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01/09/2022 | FRANCE | N°21/22315

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 01 septembre 2022, 21/22315


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 01 SEPTEMBRE 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/22315 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CE37H



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 20 Octobre 2021 -Président du TJ de MEAUX - RG n° 21/00639





APPELANTS



M. [N] [P]



[Adresse 1]

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[Adresse 1]

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Représentés et assistés par Me Marie-Madalen DELAPORTE, avocat au barreau de MEAUX







INTIMES



M. [U] [X]



[Adresse 1]

[Adresse 1]



Mme [S] [D] é...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 01 SEPTEMBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/22315 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CE37H

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 20 Octobre 2021 -Président du TJ de MEAUX - RG n° 21/00639

APPELANTS

M. [N] [P]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Mme [E] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentés et assistés par Me Marie-Madalen DELAPORTE, avocat au barreau de MEAUX

INTIMES

M. [U] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Mme [S] [D] épouse [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentés et assistés par Me Alycia INDRIGO, avocat au barreau de PARIS, toque : 61

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 2 juin 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, et Michèle CHOPIN, Conseillère chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

M. [X] et Mme [D] épouse [X] sont propriétaires d'une maison à usage d'habitation qu'ils ont fait construire sur une parcelle située [Adresse 1] (Seine-et-Marne). M. [P] et Mme [B] sont propriétaires d'une maison d'habitation qu'ils ont fait construire sur une parcelle voisine située [Adresse 1] (Seine-et-Marne). Pour accéder à leur propriété, ils bénéficient d'une servitude de passage sur une parcelle aménagée en chemin qui appartient aux époux [X]. Les consorts [P] ont fait carrosser le chemin appartenant désormais aux époux [X], à leurs frais exclusifs. Le chemin a par la suite été endommagé, des ornières ayant fait leur apparition. Des expertises ont été diligentées par les assureurs des propriétaires respectifs, sans que ceux-ci ne puissent parvenir à un accord amiable.

Par exploit du 16 juin 2021, M. [P] et Mme [B] ont fait assigner les époux [X] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux aux fins de :

- obtenir la désignation d'un expert judiciaire sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile et

- les voir condamner à leur payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par ordonnance contradictoire du 20 octobre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux, a :

- rejeté les demandes de M. [P] et de Mme [B],

- condamné M. [P] et Mme [B] à payer à M. [X] et à Mme [D] épouse [X] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [P] et Mme [B] aux dépens.

Par déclaration du 17 décembre 2021, M. [P] et Mme [B] ont relevé appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 25 mai 2022, ils demandent à la cour de :

- annuler et réformer l'ordonnance entreprise, et par conséquent :

- déclarer leur demande recevable et bien fondée, et en conséquence :

- ordonner une mesure d'expertise et désigner pour y procéder tel expert qu'il lui plaira, lequel, connaissance prise de tout document et les parties dûment appelées, aura pour mission de :

se rendre sur les lieux, [Adresse 1] (Seine-et-Marne) ;

décrire l'ensemble du chemin desservant le [Adresse 1] (Seine-et-Marne) ;

décrire et examiner les désordres ;

se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles pour l'accomplissement de sa mission ;

rechercher la cause de ces désordres préjudiciables à M. [P] et Mme [B] ;

préciser les travaux nécessaires pour remettre en état l'ensemble des désordres ;

rechercher si les désordres sont imputables à M. et Mme [X] ;

évaluer et indiquer le coût des travaux éventuellement nécessaires à la réfection, et chiffrer, le cas échéant, le coût des remises en état,

réunir tous les éléments techniques permettant à la juridiction de statuer sur les responsabilités ainsi que sur les préjudices subis ;

évaluer les préjudices subis par eux, du fait de leur perte de jouissance paisible et totale ;

- dire qu'avant de déposer son rapport, l'expert fera connaître aux parties ses premières conclusions dans un pré-rapport, leur impartira un délai pour formuler dires et observations qu'il annexera à ses réponses avec son rapport définitif ;

- dire que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et suivants du code de procédure civile, en particulier, il pourra recueillir les déclarations de toute personne informée et s'adjoindre tout spécialiste de son choix pris sur la liste des experts près ce tribunal ;

- dire qu'en cas de difficulté, l'expert saisira le président qui aura ordonné l'expertise ou le juge désigné par lui ;

- rejeter toute demande de condamnation pécuniaire dirigée à leur égard ;

- condamner M. [X] et Mme [D] à leur payer la somme de 2.000,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [X] et Mme [D] aux entiers dépens.

M. [P] et Mme [B] soutiennent notamment que :

- le relevé cadastral témoigne de ce que les époux [X] sont les propriétaires de l'allée litigieuse, ce qu'ils reconnaissent eux-mêmes aux termes de leurs écritures, en rappelant que M. [P] et Mme [B] bénéficient d'une servitude de passage sur leur parcelle, servitude de passage qui figure bien dans leur acte de propriété ;

- les consorts [X] reconnaissent avoir effectué des travaux sur leur parcelle, travaux qui sont à l'origine des dégradations, notamment pour faciliter le passage des véhicules ;

- le premier juge, pour écarter la mesure d'expertise, a retenu que M. [P] et Mme [B] ne démontraient pas l'importance des dégâts, alors que précisément l'objet de la mesure d'expertise sollicitée est bien d'évaluer l'ampleur de ces dégradations ; en outre, la production du rapport d'expertise amiable fondait leur demande d'expertise ;

- il est bien demandé à l'expert de décrire les désordres, ce qui revient à en démontrer l'existence ; il lui sera en outre demandé de déterminer l'origine des désordres ; le fait que les époux [X] s'opposent à tout prix à l'expertise démontre tant leur mauvaise foi que la conscience de leur responsabilité dans les détériorations ;

- les époux [X] reconnaissent eux-mêmes que le chemin est dans un état déplorable en temps de pluie, ce qui corrobore les constatations établies par procès-verbal d'huissier, tous ces éléments rendant plausible l'existence d'un procès en germe ;

- les dégradations sont telles désormais qu'il devient impératif de remettre l'allée en état, ce qui caractérise l'urgence alors que par ailleurs, les mesures sollicitées ne se heurtent à aucune contestation sérieuse.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 30 mai 2022, les époux [X] demandent à la cour de :

A titre principal,

- confirmer l'ordonnance de référé rendue par le tribunal judiciaire de Meaux en tous points,

En conséquence,

- débouter M. [P] et Mme [B] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

- définir la mission de l'expert dans les termes suivants :

convoquer les parties et dans le respect du contradictoire, notamment en convoquant les propriétaires du chemin d'accès aux réunions d'expertise ;

se rendre sur les lieux, [Adresse 1]), les visiter, entendre les parties et tout sachant, se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission ;

décrire l'état du chemin d'accès et indiquer si son état résulte d'une situation anormale après la réalisation de deux chantiers de construction de maisons individuelles ;

préciser éventuellement, les travaux nécessaires à la remise en état du chemin d'accès ainsi que le coût afférent ;

à l'issue de ces constatations, dresser et déposer, sous la forme d'un pré rapport, un état descriptif et qualitatif du chemin d'accès et des éventuelles mesures de remise en état ;

de façon générale, fournir tous éléments techniques et/ou de fait, de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie, de se prononcer sur les responsabilités encourues, d'évaluer s'il y a lieu les préjudices subis, par chacune des parties, ainsi que d'apprécier toutes les éventuelles questions liées aux servitudes de passage dont elles bénéficient ;

dire que l'expert judiciaire pourra s'adjoindre tout Sapiteur de son choix ;

dire que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport final au greffe du tribunal ;

En tout état de cause,

- condamner M. [P] et Mme [B] à prendre en charge l'intégralité du montant de la consignation qui serait fixée par la décision à venir ainsi qu'à prendre en charge l'ensemble des futures demandes de consignations complémentaires et donc l'intégralité des frais finaux relatifs à l'expertise, en ce compris d'éventuels frais d'investigation,

- condamner M. [P] et Mme [B] au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [P] et Mme [B] aux entiers dépens de l'instance.

Les époux [X] soutiennent notamment que :

- un expert ne pourra pas déterminer l'origine des désordres allégués, car l'allée en question est ouverte à la circulation et tout véhicule extérieur peut y accéder ;

- le chemin a été carrossé par les époux [X] en octobre 2020 après la construction des deux maisons, ainsi la faute des époux [X] n'est pas démontrée par M. [P] et Mme [B], pas plus que le préjudice ou le lien de causalité ; en outre, l'allée est tout à fait praticable, même par temps de pluie ;

- les ornières ayant prétendument été formées par les poids lourds circulant pour les époux [X] ont été comblées par eux ; par ailleurs, M. [P] et Mme [B] sont de mauvaise foi, la construction de leur propre maison ayant elle-même nécessité le passage répété de poids lourds, en sus des travaux de réalisation de leur terrasse de mars à novembre 2021 ;

- la rédaction de la mission de l'expert, si sa désignation devait être ordonnée, devra être reformulée.

SUR CE, LA COUR

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L'article 145 suppose l'existence d'un motif légitime, c'est-à-dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui. Elle doit être pertinente et utile.

Ainsi, si le demandeur à la mesure d'instruction n'a pas à démontrer l'existence des faits qu'il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions et démontrer que le litige potentiel n'est pas manifestement voué à l'échec, la mesure devant être de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.

De plus, si la partie demanderesse dispose d'ores et déjà de moyens de preuves suffisants pour conserver ou établir la preuve des faits litigieux, la mesure d'instruction demandée est dépourvue de toute utilité et doit être rejetée.

Enfin, ni l'urgence ni l'absence de contestation sérieuse ne sont des conditions d'application de ce texte.

M. [P] et Mme [B] soutiennent qu'ils justifient d'un motif légitime à établir l'existence des désordres qu'ils invoquent et leur origine.

Il apparaît que :

- il est constant que le chemin litigieux a été re-carrossé par les époux [X] en octobre 2020, postérieurement à la construction des maisons individuelles des parties,

- les appelants produisent un rapport d'expertise dit "protection juridique" qui relève : un regard au droit de l'entrée de l'allée qui semble endommagé, une semelle à l'entrée de l'allée fissurée, le revêtement étant enfoncé et endommagé, l'allée n'est plus plane, des remblais se sont formés naturellement par le passage des engins, deux autres regards en seconde partie d'allée sont recouverts de plaques de roulages, une planche en bois est posée sur le regard et recouverte de la plaque de circulation ;

- par procès-verbal de constat du 6 novembre 2019, Me [L], huissier de justice relève, ce que les appelants qualifient eux-mêmes de "désordres": léger éclat sur la partie de devant d'une délimitation, présence d'une zone de circulation en pierres calcaires et résidus de pierres compactées avec "quelques différentiels de niveau et légères déformations", présence d'un coffret Enedis avec "défaut de verticalité prononcé et nivellement", l'allée jusqu'à la rue est relativement plane avec "quelques légères déformations", présence d'un regard carré sans dégradation puis d'un autre quelques mètres plus loin, présence d'un poteau ancien avec éclat, murets avec éclats, plusieurs fissurations verticales, peinture écaillée, deux tampons sur le trottoir avec légers écrasements, déformations de l'enrobé, au niveau du caniveau des épaufrures et éclats, et au niveau voirie, une déformation importante dans l'axe de sortie avec affaissements prononcés,

- des photographies (pièce n°13 des appelants), datées, sans que cette date ne soit vérifiable, du 13 décembre 2021 montre l'allée comportant des flaques d'eau de pluie,

- par un second constat, Me [L], huissier de justice relève le 15 décembre 2021 une plaque posée au sol, avec risque de chute, d'autres plaques sans protection, certaines avec risque d'accrochage, des traces de passage de véhicules et la présence de séries de trous, un relèvement de l'allée avec pierres ressortantes et saillantes, de larges ornières et nids de poule.

Il convient de constater que les désordres relevés, qui sont susceptibles de persister depuis la remise en état d'octobre 2020, n'apparaissent pas de nature à limiter l'usage de l'allée par les appelants, ainsi que le premier juge l'a parfaitement souligné alors que faute de pouvoir imputer aux époux [X] toutes les dégradations constatées, l'expertise ne serait pas de nature à améliorer la situation probatoire des consorts [P] [B] dans le cadre d'un éventuel procès à venir, dont la solution ne peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée.

L'ordonnance entreprise sera confirmée.

Le sort des dépens et des frais irrépétibles a été exactement tranché par le premier juge.

Les consorts [P] et [B], parties perdantes, seront condamnés aux dépens d'appel ainsi qu'à indemniser les intimés des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Rejette toute autre demande,

Condamne M. [N] [P] et Mme [E] [B] à payer à M. [U] [X] et Mme [S] [D] épouse [X] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne M. [N] [P] et Mme [E] [B] aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 21/22315
Date de la décision : 01/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-01;21.22315 ?
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