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08/09/2022 | FRANCE | N°20/00178

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - b, 08 septembre 2022, 20/00178


République française

Au nom du Peuple français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B



ARRET DU 08 Septembre 2022

(n° 139 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/00178 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCD7T



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Juin 2020 par le Tribunal judiciaire de BOBIGNY RG n° 11-18-002843





APPELANTS



Monsieur [Z] [R] (débiteur)

Chez Monsieur et Madame [R]

[Adresse 2]

[Localité 10]r>
comparant en personne



Madame [K] [I] épouse [R] (débitrice)

Chez Monsieur et Madame [R]

[Adresse 2]

[Localité 10]

non comparante représentée par M. [R] (conjoint) muni d'un ...

République française

Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B

ARRET DU 08 Septembre 2022

(n° 139 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/00178 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCD7T

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Juin 2020 par le Tribunal judiciaire de BOBIGNY RG n° 11-18-002843

APPELANTS

Monsieur [Z] [R] (débiteur)

Chez Monsieur et Madame [R]

[Adresse 2]

[Localité 10]

comparant en personne

Madame [K] [I] épouse [R] (débitrice)

Chez Monsieur et Madame [R]

[Adresse 2]

[Localité 10]

non comparante représentée par M. [R] (conjoint) muni d'un pouvoir spécial

INTIMEES

[13] (420.03.082)

SERVICE SURENDETTEMENT

[Adresse 4]

[Localité 8]

non comparante

[19] (42312874241100)

Agence surendettement

[Adresse 5]

[Localité 1]

non comparante

POLE DE RECOUV.SPEC.SEINE-SAINT-DENIS (083350266934993041 IR2015)

[Adresse 17]

[Adresse 17]

[Localité 9]

non comparante

[16] (00467/072004H ; 00467 072004H)

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 11]

non comparante

POLE EMPLOI IDF EST(0759950H/20170616I01)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 12]

non comparante

[15] CIC (300661085500020178905 ; 300661085500020178901)

Chez [14]

[Adresse 18]

[Localité 6]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Fabienne TROUILLER conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, président

Mme Fabienne TROUILLER, conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, conseillère

Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats

ARRET :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Fabienne TROUILLER, conseillère faisant fonction de présidente pour Monsieur Christophe BACONNIER, président de chambre empêché présent lors des débats, et par Madame Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 15 janvier 2018, M. et Mme [R] ont saisi la commission de surendettement de la Seine-Saint-Denis qui a, le 12 mars 2018, déclaré leur demande recevable.

Le 5 novembre 2018, la commission a imposé des mesures consistant en une suspension de l'exigibilité des créances pendant 24 mois et subordonnant ces mesures à la mise en vente de leur bien immobilier.

M. et Mme [R] ont contesté les mesures le 17 novembre 2018 au motif que la nue-propriété de leur appartement appartenait à leurs enfants suivant donation de 2005 et qu'ils n'ont pas les moyens d'habiter ailleurs.

Par courrier du 27 décembre 2019, la société [13] indique qu'elle ne conteste pas les mesures imposées par la commission de surendettement, son recours ayant uniquement pour objet l'intégration dans le plan de surendettement ses deux créances.

Par un jugement réputé contradictoire du 3 juin 2020, le tribunal judiciaire de Bobigny a :

- constaté que la société [13] ne contestait pas les mesures imposées par la commission de surendettement le 5 novembre 2018 ;

- prononcé la suspension de l'exigibilité des créances de M. et Mme [R] pendant 12 mois ;

- rappelé que la suspension des créances entraînait la suspension des intérêts dus à ce titre ;

- rappelé que durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital pouvaient être productives d'intérêts au taux d'intérêt légal non majoré.

Le tribunal a estimé que les ressources de M. et Mme [R] s'élevaient à la somme de 1 068,88 euros, leurs charges à la somme de 1421 euros et qu'ils ne disposaient pas d'une capacité de remboursement. Il a relevé que la situation était susceptible de changer car M. [R] pouvait retrouver un emploi et que leurs enfants à charges étaient susceptibles d'acquérir une autonomie financière.

Le tribunal a constaté que M. et Mme [R] ne possédant que l'usufruit de leur appartement, ils ne pouvaient l'aliéner. Il a estimé leur endettement total à 99 000 euros, que si leur situation de ressources et charges ne permettait pas d'envisager actuellement un remboursement, la possibilité d'évolution de leur situation permettait une suspension de l'exigibilité des créances pendant une durée de 12 mois.

Le jugement a été notifié le 12 juin aux débiteurs. M. [R] a signé l'AR le 26 juin 2020 et Mme [R] le 22 juin.

Par déclaration expédiée au greffe de la cour le 24 juin 2020, M. et Mme [R] ont interjeté appel du jugement.

L'affaire a été appelée à l'audience du 24 mai 2022.

À cette audience, M. [R] a comparu seul et réclamé un effacement de ses dettes. Il précise que son épouse maintient son appel mais qu'elle n'est pas présente car elle a le Covid.

Il a fait valoir qu'il a eu des difficultés pénales avec son entreprise, qu'il a été incarcéré, qu'il n'a pas les moyens de payer ses dettes, qu'il est en fin de droits et que son épouse (54 ans) ne travaille pas car elle n'a pas envie de travailler. Il ajoute qu'il ne peut la forcer à travailler et rappelle que ses trois enfants sont nus-propriétaires et qu'il ne peut donc vendre l'appartement.

Par courrier reçu au greffe le 16 mars 2022, la direction régionale Île-de-France de Pôle emploi indique qu'il ne sera pas présent à l'audience.

Par courrier reçu au greffe le 5 avril 2022 et notifié aux débiteurs le 21 avril 2022, le pôle de recouvrement spécialisé de la Seine-Saint-Denis de la direction générale des finances publiques, précise que sa créance s'élève à 62 038,74 euros. Il indique que le débiteur fait l'objet d'une plainte pour fraude fiscale par la DDFIP de Seine-Saint-Denis. Il s'oppose à tout effacement des dettes et invoque la mauvaise foi des débiteurs.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, il doit être rappelé que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures.

En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours des époux [R].

Sur le moyen tiré de la mauvaise foi

Il résulte de l'article L.711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.

Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.

En application de l'article L.761-1 du code de la consommation, la mauvaise foi procédurale est également sanctionnée en ce qu'est déchue du bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement toute personne :

1° ayant sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts,

2° ayant détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens,

3° ayant, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou ayant procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel, ou pendant l'exécution du plan ou des mesures de traitement.

Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.

Le juge doit se déterminer au jour où il statue.

En l'espèce, le Pôle recouvrement de la Direction départementale des finances publiques a exercé un recours en raison de la mauvaise foi des débiteurs. Il convient de relever qu'il justifie avoir notifié son recours aux débiteurs.

Il fait valoir que M. [R] a fait l'objet d'une plainte pour fraude fiscale et que compte tenu du comportement fiscal, des défaillances répétées à des obligations fiscales, il s'oppose à tout effacement des dettes du contribuable.

Il ressort du dossier que les époux [R] ont bénéficié, à compter du 5 novembre 2018, d'un moratoire de deux ans subordonné à la vente de leur bien immobilier.

S'il n'est pas contestable que la vente du bien immobilier ne peut être entreprise sans l'accord des trois enfants nu-propriétaires, il ressort des pièces produites et notamment de l'ordonnance du 20 juin 2019 que M. [R] a été placé en détention provisoire jusqu'au 22 octobre 2019 pour des faits de travail dissimilé en bande organisée, blanchiment en bande organisée, abus de bien social et gestion de sociétés de travail temporaire malgré une interdiction de gérer judiciairement prononcée en janvier 2017 pour des faits de fraude fiscale et qu'il a été interpellé début juin 2019 en possession de 40 000 euros alors qu'il rentrait de Turquie où il possède des comptes bancaires.

Ainsi, alors qu'ils se trouvaient en procédure de surendettement depuis le 15 janvier 2018, M. [R] s'est retrouvé impliqué dans une procédure pénale établissant qu'il détenait des fonds en espèces non déclarés, les faits étant reprochés pour la période du 20 juillet 2017 au 19 juin 2019.

De surcroît, les appelants n'ont produit aucun justificatif de leur situation actuelle et encore moins de démarches entreprises pour trouver un emploi. Ils ne justifient nullement d'une situation irrémédiablement compromise.

Leur implication dans des activités illicites et lucratives pendant la procédure de surendettement caractérise leur mauvaise foi et justifie une déchéance du bénéfice de cette procédure réservée aux débiteurs de bonne foi.

Partant le jugement est infirmé et les époux [R] sont déchus de la procédure de surendettement.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt réputé contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable l'appel de M. [Z] [R] et Mme [K] [I] épouse [R],

Confirme le jugement en ce qu'il a déclaré recevable le recours de M. et Mme [R],

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

Constate la mauvaise foi des débiteurs,

En conséquence, déclare M. [Z] [R] et Mme [K] [I] épouse [R] irrecevables à la procédure de surendettement,

Dit que la présente décision sera notifiée par lettre simple à la commission de surendettement des particuliers de la Seine-Saint-Denis et aux parties par lettre recommandée avec avis de réception,

Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel.

LA GREFFIERE LA CONSEILLERE FAISANT

FONCTION DE PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - b
Numéro d'arrêt : 20/00178
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;20.00178 ?
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