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07/09/2022 | FRANCE | N°21/17770

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 15, 07 septembre 2022, 21/17770


Grosses délivrées aux parties le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS









COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15



ORDONNANCE DU 07 SEPTEMBRE 2022



(n°35 , 9 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 21/17770 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEOZJ auquel sonts joint les RG 21/17778 (recours) et 21/17779 (appel)



Décisions déférées : Ordonnance rendue le 23 Septembre 2021 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal

judiciaire de CRETEIL



Procès-verbal de visite et saisies en date du 30 septembre 2021 pris en exécution de l'Ordonnance rendue le 23 Septembre 2021 par le Juge des libertés et...

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15

ORDONNANCE DU 07 SEPTEMBRE 2022

(n°35 , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 21/17770 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEOZJ auquel sonts joint les RG 21/17778 (recours) et 21/17779 (appel)

Décisions déférées : Ordonnance rendue le 23 Septembre 2021 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de CRETEIL

Procès-verbal de visite et saisies en date du 30 septembre 2021 pris en exécution de l'Ordonnance rendue le 23 Septembre 2021 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de CRETEIL

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, Elisabeth IENNE-BERTHELOT, Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'article 164 de la loi n°2008-776 du 04 août 2008 ;

assistée de Véronique COUVET, greffier lors des débats et de la mise à disposition ;

Après avoir appelé à l'audience publique du 15 juin 2022 :

La Société INSTITUT FRANCAIS DE FORMATION EN ENERGETIQUE CERTIFICATION (IFFEN CERTIFF)

Prise en la personne de son dirigeant Madame [F] [K]

Élisant domicile au cabinet de Me Eric PLANCHAT

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Eric PLANCHAT, de la SCP NATAF ET PLANCHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0406

APPELANTE ET REQUERANTE

La Société IIB LIMITED

Prise en la personne de son gérant Monsieur [H] [K]

Élisant domicile au cabinet de Me Eric PLANCHAT

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Eric PLANCHAT, de la SCP NATAF ET PLANCHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0406

APPELANTE

et

LA DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentée par Me Jean DI FRANCESCO, de la SCP URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137

INTIMÉE ET DEFENDERESSE AU RECOURS

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 15 juin 2022, le conseil des appelantes, et le conseil de l'intimée ;

Les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 07 Septembre 2022 pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

Le 23 septembre 2021 le juge des libertés et de la détention (ci-après JLD) du Tribunal Judiciaire (ci-après TJ) de Créteil a rendu, en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales (ci-après LPF), une ordonnance à l'encontre de :

-la société de droit hongkongais IIB LIMITED, représentée par Monsieur [H] [K], dont le siège est [Adresse 11] et qui a pour objet social le commerce, investissement et conseils.

L'ordonnance autorisait des opérations de visite et saisie dans les lieux suivants:

locaux et dépendances sis [Adresse 3], susceptibles d'être occupés par les sociétés INSTITUT FRANCAIS DE FORMATION EN ENERGETIQUE CERTIFICATION, AVERROES, KEEP SAFE, BLACK & HOLE, KAKO, AMBER, AIRWELL ACADEMY, FARACHATI I, SEAFOOD I, SALADIN I, les associations IFFEN ASSOCIATION ou IFFCOM ASSOCIATION et la société de droit hongkongais IIB LIMITED.

L'autorisation de visite et saisie des lieux susmentionnés était délivrée aux motifs que la société de droit hongkongais IIB LIMITED serait présumée exercer depuis le territoire national une activité dans le commerce, investissements et conseils sans souscrire les écritures comptables y afférentes.

Et ainsi serait présumée s'être soustraite et/ou se soustraire à l'établissement et au paiement des impôts sur les bénéfices et de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code général des impôts (articles 54 et 209-I pour l'IS et 286 pour la TVA).

L'ordonnance visait la requête de la DNEF et les pièces de procédure (35 pièces annexées à la requête).

Il ressortait des éléments du dossier que lors de la visite domiciliaire autorisée en date du 3 septembre 2019 par le JLD du TGI de BORDEAUX à l'encontre des sociétés HAI YANG COMPANY SECRETARY LIMITED et HAI LANG INTERNATIONAL FZ LLC, des documents ont été saisis, parmi lesquels se trouvent plusieurs échanges de courriels entre la société HAI YANG SECRETARY COMPANY et M. [H] [K] relatifs à la gestion de la société de droit hongkongais IIB LIMITED.

Il résulte de ces documents que la société de droit hongkongais IIB LIMITED, créée le 24/12/2013 par M. [H] [K] et dont l'objet social est le commerce, l'investissement et le conseil, serait représentée auprès des autorités hongkongaises par un agent (« company secretary »).

Par ailleurs, la société HAI YANG COMPANY SECRETARY LTD, devenue en 2019 MERRITT ASIA LIMITED, serait un acteur connu depuis de nombreuses années en FRANCE pour la création de sociétés à [Localité 9]. Elle aurait exercé les fonctions de « company secretary », pour le compte de la société IIB LIMITED auprès des autorités d'[Localité 9] sur la période du 24/12/2013 au 23/04/2018.

D'autres recherches laisseraient apparaître que la société IIB LIMITED aurait utilisé sur la période allant du 24/12/2013 au 23/04/2018 les services de domiciliation à [Localité 9] proposés par la société HAI YANG SECRETARY COMPANY LTD, et que depuis le 23/04/2018, elle utiliserait les services d'une seconde société de domiciliation à [Localité 9], la société ONESTART SECRETARIES LIMITED.

Il découle de ce qui précède que la société IIB LIMITE aurait toujours été sise à une adresse de domiciliation.

Dès lors, il pourrait être présumé que la société IIB LIMITED ne disposerait pas de moyens matériels et humains d'exploitation propres sur le territoire de [Localité 9] pour déployer une activité économique conforme à son objet social.

Dès sa création jusqu'au 20/04/2018, la société IIB LIMITED, dont les directeurs étaient M. [X] [V] et la société LANG CHAO LIMITED, aurait bénéficié d'un service de « nominee », qui permet de ne pas faire apparaître sur les registres, qui sont publics à [Localité 9], le nom des personnes représentées. Un « nominee » est en effet une personne (physique ou morale) représentant un bénéficiaire et dont l'objectif est de protéger l'identité du bénéficiaire.

La société IIB LIMITED n'utilisant plus la fonction de « nominee » à compter du 20/04/2018, M. [H] [K] apparaîtrait, à partir de cette date, comme le seul gérant de ladite société.

Il ressortirait des courriels saisis dans le cadre de la procédure exercée à l'encontre de la société HAIYANG COMPANY SECRETARY que M. [H] [K] serait le seul interlocuteur de la société HAI YANG SECRETARY COMPANY pour le compte d'IIB LIMITED.

Par conséquent, M. [H] [K] serait le principal décisionnaire de la société IIB LIMITED.

Suite à d'autres investigations, il s'avérerait que M. [H] [K] serait le membre fondateur de la société de droit hongkongais IIB LIMITED, qu'il aurait fait appel à des nominees pour masquer ses liens et son implication dans cette dernière, et qu'en étant le seul interlocuteur d'HAI YANG SECRETARY COMPANY et le seul décisionnaire pour les aspects organisationnel et financier, il apparaîtrait comme le véritable dirigeant d'IIB LIMITED depuis sa création.

Ainsi M. [H] [K], qui disposerait de ses intérêts personnels et professionnels sur le territoire national, serait, de par son rôle dans la société IIB LIMITED, présumé incarner en FRANCE le centre décisionnel de cette dernière.

Il serait également établi que dans le cadre de la gestion de la société de droit hongkongais IIB LIMITED avec la société HAI YANG, M. [H] [K], seul interlocuteur, utiliserait l'adresse courriel [Courriel 8].

En outre, lorsque ce dernier communique avec la société HAI YANG SECRETARY COMPANY, sa signature serait la suivante : [H] [K], Directeur, IFFEN (Institut français de formation en énergétique), [XXXXXXXX01], [Adresse 10], France.

Il était indiqué que la société INSTITUT FRANÇAIS DE FORMATION EN ÉNERGÉTIQUE, nom commercial IFFEN CERTIF, créée le 13/07/2014 et ayant pour activité principale la formation continue d'adultes, est dirigée par Mme [F] [K], et que la société INSTITUT FRANÇAIS DE FORMATION EN ÉNERGÉTIQUE, nom commercial IFFEN, créée en 2010 et radiée le 29/02/2020 et ayant pour activité principale la formation continue d'adultes, était dirigée par M. [H] [K]. Les deux sociétés sont représentées auprès du public par le même site internet https:/iffen.fr.

Par ailleurs, le numéro de téléphone fixe communiqué dans la signature des courriels envoyés par M. [H] [K] à la société HAI YANG SECRETARY COMPANY est celui des sociétés IFFEN CERTIF et IFFEN.

Dans ces conditions, la société de droit hongkongais IIB LIMITED disposerait sur le territoire national d'une adresse de correspondance et utiliserait les moyens de communication de deux sociétés françaises dirigées ou ayant été dirigées par M. [H] [K].

Dès lors, la société de droit hongkongais IIB LIMITED serait susceptible de disposer des moyens d'exploitation des sociétés IFFEN CERTIF et IFFEN pour réaliser son activité sur le territoire français.

Enfin, à titre subsidiaire, il est indiqué que la société AMBER 360 PTE.LTD, immatriculée au registre de SINGAPOUR en 2018 et ayant pour dirigeant M. [H] [K], serait sise à une adresse de domiciliation et aurait un objet social proche de la société de droit hongkongais IIB LIMITED.

Les associations IFFEN ASSOCIATION et IFFCOM ASSOCIATION gérées par Monsieur [K] ont leur siège social au [Adresse 2] (94), les sociétés INSTITUT FRANCAIS DE FORMATION EN ENERGETIQUE CERTIFICATION, AVERROES, KEEP SAFE, BLACK & HOLE, KAKO, AMBER, AIRWELL ACADEMY, FARACHATI I, SEAFOOD I, SALADIN I, les associations IFFEN ASSOCIATION ou IFFCOM ASSOCIATION et la société de droit hongkongais IIB LIMITED sont susceptibles d'occuper ces locaux, et à ce titre d'y détenir les documents et supports d'informations relatifs à la fraude présumée.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, le JLD a autorisé la visite domiciliaire dans les locaux sis [Adresse 3].

Les opérations se sont déroulées le 30 septembre 2021 dans les locaux susmentionnés de 7H55 à 19H05, en présence de Madame [I] [R], représentante désignée de l'occupant des lieux.

Le 12 octobre 2021, la société Institut français de formation en énergétique certification a interjeté appel contre l'ordonnance du JLD (RG 21/17770) et a exercé un recours contre le déroulement des opérations de visite (RG 21/17778).

Le 12 octobre 2021, la société IIB LIMITED a interjeté appel contre l'ordonnance du JLD (RG 21/17779)

L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 23 mars 2022 et a été renvoyée à l'audience du 15 juin 2022, à cette date la jonction a été évoquée et l'affaire a été mise en délibéré pour être rendue le 7 septembre 2022.

SUR L'APPEL.

Par conclusions déposées le 18 mars 2022 au greffe de la Cour d'appel de Paris, soutenues à l'audience du 15 juin 2022, les parties appelantes font valoir:

1/ les faits.

La société de droit hongkongais créée le 24 décembre 2013 est représentée par Monsieur [H] [K], suite à la visite domiciliaire du 3 septembre 2019 autorisées par le JLD de Bordeaux à l'encontre de deux autres sociétés, des documents saisis concernant la société IIB LIMITED permettaient d'établir que monsieur [H] [K] était le dirigeant de cette société. Par ordonnance du 23 septembre 2021, le JLD de Créteil a autorisé la visite des locaux professionnels à [Localité 12] qui sont occupés par la société Institut français de formation en énergétique certification (IFFEN CERTIF).

Les deux sociétés contestent l'ordonnance du JLD du TJ de Créteil du 23 septembre 2021.

2/ les présomptions de fraude.

En droit, le juge, pour autoriser l'administration fiscale à procéder à des opérations de visite et saisie domiciliaires, doit caractériser l'existence d'acte ou d'omission entrant dans le champ de l'article L.16 B du LPF.

La réalisation sur le territoire d'opérations commerciales non déclarées, tout en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures dans les documents comptables entre au nombre des agissements pour lesquels la visite domiciliaire, qui constitue une ingérence dans la vie privée, le domicile et la correspondance est autorisée.

Le juge méconnaît son obligation de vérification concrète du bien-fondé de la requête que lui soumet l'administration fiscale pour demander l'autorisation de procéder à des opérations de visite et saisie domiciliaire, lorsqu'il se fonde expressément sur un document incomplet, ne lui permettant pas de connaître la consistance exacte de l'opération en cause, pour présumer une minoration de recettes et un transfert de bénéfices à l'étranger (Cass. Com., 6 avril 1999, n°97-30271).

Saisi d'une contestation sur la régularité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, et dans le cas où l'administration présume qu'une société ayant son siège à l'étranger exercerait en France une activité imposable, le Premier Président de la cour d'appel doit vérifier que les éléments d'informations fournis par l'administration fiscale au juge des libertés et de la détention au soutien de sa requête, concernant son activité en France sont vrais, concordants pour laisser présumer une fraude fiscale. En l'absence de présomption établie d'une fraude fiscale en France, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention devra être annulée pour absence de motivation et absence de vérification concrète du bien-fondé de la requête de administration fiscale.

Les parties appelantes rappellent la jurisprudence concernant l'adresse de domiciliation, la localisation du centre décisionnel et l'omission de déclarations fiscales.

En l'espèce, l'ordonnance du JLD est irrégulière au regard de l'article 16 B du LPF

L'ordonnance attaquée n'évoque aucune présomption qui serait de nature à établir que la Société IIB LIMITED exercerait en France une activité de commerce, investissement et conseil et ne précise même pas les périodes de fraude présumée.

En conséquence, en l'absence de toute présomption de fraude, l'ordonnance attaquée doit être annulée.

Par ces motifs, il est demandé de :

- annuler l'ordonnance du 23 septembre 2021 attaquée qui a autorisé une visite de locaux professionnels à [Localité 12] en vue de rechercher des preuves de nature à établir que la société IIB LIMITED exercerait en France une activité de commerce, investissements et conseil sans souscrire de déclarations fiscales correspondantes.

Par conclusions déposées au greffe de la Cour d'appel de Paris le 25 mai 2022, soutenues à l'audience du 15 juin 2022, l'administration fiscale fait valoir :

1 Un rappel préalable de la procédure est exposé.

2 Discusssion

Rappel préalable des faits :

L'administration fiscale rappelle et développe les éléments soumis à l'appréciation du juge justifiant la mise en oeuvre de la procédure de visite domiciliaire dans la requête ainsi que les pièces produites.

Aux termes de l'article L 16B du LPF, l'autorité judiciaire peut autoriser l'administration à effectuer une visite domiciliaire lorsqu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt sur le revenu ou les bénéfices ou de la TVA, pour rechercher la preuve de ces agissements.

L'argumentation développée par les appelantes ne remet pas en cause le bien-fondé des présomptions retenues par le premier juge :

La requérante se limite à affirmer que l'ordonnance du JLD n'évoquerait aucune présomption de nature à établir que la société IIB LIMITED exercerait en France, une activité de commerce, investissements et conseil et ne préciserait même pas les périodes de fraude présumée.

Le juge n'a pas à préciser la période sur laquelle doit porter la recherche de preuve. Aucune disposition légale n'impose au juge de limiter l'objet de l'autorisation qu'il accorde, permettant ainsi la saisie de tous documents se rapportant aux faits présumés pour la période non prescrite (cass. Com., 15/10/1996, n°94-12.381, cass. Crim., 20/04/2005, n°04-82.951, et en dernier lieu cass. Crim., 23/11/2010, n°10-10.253).

Par ailleurs, s'agissant de l'activité de la société IIB LIMITED, le JLD a parfaitement relevé l'existence d'une adresse de domiciliation et de l'utilisation de services de domiciliation à [Localité 9], proposés par différentes sociétés spécialisées dans la domiciliation, ce qui permettait de présumer l'absence de moyens humains et matériels suffisants à Hong-Kong, pour l'exercice de son activité.

De plus, M. [H] [K], membre fondateur de la société IIB LIMITED, a fait appel à des 'nominees' pour masquer ses liens et son implication dans la société ainsi que les liens de de la société avec la France, il apparait comme le seul décisionnaire et véritable dirigeant de la société depuis sa création. Celui-ci étant domicilié en France, il apparaîtrait donc que le centre décisionnel de la société IIB LIMITED serait localisé en France.

Enfin, la société IIB LIMITED dispose sur le territoire national d'une adresse de correspondance et utilise les moyens de communication de deux sociétés françaises dirigées ou ayant été dirigées par M. [H] [K].

Ces éléments permettent de présumer à eux seuls que la société IIB LIMITED exerce sur le territoire national une activité conforme à son objet social.

Par ces motifs, il est demandé de :

- déclarer les appelantes non fondées en leur appel.

- confirmer l'ordonnance rendue le 23 septembre 2021 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Créteil.

- rejeter toutes autres demandes, fins et conclusions.

- condamner les appelantes au paiement de la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et en tous les dépens.

SUR LE RECOURS

La société requérante 'société Institut français de formation en énergétique certification' n'a déposé aucunes écritures à l'appui de son recours. A l'audience du 15 juin 2022, son conseil confirme que le recours contre les opérations de visite domiciliaire du 30 septembre 2021 n'est pas soutenu.

***

SUR CE LA COUR

SUR LA JONCTION :

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il convient en application de l'article 367 du Code de procédure civile et eu égard aux liens de connexité entre les affaires, de joindre les instances enregistrées sous le numéro de RG 21 /17770 et 21/17779 (appel) et sous le numéro de RG 21/17778 (recours), qui seront regroupées sous le numéro le plus ancien.

SUR L'APPEL :

Sur le moyen selon lequel le JLD a méconnu son obligation de vérification concrète du bien fondé de la demande.

Il résulte de l'ordonnance du JLD que celui-ci dans sa décision vise la requête de l'administration qui lui a été présentée en date du 23 septembre 2021, ainsi que les pièces de la procédure, que le JLD a rendu une ordonnance motivée s'appuyant sur les pièces qui étaient soumises, que les parties appelantes n'apportent aucun élément permettant d'affirmer que le juge n'a pas procédé à la vérification concrète du bien fondé de la demande.

Ce moyen sera rejeté.

Sur le moyen selon lequel le JLD ne précise pas la période de la fraude présumée.

Il convient de rappeler que l'article L 16B du LPF prévoit que 'le juge motive sa décision par l'indication des éléments de fait et de droit qu'il retient et qui laissent présumer, en l'espèce, l'existence des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée', que cet article n'impose nullement au juge de préciser dans sa décision la période de la fraude présumée, qu'il résulte de la jurisprudence que l'article L 16B permet la saisie de tous documents se rapportant aux faits présumés pour la période non prescrite , ce qui est le cas en l'espèce.

Ce moyen sera rejeté.

Sur le moyen selon lequel l'ordonnance n'évoque aucune présomption de fraude concernant la société IIB LIMITED.

Il résulte de l'ordonnance du JLD que la société IIB LIMITED a depuis sa création utilisé des adresses de domiciliation à [Localité 9] concernant son siège social, qu'elle fait appel à la société 'Merritt Asia Limited' qui fournit comme prestations la création de sociétés de droit hongkongais à une adresse de domiciliation, l'ouverture d'un compte bancaire professionnel ainsi que le suivi des formalités administratives, fiscales et sociales , que le JLD a pu présumer dans sa décision que la société IIB LIMITED sur le territoire de [Localité 9] ne dispose pas de moyens matériels et humains d'exploitation propre pour déployer son activité économique, que le JLD a justement relevé que depuis 2018 monsieur [H] [K] est l'unique administrateur et l'unique actionnaire de la société IIB LIMITED, qu'il apparaît depuis le 20 avril 2018 comme le seul gérant de cette société, que Monsieur [H] [K] qui est présumé incarner le centre décisionnel de cette société, dispose de ses intérêts personnels et professionnels sur le territoire national, qu'il ressort des éléments du dossier que la société IIB LIMITED semble disposer des moyens d'exploitation des sociétés 'Institut français de formation en énergétique certification' et 'Institut français de formation en énergétique' dirigées et détenues par Monsieur [H] [K] pour réaliser son activité sur le territoire français.

Ainsi il résulte de l'ensemble des ces éléments rappelés par le JLD que la présomption de fraude selon laquelle la société de droit hongkongais IIB LIMITED exerce une activité de commerce, d'investissement et de conseil depuis le territoire national sans souscrire les déclarations fiscales y afférentes et en omettant de passer ou de faire passer l'intégralité des écritures comptables, est parfaitement établie au vu de la requête et des pièces de l'administration fiscale, non contestées par les appelantes, soumises au magistrat.

Ce moyen sera rejeté.

Ainsi, l'ordonnance rendue le 23 septembre 2021 par le JLD de Créteil sera déclarée régulière et confirmée.

SUR LE RECOURS :

Il convient de constater que le recours de la société Institut français de formation en énergétique certification contre le déroulement des opérations de visite et de saisie du 30 septembre 2021 n'a pas été soutenu à l'audience.

Enfin les circonstances de l'instance commandent de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'administration fiscale.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement et en dernier ressort :

- Ordonnons la jonction des instances enregistrées sous les numéros de RG 21/17779 et 21//17770 (appel) et de RG 21/17778 (recours), qui seront regroupées sous le numéro le plus ancien (RG 21/17770) ;

- Déclarons régulière et confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Créteil en date du 23 septembre 2021;

- Constatons que le recours contre les opérations de visite domiciliaire n'a pas été soutenu;

- Confirmons le déroulement des opérations de visite et saisies effectuées en date du 30 septembre 2021 dans les locaux et dépendances sis :[Adresse 3], susceptibles d'être occupés par les sociétés INSTITUT FRANCAIS DE FORMATION EN ENERGETIQUE CERTIFICATION, AVERROES, KEEP SAFE, BLACK & HOLE, KAKO, AMBER, AIRWELL ACADEMY, FARACHATI I, SEAFOOD I, SALADIN I, les associations IFFEN ASSOCIATION ou IFFCOM ASSOCIATION et la société de droit hongkongais IIB LIMITED ;

- Rejetons toute autre demande ;

- Disons qu'il convient d'accorder la somme de 500 euros (cinq cents euros) à charge pour les parties appelantes à verser à la DNEF au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Disons que la charge des dépens sera supportée par les parties appelantes.

LE GREFFIER

Véronique COUVET

LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT

[B] [O]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 15
Numéro d'arrêt : 21/17770
Date de la décision : 07/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-07;21.17770 ?
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