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06/09/2022 | FRANCE | N°19/12395

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 06 septembre 2022, 19/12395


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRET DU 06 SEPTEMBRE 2022



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/12395 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBEWD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Septembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN - RG n° F 18/00417



APPELANTE



Madame [F] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Rep

résentée par Me Sylvie LEFORT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0099



INTIMEE



SARL HMB

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRET DU 06 SEPTEMBRE 2022

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/12395 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBEWD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Septembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN - RG n° F 18/00417

APPELANTE

Madame [F] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie LEFORT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0099

INTIMEE

SARL HMB

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Janvier 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne HARTMANN, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Madame Laurence DELARBRE, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Mathilde SARRON

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Anne HARTMANN Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière présente lors du prononcé.

RAPPEL DES FAITS , PRETENTIONS ET PROCEDURE

Mme [F] [H], née en 1991, a été engagée par la SARL HMB, en qualité de monitrice d'équitation par contrat à durée indéterminée en date du 1er septembre 2014, faisant suite à un contrat à durée déterminée du 2 septembre 2013.

La convention collective applicable était celle des centres équestres.

Les parties ont en date du 14 juin 2017 signé une rupture conventionnelle.

Mme [H] soutient avoir effectué des heures supplémentaires dont elle a vainement réclamé le paiement lorsqu'elle a compris qu'elle n'était pas liée par une convention de forfait et qu'elle a signé une rupture conventionnelle après que l'employeur l'ait menacée si elle engageait une procédure.

Sollicitant l'annulation de la rupture conventionnelle pour vice du consentement, la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et réclamant outre des rappels de salaire sur heures supplémentaires et congés non pris, diverses indemnités dont de rupture, Mme [F] [H] a saisi, le 16 juillet 2018, le conseil de prud'hommes de Melun, lequel par jugement rendu le 18 septembre 2019 a statué comme suit:

DIT que la rupture conventionnelle entre Mme [F] [H] et la société HMB est légale.

DEBOUTE Mme [F] [H] de l'ensemble de ses demandes;

CONDAMNE Mme [F] [H] à rembourser à la société HMB la somme de 570,21 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence trop perçue.

CONDAMNE Mme [F] [H] à la société HBM la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE Mme [F] [H] aux dépens.

Selon déclaration du 18 décembre 2019, Mme [F] [H] a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 28 novembre 2019.

Par des conclusions transmises à la cour par voie de réseau privé virtuel des avocats le 23 mars 2020, Mme [F] [H] demande à la cour de :

INFIRMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

En conséquence,

' FIXER le salaire mensuel moyen brut de Mme [F] [H] à la somme de 1.744,82 €,

' PRONONCER la nullité de la rupture conventionnelle intervenue le 31 juillet 2017 entre Mme [F] [H] et la société HMB,

En conséquence,

' DIRE et JUGER que la rupture du contrat de travail de Mme [F] [H] produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' CONDAMNER la société HMB à verser à Mme [F] [H] les sommes

suivantes :

o 3.489,64 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

o 348,96 € au titre des congés payés afférents,

o 2.093,78 € à titre d'indemnité de licenciement,

o 10.468,92 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Par ailleurs,

' DIRE et JUGER que la clause de non-concurrence liant Mme [F] [H] est

nulle,

En conséquence,

' CONDAMNER la société HMB à verser à Mme [F] [H] la somme de

30.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de la nullité de la

clause,

' CONDAMNER la société HMB à verser à Mme [F] [H] la somme de 1.223,74 € au titre de la rémunération de la clause non versée à la salariée,

' CONDAMNER la société HMB à verser à Mme [F] [H] la somme de 122,37 euros au titre des congés payés afférents.

DÉBOUTER la société HMB de sa demande reconventionnelle en remboursement de la somme de 570,21 € au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,

Par ailleurs,

' CONDAMNER la société HMB à verser à Mme [F] [H] les rappels de salaires suivants :

o 651,49 € à titre de rappel de salaire sur congés payés prétendument pris mais en réalité non pris en mai 2017,

o 520,92 € à titre de rappel de salaire sur congés payés prétendument pris mais en réalité non pris en juin 2017,

o 195,34 € à titre de rappel de salaire sur congés payés prétendument pris mais en réalité non pris en juillet 2017,

o 130,23 € à titre de rappel de salaire au titre du solde des congés payés non pris en juillet 2017,

o 317,40 € à titre de rappel de salaire au titre des congés payés sur la base de la règle du dixième,

o 156,37 € à titre de rappel de salaire pour deux jours de mai 2017 travaillés et non payés

o 234,55 € à titre de rappel de salaire pour trois jours de juin 2017 travaillés et non payés

o 234,55 € à titre de rappel de salaire pour trois jours de juillet 2017 travaillés et non payés

o 4.816,20 € à titre d'heures supplémentaires,

o 481,62 € au titre des congés payés sur les heures supplémentaires,

o 176,60 € à titre de complément d'indemnité de licenciement lié au rappel de salaire sur heures supplémentaires,

o 2.053,44 € au titre des temps de pause à titre principal,

' 513,36 € au titre des temps de pause à titre subsidiaire,

o 205,34 € au titre des congés payés sur les temps de pause à titre principal,

' 51,34 € au titre des congés payés sur les temps de pause à titre subsidiaire,

o 75,28 € à titre de complément d'indemnité de licenciement lié au rappel de salaire sur les temps de pause à titre principal,

' 18,82 € à titre de complément d'indemnité de licenciement lié au rappel de salaire sur les temps de pause à titre subsidiaire,

' CONDAMNER la société HMB à verser à Mme [F] [H] les indemnités suivantes

o 10.468,92 € nets à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

o 6.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi par Mme [H] du fait du manquement de l'employeur dans le paiement des salaires, sur le fondement de l'article 1240 du Code civil,

o 10.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour atteinte à sa vie privée du fait de la violation par la société HMB des dispositions légales relatives au repos dominical,

o 1.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du non-respect de la réglementation en matière de visites médicales,

' ORDONNER à la société HMB la remise à Mme [F] [H] des documents

sociaux conformes, à savoir la remise d'une attestation Pôle Emploi, d'un certificat de travail, d'un solde de tout compte et des bulletins de paie conformes aux condamnations à intervenir sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document passé un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir,

' ORDONNER en tout état de cause à la société HMB la remise à Mme [F] [H] d'une attestation Pôle Emploi conforme en ce qu'elle doit prendre en compte les rappels de salaires reconnus par la société HMB au titre de la prime d'ancienneté, sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document passé un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir,

' CONDAMNER la société HMB à verser à Mme [F] [H] la somme de 2.400€ sur le fondement de l'article 700 du CPC,

' CONDAMNER la société HMB aux entiers dépens.

Selon des écritures transmises à la cour le 5 juin 2020, la société HMB demande à la cour de :

Recevoir la société HMB en ses écritures, la dire bien fondée ;

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Melun le 18 septembre 2019 ayant débouté Mme [H] de l'intégralité de ses demandes et l'ayant condamné à verser à la société HMB la somme de 570,21 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence trop perçue et 500 euros au titre de l'article 700 du CPC outre les dépens ;

En conséquence :

Dire et juger que la rupture conventionnelle conclue le 14 juin 2017 entre Mme [H] et la société HMB est parfaitement valide,

Dire et juger que Mme [H] n'a pas effectué d'heures supplémentaires,

Dire et juger que Mme [H] est mal fondée à formuler des demandes au titre de sa clause de non-concurrence : cette dernière étant à titre principal irrecevable et à titre subsidiaire particulièrement mal fondée en ses demandes, ayant délibérément violé ladite clause,

Dire et juger que Mme [H] ne justifie pas de ses demandes de rappel de salaires et la débouter en conséquence de ses prétentions salariales ;

En tout état de cause :

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [H] de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions

Reconventionnellement :

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [H] à restituer à la société HMB la somme brute de 570,21 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence indûment versée entre le mois d'octobre et décembre 2017 cette dernière ayant violé sa clause de non-concurrence;

Condamner Mme [H] à verser à la société HMB la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

Condamner Mme [H] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître François TEYTAUD dans les conditions de l' article 699 du CPC.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 octobre 2021 et l'affaire fixée au 20 janvier 2022 puis mise en délibéré au 29 mars 2022.

Le délibéré a été prorogé dans l'attente de la production des pièces par l'appelante, qui n'est intervenue qu'en date du 22 juin 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE, LA COUR :

Sur la validité de la rupture conventionnelle et ses conséquences

Pour infirmation du jugement déféré, Mme [H] plaide la nullité de la rupture conventionnelle qu'elle a signée avec son employeur pour vice du consentement. Elle soutient qu'elle a été contrainte de la signer sous la menace de celui-ci de la discréditer au sein des haras locaux en faisant état de la procédure judiciaire touchant son compagnon alors qu'elle lui avait savoir qu'elle entendait saisir la justice pour obtenir le paiement de ses heures supplémentaires. Elle ajoute en outre que la rupture est intervenue en fraude de ses droits puisque l'employeur lui doit des congés payés imputés sur ses fiches de paye alors qu'elle était à son poste. Elle demande à la cour de dire que la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse avec les conséquences financières qui en découlent.

Pour confirmation de la décision, la société HBM réplique qu'elle n'a jamais souhaité le départ de l'appelante mais qu'elle a accédé à sa demande de rupture conventionnelle pour lui éviter une démission. Elle indique que l'appelante ne verse aucun élément justifiant le « scénario » inventé pour réclamer des sommes exorbitantes et infondées soulignant que le formalisme inhérent à la rupture conventionnelle a bien été respecté.

Aux termes de l'article L.1237-11 du code du travail, l'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie, la rupture conventionnelle exclusive du licenciement ou de la démission ne pouvant être imposée par l'une ou l'autre des parties.

Selon l'article L. 1237-13 du même code, à compter de la date de signature par les deux parties, chacune d' elles dispose d'un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation, lequel fait partie avec l'homologation par l'autorité administrative des garanties de liberté du consentement des parties à la convention de rupture amiable.

Il est de droit que si l'existence, au moment de sa conclusion, d'un différend entre les parties au contrat de travail n'affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conclue en application de l'article L. 1237-11 du code du travail, la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties de sorte que sa signature ne peut pas intervenir dès lors que le consentement du salarié a été vicié à peine de nullité de celle-ci.

Il est constant qu'il appartient au salarié de rapporter la preuve d'un vice du consentement qu'il invoque.

La cour retient que la salariée ne produit, ainsi que le fait observer l'employeur, aucun justificatif des menaces ou pressions que l'employeur aurait exercées à son encontre que ce soit au regard de sa réclamation d'heures supplémentaires ou au regard de la procédure judiciaire en cours concernant son compagnon, pour la contraindre à signer la rupture conventionnelle. Les attestations de témoins versées par l'employeur faisant état de versions parfois contradictoires et en tous cas contestées sur les intentions prêtées à Mme [H] quant à son avenir professionnel sont insuffisantes voire inopérantes à établir le vice du consentement dont elle aurait été victime. La cour relève que s'agissant des réclamations relatives au contentieux concernant les congés payés mentionnés de façon erronée comme pris sur les derniers bulletins de paye, cette situation dont la salariée a pu se convaincre lors de la réception des fiches de paye n'est pas un élément objectivement de nature à contribuer à vicier son consentement.

Il s'en déduit que par confirmation du jugement déféré, Mme [H] qui n'a pas fait usage du droit de rétractation qui lui était ouvert, doit être déboutée de sa demande de nullité de la rupture conventionnelle, de requalification de celle-ci en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes indemnitaires subséquentes.

Sur la demande concernant la clause de non-concurrence

Pour infirmation du jugement déféré, Mme [H] réclame une indemnité de 30.000 euros en réparation du préjudice causé par l'application de la clause de non-concurrence prévue au contrat de travail dont la contre-partie était trop faible, ce qui équivaut à une absence de contrepartie financière, pour un périmètre géographique étendu et une durée très longue. Elle précise que l'employeur ne peut à la fois soutenir l'inopposabilité de cette clause faute de signature du contrat et invoquer une prétendue concurrence déloyale, elle réclame à cet égard en outre le paiement de la contre-partie due au titre de la clause de non concurrence pour les mois de janvier à juillet 2018 inclus soit la somme de 1.223,74 euros majorée de 122,37 euros de congés payés afférents.

Pour confirmation du jugement déféré, la société HMB fait valoir que la salariée a violé sa clause de non concurrence laquelle est conforme aux exigences de la jurisprudence.

La clause de non-concurrence figurant au contrat de travail liant les parties en son article 10, était ainsi libellée :

«  Compte-tenu de la nature de ses fonctions, mettant Mademoiselle [H] [F] en rapport direct avec la clientèle et des connaissances techniques acquises dans l'entreprise, Mademoiselle [H] [F] s'interdit de s'intéresser directement ou indirectement et sous quelques formes que ce soit à une entreprise ayant en tout ou en partie une activité semblable ou similaire à celle de la société HMB.

Cette interdiction s'appliquera en cas de cessation du contrat qu'elle qu'en soit la cause.

Cette interdiction de non-concurrence est limitée à une période de 12 mois à compter du jour de la cessation effective du contrat et dans un périmètre de 50 kilomètres autour de la société HMB.

En contrepartie de l'obligation de non-concurrence prévue ci-dessus, Mademoiselle [H] [F] percevra après la cessation effective de son contrat et pendant toute la durée de cette interdiction une indemnité forfaitaire égale à 10% de la moyenne mensuelle du salaire brut perçu par lui au cours de ces 2 derniers mois de présence. ».

La cour relève ainsi que le fait observer la salariée, que l'employeur ne peut valablement tout à la fois soutenir que la clause de non-concurrence est inopposable à la salariée, faute pour elle d'avoir signé le contrat pour invoquer qu'elle ne pourrait en solliciter la nullité, alors même qu'il a payée celle-ci jusqu'en décembre 2017 et réclamer la condamnation de la salariée pour le non-respect de ladite clause.

De la même façon toutefois, la salariée ne peut tout à la fois remettre en cause la validité de la clause au motif que la contrepartie serait dérisoire et la durée trop longue ou le périmètre trop important ce qui revient à solliciter sa nullité avec réparation du préjudice causé et réclamer le paiement des contreparties financières non réglées.

Il est constant que la validité d'une clause de non concurrence s'interprète strictement et suppose le respect de 4 critères cumulatifs dégagés par la jurisprudence :

- Être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise ;

- Être limitée dans le temps et dans l'espace ;

-Tenir compte des spécificités de l'emploi du salarié ;

- Comporter l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie

financière.

Il est de droit qu'une clause de non concurrence ne prévoyant pas de contrepartie financière est nulle et qu' une contrepartie financière « dérisoire » équivaut à une absence de contrepartie. S'il n'existe pas en la matière de montant minimum applicable, il est admis que celui-ci dépend essentiellement de la contrainte que fait peser la clause sur le salarié (par rapport au secteur géographique, à la durée de la clause, aux activités interdites).

Au constat que la contrepartie convenue représentait au total, sur une durée d'une année, à peine plus d'1/10è de la rémunération, soit 1, 2 mois de salaire la cour estime que celle-ci était dérisoire de sorte que celle-ci était nulle.

En cas de nullité de la clause, il appartient au juge d'apprécier l'étendue du préjudice ainsi subi par le salarié.

Mme [H] sollicite une indemnité de 30.000 euros en expliquant que l'interdiction imposée par la clause l'empêchant de travailler dans un périmètre de 50 km, l'obligeait à déménager si elle souhaitait travailler dans son domaine d'activité voire dans le soin des chevaux ou toute activité concernant les chevaux, ce qui rendait sa recherche d'emploi plus difficile et n'était pas compensée par l'indemnité de 10% prévue.

La cour est en mesure d'évaluer le préjudice subi par Mme [H] à la somme de 5.000 euros de dommages-intérêts, au paiement de laquelle la société HMB sera condamnée.

Il s'ensuit que Mme [H] doit être par confirmation du jugement déféré, déboutée de sa demande de rappel de contrepartie financière de la clause de non-concurrence tandis que la demande de remboursement de l'employeur de la contrepartie financière payée entre octobre 2017 et décembre 2017 pour non-respect l'obligation de non-concurrence, par infirmation du jugement déféré doit être rejetée.

Sur les prétentions salariales

Sur la demande de rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires

Pour infirmation du jugement déféré, Mme [H] réclame un rappel de salaires correspondant à des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées.

La société intimée s'oppose à cette demande imprécise et totalement injustifiée et demande la confirmation du jugement sur ce point.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Au soutien de sa demande d'heures supplémentaires accomplies au-delà de la limite légale, l'appelante se borne à affirmer dans ses écritures que ses horaires étaient fixés sur une base de 37 heures 30 sans compter les heures passées à monter des chevaux l'amenant à travailler parfois plus de 10 heures par jour, de sorte qu'elle met en compte 2h30 par semaine, sans autre précision.

La cour retient à l'instar des premiers juges que la salarié qui ne produit pas un décompte présentant les heures qu'elle prétend avoir effectuées, ne verse en l'état pas d'éléments suffisamment précis permettant à l'employeur de répondre et de vérifier sur la semaine si elle a effectivement réalisé des heures supplémentaires. C'est à juste titre qu'elle a été déboutée de sa demande de ce chef et de celle subséquente d'indemnité pour travail dissimulé, le jugement déféré est confirmé sur ce point.

Sur la demande de rappel de salaire au titre des congés indûment décomptés en mai, juin et juillet 2017

Pour infirmation du jugement déféré, l'appelante réclame le paiement de jours de congés non pris bien que décomptés sur les fiches de paye de mai à juillet 2017. Elle réclame un total de 1.497,98 euros à titre de rappel de salaires sur congés payés non pris.

Pour confirmation de la décision, l'employeur réplique que les jours de congé décomptés ont été pris par l'appelante d'un commun accord avec l'employeur tels qu'ils sont mentionnés sur les fiches de paye correspondantes lesquelles n'ont pas été contestées en leur temps.

Il est de droit qu'il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement.

C'est donc à l'employeur qu'il incombe de rapporter la preuve que le salarié a pris effectivement ses congés, et non au salarié.

En cas de litige, la mention de la prise de congés payés sur le bulletin de paie et de leur paiement ne suffit pas à démontrer que l'employeur a pris toutes les mesures pour que le salarié prenne ses congés pas plus en l'espèce que, les instructions données concernant les congés pris par l'employeur au service paye en vue de l'établissement des fiches de paye contestées, en l'absence de justificatifs écrits de demande et d'octroi desdits congés.

Il s'en déduit que par infirmation du jugement déféré, il convient de faire droit à la demande de Mme [H] de ce chef.

Sur la demande de rappel de salaire s'agissant des jours décomptés comme congés sans solde et en réalité travaillés

Pour infirmation du jugement déféré, Mme [H] réclame le paiement des salaires de jours décomptés comme congés sans solde alors qu'elle a travaillé à raison de deux jours en mai 2017, trois jours en juin et en juillet 2017, soit un total de 625,47 euros (156,37+(234,55 X2)).

Pour confirmation de la décision, l'employeur fait observer que la contestation de l'appelante est tardive s'agissant des congés sans solde mentionnés sur ses fiches de paye corroborées par les instructions données au comptable par la directrice.

Il est constant que le congé sans solde ne fait l'objet d'aucune disposition légale et réglementaire et que la procédure pour l'obtention d'un congé sans solde est normalement libre. Cependant, le congé sans solde doit être contractualisé entre l'employeur et le salarié.

En effet la demande émane en principe du salarié et l'employeur est libre d'accepter ou de refuser la demande de congé sans solde. En cas d'acceptation, un écrit doit préciser la durée du congé sans solde notamment à des fins de preuve pour l'employeur qui peut alors aisément prouver l'absence du salarié.

La principale obligation de l'employeur avec celle de fournir un travail est de payer le salaire dû.

En l'espèce, faute pour l'employeur de justifier de l'octroi écrit de congés sans solde sollicités par la salariée alors même qu'il n'est pas justifié qu'elle n'a pas travaillé les jours dits, il reste redevable des salaires retenus à ce titre, les instructions de paiement données à la comptable étant inopérantes ainsi qu'il a déjà été rappelé pour les congés payés.Il sera fait droit à la demande de l'appelante sur ce point. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur la demande de rappel de salaire au titre des congés payés sur la base de la règle du dixième

Pour infirmation du jugement déféré, Mme [H] conteste le calcul de ses congés payés sur la base de maintien du salaire moins favorable que le calcul sur la base du dixième. Elle réclame la différence sur quatre années soit la somme de 317,40 euros.

Pour confirmation de la décision, la société intimée oppose la prescription triennale et qu'il n'est pas démontré que la règle du dixième soit plus favorable. Il reconnaît avoir appliqué la règle du maintien du salaire.

L'article L 3141-22 du Code du travail, qui constitue la référence à ce sujet, distingue deux modes de calcul applicables aux congés payés: le premier consiste à déterminer le dixième du salaire perçu pendant la période de référence (méthode du salaire moyen), l'autre à déterminer le salarie qui aurait été perçu si le salarié avait travaillé au lieu de prendre ses congés (méthode du maintien de salaire), étant précisé qu'il convient de retenir la méthode la plus favorable au salarié.

S'il est constant que par application de l'article L.3145-1 du code du travail, l'action en paiement du salaire se prescrit par trois ans, il ressort du calcul non utilement contredit par l'employeur qu'en l'espèce la règle du dixième (comprenant la prime d'ancienneté contrairement à ce que l'employeur a soutenu) était plus favorable que la méthode du maintien de salaire, de sorte qu'il sera fait droit à la demande de Mme [H], par infirmation de la décision, à raison de 238,05 euros.

Sur la demande relative au temps de pause

Pour infirmation du jugement déféré, Mme [H] expose qu'elle n'a jamais bénéficié de ses temps de pause alors que son travail quotidien les lundi , mardi mercredi et samedi dépassait les 6 heures.

Pour confirmation de la décision, l'employeur réplique que les emplois du temps versés aux débats établissent que l'appelante ne dépassait pas les 6 heures de travail les mardi mercredi et jeudi et que les lundi et samedi elle bénéficiait d'une pause.

Aux termes de l'article L. 3121-33 du code du travail, devenu les articles L. 3121-16 et 3121-17 du même code, dès que le temps de travail quotidien atteint 6 heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes consécutives et des dispositions conventionnelles peuvent fixer un temps de pause supérieur.

Il est de droit que c'est à l'employeur qu'il appartient de rapporter la preuve du respect des temps de pause dans l'entreprise et que c'est au salarié d'établir l'existence du préjudice invoqué au titre du non-respect du temps de pause.

Au soutien de la preuve du respect du temps de pause qui lui incombe, la société intimée s'appuie sur les emplois du temps types de Mme [H] prévus pour les années 2015/2016 et 2016/2017 sans qu'ils reflètent la réalité des horaires effectués et sans faire apparaître la prise de temps de pause. Cette preuve n'est par conséquent pas rapportée.

Le préjudice qui en est résulté pour l'appelante sera en l'état du dossier justement évalué, par infirmation du jugement déféré, à la somme de 500 euros.

Sur l'indemnité pour manquement de l'employeur dans le paiement des salaires

Mme [H] réclame une somme de 6.000 euros d'indemnité comprenant un préjudice matériel pour 1.000 euros pour minoration de son droit à retraite et 5.000 euros de préjudice moral subi pendant l'exécution des derniers mois de son contrat de travail.

L'employeur s'oppose à cette demande qu'il estime ni fondée ni justifiée.

Au constat qu'il a été jugé plus avant que les pressions dénoncées par Mme [H] à la fin de la relation de travail n'ont pas été retenues et que le préjudice matériel de minoration de ses droits à retraite n'est pas explicité, c'est à juste titre que l'appelante a été déboutée de ce chef de prétention. Le jugement déféré est confirmé sur ce point.

Sur la demande d'indemnité pour violation de la réglementation relative au travail dominical

Mme [H] réclame une indemnité de 10.000 euros pour atteinte à sa vie privée du fait de la violation par l'employeur des dispositions relatives au travail dominical.

La société HMB s'oppose à cette demande en faisant observer que le jour de repos de l'appelante était le vendredi, qu'en tant que centre équestre, centre sportif, elle était autorisée à déroger à la règle du repos dominical et que la salariée ne justifie pas du préjudice qu'elle invoque d'autant que pendant les congés scolaires elle bénéficiait du dimanche comme jour de repos.

S'il est constant qu'aux termes de l'article L. 3132-3 du Code du travail : « Dans l'intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche », l'article R 3132-5 du code du travail autorise toutefois les centres sportifs auxquels les centres équestres peuvent être assimilés, à donner le repos hebdomadaire par roulement pour les salariés qu'ils emploient.

Au constat, qu'il n'est pas contesté que durant les vacances scolaires l'appelante bénéficiait de ses dimanches de sorte que les dispositions conventionnelles étaient respectées, que Mme [H] n'était pas sans ignorer que dans son domaine d'activité, le dimanche était un jour travaillé et qu'elle ne justifie pas du préjudice invoqué, elle sera par confirmation du jugement déféré, déboutée de sa demande de ce chef.

Sur la demande d'indemnité pour le non-respect des dispositions relatives à la médecine du travail

Mme [H] réclame une indemnité de 1.000 euros pour non-respect par l'employeur de la réglementation en matière de santé au travail puisqu'elle n'a été vue qu'une fois par la médecine du travail pendant toute la relation contractuelle et qu'elle n'était pas informée d'une convocation en 2016.

L'employeur s'oppose à cette demande en faisant valoir que le 14 janvier 2014 un avis d'aptitude concernant l'appelante a été rendu et qu'elle ne s'est pas présentée à la convocation du 9 novembre 2016 pour la visite périodique.

La cour retient que si l'employeur est tenu d'une obligation de veiller à la santé de ses salariés, il n'en reste pas moins que l'appelante avait été déclarée apte à son emploi lors de l'embauche par la médecine du travail et qu'elle ne justifie pas d'un problème de santé particulier dont il n'a pu être tenu compte faute de visite périodique, de sorte qu'elle ne rapporte pas la preuve d'un préjudice de ce chef. C'est à bon droit qu'elle a été déboutée de cette demande par le jugement déféré confirmé sur ce point.

Sur les autres dispositions

Il est ordonné à la société HMB la remise à Mme [H] d'un certificat de travail, du solde de tout compte, d'un bulletin de paye récapitulatif des sommes salariales accordées conformes au présent arrêt et d'une attestation Pôle Emploi portant mention des rappels de salaire concernant la prime d'ancienneté, sans que le prononcé d'une astreinte ne s'impose.

Partie perdante même partiellement, la société HMB est condamnée aux dépens d'instance et d'appel et à verser à Mme [H] une somme de 2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [F] [H] de :

- sa demande de nullité de la rupture conventionnelle, de requalification de celle-ci en licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de ses demandes indemnitaires subséquentes,

- de sa demande de rappel de contrepartie financière de la clause de non-concurrence,

- de ses demandes de rappels d'heures supplémentaires et d'indemnité pour travail dissimulé,

- de ses demandes d'indemnités pour manquement de l'employeur dans le paiement des salaires, pour violation de la réglementation relative au travail dominical et pour le non-respect des dispositions relatives à la médecine du travail.

L'INFIRME quant au surplus.

Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

JUGE que la clause de non-concurrence figurant au contrat est nulle.

CONDAMNE la SARL HMB à payer à Mme [F] [H] les sommes suivantes :

- 5.000 euros d'indemnité pour nullité de la clause de non-concurrence,

-1.497,98 euros à titre de rappel de salaires sur congés payés non pris en mai, juin et juillet 2017.

- 625,47 euros à titre de rappel de salaires de congés sans solde non pris en mai, juin et juillet 2017.

- 238,05 euros de rappel de salaire au titre des congés payés sur la base du dixième.

- 500 euros d'indemnité pour non-respect du temps de pause.

-2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

DEBOUTE la SARL HMB de sa demande reconventionnelle en remboursement de la somme de 570,21 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence.

ORDONNE à la SARL HMB la remise à Mme [F] [H] d'un certificat de travail d'un solde de tout compte, d'un bulletin de paye récapitulatif des sommes salariales accordées conformes au présent arrêt et d' une attestation Pôle emploi portant mention des rappels de salaire concernant la prime d'ancienneté.

CONDAMNE la SARL HMB aux dépens d'instance et d'appel.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 19/12395
Date de la décision : 06/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-06;19.12395 ?
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