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01/09/2022 | FRANCE | N°21/22498

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 01 septembre 2022, 21/22498


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 01 SEPTEMBRE 2022



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/22498 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CE4K4



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Novembre 2021 -Président du TJ de PARIS - RG n° 21/56005





APPELANT



SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 5] À [Localité 8] représ

enté par son syndic le cabinet [P]P. [H] (RCS Paris n°691 078 547)



[Adresse 6]

[Localité 9]



Représentée par Me Jean-julien BAUMGARTNER de la SELEURL JBR AVOCATS, avocat a...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 01 SEPTEMBRE 2022

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/22498 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CE4K4

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Novembre 2021 -Président du TJ de PARIS - RG n° 21/56005

APPELANT

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 5] À [Localité 8] représenté par son syndic le cabinet [P]P. [H] (RCS Paris n°691 078 547)

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentée par Me Jean-julien BAUMGARTNER de la SELEURL JBR AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0429

Assisté par Me Cindy DELGADO, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

M. [Y] [K]

[Adresse 3]

[Localité 14]

Mme [R] [E] épouse [K]

[Adresse 3]

[Localité 14]

Représentés et assistés par Me Marie PLASSART de la SELEURL SELARL MPA, avocat au barreau de PARIS, toque : L0201

S.C.I. SCI DU [Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentée par Me Chloé FROMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0074

S.A.R.L. SOCIETE D'EXPLOITATION DE MAGASINS D'ARTICLES MULTIPLES (SEMAM)

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentée par Me Chloé FROMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0074

M. [H] [P], exerçant sous l'enseigne Cabinet [P]P. [H], ( RCS PARIS n° 691 078 547)

[Adresse 1]

[Localité 9]

S.A. AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 13]

Représentés par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistés par Sophie BELLON, avocat au barreau de PARIS

S.A. ALBINGIA (RCS de NANTERRE sous le n°429369309)

[Adresse 2]

[Localité 12]

Représentée par Me William FUMEY de la SELARL ROINÉ ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : A0002

Assistée par Me Tristan DOLBEAU, avocat au barreau de PARIS

S.A. NATIO ASSURANCES

[Adresse 11]

[Localité 13]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

G.I.E. UNIFRAIS

[Adresse 4]

[Localité 13]

S.C.I. SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DU [Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentées par Me Chloé FROMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0074

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 2 juin 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, et Michèle CHOPIN, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

M. [K] et Mme [E] sont propriétaires des lots 2 et 3 dans un immeuble en copropriété situé [Adresse 5] à [Localité 8], lequel a pour syndic le cabinet [H], assuré auprès de la société AXA France Iard.

Le lot 3 est un appartement situé au premier étage, au-dessus d'un local commercial appartenant à la société civile immobilière du [Adresse 5] et donné à bail à la société Senam (société d'exploitation de magasins d'articles multiples), exerçant sous l'enseigne Franprix.

Un sinistre est survenu dans cet immeuble : l'affaissement du plancher haut du local commercial constituant aussi le plancher bas de l'appartement de M. [K] et Mme [E], occupé par une de leurs filles.

Suite à un courrier daté du 13 janvier 2020 par lequel M. [K] a signalé au syndic l'aggravation de l'affaissement du plancher, diverses mesures ont été prises :

- l'architecte de 1a copropriété a visité l'appartement de M. [K] et Mme [E] les 23 janvier et 2 juin 2020 et établi un compte-rendu le 2 juin 2020 ;

- mandatée par le syndic pour effectuer une recherche de fuite, la société Coplis Pavlidis a organisé une visite le 10 juin 2020 et dressé un rapport le 11 juin 2020 ;

- en juillet 2020, des sondages et des travaux d'étaiement ont été réalisés dans l'appartement de M.[K] et Mme [E] et dans le local commercial de la société Senam ;

- l'architecte de la copropriété, Mme [C], a effectué de nouvelles visites des lieux les 24 et 27 juillet 2020 et établi un compte-rendu le 29 juillet 2020 ;

- mandaté par le syndic, la société Iser, bureau d'études, a dressé un rapport le 14 mai 2021 portant sur le "renforcement ossature plancher bois suite à infiltrations en plancher haut".

Par courrier recommandé du 7 juin 2021, M. [K] et Mme [E] ont mis en demeure le syndic et le syndicat des copropriétaires de prendre toutes dispositions utiles pour la remise en état des parties communes et du plancher bas de leur lot. Ils ont également sollicité l'indemnisation de la perte de jouissance de leur appartement.

En réponse à ce courrier le ll juin 2021, le syndic a indiqué que "Mme [C] rendra son étude et appel d'offres relatif aux travaux de reprise de structures de la zone de plancher haut du Franprix en septembre 2021, une assemblée générale extraordinaire sera convoquée, lorsque l'ensemble des modalités auront été déterminées, car pour permettre la mise en oeuvre des travaux le magasin devra être fermé pour une durée de 7 jours environs." S'agissant de l'indemnisation pour perte de jouissance, il a renvoyé M. [K] et Mme [E] vers leur assureur, au motif que leur appartement est notamment à l'origine d'infiltrations dans le plancher.

Par actes d'huissier de justice en date des 29 juillet, 4 et 9 août 2021, M. [K] et Mme [E] ont fait assigner devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], son syndic le cabinet [H] et leurs assureurs respectifs la société Albingia et la société AXA France IARD, leur assureur habitation la société Natio Assurances ainsi que le GIE Unifrais et la société Franprix (supposés propriétaire et locataire du local commercial), aux fins de les voir condamner à faire procéder aux travaux de réparation nécessaires et à leur verser une provision de 18.000 euros.

Par actes des 16 et 20 septembre 2021, M. [K] et Mme [E] ont fait assigner en intervention forcée la société civile immobilière du [Adresse 5] (supposé propriétaire du local commercial) et la société Semam (locataire de ce local).

Cette instance a été jointe à la précédente.

La société civile immobilière du [Adresse 5] (réelle propriétaire du local commercial), est intervenue volontairement à l'instance.

Par ordonnance contradictoire en date du 22 novembre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

- déclaré irrecevable l'action engagée contre la société Franprix ; (s'agissant d'une simple enseigne) ;

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la société du [Adresse 5] à [Localité 8] ;

- condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 8] à faire réaliser les travaux de reprise de structure du plancher haut du Franprix, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification de la décision ;

- réservé la liquidation de l'astreinte ;

- dit n'y avoir lieu à référé sur les autres demandes des parties ;

- condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 8]) aux dépens ;

- condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 8]) à payer à M. [K] et à Mme [E] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté les autre demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 20 décembre 2021, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 8] a relevé appel de cette décision.

Par déclaration en date du 3 janvier 2022, M. [K] et Mme [E] ont eux aussi relevé appel de cette décision.

Les deux appels ont été joints par ordonnance du 8 février 2922 rendue par le président de la chambre saisie.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 25 avril 2022, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel,

y faisant droit,

à titre principal,

- infirmer l'ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Paris le 22 novembre 2021 en ce qu'elle a :

condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 8]) à faire réaliser les travaux de reprise de structure du plancher haut du Franprix, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification de la décision ;

réservé la liquidation de l'astreinte ;

dit n'y avoir lieu à référé sur les autres demandes des parties ;

condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 8]) aux dépens ;

condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 8]) à payer à M. [K] et à Mme [E] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

rejeté les autre demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

rappelé que l'exécution provisoire est de droit ;

statuant à nouveau :

- déclarer irrecevable la demande nouvelle formée en cause d'appel par laquelle les consorts [K]-[E] sollicitent sa condamnation à les indemniser à hauteur de 100 euros par jour de retard ;

- déclarer irrecevable la demande nouvelle formée en cause d'appel par laquelle la société Senam demande sa condamnation à lui verser la somme de 1.806,44 euros par jour de fermeture du magasin pour la réalisation des travaux ;

- dire n'y avoir lieu à référé sur la demande de condamnation formée par les consorts [K]-[E] à réaliser les travaux de réparation sous astreinte ;

- débouter les défendeurs de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions plus amples et contraires ;

- dire et juger que l'origine des désordres affectant l'immeuble du syndicat n'est pas connue à ce jour ;

- confirmer l'ordonnance dont appel pour le surplus ;

y ajoutant :

- désigner tel expert qu'il plaira avec la mission suivante :

se rendre sur place [Adresse 5] à [Localité 8]) ;

se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission ;

visiter les immeubles sis [Adresse 5] à [Localité 8]) et en particulier le local commercial au rez-de-chaussée et l'appartement au 1er étage appartenant à M. [K] et Mme [E] ;

examiner désordres allégués malfaçons, non-façons et non conformités allégués dans le corps des présentes conclusions, de toutes pièces jointes à la présente, tout désordre se révélant à ses yeux au cours des opérations d'expertise ainsi que tout autre désordre pouvant en être la cause ou la conséquence et décrire les désordres constatés ;

rechercher l'origine, l'étendue et les causes de ces désordres ;

dire si les ouvrages et les travaux en lien avec l'origine des désordres ou les subissant ont été conduits conformément aux documents contractuels et aux règles de l'art ;

fournir de façon générale, tous éléments techniques ou de fait, de nature à permettre à la juridiction du fond, éventuellement saisie, de se prononcer sur les responsabilités encourues et les préjudices subis ;

donner son avis sur les préjudices allégués et chiffrés par les parties ;

indiquer et évaluer les travaux éventuellement nécessaires à la réfection des lieux et installations dont s'agit ;

en cas d'urgence ou de péril reconnu par l'expert, autoriser le demandeur à faire exécuter à ses frais avancés, pour le compte de qui il appartiendra, les travaux estimés indispensables par l'expert, sous la direction du maître d'oeuvre de son choix, par des entreprises qualifiées,

dire que dans ce cas, l'expert déposera un pré-rapport précisant la nature, l'importance et le coût des travaux et établira un constat de bonne fin,

dire que l'expert mettra en 'uvre et accomplira sa mission, conformément aux dispositions des articles 232 et suivants du code de procédure civile et que, sauf conciliation des parties, il déposera son rapport au secrétariat du greffe de ce tribunal dans les trois mois de sa saisine,

dire qu'il en sera référé en cas de difficulté,

- condamner la société d'assurance Albingia à relever et le garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

- condamner in solidum M. [K] et Mme [E] et les parties succombantes à lui verser la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner in solidum M. [K] et Mme [E] et les parties succombantes aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 28 avril 2022, M. [K] et Mme [E] demandent à la cour de :

- dire le syndicat des copropriétaires mal fondé en son appel principal ;

- recevoir les appelants en leur appel incident sur l'appel du syndicat et en leur appel principal ;

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à la « reprise de structure du plancher haut » sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

- y ajoutant sur ce point, élever à 300 euros par jour le taux de l'astreinte à effet du 1 er avril 2022, et subsidiairement à compter de l'arrêt à intervenir ;

- la confirmer en ce qu'elle l'a condamné aux dépens et en indemnisation des frais irrépétibles exposés par les concluants en première instance ;

- rejeter la demande d'expertise comme inutile, injustifiée et strictement dilatoire ;

- subsidiairement quant à cela, dire que les opérations d'expertise éventuelles seront conduites au contradictoire de la société Albingia et de la société Axa Natio-assurances et que les frais d'expertise seront supportés par le syndicat, et/ou son assureur et/ou Natio assurances ;

réformer partiellement l'ordonnance entreprise pour le surplus et :

- condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], à réparer le plancher bas du lot n°3, et les ouvrages et éléments qu'il supporte et l'ensemble de la zone de l'appartement qui en est affectée, englobant toutes les zones sanitaires (salle de bain, WC, cuisine) et les zones avoisinantes des chambre, entrée et séjour, les réseaux qu'ils supportent, et le parquet pour la totalité de la surface sous astreinte de 100 euros par jour de retard jusqu'au 31 mars 2022, puis de 300 euros par jour à compter du 1 er avril 2022 jusqu'à complète réalisation des réparations,

- faire courir l'astreinte de l'expiration d'un délai de six semaines courant de la mise à disposition de la minute le 24 novembre 2021 soit à partir du 5 janvier 2022 ;

- condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à payer aux concluants une indemnité provisionnelle de 29.880 euros au 4 juin 2022 à parfaire à concurrence de 1.240 euros par mois au-delà de cette date jusqu'à la réception des travaux restituant à leur lot son habitabilité, et les réintégrant dans sa pleine jouissance ;

- le condamner à leur verser une indemnité supplémentaire de 100 euros par jour de retard apporté à l'achèvement des travaux de remise en état d'habitabilité de l'appartement postérieurement au 5 janvier 2022 ;

- élever à 4.000 euros le montant des condamnations aux frais irrépétibles de première instance ;

- condamner le syndicat des copropriétaires en tous les dépens d'appel et en paiement d'une somme de 5.000 euros supplémentaires au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 1er février 2022, le cabinet [H] et la compagnie Axa France Iard demandent à la cour de :

- confirmer en tous points l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris le 22 novembre 2021 ;

en conséquence,

sur le principal,

- juger qu'il existe des contestations sérieuses tenant aux responsabilités et à l'origine des désordres,

- débouter le syndicat des copropriétaires et toutes autres parties des demandes qui seraient formées à l'encontre du cabinet [H] et de son assureur, la compagnie Axa France,

- prononcer la mise hors de cause consécutive du cabinet [H] et de la compagnie Axa France,

sur la demande d'expertise judiciaire,

- prendre acte de ce que le cabinet [H] et la compagnie Axa France formulent les plus expresses protestations et réserves sur la demande d'expertise régularisée par le syndicat des copropriétaires,

- condamner les consorts [K]-[E] à payer au cabinet [H] et à la compagnie Axa France la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées les 13 et 25 janvier 2022, la société Albingia demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a débouté M. [K] et Mme [E] de l'ensemble de leurs réclamations à l'encontre de la compagnie Albingia,

- débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de garantie formée contre la compagnie Albingia,

- rejeter en tant que de besoin, toute demande formée contre la concluante,

- juger que la compagnie Albingia forme les plus expresses réserves de garantie et de responsabilité sur l'éventuelle mesure d'expertise judiciaire ordonnée,

- juger que cette expertise serait ordonnée aux frais avancés des consorts [K] et [E],

- condamner M. [K] et Mme [E] le syndicat des copropriétaires ainsi que toute partie succombante à payer à la compagnie Albingia la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la société Roine et associés représentée par Me Fumey en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 25 janvier 2022, la société Cardif Iard venant aux droits de la société Avanssur direct assurances venant elle-même aux droits de la société Natio assurance demande à la cour de :

- accueillir les concluants en leurs présentes écritures et les y déclarer bien fondés ;

- recevoir la concluante en son intervention volontaire à la procédure ;

- juger l'absence de demande à l'encontre de la société Cardif Iard venant aux droits d'Avanssur direct assurances ;

à titre principal :

- confirmer l'ordonnance du 22 novembre 2021, et en conséquence :

- rejeter toute demande formulée à l'encontre de la société Cardif Iard venant aux droits d'Avanssur direct assurances ;

à titre subsidiaire :

- donner acte à la concluante de ce qu'elle formule les protestations et réserves d'usage ;

- dire que les opérations d'expertise seront effectuées aux frais avancés du demandeur et que l'expert déposera un pré-rapport afin de recueillir les dires des parties avant de déposer son rapport d'expertise final ;

- débouter les parties de leurs plus amples demandes ;

- réserver les dépens.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 22 mars 2022, la société civile immobilière du [Adresse 16], la société Semam, le GIE Unifrais, la société civile immobilière du [Adresse 5] demandent à la cour de :

- confirmer l'ordonnance par le président du tribunal judiciaire de Paris le 22 novembre 2021 en ce qu'elle a :

déclaré irrecevable l'action engagée contre la société Franprix ;

déclaré recevable l'intervention volontaire de la société civile immobilière du [Adresse 5] à [Localité 8] ;

statuant à nouveau :

- ordonner la mise hors de cause du GIE Unifrais ;

- ordonner la mise hors de cause de la société civile immobilière du [Adresse 16] ;

- donner acte à la société civile immobilière du [Adresse 5] et la société Semam société d'exploitation de magasins d'articles multiples de leurs protestations et réserves quant à la demande d'expertise judiciaire sollicitée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 8]) ;

- en cas de désignation d'un expert judiciaire dire qu'il devra avoir notamment pour mission d'apprécier les préjudices subis par la société civile du [Adresse 5] et la société Semam société d'exploitation de magasins d'articles multiples et résultant tant des désordres actuels que de la fermeture éventuelle du magasin ou toutes contraintes liées à la réalisation des travaux ;

si la cour confirmait la condamnation du syndicat des copropriétaires à exécuter les travaux :

- assortir cette condamnation au paiement à la la société Semam société d'exploitation de magasins d'articles multiples à titre provisionnel de la somme de 1.806,44 euros par jour de fermeture du magasin pour la réalisation des travaux sans que ce montant ne soit définitif ni ne représente la totalité des indemnisations qui pourraient être ultérieurement sollicitées ;

- condamner les parties succombantes à payer au GIE Unifrais, à la société civile immobilière du [Adresse 5], à la société civile immobilière du [Adresse 5] et la la société Semam société d'exploitation de magasins d'articles multiples la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Pour l'exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions susvisées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

A titre liminaire, il convient de relever que la décision de première instance n'est pas critiquée en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'action engagée contre la société Franprix, qui n'est qu'une simple enseigne, alors qu'il n'est pas discuté que c'est la société Senam qui est le preneur à bail du local commercial dont le plancher haut est sinistré.

Il n'est pas non plus contesté que c'est la société civile immobilière du [Adresse 5] à [Localité 8] qui est propriétaire de ce local commercial, et non la société civile immobilière du [Adresse 5] ou le GIE Unifrais qui ont à tort été attraits à la procédure par M. [K] et Mme [E].

La mise hors de cause de la société civile immobilière du [Adresse 5] et du GIE Unifrais, non prononcée en première instance, s'impose donc en appel ; et c'est à bon droit que le premier juge a reçu l'intervention volontaire de la SCI du [Adresse 5].

En application de l'article 835 du code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer. Le trouble manifestement illicite découle de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

En l'espèce, il n'est pas discuté que les mesures concervatoires qui s'imposaient ont été prises tant dans le local commercial que dans le logement de M. [K] et Mme [E] pour prévenir l'effondrement du plancher concerné.

Considérant que les investigations qui ont été menées établissent suffisamment la responsabilité du syndicat des copropriétaires sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 et qu'une expertise judiciaire est inutile, se prévalant d'un trouble manifestement illicite en conséquence de la privation de jouissance de leur logement, M. [K] et Mme [E] sollicitent la condamnation du syndicat des copropriétaires à effectuer tous les travaux de remise en état nécessaires : réparation du plancher bas de leur lot et des ouvrages et éléments supportés par ce plancher ainsi que l'ensemble de la zone de l'appartement qui en est affectée, englobant toutes les zones sanitaires (salle de bain, WC, cuisine) et les zones avoisinantes des chambres, entrée et séjour, les réseaux qu'ils supportent, et le parquet pour la totalité de la surface.

Le syndicat des copropriétaires considère pour sa part que l'origine des désordres n'est pas précisément déterminée (ni par suite les responsabilités) par l'architecte de la copropriété ni par les autres intervenants, et qu'il n'a pas d'autre choix que de solliciter une expertise judiciaire à cette fin alors qu'il serait contreproductif, inefficace et inutilement onéreux pour lui d'avoir à remettre en état la structure du plancher haut comme l'y a condamné le premier juge, sans avoir préalablement identifié les causes de cette dégradation.

Il ajoute que l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 visé par les consorts [K]/[E] ne prévoit pas d'obligation à la charge du syndicat des copropriétaires de réaliser des travaux sur les parties privatives des copropriétaires, surtout lorsque ces travaux ont trouvé leur origine dans leur propre parties privatives ; que selon le règlement de copropriété sont privatives les parties des canalisations se trouvant à l'intérieur de chaque appartement ou local et affectés à l'usage exclusif et particulier de celui-ci et qu'en l'espèce, il résulte du rapport de la société Coplis Pavlidis que les évacuations de l'appartement des consorts [K]/[E] qui cheminent en sol sont fuyardes, et le rapport de Mme [C] mentionne l'existence d'une fuite du lavabo de cet appartement ; que la baignoire, le lavabo et les canalisations de même que le parquet et les cloisons qui se trouvent à l'intérieur du lot des consorts [K]/[E] sont des parties privatives.

L'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

La responsabilité du syndicat des copropriétaires et, par suite, sa condamnation à effectuer les travaux de remise en état nécessaires supposent donc que soit préalablement déterminé que les désordres ont bien leur origine dans les parties communes.

Or en l'espèce, s'il apparaît certain que les désordres affectent principalement une partie commune, à savoir le plancher haut de l'appartement des consorts [K]/[E] qui s'est effondré, force est de constater que l'origine de cet effondrement reste en l'état incertain au vu des investigations qui ont été menées.

En effet,

- Dans son compte rendu de visite du 2 juin 2020, l'architecte de la copropriété, Mme [C], conclut qu'à ce jour elle cherche à savoir :

* s'il y a une ou plusieurs causes, commune(s) ou distincte(s), en cours ou stabilisées, à l'effondrement constaté du sol comme à celle de la fissure de la cloison du logement [K]/[E],

* leur origine : second-oeuvre ou gros oeuvre (structure porteuse) ;

- A l'issue de son rapport de visite du 11 juin 2020, la société Coplis Pavlidis conclut que les évacuations de l'appartement [K]/[E], qui cheminent en sol sont fuyardes, ayant été probablement rompues par les mouvements immeubles et planchers. Cette société de couverture- plomberie- installation sanitaire pense ainsi que l'effondrement du plancher a provoqué la rupture des canalisations du logement [K]/[E], mais elle n'en est pas certaine ;

- La société Iser, chargée de déterminer les travaux de reprise du plancher, relève que les désordres affectant ce plancher résultent des infiltrations d'eau ayant entamé des réductions de section de solives bois. Elle note que du fait des mesures conservatoires appliquées en sous-face du plancher il est impossible en l'état actuel de faire une lecture exacte de l'ossature bois et métallique de la sous-face du plancher qui n'apparaît que très peu, et que seule une dépose massive des faux plafonds permettrait une lecture appropriée ;

- Dans son "compte rendu de visites des 24 et 27 juillet 2020 - phase : étaiement plancher", l'architecte de la copropriété relève que le plancher en bois présente à de nombreuses endroits des parties et assemblages "bricolés", que s'agissant de la plomberie les trois tests d'eau qu'elle a réalisés n'ont pas révélé de fuite sur l'évier de la cuisine et sur la baignoire, mais une fuite sur l'évacuation du lavabo ;

- Dans le CCTP concernant les travaux de reprise du plancher qui a été transmis par l'architecte de la copropriété au syndicat des copropriétaires, Mme [C] note que lors de la phase d'étaiement d'urgence le temps n'a permis d'effectuer que des tests d'eau différenciés, lesquels ont désigné l'évacuation du lavabo comme étant à l'origine des fuites décrites, et s'agissant des travaux nécessaires sur les parties privatives, Mme [C] indique qu'à ce jour, sans visibilité des ouvrages localisés dans le plénum 2 ou 3, il n'est pas permis de décrire l'étendue de ces travaux.

Force est ainsi de constater qu'il n'a pas été mené d'investigations suffisamment approfondies pour déterminer l'origine précise des désordres et que la ou les causes de l'effondrement du plancher restent incertaines ; notamment, la question de savoir si le dégât des eaux constaté a été provoqué par l'effondrement ou si l'effondrement est la conséquence d'un dégât des eaux est en l'état sans réponse.

Dans ces conditions, même si la cour ne peut que déplorer son caractère tardif, une expertise judiciaire s'impose pour déterminer l'origine des désordres et par suite les responsabilités encourues, et permettre ensuite la mise en jeu des garanties d'assurance.

En l'attente des conclusions de cette expertise, s'il est certain que les consort [K]/[E] subissent un trouble de jouissance en étant privé de leur appartement, ce trouble ne peut être qualifié de manifestement illicite alors qu'il n'est pas avéré en l'état, avec l'évidence requise en référé, que les désordres engagent la seule responsabilité du syndicat des copropriétaires, la propre responsabilité des consort [K]/[E] n'étant pas exclue, et qu'en outre tous les travaux nécessaires tant sur les parties communes que sur les parties privatives n'ont pas été déterminés pour qu'il soit complètement et définitivement remedié aux désordres.

Par ailleurs, compte tenu des mesures conservatoires qui ont été prises, aucun dommage imminent ne se trouve caractérisé et n'est d'ailleurs invoqué.

Il ne sera donc fait droit qu'à la demande d'expertise sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, cela aux frais avancés du syndicat des copropriétaires qui la requiert, et il sera dit n'y avoir lieu à référé sur toutes les autres demandes, la demande de remise en état sous atstreinte pour les motifs précédemment exposés, les demandes de provision et de garantie se heurtant quant à elles à contestation sérieuse pour les mêmes motifs.

L'ordonnance entreprise sera ainsi infirmée sauf en ce quelle a déclaré irrecevable l'action engagée contre la société Franprix et déclaré recevable l'intervention volontaire de la SCI du [Adresse 5] à [Localité 8]

Statuant à nouveau, la cour ordonnera une expertise et dira n'y avoir lieu à référé sur toutes les autres demandes.

L'équité et la nature du litige commandent de laisser à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise, sauf en ce quelle a déclaré irrecevable l'action engagée contre la société Franprix et déclaré recevable l'intervention volontaire de la SCI du [Adresse 5] à [Localité 8],

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Met hors de cause la société civile immobilière du [Adresse 5] et le GIE Unifrais,

Ordonne une expertise et commet pour y procéder :

M. [F] [W],

[Adresse 10],

06 15 40 31 69

[Courriel 15]

avec pour mission de :

- se rendre sur place [Adresse 5] à [Localité 8]) ;

- se faire communiquer par les parties tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission ;

- visiter l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8]) et en particulier le local commercial au rez-de-chaussée et l'appartement au 1er étage appartenant à M. [K] et Mme [E] ;

- constater et décrire tous les désordres en lien avec l'effondrement du plancher séparant ces deux lots ;

- rechercher et déterminer l'origine et les causes de ces désordres ;

- fournir tous éléments techniques ou de fait de nature à permettre à la juridiction du fond, éventuellement saisie, de se prononcer sur les responsabilités encourues et les préjudices subis ;

- donner son avis sur les préjudices allégués et chiffrés par les parties ;

- décrire et évaluer tous les travaux de remise en état nécessaires ;

- en cas d'urgence ou de péril reconnu par l'expert, autoriser le syndicat des copropriétaires à faire exécuter à ses frais avancés, pour le compte de qui il appartiendra, les travaux estimés indispensables par l'expert, sous la direction du maître d'oeuvre de son choix, par des entreprises qualifiées,

- dire que dans ce cas, l'expert déposera un pré-rapport précisant la nature, l'importance et le coût des travaux et établira un constat de bonne fin ;

- permettre aux parties d'émettre des dires sur la base d'un pré-rapport ou d'une note de synthèse et y répondre dans son rapport définitif ;

Fixe à la somme de 4.000 euros la provision à valoir sur les frais d'expertise qui devra être consignée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] [Localité 8] à la régie du tribunal judiciaire de Paris dans le délai de six semaines à compter du présent arrêt ;

Dit que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, la désignation de l'expert sera caduque et de nul effet ;

Dit que l'exécution de la mesure d'instruction sera suivie par le juge du service du contrôle des expertises du tribunal judiciaire de Paris, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du code de procédure civile ;

Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 255, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport au greffe du tribunal judiciaire de Paris, service du contrôle des expertises, dans un délai de quatre mois à compter de l'avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, sauf prorogation de ce délai dûment en temps utile auprès du juge chargé du contrôle de la mesure ;

Dit n'y avoir lieu à référé sur toutes les autres demandes,

Dit que chaque partie supportera la charge de ses dépens et frais irrépétibles de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 21/22498
Date de la décision : 01/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-01;21.22498 ?
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