Insurance Company SE (la société XL Insurance) à compter du 1er janvier 2020.

Par ordonnance rendue le 12 juin 2017, le juge des référés a alloué à Mme [R] [P] une provision de 10 000 euros et a prescrit une expertise médicale confiée au Docteur [L], qui a établi son rapport définitif le 28 février 2018.

Par actes d'huissier de justice en date des 19, 20 et 25 mars 2019, Mme [R] [P], M. [S] [P], son époux, M. [T] [P] et M. [Z] [P], ses fils, (les consorts [P]) ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris la société Axa, la Caisse de coordination d'assurance maladie de la RATP (la CCAS), la Caisse de retraite du personnel de la RATP (la CRP) et la Mutuelle du personnel du groupe RATP (la MGPR), pour obtenir l'indemnisation de leurs préjudices.

Par jugement du 8 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Paris, a :

- dit que le droit à indemnisation de Mme [R] [P] des suites de l'accident de la circulation survenu le 9 septembre 2013 est entier,

- condamné la société XL Insurance venant aux droits de la société Axa à payer à Mme [R] [P] en deniers ou quittance, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, les sommes suivantes en réparation des préjudices subis :

- dépenses de santé actuelles : 1 364 euros

- frais divers : 3 123,90 euros

- assistance tierce personne temporaire : 21 264 euros

- pertes de gains professionnels actuels : 27 314,28 euros

- assistance tierce personne pérenne : 341 478,36 euros

- pertes de gains professionnels futurs : aucune somme après déduction de la créance de la RATP

- incidence professionnelle : 21 091,52 euros après déduction du reliquat de la créance RATP

- frais de logement adapté : 5 000 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 6 695 euros

- déficit fonctionnel permanent : 50 000 euros

- préjudice esthétique permanent : 2 500 euros

- préjudice d'agrément : 5 000 euros

- préjudice sexuel : 5 000 euros,

- condamné la société XL Insurance à payer à M. [S] [P], en deniers ou quittance, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, les sommes suivantes en réparation des préjudices subis :

- préjudice d'affection et trouble dans les conditions d'existence : 5 000 euros

- préjudice économique : 2 392,66 euros

- préjudice sexuel : 5 000 euros,

- condamné la société XL Insurance à payer à M. [T] [P] la somme de 3 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, au titre du préjudice d'affection et du trouble dans les conditions d'existence,

- condamné la société XL Insurance à payer à M. [Z] [P] la somme de 3 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, au titre du préjudice d'affection et du trouble dans les conditions d'existence,

- dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixés par l'article 1343-2 du code civil,

- condamné la société XL Insurance à payer à Mme [R] [P] les intérêts au double du taux légal sur le montant de l'offre effectuée le 5 décembre 2016, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 9 mai 2014 et jusqu'au 5 décembre 2016,

- déclaré le jugement commun à la CCAS, la CRP et la MPGR,

- condamné la société XL Insurance aux dépens ainsi qu'au versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire à hauteur des deux tiers des indemnités allouées et en totalité pour les frais irrépétibles et les dépens,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 25 janvier 2021, les consorts [P] ont interjeté appel de cette décision, en ses dispositions relatives au préjudice corporel de Mme [R] [P], hormis celles concernant les postes de dépenses de santé actuelles, de frais divers, de déficit fonctionnel temporaire et de déficit fonctionnel permanent, en ce que Mme [R] [P] a été déboutée de sa demande d'indemnisation d'un préjudice de retraite, en ses dispositions relatives aux préjudices économique et sexuel de M. [S] [P], en ses dispositions relatives au doublement du taux de l'intérêt légal notamment en ce que M.M. [S] [P], [T] [P] et [Z] [P] ont été déboutés de leur demande formée en ce sens et en ce que le tribunal a débouté les parties du surplus de leurs demandes.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions des consorts [P], notifiées le 16 février 2022, aux termes desquelles, ils demandent à la cour, de :

Vu la loi du 5 juillet 1985,

Vu l'article 25 de la Loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006,

Vu les articles L. 211-19 et L. 211-13 du code des assurances,

recevoir les consorts [P] en leur appel et en leurs demandes,

débouter la société XL Insurance de ses demandes,

confirmer le jugement entrepris à ce qu'il a :

- jugé que le droit à indemnisation de Mme [R] [P], de son époux et de leurs enfants, résultant de l'accident de la circulation du 9 septembre 2013, est intégral,

- évalué les préjudices de Mme [R] [P] de la manière suivante :

- dépenses de santé actuelles : 1 364 euros

- frais divers : 3 123,90 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 6 695 euros

- déficit fonctionnel permanent : 50 000 euros,

- évalué les préjudices de M. [T] et [Z] [P] de la manière suivante :

- préjudice d'affection et troubles dans les conditions d'existence : 3 000 euros chacun,

- évalué les préjudices de M. [S] [P] de la manière suivante :

- préjudice d'affection et troubles dans les conditions d'existence : 5 000 euros,

- jugé que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil,

infirmer le jugement entrepris pour le surplus,

statuant à nouveau

juger que la déduction de la créance des organismes sociaux ne pourra s'exercer, poste par poste, que sur les indemnités qui réparent les préjudices qu'elle est susceptible de prendre en charge,

évaluer les préjudices de Mme [R] [P] au vu des observations ci-dessus de la manière suivante, sauf à parfaire :

- tierce personne temporaire : 26 660 euros

- tierce personne définitive : 566 544,58 euros

- pertes de gains professionnels actuels : 31 749 euros

- pertes de gains professionnels futurs (perte retraite incluse) : 285 356,96 euros

- incidence professionnelle : 50 000 euros

- aménagement du domicile : 23 649,37 euros

- souffrances endurées : 20 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 5 000 euros

- préjudice esthétique permanent : 5 000 euros

- préjudice d'agrément : 40 000 euros

- préjudice sexuel : 20 000 euros,

condamner la société XL Insurance, à payer Mme [R] [P] la somme, sauf à parfaire en deniers et quittance, de 1 073 959,91 euros,

condamner la société XL Insurance, à payer à RATP la somme, sauf à parfaire en deniers et quittance, de 276 070,30 euros, au titre de sa créance,

évaluer, les préjudices de M. [S] [P] au vu des observations ci-dessus de la manière suivante, sauf à parfaire :

- préjudice sexuel : 20 000 euros

- préjudice professionnel : 146 961,57 euros,

condamner la société XL Insurance à payer à M. [S] [P], la somme de 166 961,57 euros,

juger à titre principal,

- que l'évaluation qui sera faite du préjudice de Mme [R] [P], créance de la CCAS de la RATP et provisions incluses, portera intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter du 9 mai 2014 jusqu'à la date de la décision de la cour à intervenir,

juger à titre subsidiaire,

- que l'évaluation qui sera faite du préjudice de Mme [R] [P], créance de la CCAS, de la RATP et provisions incluses, portera intérêts au double du taux de l'intérêt légal :

- d'une part, à compter du 9 mai 2014 (soit 8 mois après l'accident, pour un accident du 9 septembre 2013) et jusqu'au 5 décembre 2016 (date de l'offre tardive)

- et d'autre part, à compter du 6 décembre 2016 jusqu'à, sinon la décision définitive à intervenir, à tout le moins jusqu'aux conclusions de l'assureur régularisées en première instance le 9 septembre 2019 (lesdites conclusions valant offre),

juger que l'évaluation qui sera faite du préjudice de M. [S] [P], créance de la CCAS de la RATP et provisions incluses, portera intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter du 9 mai 2014 jusqu'à la date de la décision de la cour à intervenir,

juger que l'évaluation qui a été faite du préjudice de M. [T] et [Z] [P], créance de la CCAS de la RATP et provisions incluses, portera intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter du 9 mai 2014 jusqu'au jugement en date 8 décembre 2020,

condamner la société XL Insurance au paiement à Mme [R] [P] au titre de l'article 700 du code de procédure civile de la somme de 5 000 euros tant au titre de la première instance, qu'au titre de la procédure devant la cour,

condamner la société XL Insurance aux dépens, dont distraction au profit de Maître Cyril Irrmann, avocat aux offres de droits,

déclarer la décision à intervenir commune à la CCAS de la RATP et la mutuelle du personnel du groupe RATP.

Vu les conclusions de la société XL Insurance, notifiées le 10 février 2022, aux termes desquelles, elle demande à la cour, de :

Vu la loi du 5 juillet 1985,

Vu l'article L211-9 du code des assurance,

- donner acte à la société XL Insurance, qu'elle vient aux droits de la société Axa à la suite d'une fusion-absorption emportant transfert de portefeuille à compter du 1er janvier 2020,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions hormis concernant les deux postes de préjudices suivants pour Mme [R] [P] : tierce personne après consolidation et les intérêts majorés,

et, statuant à nouveau

- fixer, en deniers ou quittance, la tierce personne après consolidation à la somme de 311 935,64 euros sauf à parfaire,

- dire n'y avoir lieu au versement d'intérêts majorés par société XL Insurance vu l'article L.211-9 du code des assurances visant 'l'assureur mandaté' pour la procédure d'offre,

subsidiairement

- limiter les intérêts majorés du 9 mai 2014 au 15 mai 2015 avec pour assiette la provision de 5 000 euros,

encore plus subsidiairement

- confirmer le jugement (intérêts majorés du 9 mai 2014 au 5 décembre 2016 avec pour assiette l'offre du 5 décembre 2016, créance incluse et provisions non déduites),

- rejeter le surplus des demandes,

- réduire l'indemnité sollicitée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La CRP et la MPGR, auxquelles la la déclaration d'appel a été signifiée par actes d'huissier de justice en date du 8 mars 2022 délivrés à personne habilitée, n'ont pas constitué avocat.

Il en est de même de la CCAS à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 10 mars 2022 par acte déposé en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte des appels principal et incident que la cour n'est pas saisie de l'indemnisation d'une part, des postes du préjudice corporel de Mme [R] [P] relatifs aux dépenses de santé actuelles, frais divers, déficit fonctionnel temporaire et déficit fonctionnel permanent, d'autre part des préjudices d'affection et du trouble dans les conditions d'existence des conjoint et enfants de Mme [R] [P] ; la cour n'a donc pas à confirmer le jugement qui est définitif, sur ces points.

Sur le préjudice corporel de Mme [R] [P]

L'expert, le Docteur [L], a indiqué dans son rapport en date du 28 février 2018 que Mme [R] [P] a présenté à la suite de l'accident du 9 septembre 2013 une fracture de la 3ème côte droite et une entorse acromio-claviculaire et qu'elle conserve comme séquelles une ankylose de l'épaule avec une abduction très limitée sur un membre dominant.

Il a conclu ainsi qu'il suit :

- déficit fonctionnel temporaire total du 16 février 2015 au 17 février 2015

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50 % du 9 septembre 2013 au 15 octobre 2013 et du 18 février 2015 au 28 février 2015, de 30 % du 16 octobre 2013 au 15 février 2015 et du 1er mars 2015 au 12 janvier 2016

- assistance temporaire par tierce personne de 2h30 par jour pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % pour les actes de la vie quotidienne, les courses (sachant que les courses étaient faites avant l'accident pour moitié par son mari) et les accompagnements extérieurs et de 1h30 par jour pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel à 30 %

- consolidation au 13 janvier 2016

- souffrances endurées de 3,5/7

- préjudice esthétique temporaire de 2/7 pour le port d'une immobilisation coude au corps puis d'anneaux pendant 5 semaines

- déficit fonctionnel permanent de 25 %

- assistance permanente par tierce personne de 1h par jour après consolidation pour les actes de la vie quotidienne et 2h par semaine pour les accompagnements extérieurs

- aménagement du logement : le plan de travail de la cuisine est trop haut

- véhicule : Mme [R] [P] ne peut plus conduire

- incidence professionnelle : Mme [R] [P] a été déclarée inapte au poste d'agent de station le 14 janvier 2016 et mise à la retraite anticipée par réforme le 30 mai 2016 (document non vu)

- préjudice esthétique permanent de 1/7 (bras figé)

- préjudice d'agrément : Mme [R] [P] faisait des activités de loisir vélo, quad, ski avec ses enfants qu'elle ne peut plus faire ; elle ne peut plus jardiner ni sortir son chien

- préjudice sexuel : Mme [R] [P] dit que les rapports sont rares.

Il a précisé quant aux répercussions de l'accident sur l'exercice de la profession 'Prescriptions successives (Dr [O]) d'arrêts de travail en accident du travail du 9 septembre 2013 au 13 janvier 2016, consolidation (Dr [O]) le 13 janvier 2016 avec reprise du travail à temps complet le 14 janvier 2016, prescriptions successives (Dr [O]) d'arrêt de travail du 15 janvier 2016 au 31 mai 2016 pour altération de l'état général et asthénie. Mme [P] a été déclarée inapte au poste d'agent de station le 14 janvier 2016 et mise à la retraite anticipée par réforme le 30 mai 2016 (document non vu). Ces décisions sont en rapport avec l'accident du 9 septembre 2013".

Ce rapport d'expertise constitue, une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi par Mme [R] [P] à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 6] 1964, de son activité d'agent de la RATP en station, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Par ailleurs, l'évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue et le barème de capitalisation utilisé sera celui publié par la Gazette du palais du 15 septembre 2020 taux d'intérêts 0 %, dont l'application est sollicitée par la victime et qui est le plus approprié en l'espèce pour assurer la réparation intégrale de son préjudice corporel dans la mesure où il s'appuie sur les données démographiques et économiques les plus pertinentes.

Les postes du préjudice corporel de Mme [R] [P] restant en litige doivent être indemnisés dans les conditions qui suivent.

Préjudices patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Assistance temporaire de tierce personne

Ce poste vise à indemniser, pendant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident jusqu'à la consolidation, le coût pour la victime de la présence nécessaire, de manière temporaire, d'une tierce personne à ses côtés pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie.

Le tribunal a rejeté la demande de Mme [R] [P] d'indemnisation des jours d'entrée et de sortie d'hospitalisation au motif que les pièces communiquées par Mme [R] [P] ne permettaient pas de les déterminer et qu'en toute hypothèse sur les deux jours de déficit fonctionnel temporaire total retenus par l'expert aucun besoin en tierce personne n'était établi ; il a liquidé ce poste de préjudice selon un taux horaire de 16 euros.

Mme [R] [P] conclut à l'infirmation du jugement en soutenant que le premier juge a confondu le besoin de tierce personne à l'hôpital et le besoin avant puis après l'hospitalisation ; elle précise que son dossier médical démontre qu'elle est entrée à l'hôpital le 16 février 2015 et qu'elle en est sortie le 17 février 2015 ; elle demande à la cour d'appliquer un tarif horaire de 20 euros, en soutenant qu'il n'y a pas lieu de tenir compte de l'éventuel défaut de paiement de charges sociales et de la réduction fiscale applicable en cas d'embauche d'un salarié à domicile.

La société XL Insurance répond que Mme [R] [P] ne justifie pas des heures d'entrée et de sortie de l'hôpital et de son besoin en tierce personne les jours d'hospitalisation ; elle estime qu'un taux horaire de 14 euros doit être retenu, en faisant valoir que si l'indemnisation du poste de tierce personne ne doit pas être exclue en cas d'assistance familiale, le juge peut tenir compte de cette circonstance qui implique que la victime n'a pas assumé de charge sociale ou de la circonstance qu'elle bénéficie d'un avantage fiscal.

Sur ce, l'expert a retenu le besoin de Mme [R] [P] d'être assistée par une tierce personne 2h30 par jour pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % pour les actes de la vie quotidienne, les courses et les accompagnements extérieurs et 1h30 par jour pendant les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel à 30 %.

Il a fixé le déficit fonctionnel temporaire partiel à 30 % notamment du 16 octobre 2013 au 15 février 2015 et le déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % notamment du 16 octobre 2013 au 15 février 2015 ; compte tenu de ces éléments et de la circonstance que l'état de Mme [R] [P], caractérisé en particulier par des blessures au bras droit ne lui permettait pas d'accomplir tous les actes de la vie quotidienne et de conduire, sa demande d'indemnisation d'une assistance temporaire par tierce personne est fondée le 16 février 2015 et le 17 février 2015, jours d'entrée et de sortie d'hôpital, à hauteur de 1h30 par jour.

En application du principe de la réparation intégrale et quelles que soient les modalités choisies par la victime, le tiers responsable est tenu d'indemniser le recours à cette aide humaine indispensable qui ne saurait être réduit en cas d'aide familiale ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées.

Eu égard à la nature de l'aide requise, non spécialisée et du handicap qu'elle est destinée à compenser, l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire de 20 euros sur une année de 365 jours, ainsi que demande par Mme [R] [P].

L'indemnité de tierce personne s'établit ainsi qu'il suit :

- du 9 septembre 2013 au 15 octobre 2013 et du 18 février 2015 au 28 février 2015

2,5 heures x 48 jours x 20 euros = 2 400 euros

- le 16 février 2015 et le 17 février 2015

1,5 h x 2 jours x 20 euros = 60 euros

- du 16 octobre 2013 au 15 février 2015 et du 1er mars 2015 au 12 janvier 2016

1,5 h x 806 jours x 20 euros = 24 180 euros

- total : 26 640 euros.

Le jugement est infirmé.

- Perte de gains professionnels actuels

Ce poste vise à compenser une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d'une perte effective de revenus.

Le tribunal a indemnisé la perte de gains professionnels actuels subie par Mme [R] [P] sur la base des revenus professionnels qu'elle avait déclarés en 2012 soit 31 375 euros ; il a estimé, d'une part, que sur la période d'arrêt de travail retenue par l'expert, Mme [R] [P] aurait dû percevoir 70 593,66 euros et que d'après ses déclarations de revenus elle avait perçu de la RATP sur la même période des salaires à hauteur de 43 279,38 euros, de sorte qu'elle justifiait d'une perte de gains de 27 314,28 euros.

Mme [R] [P] demande à la cour de fixer sa perte à la somme de 15 070 euros en 2014 et à celle de 16 679 euros en 2015, sur la base des revenus qu'elle a déclarés en 2012, 2014 et 2015 ; elle précise que le premier juge a commis une erreur en déduisant les salaires perçus de 2013 à 2015, alors que l'année 2013 a été travaillée durant 9 mois et précise que les pertes incluent les pertes de primes et de jours fériés ainsi que les pertes d'intéressement sur les années 2014 et 2015.

La société XL Insurance admet que le salaire annuel de référence doit être fixé à la somme de 31 375 euros ; elle précise que le tribunal s'est fondé sur les revenus déclarés qui intègrent les indemnités journalières et les maintiens de salaire et ce dans la mesure où la créance de la RATP était fournie en brut ; elle relève que Mme [R] [P] invoquait devant le premier juge avoir subi une perte de gains de 4 670 euros en 2013 ; elle ajoute que s'agissant d'un accident du travail la seule perte est en principe celle des primes ; elle estime ainsi que sauf à ce que Mme [R] [P] produise tous ses bulletins de salaire, le calcul du tribunal doit être confirmé.

Sur ce, l'expert a entériné les arrêts de travail successifs prescrits au bénéfice de Mme [R] [P] en considérant qu'ils étaient imputables à l'accident ; la période d'arrêt de travail en rapport avec l'accident du 9 septembre 2013 a ainsi été fixée du 9 septembre 2013 au 13 janvier 2016, date à laquelle l'expert a fixé la consolidation de l'état de Mme [R] [P].

Les parties s'accordent pour retenir comme salaire annuel de référence le salaire perçu par Mme [R] [P] durant l'année 2012 selon l'avis d'imposition 2013 soit 31 375 euros qui correspond à un salaire net imposable et qui représente un salaire mensuel net imposable de 2 614,58 euros (31 375 euros / 12 mois) ; au vu des bulletins de salaire versés aux débats, ces montants intègrent toutes les primes que percevait Mme [R] [P], notamment les primes de dimanche et jours fériés, primes de qualification/ pénibilité, mais non les primes d'intéressement.

Durant la période d'arrêt de travail consécutive à l'accident Mme [R] [P] aurait dû percevoir les salaires nets imposables suivants :

- du 9 septembre 2013 au 30 septembre 2013

2 614,58 euros x 22 jours / 30 jours = 1 917,36 euros

- du 1er octobre 2013 au 31 décembre 2013

2 614,58 euros x 3 mois = 7 843,74 euros

- année 2014

31 375 euros

- année 2015

31 375 euros

- du 1er janvier 2016 au 16 janvier 2016

2 614,58 euros x 16 jours / 31 jours = 1 349,46 euros

- total : 73 860,56 euros.

Il ressort des bulletins de salaire communiqués par Mme [R] [P] qui mentionnent les montants des salaires bruts et des salaires nets imposables, que les charges sociales salariales et les taxes déductibles représentent 18,7 % du salaire brut.

La RATP a transmis à la cour, qui l'a elle-même communiquée aux avocats des parties, sa 'créance définitive actualisée', qui reprend pour les salaires versés, le contenu de sa créance notifiée le 15 juillet 2016 à Mme [R] [P], qui l'a produite aux débats, qui fait apparaître qu'elle a versé à Mme [R] [P] les salaires bruts suivants :

- du 10 septembre 2013 au 31 janvier 2014

12 254,82 euros

- du 1er février 2014 au 30 septembre 2014

22 022,20 euros

- du 1er octobre 2014 au 15 janvier 2016

42 175,05 euros

- total : 76 452,07 euros.

Ce montant total brut représente un montant total net imposable de 62 155, 53 euros (76 452,07 euros x 81,30 %).

La perte totale est ainsi de 11 705,03 euros (73 860,56 euros - 62 155,53 euros) hors primes d'intéressement.

Mme [R] [P] a communiqué des documents établis par le pôle gestion des rémunérations de la RATP indiquant le montant des pertes de primes d'intéressement subies par Mme [R] [P] en conséquence de l'accident du 9 septembre 2013, qui s'élèvent à un montant net de 330,10 euros en 2013, de 1 072,43 euros en 2014, de 1 067,49 euros et 188,63 euros en 2015 et de 34,94 euros (981 euros x 13 jours /365 jours) en 2016, soit une perte nette totale de 2 693,59 euros.

La perte totale subie par Mme [R] [P] est ainsi de 14 398,62 euros (11 705,03 euros + 2 693,59 euros) augmentée à la somme de 27 314,28 euros pour tenir compte de l'offre de la société XL Insurance, qui conclut à la confirmation du jugement.

Le jugement est confirmé.

Préjudices patrimoniaux

permanents (après consolidation)

- Assistance permanente par tierce personne

Ce poste vise à indemniser, postérieurement à la consolidation, le coût pour la victime de la présence nécessaire, de manière définitive, d'une tierce personne à ses côtés pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie.

Le tribunal a retenu un besoin d'aide pour les actes de la vie quotidienne et les transports selon un volume conforme aux préconisations de l'expert et a ajouté une heure d'aide par semaine pour l'entretien du jardin ; il a appliqué pour la période échue un tarif horaire de 18 euros et pour la période à échoir de 20 euros et ce sur une année de 53 semaines, eu égard sur ce dernier point, à l'offre de la société XL Insurance.

Mme [R] [P] sollicite pour l'aide dans les actes de la vie quotidienne et les transports l'application d'un tarif horaire de 23 euros sur une année de 59 semaines, afin de tenir compte d'une part, de l'érosion monétaire et de l'évolution des salaires et d'autre part des congés payés et jours fériés.

Elle critique le tribunal qui a limité à 1 060 euros en moyenne l'indemnisation des besoins d'aide pour l'entretien du jardin au motif que son jardin est d'une superficie de 311 m² et que les frais d'entretien annuel dont elle justifie représentent un dépense de 3 480 à 4 200 euros TTC ; elle demande à la cour une indemnité calculée sur une base annuelle de 3 840 euros.

La société XL Insurance offre une aide de 1 heure par jour sur 372 jours pour les actes de la vie quotidienne et de 3 heures par semaine sur une année de 53 semaines pour les transports et l'entretien du jardin avec l'application d'un tarif horaire de 18 euros tant pour la période échue que pour la période à échoir ; elle relève que Mme [R] [P] ne démontre ni qu'elle était seule à entretenir le jardin avant l'accident ni que le jardin était parfaitement entretenu et estime que les justificatifs d'entretien sont excessifs eu égard à la surface du terrain.

Sur ce, l'expert a retenu que l'état de Mme [R] [P] après la consolidation nécessitait qu'elle soit aidée par une tierce personne à raison d'1h par jour pour les actes de la vie quotidienne et de 2h par semaine pour les accompagnements extérieurs ; il a estimé que Mme [R] [P] ne pouvait plus entretenir son jardin.

Néanmoins, Mme [R] [P] ne rapporte pas la preuve qu'elle entretenait elle-même son jardin avant l'accident, étant rappelé que la victime doit être replacée dans la situation qui était la sienne avant l'accident en application du principe de la réparation intégrale ; eu égard à l'offre de la société XL Insurance il convient d'indemniser Mme [R] [P] à hauteur d'une heure par semaine pour l'entretien du jardin.

Pour les actes de la vie quotidienne et les transports Mme [R] [P] sera indemnisée selon le volume horaire fixé par l'expert.

Ainsi que précisé pour l'assistance temporaire par tierce personne, le tiers responsable est tenu d'indemniser le recours à cette aide humaine indispensable qui ne saurait être réduit en cas d'aide familiale ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées.

En l'espèce, eu égard à la nature de l'aide requise, non spécialisée et du handicap qu'elle est destinée à compenser, et des offres de la société XL Insurance l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire de 20 euros sur une année de 365 jours pour l'aide dans l'accomplissement des actes de la vie quotidienne et les transports et conformément à l'offre de la société XL Insurance pour l'entretien du jardin.

L'indemnité est la suivante pour l'aide quotidienne et les transports :

de la consolidation du 13 janvier 2016 à la liquidation

- actes de la vie quotidienne

1 heure x 2 353 jours x 20 euros = 47 060 euros

- transports

2 heures x 2 353 jours / 7 jours x 20 euros = 13 445,71 euros

à compter de la consolidation

par capitalisation du besoin annuel par un euro de rente viagère pour une femme âgée de 57 ans à la liquidation selon le barème précité soit 29,691

- actes de la vie quotidienne

1 heure x 365 jours x 20 euros x 29,691 = 216 744,30 euros

- transports

2 heures x 52 semaines x 20 euros x 29,691 = 61 757,28 euros

total : 339 007,29 euros (47 060 euros + 13 445,71 euros + 216 744,30 euros + 61 757,28 euros).

L'indemnité est la suivante pour l'entretien du jardin :

de la consolidation du 13 janvier 2016 à la liquidation

1 heure x 2 353 jours / 7 jours x 53 semaines / 52 semaines x 20 euros = 6 852,14 euros

à compter de la consolidation

par capitalisation du besoin annuel par un euro de rente viagère pour une femme âgée de 57 ans à la liquidation selon le barème de la Gazette du palais du 28 novembre 2017 auquel se réfère la société XL Insurance soit 27,054

1 heure x 53 semaines x 20 euros x 27,054 = 28 677,24 euros

total : 35 529,38 euros (6 852,14 euros + 28 677,24 euros).

L'indemnité totale d'assistance permanente tierce personne est ainsi de 374 536,67 euros (339 007,29 euros + 35 529,38 euros).

Le jugement est infirmé.

- Perte de gains professionnels futurs

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

Le tribunal a relevé que l'expert avait estimé que la décision prise par la commission médicale de la CCAS le 12 mai 2016 de placer Mme [R] [P] en retraite anticipée par réforme avec effet au 30 mai 2016 était en lien avec l'accident et qu'aucune aptitude professionnelle de Mme [R] [P] après la consolidation ne pouvait être retenue en raison des séquelles de l'accident et de son absence de diplôme.

Il a estimé d'une part, que Mme [R] [P] pourrait bénéficier d'un départ à la retraite anticipé à l'âge de 60 ans et d'une retraite à taux plein pour avoir acquis 169 trimestres en cumulant son activité dans le privé et celle effectuée au sein de la RATP en septembre 2018, et d'autre part, qu'elle ne pouvait pas bénéficier du régime spécial de retraite de la RATP applicable aux agents de la catégorie B faute d'avoir atteint 25 ans de service dans cette catégorie.

Il a ainsi évalué la perte de gains professionnels subie par Mme [R] [P] du 13 janvier 2016 au 30 mai 2016 au montant du salaire et de la prime d'intéressement perdus, puis jusqu'au 30 décembre 2020 en imputant sur le salaire qu'elle aurait dû percevoir le montant cumulé de sa retraite anticipé et de sa pension d'invalidité puis jusqu'au 30 novembre 2024 en imputant sur les salaires qu'elle aurait dû percevoir le montant de sa retraite.

Il a examiné la demande relative à la perte de retraite au titre de l'incidence professionnelle.

Mme [R] [P] précise qu'elle a travaillé dans le secteur privé de 1980 à 1998 et à la RATP à partir du 25 mai 1998.

Elle expose qu'elle ne pourra bénéficier de sa retraite du secteur privé qu'à compter du 1er décembre 2024 mais sans qu'il s'agisse d'une retraite à taux plein puisque pour l'obtenir elle aurait dû travailler jusqu'au 30 novembre 2031.

Elle précise que les agents de la RATP de catégorie B, à laquelle elle appartenait, peuvent prendre leur retraite à l'âge de 50 ans sous réserve d'être nés avant 1967, ce qui est son cas et d'avoir effectué au moins 25 ans de service, condition qu'elle ne remplit pas.

Elle soutient qu'en l'absence de l'accident, elle aurait travaillé jusqu'au 8 mars 2036 pour obtenir une retraite à taux plein et aurait atteint le niveau le plus élevé de son métier avec la rémunération correspondante en décembre 2031.

Mme [R] [P] calcule sa perte de gains professionnels futurs sur différentes périodes ; pour la période du 13 janvier 2016 au 30 mai 2016, date de sa mise à la retraite anticipée, elle sollicite une somme de 1 786,23 euros correspondant à la perte de gains et de primes d'intéressement qu'elle a subie selon les attestations établies par la RATP qu'elle produit aux débats ; pour la période du 31 mai 2016 au 30 novembre 2024, veille de son départ anticipé à la retraite dans le secteur privé, elle demande l'allocation d'une indemnité correspondant à la différence entre le salaire qu'elle aurait dû percevoir jusqu'en 2024 et la pension de retraite qu'elle perçoit depuis le 31 mai 2016 ; pour la période du 1er décembre 2024, date de mise en retraite anticipée dans le secteur privé et le 1er décembre 2031, date de départ à la retraite en l'absence d'accident, elle sollicite le paiement du différentiel entre les salaires qu'elle aurait dû percevoir et les pensions de retraite qu'elle percevra de la CNAV et de la RATP.

Mme [R] [P] demande en outre l'indemnisation d'une perte de retraite.

La société XL Insurance conclut à la confirmation du jugement ; elle fait néanmoins valoir que si dans la dernière fiche d'aptitude établie par le médecin du travail Mme [R] [P] est estimée inapte à son poste elle n'est pas considérée comme inapte à tout travail et que Mme [R] [P] ne justifie pas d'une tentative de reclassement à la RATP ou ailleurs et que le fait qu'elle ait perçu l'allocation de retour à l'emploi le confirme ; elle affirme ainsi que Mme [R] [P] conserve une capacité de gains qui doit être prise en compte alors même qu'elle ne travaille pas effectivement et qu'elle a demandé à bénéficier d'un départ anticipé à la retraite qui a été accepté.

***

Sur ce, il ressort des termes de son rapport que l'expert a considéré que la décision de mise à la retraite anticipée par réforme de Mme [R] [P] prise le 30 mai 2016 était bien en rapport avec l'accident et que les séquelles induites par celui-ci excluaient que Mme [R] [P] puisse continuer à occuper son emploi d'agent de station à la RATP.

Le médecin du travail a émis le 14 janvier 2016 après seconde visite et étude de poste un avis d'inaptitude de Mme [R] [P] à son poste d''agent animateur mobile' en précisant qu'elle pourrait être reclassée sur un poste 'ne comportant pas de tâches sollicitant le membre supérieur droit (par exemple : pas de travaux de précision comme des travaux d'écriture, travaux de saisie informatique ; pas de travaux physiques comme de la manutention) ; Mme [R] [P] pourrait être affectée à un poste comportant une activité d'accueil (communication verbale, téléphonique) ou de surveillance sans contact physique (salle d'écran de contrôle)'.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 30 mai 2016 la RATP a informé Mme [R] [P] de sa décision, après avis favorable de la commission médicale du 12 mai 2016, de la mettre à la retraite par réforme à compter de cette date.

Il ressort des éléments qui précèdent la preuve que la perte par Mme [R] [P] de son emploi au sein de la RATP est directement imputable à l'accident, étant précisé qu'elle n'a pas à rapporter la preuve d'une vaine tentative de reclassement auprès de cet employeur, et non la résultante d'un choix personnel d'un départ anticipé à la retraite.

Par ailleurs compte tenu des séquelles de l'accident consistant selon l'expert en une ankylose de l'épaule avec une abduction très limitée sur un membre dominant, des restrictions importantes à l'emploi retenues par le médecin du travail telles qu'elles ont été énoncées ci-avant, de la circonstance que Mme [R] [P] n'a jamais retrouvé d'emploi compatible avec son handicap jusqu'à ce jour, de son âge, soit 57 ans à ce jour, et de la situation actuelle difficile du marché de l'emploi, il est totalement illusoire que Mme [R] [P] puisse retravailler à l'avenir.

Elle est donc fondée en sa demande d'une perte de gains professionnels futurs totale, aucune capacité subsistante de gains n'étant démontrée.

La demande relative à la perte de retraite sera examinée au titre du poste de perte de gains professionnels futurs par commodité, ainsi que le fait Mme [R] [P].

Il résulte du relevé de carrière au titre des salariés du régime général de sécurité sociale édité le 24 janvier 2019, produit aux débats, qui est précis et détaillé que Mme [R] [P] a commencé à travailler de façon régulière dans le secteur privé à partir de l'année 1982, qu'en 2016 et 2017 elle a bénéficié d'allocations chômage et qu'elle a ainsi cotisé au total 77 trimestres pour le calcul de ses droits à la retraite.

Le document de projection de carrière établi par la RATP le 14 février 2018 révèle que Mme [R] [P] est entrée à la RATP le 25 mai 1998 en tant qu' 'élève exploitation' et qu'au jour de l'accident elle exerçait la fonction d''animateur agent mobile' de niveau E 9.

Par ailleurs s'il ressort du courrier de la Caisse de retraite des personnels de la RATP en date du 15 avril 2021 que depuis le 30 mai 2016 Mme [R] [P] perçoit une pension de retraite du régime spécial de retraite de la RATP, date à laquelle 'elle avait déjà 51 ans et aurait pu prétendre à une pension de retraite', il ne peut en être déduit que Mme [R] [P], qui compte tenu de sa date d'entrée à la RATP, n'aurait pas pu prétendre à une retraite à taux plein, aurait effectivement pris sa retraite à cette date ; d'ailleurs le document de 'détermination des droits à pension' établi par la CRP le 7 mars 2018 fait état d'une ouverture des droits à pension de Mme [R] [P] au 13 mars 2025 et d'une liquidation de sa retraite au 31 décembre 2029, alors qu'elle aura atteint 65 ans.

En réalité, eu égard à l'âge auquel Mme [R] [P], née le [Date naissance 6] 1964, a commencé à travailler de façon régulière, soit 19 ans, et au nombre de trimestres cotisés à la date de l'accident, au titre tant du régime général que du régime spécial de la RATP il s'avère que sans l'accident Mme [R] [P] aurait travaillé jusqu'à l'âge de 65 ans, pour avoir une meilleure retraite.

La perte de gains professionnels futurs subie par Mme [R] [P] à compter de la liquidation sera ainsi calculée jusqu'à l'âge de 65 ans sur la base d'un salaire moyen de 2 500 euros afin de tenir compte des progressions d'échelon dont Mme [R] [P] aurait bénéficié sans l'accident.

La perte de gains professionnels futurs jusqu'à l'âge de la retraite, doit ainsi être décomposée en plusieurs périodes, à savoir :

de la consolidation du 13 janvier 2016 au 30 mai 2016 (date de mise à la retraite par réforme)

cette perte correspond, selon les attestations de la RATP, à des pertes de salaires, de treizième mois et de primes à hauteur de 389,87 euros et de 415,36 euros outre la perte sur la prime d'intéressement de l'année 2016, proratisée, de 946,06 euros (981 euros -34,94 euros) soit 1 751,29 euros au total.

du 31 mai 2016 à la liquidation

La perte de gains professionnels futurs subie par Mme [R] [P] doit être calculée en fonction des salaires qu'elle aurait perçus sans l'accident en tenant compte de leur évolution en fonction des progressions d'échelons dont Mme [R] [P] aurait bénéficié selon le document de projection de carrière susvisé, progression d'échelons dont la société XL Insurance ne remet pas en cause le principe ; la perte est la suivante:

- du 31 mai 2016 au 31 octobre 2016 : 2 067,21 euros x 5 mois = 10 336,05 euros

- de novembre à décembre 2016 : 2 096,20 euros x 2 mois = 4 192,40 euros

- janvier 2017 : 2 091,65 euros

- de février à fin décembre 2017 : 2 106,58 euros x 11 mois = 23 172,38 euros

- de janvier 2018 à fin octobre 2018 : 2 083,62 euros x 10 mois = 20 836,20 euros

- de novembre 2018 à fin décembre 2019 : 2 112,46 euros x 14 mois = 29 574,44 euros

- de janvier 2020 à fin octobre 2020 : 2 258,84 euros x 10 mois = 22 588,40 euros

- de novembre 2020 à fin décembre 2021 : 2 320,93 euros x 14 mois= 32 493,02 euros

- de janvier 2022 à la liquidation : 2 401,88 euros x 8,25 mois = 19 815,51 euros

- total : 165 100,05 euros (10 336,05 euros + 4 192,40 euros + 2 091,65 euros + 23 172,38 euros + 20 836,20 euros + 29 574,44 euros + 22 588,40 euros + 32 493,02 euros +19 815,51 euros).

à compter de la liquidation

La perte de gains professionnels futurs est la suivante par capitalisation de la perte annuelle de salaire par un euro de rente temporaire pour une femme âgée de 58 ans à la liquidation jusqu'à l'âge de 65 ans selon le barème susvisé soit 6,878 :

2 500 euros x 12 mois x 6,878 = 206 340 euros.

La perte de gains professionnels futurs totale est ainsi de 373 191,34 euros (1 751,29 euros + 165 100,05 euros + 206 340 euros ).

La perte de retraite doit être examinée tant au titre du régime général de la sécurité sociale qu'au titre du régime spécial de retraite de la RATP.

Au titre du régime général de la sécurité sociale, l'accident n'a eu aucune incidence puisque Mme [R] [P] avait quitté le secteur d'emploi privé pour entrer à la RATP en 1998 et qu'à la date de l'accident, soit le 9 septembre 2013, ses droits à la retraite du régime général de la sécurité sociale étaient déjà définitivement figés, étant précisé qu'il n'est pas démontré ni même prétendu que Mme [R] [P] serait retournée travailler dans le secteur privé dont le régime de retraite était moins favorable que celui de la RATP.

La perte de retraite de la RATP correspond au différentiel entre la retraite que Mme [R] [P] aurait perçue sans l'accident et la retraite qu'elle va percevoir ; le document susvisé de 'détermination des droits à pension' établi par la CRP démontre que sans l'accident Mme [R] [P] aurait bénéficié à 65 ans d'une retraite mensuelle de 2 375,65 euros bruts soit 2 199,85 euros nets ; l'attestation de pension délivrée par la CRP le 9 janvier 2018 fait état d'une pension de 1 138,11 euros nets ; la perte de retraite est ainsi de 1 061,74 euros (2 199,85 euros - 1 138,11 euros) par mois.

La perte annuelle doit être capitalisée par un euro de rente viagère pour une femme âgée de 65 ans à la liquidation selon le barème précité, soit 22,658 ; la perte de retraite est ainsi de 288 682,86 euros (1 061,74 euros x 12 mois x 22,658).

La perte totale, préjudice de retraite compris, est de 661 874,20 euros (373 191,34 euros + 288 682,86 euros ).

Sur cette perte doivent s'imputer en application de l'article 29 alinéa 1 de la loi du 5 juillet 1985 toutes les prestations versées par la RATP et la CRP qui gèrent un régime obligatoire de sécurité sociale soit la rente accident du travail et la pension de réforme versée jusqu'à ce que Mme [R] [P] ait atteint l'âge de 65 ans.

Si le décompte de créance au titre de la rente accident du travail communiqué par la RATP par courrier du 27 janvier 2022 fait état d'arrérages échus au 30 septembre 2021 et d'un capital arrêté au 1er avril 2019 il s'avère que le calcul de ce capital constitutif des arrérages à échoir a bien été déterminé en fonction du barème figurant dans l'arrêté du 27 décembre 2011 relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale, pour une femme née le [Date naissance 6] 1964 et âgée de 56 ans au 30 septembre 2021, de sorte que la mention de la date du 1er avril 2019 résulte d'une simple erreur matérielle sans incidence ; eu égard au montant des arrérages échus au 30 septembre 2021 et du capital représentatif des arrérages à échoir, la somme à imputer au titre de la rente accident du travail est d'un montant total de 239 950,93 euros.

La pension de réforme est d'un montant mensuel justifié de 1 138,11 euros et le montant total versé et à échoir jusqu'au 31 décembre 2029 est de :

- arrérages échus du 13 janvier 2016 à la liquidation : 90 206,60 euros (1 138,11 euros x 79,26 mois)

- capital représentatif des arrérages à échoir à compter de la liquidation jusqu'au 31 décembre 2029 par capitalisation de la pension annuelle par un euro de rente temporaire pour une femme âgée de 57 ans à la liquidation, jusqu'à l'âge de 65 ans, en fonction du barème susvisé publié par la Gazette du Palais, ce qui représente une somme de 107 196,30 euros (1 138,11 euros x 12 mois x 7,849)

- total : 197 402,90 euros (90 206,60 euros + 107 196,30 euros).

La rente accident du travail et la pension de réforme à imputer représentent un total général de 437 353,83 euros (239 950,93 euros + 197 402,90 euros).

Après imputation la somme de 224 520,37 euros (661 874,20 euros - 437 353,83 euros) revient à Mme [R] [P].

Le jugement est infirmé.

- Incidence professionnelle

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap ; il inclut la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail.

Le tribunal a évalué à 100 000 euros le préjudice résultant d'une part, de l'éviction sociale subie par Mme [R] [P] en conséquence de la perte de son emploi et, d'autre part de sa perte de retraite ; après imputation du reliquat de créance de la RATP à hauteur de 78 908,48 euros il a alloué à Mme [R] [P] une indemnité de 21 091,52 euros.

Mme [R] [P] demande à la cour d'évaluer à la somme de 50 000 euros l'incidence professionnelle résultant de la privation de son activité professionnelle qui lui apportait un intérêt intellectuel, une estime de soi et une reconnaissance sociale.

La société XL Insurance sollicite la confirmation de l'évaluation de l'incidence professionnelle à 100 000 euros perte de retraite comprise dont à déduire le solde de la créance de la RATP.

Sur ce, la dévalorisation sociale ressentie par Mme [R] [P] du fait de son éviction définitive du monde du travail doit être indemnisée au titre de l'incidence professionnelle à hauteur de la somme de 12 000 euros.

La rente accident du travail ayant été imputée en totalité sur le poste de perte de gains professionnels futurs incluant la perte d edroits à la retraite cette somme revient en intégralité à Mme [R] [P].

Le jugement est infirmé.

- Frais d'aménagement du logement

Ce poste comprend les frais que doit débourser la victime directe à la suite du dommage pour adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi d'un habitat en adéquation avec ce handicap après la consolidation. Il inclut non seulement l'aménagement du domicile préexistant mais éventuellement le surcoût financier engendré, soit par l'acquisition d'un domicile mieux adapté, soit par la location d'un logement plus grand. Il intègre les frais nécessaires pour que la victime handicapée puisse disposer d'un autre lieu de vie extérieur à son logement habituel de type foyer ou maison médicalisée. Il comprend aussi les frais de déménagement et d'emménagement.

Le tribunal a alloué à Mme [R] [P] une somme de 5 000 euros à ce titre en estimant que les seules adaptations rendues nécessaires par son handicap consistaient en l'abaissement du plan de travail et le changement des éléments bas et du piano de la cuisine.

Mme [R] [P] soutient que ses séquelles imposent le changement du plan de travail et du piano qui intègrent les appareils d'électroménagers, ce qui suppose de réaménager totalement sa cuisine ; elle demande une somme de 23 649,37 euros correspondant à la moyenne de deux devis qu'elle a fait établir.

La société XL Insurance s'étonne que Mme [R] [P] ne produise que des devis compte tenu de l'ancienneté de l'accident et estime que Mme [R] [P] ne peut prétendre à la réfection complète de sa cuisine avec changement de tous les éléments de cuisine dont l'électroménager.

Sur ce, l'expert a constaté que depuis l'accident Mme [R] [P] conserve une ankylose de l'épaule avec une abduction très limitée sur un membre dominant et a préconisé l'aménagement de son logement au motif que le plan de travail de la cuisine est trop haut ; Mme [R] [P] qui ne peut être tenue de minimiser son dommage doit pouvoir continuer à bénéficier d'une cuisine harmonieuse dans laquelle les éléments de cuisine sont de même aspect et facture et les équipements ménagers adaptés aux éléments fixes ; eu égard aux devis communiqués les travaux d'adaptation de la cuisine au handicap de Mme [R] [P] seront évalués à la somme de 15 000 euros.

Le jugement est infirmé.

Préjudices extra-patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Souffrances endurées

Ce poste comprend l'indemnisation de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi

que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à dire du jour de l'accident jusqu'à celui de la consolidation

En l'espèce, il convient de prendre en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison du traumatisme initial, de l'hospitalisation, de l'intervention chirurgicale, des examens et soins notamment de rééducation ; évalué à 3,5/7 par l'expert, ce chef de préjudice a été justement indemnisé à hauteur de la somme de 12 000 euros par le tribunal.

Le jugement est confirmé.

- Préjudice esthétique temporaire

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique.

L'expert l'a coté 2/7 pour le port d'une immobilisation coude au corps puis d'anneaux pendant 5 semaines ; ce chef de préjudice a été justement indemnisé à hauteur de la somme de 1 000 euros par le tribunal.

Le jugement est confirmé.

Préjudices extra-patrimoniaux

permanents (après consolidation)

- Préjudice esthétique permanent

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique.

L'expert a retenu un préjudice esthétique permanent au titre de l'existence d'un bras figé, qu'il a coté 1/7 ; eu égard à l'aspect disgracieux de ce bras figé ce préjudice doit être indemnisé à hauteur de l'indemnité de 5 000 euros sollicitée par Mme [R] [P].

Le jugement est infirmé.

- Préjudice d'agrément

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

Mme [R] [P] justifie ne plus pouvoir pratiquer certaines activités sportives auxquelles elle s'adonnait régulièrement avant l'accident, qui nécessitent l'intégrité des deux membres supérieurs, à savoir notamment le tennis, le ping-pong, la pétanque et le vélo, suivant attestations concordantes versées aux débats, ce qui justifie l'indemnité de 5 000 euros allouée par le tribunal.

Le jugement est confirmé.

- Préjudice sexuel

Ce poste concerne la réparation des préjudices touchant à la sphère sexuelle, soit le préjudice morphologique lié à l'atteinte aux organes sexuels primaires et secondaires résultant du dommage subi, le préjudice lié à l'acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l'accomplissement de l'acte sexuel (perte de l'envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l'acte, perte de la capacité à accéder au plaisir) et le préjudice lié à une impossibilité ou une difficulté à procréer (ce préjudice pouvant notamment chez la femme se traduire sous diverses formes comme le préjudice obstétrical, etc.).

L'expert a noté que Mme [R] [P] avait déclaré que les rapports sexuels étaient rares sans se prononcer sur ce poste de préjudice ; néanmoins il résulte des séquelles de l'accident que Mme [R] [P] subit une gêne positionnelle, confirmée par M. [S] [P] dans une attestation, ce qui justifie l'indemnité de 5 000 euros allouée par le tribunal.

Le jugement est confirmé.

Sur les préjudices de M. [S] [P]

- Sur la perte de gains et l'incidence professionnelle

Le tribunal a alloué à M. [S] [P] une somme de 2 392,66 euros au titre d'une perte de gains professionnels durant la maladie traumatique de son épouse et rejeté sa demande d'indemnisation d'une perte de retraite en estimant que le fait d'être parti quatre ans plus tôt à la retraite afin de pouvoir mieux aider son épouse et libérer ses enfants d'une telle charge correspondait à un choix personnel d'autant que Mme [R] [P] était indemnisée du besoin d'être aidée par une tierce personne.

M. [S] [P] sollicite une indemnité 2 392,66 euros au titre des gains perdus durant les jours de congés posés afin d'accompagner son épouse notamment à ses rendez-vous médicaux et une somme de 144 961,57 euros au titre de sa perte de retraite consécutive à la nécessité de réorganiser sa famille afin de pouvoir aider Mme [R] [P] et de libérer ses enfants de toute charge sur ce point.

La société XL Insurance conclut à la confirmation du jugement en soutenant que les décisions de prendre des jours de congés et de partir plus tôt à la retraite sont le résultat d'un choix personnel et non d'une contrainte liée à l'accident.

Sur ce, M. [S] [P] n'a communiqué aucun document pour rapporter la preuve que l'accident subi par son épouse l'a contraint d'une part, à demander le bénéfice de jours de congés, les attestations produites indiquant uniquement les jours demandés et d'autre part, à solliciter, plus tôt qu'initialement prévu, son départ à la retraite ; il ne démontre donc pas que les préjudices qu'il invoque sont directement et certainement imputables à l'accident ; eu égard à l'offre de la société XL Insurance seule la somme de 2 392,66 euros lui sera allouée.

Le jugement est confirmé.

- Sur le préjudice sexuel

Ce préjudice non contesté en son principe par la société XL Insurance a été justement évalué par le tribunal à hauteur de la somme de 5 000 euros.

Le jugement est confirmé.

Sur le doublement des intérêts légaux

- Au titre du préjudice Mme [R] [P]

Le tribunal a retenu que la société XL Insurance n'avait pas respecté l'obligation de faire une offre d'indemnisation à Mme [R] [P] dans le délai de 8 mois de l'accident de sorte que le doublement des intérêts au taux légal courrait à compter du 9 mai 2014 et que l'offre du 5 décembre 2016 ne pouvait être considérée comme incomplète alors que l'assureur ne disposait pas des justificatifs lui permettant de faire une offre sur les dépenses de santé actuelles, les frais divers et les préjudices professionnels et qu'elle n'était pas manifestement insuffisante.

Mme [R] [P] demande à la cour de dire que la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal courra du 9 mai 2014 jusqu'au jour de l'arrêt devenu définitif dans la mesure où l'inaction de la société MAAF, assureur mandaté en application de la convention IRCA entre assureurs ne dispensait pas la société Axa de faire une offre, que l'offre du 5 décembre 2016 est non seulement tardive mais aussi inopérante pour être incomplète, plusieurs postes étant portés pour mémoire ou absents, sans que l'absence de renseignement sur la créance d'un organisme social puisse le justifier, et manifestement insuffisante (inférieure à 1/5ème des indemnités allouées par le tribunal).

La société XL Insurance oppose qu'elle ne s'est vue transférer le mandat d'indemnisation que tardivement, postérieurement à l'expiration du délai d'offre provisionnelle, qu'elle a versé diverses provisions à Mme [R] [P] et qu'une offre définitive a été émise le 5 décembre 2016, après le dépôt du rapport d'expertise amiable contradictoire.

Sur ce, en application de l'article L. 211-9 du code des assurances, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime, lorsque la responsabilité, n'est pas contestée, et le dommage entièrement quantifié, une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.

Une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans un délai maximal de huit mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime et l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

A défaut d'offre dans les délais impartis, étant précisé que le délai applicable est celui qui est le plus favorable à la victime, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal, en vertu de l'article L.211-13 du même code, à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.

La société Axa puis la société XL Insurance avait, en application des textes rappelés ci-dessus, la double obligation de présenter à Mme [R] [P] dont l'état n'était pas consolidé, une offre provisionnelle dans le délai de 8 mois de l'accident survenu le 9 septembre 2013, soit avant le 10 mai 2014, et de lui faire ensuite, une offre définitive dans le délai de 5 mois suivant la date à laquelle elle a été informée de la consolidation de son état.

La société XL Insurance ne peut valablement opposer, pour échapper à cette obligation légale, que la société MAAF était chargée du mandat d'indemnisation dans le cadre de la convention IRCA entre assureurs, qui ne lie pas Mme [R] [P].

Par ailleurs le versement de provisions ne pouvait avoir eu pour effet de dispenser l'assureur du véhicule impliqué dans l'accident dont Mme [R] [P] avait été victime de l'obligation de lui faire une offre provisionnelle détaillée portant sur tous les postes indemnisables de son préjudice.

La société Axa aux droits de laquelle est venue la société XL Insurance a adressé à Mme [R] [P], après réception du rapport d'expertise amiable contradictoire des Docteurs [K] et [J] en date du 25 février 2016, une offre définitive d'indemnisation le 5 décembre 2016 mais celle-ci est incomplète pour porter en mémoire notamment les postes de frais divers, perte de gains professionnels futurs et incidence professionnelle, alors que les experts avaient relevé que Mme [R] [P] était inapte au poste d'agent de station et que la société XL Insurance ne justifie pas lui avoir vainement demandé des renseignements conformément à l'article R. 211-31 du code des assurances.

Cette offre incomplète est assimilable à une absence d'offre.

Les offres faites par la société XL Insurance par conclusions du 4 septembre 2019 puis du 15 septembre 2020 devant le tribunal judiciaire de Paris s'avèrent également incomplètes, notamment pour le poste de perte de gains professionnels futurs.

L'offre faite par la société XL Insurance par conclusions du 8 juillet 2021 devant la présente cour s'avère complète et non manifestement insuffisante pour représenter plus de 60 % des indemnités allouées par la présente cour.

Il résulte de l'ensemble des motifs qui précèdent que la société XL Insurance doit être condamnée à payer à Mme [R] [P] les intérêts au double du taux légal courus à compter du 10 mai 2014 jusqu'au 8 juillet 2021, sur le montant des sommes offertes par la société XL Insurance le 8 juillet 2021, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées.

Le jugement est infirmé.

- Au titre des préjudices des proches de Mme [R] [P]

M. [T] [P], M. [Z] [P] et M. [S] [P] ne sont pas des victimes 'ayant subi une atteinte à sa personne' ni des héritiers d'une victime ayant subi un tel dommage.

Dès lors il y a lieu d'appliquer les dispositions de l'alinéa 1 de l'article L. 211-9 du code des assurances selon lesquelles 'Quelle que soit la nature du dommage, dans le cas où la responsabilité n'est pas contestée et où le dommage a été entièrement quantifié, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée'.

En l'espèce le droit à indemnisation intégrale de M. [T] [P] et M. [Z] [P], d'une part, et de M. [S] [P] n'a pas été contesté et leur droit était entièrement quantifié lors de l'assignation délivrée par actes des 19 mars, 20 et 25 mars 2019, contenant une demande d'indemnisation.

Il n'est justifié d'aucune offre d'indemnisation faite à M. [T] [P] et M. [Z] [P] avant les conclusions notifiées le 4 septembre 2019 ; la demande de doublement du taux des intérêts légaux est justifiée à compter du 26 juin 2019 (expiration du délai de trois mois à compter de l'assignation contenant la demande) jusqu'au 4 septembre 2019 sur le montant de l'offre faite à M. [T] [P] et M. [Z] [P].

Les offres faites à M. [S] [P] par conclusions du 4 septembre 2019 puis du 15 septembre 2020 sont incomplètes pour ne pas comporter de proposition pour le préjudice sexuel.

La première offre complète est contenue dans les conclusions du 8 juillet 2021 et s'avère non manifestement insuffisante le montant des sommes offertes correspondant à celui des sommes allouées ; la société XL Insurance est ainsi redevable envers M. [S] [P] des intérêts au double du taux légal du 26 juin 2019 au 8 juillet 2021 sur le montant de l'offre du 8 juillet.

Le jugement est infirmé.

Sur les demandes accessoires

Il n'y a pas lieu de déclarer l'arrêt opposable à la CRP, à la CCAS et à la MPGR qui sont en la cause.

La société XL Insurance qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à Mme [R] [P] une indemnité de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement par arrêt rendu par défaut, par mise à disposition au greffe,

Et dans les limites de l'appel

- Infirme le jugement sur les postes du préjudice corporel de Mme [R] [P] relatifs à l'assistance temporaire par tierce personne, l'assistance permanente par tierce personne, la perte de gains professionnels futurs, l'incidence professionnelle et le préjudice esthétique permanent, et sur la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal,

- Le confirme pour le surplus

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Condamne la société XL Insurance Company SE à payer à Mme [R] [P], les sommes suivantes, provisions et sommes versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement non déduites, au titre des postes ci-près de son préjudice corporel :

- assistance temporaire par tierce personne : 26 640 euros

- assistance permanente par tierce personne : 374 536,67 euros

- perte de gains professionnels futurs : 224 520,37 euros

- incidence professionnelle : 12 000 euros

- préjudice esthétique permanent : 5 000 euros,

- Condamne la société XL Insurance Company SE à payer à Mme [R] [P] les intérêts au double du taux légal du 10 mai 2014 jusqu'au 8 juillet 2021, sur le montant des sommes offertes par la société XL Insurance le 8 juillet 2021, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées,

- Condamne la société XL Insurance Company SE à payer à M. [T] [P] et M. [Z] [P] les intérêts au double du taux légal du 26 juin 2019 jusqu'au 4 septembre 2019 sur le montant de l'offre faite le 4 septembre 2019,

- Condamne la société XL Insurance Company SE à payer à M. [S] [P] les intérêts au double du taux légal du 26 juin 2019 jusqu'au 8 juillet 2021 sur le montant de l'offre faite le 8 juillet 2021,

- Condamne la société XL Insurance Company SE à payer à Mme [R] [P] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Condamne la société XL Insurance Company SE aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 21/01736
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;21.01736 ?
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