REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 12
SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT
ORDONNANCE DU 08 JUILLET 2022
(no 290 , pages)
No du répertoire général : No RG 22/00292 - No Portalis 35L7-V-B7G-CF7SY
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 Juin 2022 -Tribunal judiciaire d'Evry (Juge des Libertés et de la Détention) - RG no 22/01051
L'audience a été prise au siège de la juridiction en audience publique le 07 Juillet 2022
Décision réputée contradictoire
COMPOSITION
Madame Anne EVEILLARD, président de chambre à la cour d'appel de Paris, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,
assistée de Madame Alexandra AUBERT, greffier lors des débats et du prononcé de la décision
APPELANTE
Madame [C] [B] (Personne faisant l'objet de soins)
née le[Date naissance 1]1/2000 à [Localité 5]
demeurant [Adresse 2]
Actuellement hospitalisée au Centre hospitalier d'[Localité 4]
comparante en personne assistée de Me Nina ITZCOVITZ, avocat commis d'office au barreau de Paris,
INTIMÉ
M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER D'[Localité 4]
demeurant [Adresse 3]
non comparant, non représenté
TIERS
Madame [J] [B] [K]
demeurant [Adresse 2]
comparante, non représentée
MINISTÈRE PUBLIC
Représenté par Madame Marie-Daphné PERRIN, avocate générale
DÉCISION
Vu l'ordonnance du 21 juin 2022 rendue par le juge des libertés et de la détention d'Evry ordonnant la poursuite de la mesure d'hospitalisation complète de Mme [C] [B], suite à l'admission dont elle avait fait l'objet le 10 juin 2022 sur demande d'un tiers en urgence.
Par déclaration d'appel en date du 30 juin 2022, enregistrée au greffe le 1er juillet 2022, Mme [C] [B] a interjeté appel de cette ordonnance.
Les parties ainsi que le directeur de l'établissement ont été convoqués à l'audience du 07juillet 2022.
L'audience s'est tenue au siège de la juridiction, en audience publique.
Le conseil de Mme [C] [B] a exposé que la mère de la patiente, qui est à l'origine de la demande d'hospitalisation en a demandé la levée, qu'il existe une contamination importante de covid-19 au sein du service qui la prend en charge alors qu'elle souffre d'une embolie pulmonaire et d'obésité, facteurs de risques majeurs.
L'avocat général a requis la confirmation de la décision critiquée.
Mme [C] [B] a eu la parole en dernier.
Elle indique avoir été fragilisée par la rupture avec une amie, souligne qu'elle n'a pas d'entretien chaque jour avec le psychiatre, qu'elle n'a pas vu le docteur [F] qui a établi le certificat médical de situation. Elle précise avoir eu une fenêtre thérapeutique en mai 2022 à l'issue de laquelle son état s'est dégradé.
Elle affirme se sentir mieux grâce à un nouveau traitement, ne pas avoir d'idées suicidaires et être prête à un traitement ambulatoire.
Elle déplore ses conditions d'hospitalisation avec une fenêtre de chambre cassée la proximité avec des patients agressifs et instables, fait état d'une maladie déclenchée par manque d'hygiène en raison de l'insuffisance d'eau chaude, et de nourriture en quantité insuffisante lors des repas.
MOTIFS
Aux termes de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1o Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2o Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2o de l'article L. 3211-2-1.
Aux termes de l'article L 3211-12-1 du même code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement, n'ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de la décision par laquelle le directeur de l'établissement a prononcé son admission ou modifié la forme de la prise en charge du patient en procédant à son hospitalisation complète; que cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par le psychiatre de l'établissement ;
En cas d'appel, le premier président ou son délégataire statue dans les douze jours de sa saisine.
En application de l'article L3211-3 du code de la santé publique le juge des libertés et de la détention doit veiller à ce que les restrictions à l'exercice des libertés individuelles du patient soient adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis.
Mme [C] [B] a été admise en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète le 10 juin 2022 à la demande de sa mère. Elle avait été adressée par un psychologue aux urgences à la suite d'idées suicidaires et de multiples tentatives de suicide dans la semaine.
Le 20 juin 2022, elle manifestait toujours des idées suicidaires par défenestration, une tristesse de l'humeur et un pessimisme majeur face à l'avenir.
Devant le premier juge elle avait évolué dans la reconnaissance de sa maladie.
Il résulte du certificat médical de situation du 6 juillet 2022, que son état clinique présente une amélioration, qu'elle rapporte un amendement des idées suicidaires et une amélioration de son humeur mais que ce discours apparaît peu authentique, qu'elle indique prendre le traitement dans l‘optique d'accélérer sa sortie et il subsiste une ambivalence majeure par rapport a un suivi extérieur.
Il n'est pas précisé sur quel fondement son discours est considéré comme peu authentique.
A l'audience, elle a reconnu se sentir mieux depuis la prise du traitement prescrit et avoir conscience de sa nécessité.
Elle vit avec sa mère, présente et réactive à son état, qui a sollicité son hospitalisation, lui a rendu plusieurs fois visite et confirme la très nette amélioration de son état.
L'environnement et familial de Mme [C] [B] constitue ainsi indéniablement un facteur de protection et aucun élément ne permet de douter de la volonté affichée à l'audience de poursuivre les soins.
La mesure d'hospitalisation complète n'apparaît plus proportionnée ce jour à son état de santé mentale.
L'ordonnance déférée est donc infirmée et la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète est ordonnée.
Toutefois, étant donné que les traitements instaurés ne sont à ce jour pas équilibrés, il convient de différer l'effectivité de la mainlevée de la mesure d'hospitalisation afin de permettre la mise en place un programme de soins dans les 24 heures.
PAR CES MOTIFS
Le délégué du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement par mise à disposition au greffe,
Infirmons l'ordonnance déférée.
Ordonnons la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète de Mme [C] [B], avec effet différé de 24 heures pour la mise en place d'un programme de soins.
Laissons les dépens à la charge de l'État.
Ordonnance rendue le 08 JUILLET 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE
Une copie certifiée conforme notifiée le 08/07/2022 par mail à :
X patient à l'hôpital
ou/et par LRAR à son domicile
X avocat du patient
X directeur de l'hôpital
X tiers par LS préfet de police
avocat du préfet
tuteur / curateur par LRAR
X Parquet près la cour d'appel de Paris