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07/07/2022 | FRANCE | N°20/17668

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 07 juillet 2022, 20/17668


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 07 JUILLET 2022



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17668

N° Portalis 35L7-V-B7E-CCYHQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Novembre 2020 -TJ de PARIS (19ème chambre civile) - RG n° 19/07056



APPELANTES



Madame [L] [N] assistée de sa curatrice Madame [Z] [H]

[Adres

se 13]

[Localité 16]

née le [Date naissance 9] 1983 à [Localité 16] (60)

représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat a...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 07 JUILLET 2022

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17668

N° Portalis 35L7-V-B7E-CCYHQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Novembre 2020 -TJ de PARIS (19ème chambre civile) - RG n° 19/07056

APPELANTES

Madame [L] [N] assistée de sa curatrice Madame [Z] [H]

[Adresse 13]

[Localité 16]

née le [Date naissance 9] 1983 à [Localité 16] (60)

représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

assistée par Me Suzy DUARTE, avocat au barreau de PARIS

S.A. AXA FRANCE IARD

[Adresse 10]

[Localité 15]

représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

assistée par Me Suzy DUARTE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

SA ALLIANZ IARD

[Adresse 5]

[Localité 14]

représentée par Me Ghislain DECHEZLEPRETRE de la SELARL CABINET DECHEZLEPRETRE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1155

assistée par Me Julia CAGNAN, avocat au barreau de PARIS

SA GENERALI IARD

[Adresse 8]

[Localité 14]

représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

assistée par Me Sara FRANZINI, avocat au barreau de PARIS

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'OISE

[Adresse 7]

[Localité 16]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre, chargée du rapport et devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre assesseur.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Sophie BARDIAU, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

ARRÊT :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 17 juin 2015 à [Localité 21], Mme [L] [N], qui circulait au volant de son véhicule assuré auprès de la société Axa France IARD (la société Axa) aux termes d'un contrat comportant une clause de garantie 'sécurité du conducteur', a été victime d'un accident dans lequel étaient impliqués un véhicule conduit par M. [K] [B], assuré auprès de la société Generali IARD (la société Generali) et un poids-lourd conduit par M. [Y] [C], assuré auprès de la société Allianz IARD (la société Allianz).

Mme [N] a été grièvement blessée.

La société Axa a versé à Mme [N] des provisions à hauteur de la somme totale de 125 000 euros et a mis en place une expertise médicale amiable confiée au Docteur [T] qui a établi son rapport le 18 décembre 2017.

Par actes d'huissier de justice en date des 5 et 7 juin 2019, Mme [N], assistée de sa curatrice Mme [Z] [H], et la société Axa ont fait assigner la société Generali, la société Allianz et la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise (la CPAM) devant le tribunal de grande instance de Paris afin d'obtenir l'indemnisation des préjudices consécutifs à l'accident.

Par jugement du 20 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Paris, a :

- dit que les fautes de conduite commises par Mme [N] excluent son droit à indemnisation,

- débouté Mme [N] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa à payer à la société Generali la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa à payer à la société Allianz la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

Par acte du 4 décembre 2020, Mme [N], assistée de sa curatrice, et la société Axa ont interjeté appel de cette décision en critiquant toutes ses dispositions.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions de Mme [N], assistée de sa curatrice, et de la société Axa, notifiées le 15 juillet 2021, aux termes desquelles elles demandent à la cour, de :

Vu les dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a considéré que la faute de conduite de Mme [N] était de nature à entraîner l'exclusion de son droit à indemnisation sur le fondement de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985,

et, statuant à nouveau,

- dire que la faute commise par Mme [N] dans les circonstances de l'accident survenu le 17 juin 2015 est de nature, 'à tout le plus', à réduire d'un tiers son droit à indemnisation (soit à minima deux tiers de reliquat de droit à indemnisation),

- condamner in solidum la société Generali et la société Allianz à indemniser sous cette limitation Mme [N] de l'intégralité de ses préjudices,

- désigner tel médecin expert qu'il plaira à la cour, de préférence neurologue avec faculté de s'adjoindre tout sapiteur de son choix en particulier orthopédiste, chirurgien dentiste et ophtalmologiste, avec la mission type traumatisé crânien,

- surseoir à statuer sur le préjudice de Mme [N],

- condamner in solidum la société Generali et la société Allianz à verser à Mme [N] une provision complémentaire de 100 000 euros, à valoir sur son préjudice,

- donner acte à la société Axa qu'elle a versé à son assurée au titre de la garantie 'sécurité du conducteur' une somme de 125 000 euros, se trouvant aujourd'hui subrogée dans ses droits selon les dispositions de l'article L. 211-25 du code des assurances renvoyant à l'article 33 de la loi du 5 juillet 1985 et de l'article 29 de la même loi, et réserver son action subrogatoire à l'encontre des sociétés Allianz et Generali, vu le droit de préférence de la victime,

- condamner in solidum les intimées au versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure dont distraction au profit de la société Grappotte Benetreau en application de l'article 699 du code de procédure civile,

- déclarer le jugement commun à la CPAM.

Vu les conclusions de la société Allianz, notifiées le 15 octobre 2021, aux termes desquelles elle demande à la cour, de :

Vu la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985,

Vu les articles 699 et 700 du code de procédure civile,

à titre principal,

- confirmer le jugement déféré en toute ses dispositions et donc en ce qu'il a :

- dit que les fautes de conduite commise par Mme [N] excluent son droit à indemnisation

- débouté Mme [N] de l'ensemble de ses demandes

- débouté la société Axa de l'ensemble de ses demandes

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa à payer la somme de 1 000 euros à la société Generali au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa à payer à la société Allianz la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa aux dépens

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

y ajoutant,

- condamner Mme [N] et la société Axa à payer la somme de 8 000 euros à la société Allianz au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

à titre subsidiaire, en cas d'infirmation du jugement,

- déclarer que le droit à indemnisation de Mme [N] doit être réduit de 90 % et le fixer à 10%,

- déclarer que s'agissant d'un accident complexe impliquant deux véhicules en plus de celui conduit par Mme [N], la société Allianz ne prendra en charge qu'un 1/2 de l'indemnisation du préjudice corporel de Mme [N], soit 5 %,

- constater que la société Allianz ne s'oppose pas à la mesure d'expertise médicale sollicitée,

- désigner un médecin neurologue ou neurochirurgien pour procéder aux opérations d'expertise,

- donner au médecin expert désigné la mission figurant dans le corps des présentes conclusions,

- déclarer que les opérations d'expertise se feront aux frais avancés de Mme [N],

- déclarer satisfactoire l'offre d'indemnité provisionnelle de 500 euros, formulée par la société Allianz,

- débouter Mme [N] de toutes ses demandes, plus amples ou contraires,

- débouter Mme [N] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Vu les conclusions de la société Generali, notifiées le 27 avril 2021, aux termes desquelles elle demande à la cour, de :

Vu la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et notamment les articles 4, 29 et 33,

Vu les articles 699 et 700 du code de procédure civile,

Vu les articles R. 412-6-1 et R.413-7 du code de la route,

Vu l'article L. 211-25 du code des assurances,

à titre principal,

- déclarer recevable et bien fondée la société Generali en toutes ses demandes,

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et donc en ce qu'il a :

- dit que les fautes de conduite commise par Mme [N] excluent son droit à indemnisation

- débouté Mme [N] de l'ensemble de ses demandes

- débouté la société Axa de l'ensemble de ses demandes

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa à payer la somme de 1 000 euros à la société Generali au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa à payer à la société Allianz la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné in solidum Mme [N] et la société Axa aux dépens

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

y ajoutant,

- déclarer que Mme [N] est la seule responsable de l'accident de la circulation dont elle a été victime le 17 juin 2015,

- déclarer que MM. [B] et [C] n'ont commis aucune faute de conduite,

- déclarer que la société Axa ne dispose d'aucun recours subrogatoire légal ou conventionnel (au regard des conditions générales de son contrat) à l'encontre des sociétés Generali et Allianz,

en conséquence,

- déclarer que les sociétés Generali et Allianz doivent êtres mises hors de cause,

- déclarer que seule la société Axa devra indemniser les préjudices de son assurée Mme [N] en application de la garantie du conducteur dont elle bénéficie auprès d'elle,

- condamner solidairement et à défaut in solidum Mme [N] et la société Axa aux dépens de la procédure d'appel et à régler à la société Generali une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- déclarer que l'arrêt sera commun à la CPAM,

à titre subsidiaire, uniquement en cas d'infirmation du jugement,

- déclarer que les fautes de conduite de Mme [N] sont de nature à limiter son droit à indemnisation de 80 %, soit un droit à indemnisation résiduel de 20 %,

- déclarer qu'en l'absence de faute commise par MM. [B] et [C], les 20% d'indemnisation mis à leur charge se répartiront entre les assureurs à part égale, soit :

- 10 % à la charge de la société Generali

- 10 % à la charge de la société Allianz,

- déclarer que la société Axa devra prendre en charge les 80 % d'indemnisation restant, en application de la garantie du conducteur dont Mme [N] bénéficie auprès d'elle,

- constater que la société Generali ne s'oppose pas à la mise en place d'une expertise judiciaire, laquelle devra être confiée à un médecin spécialisé en neurologie,

- déclarer qu'il sera fait application de la mission spécifique pour les traumatisés crânien publiée par l'AREDOC,

- déclarer que l'expert devra transmettre aux parties un pré-rapport en leur impartissant un délai suffisant pour lui envoyer leurs dires, qui ne sera pas inférieur à 1 mois auxquels il devra ensuite répondre tout en les annexant à son rapport définitif,

- déclarer que les frais de consignation sur honoraires de l'expert devront nécessairement être laissés à la charge de Mme [N], qui devra en faire l'avance,

- limiter à 25 000 euros la provision qui sera le cas échéant versée à Mme [N], dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert judiciaire, laquelle sera par ailleurs répartie entre les assureurs tenus à indemnisation de la manière suivante :

- 10% à la charge de la société Generali, soit 2 500 euros

- 10% à la charge de la société Allianz, soit 2 500 euros

- 80% à la charge de la société Axa, soit 25 000 euros,

- déclarer qu'au regard des conditions générales du contrat garantie du conducteur applicable, la société Axa ne disposera d'aucun recours subrogatoire conventionnel à l'encontre de MM. [B] et [C] puisque ceux-ci ne sont pas 'responsables' de l'accident mais seulement impliqués dans celui-ci,

- déclarer de ce fait que la société Axa ne dispose d'aucun recours à l'encontre de leurs assureurs respectifs,

- débouter en conséquence la société Axa de toutes ses demandes, à l'encontre des sociétés Generali et Allianz,

- limiter à 1 000 euros la somme qui sera le cas échéant alloué à Mme [N] au titre de ses frais irrépétibles, laquelle sera répartie de la manière suivante :

- par la société Generali (10%) : 100 euros

- par la société Allianz (10%) : 100 euros

- pour la société Axa (80%) : 800 euros,

- déclarer que la prise en charge des dépens de Mme [N] sera également répartie de la manière suivante :

- 10% à la charge de la société Generali

- 10% à la charge de la société Allianz

- 80 % à la charge de la société Axa,

à titre infiniment subsidiaire,

- déclarer en application des articles 29 et 33 de la loi du 5 juillet 1985, que le recours subrogatoire de la société Axa, si retenu comme recevable dans son principe, est totalement prématuré en l'absence de fixation à ce jour du préjudice définitif de Mme [N] et des créances définitives des tiers payeurs,

- débouter en conséquence la société Axa de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre des sociétés Generali et Allianz.

La CPAM, à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 29 janvier 2021, par acte d'huissier de justice remis personne habilitée, n'a pas constitué avocat.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le droit à indemnisation

Le tribunal a retenu que l'enquête de police et le rapport de M. [F], expert en accidentologie désigné dans le cadre de cette enquête démontraient, indépendamment du fait de savoir si elle téléphonait au moment des faits, que Mme [N] avait commis plusieurs fautes de conduite caractérisées qui étaient la cause unique et certaine de l'accident, à savoir un défaut total de maîtrise de son véhicule dû à une inattention aux conditions de la circulation et une vitesse inadaptée eu égard à celles-ci, à l'approche d'une intersection et en présence d'un véhicule qui la précédait et s'apprêtait à tourner régulièrement sur sa gauche.

Mme [N] et la société Axa contestent que Mme [N] ait utilisé son téléphone lorsque l'accident s'est produit ; elles relèvent que la circonstance que ce téléphone ait été retrouvé sous le siège de Mme [N] est sans incidence et que l'étude des données enregistrées par le téléphone et de celles résultant de l'examen du chronotachygraphe du poids-lourd confirment que Mme [N] n'utilisait pas son téléphone ; elles précisent qu'en toute hypothèse l'utilisation du téléphone ne constituerait pas en elle-même une faute en lien avec l'accident.

Elles ajoutent que l'expert désigné dans le cadre de l'enquête pénale, M. [F], a estimé que Mme [N] roulait à une vitesse de 90 km/h, ce qui était la vitesse limite autorisée.

Mme [N] et la société Axa reconnaissent que Mme [N] a fait preuve d'inattention en omettant de réagir à temps à la vue du véhicule la précédant qui était arrêté pour tourner à gauche mais estiment que ce simple défaut de maîtrise ne peut conduire qu'à une limitation modérée de son droit à indemnisation.

La société Generali et la société Allianz rappellent que le juge doit apprécier la faute de la victime indépendamment du comportement de l'autre conducteur ; la société Allianz ajoute que le juge n'a pas à rechercher si cette faute a été la cause exclusive de l'accident.

Ces assureurs soutiennent que l'accident s'est produit en raison de l'inattention de Mme [N], de son absence de freinage et de son défaut de maîtrise, qui suffisent à exclure tout droit à indemnisation à son au profit.

Elles précisent que Mme [N] n'a pas adapté sa vitesse aux conditions de la circulation, même si au moment même de l'accident elle ne dépassait pas la vitesse maximale autorisée, ainsi elle arrivait à vive allure, ce que confirme la violence du choc, aux abords d'une intersection, alors qu'elle aurait dû la minorer compte-tenu de la présence d'un véhicule la précédant.

Elles avancent que Mme [N] a été inattentive au signal du véhicule situé devant elle qui avait mis son clignotant pour tourner à gauche, qu'elle n'a tenté ni freinage ni arrêt en dehors de la chaussée à droite dans son sens de circulation, mais s'est déportée sur la gauche à l'inverse de son sens de circulation après avoir franchi la ligne continue où cinq autres véhicules arrivaient, de sorte que cette manoeuvre totalement inadaptée ne peut être considérée comme une manoeuvre d'évitement.

Elles affirment que Mme [N] qui a émis un appel avec son téléphone à 11 h pour une durée de 45 secondes l'utilisait au moment de l'accident, ce qui est démontré selon elles par l'étude des données enregistrées, par le fait que ce téléphone a été retrouvé sous le siège de Mme [N], par les déclarations de M. [C] selon lesquelles il a vu la conductrice relever la tête et donner un coup de volant et par l'absence de toute trace de freinage.

***

Sur ce, en vertu de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, d'application autonome, le conducteur victime d'un accident de la circulation est indemnisé des dommages qu'il a subis sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice qui a pour effet de limiter ou d'exclure son indemnisation et qui doit s'apprécier en faisant abstraction du comportement du conducteur de l'autre véhicule impliqué, ce dont il résulte que le juge n'a pas à rechercher si cette faute a été la cause exclusive de l'accident.

En l'espèce, il ressort du procès-verbal de gendarmerie, que l'accident s'est produit le 17 juin 2010 vers 11h10mn, hors agglomération, alors que les conditions météorologiques étaient bonnes, au niveau de l'intersection formée par la route départementale 938, bidirectionnelle à deux voies, et la route départementale 55.

Le véhicule que conduisait Mme [N] a heurté en premier lieu le véhicule Renault Kangoo conduit par M. [B] et assuré auprès de la société Generali, s'est déporté sur la gauche, a franchi la ligne continue séparative des voies et est venu percuter le poids-lourd que conduisait M. [C] et qui était assuré auprès de la société Allianz.

Les collisions du véhicule que conduisait Mme [N] avec le véhicule Renault Kangoo puis le poids-lourd se sont succédées dans un enchaînement continu et dans un même laps de temps et constituent ainsi un seul et même accident.

M. [B] a déclaré qu'il circulait sur la route départementale (RD) 938 hors agglomération de [Localité 21] en direction de [Localité 20], qu'arrivé à l'intersection permettant d'aller à [Localité 20], il s'était arrêté, que cinq véhicules arrivaient en face, qu'il avait vu dans son rétroviseur qu'un véhicule arrivait qui était sur le point de le doubler, qu'il avait enclenché la première vitesse pour aller tout droit, mais que ce véhicule l'avait percuté à l'arrière gauche le projetant vers l'avant, qu'au même moment un camion arrivait dans l'autre sens et avait percuté le véhicule.

Lors d'une seconde audition M. [B] a déclaré que la voiture arrivait à vive allure.

M. [C], a indiqué que vers 11h10 alors qu'il circulait sur le RD 938 et était presque arrivé à [Localité 21] il avait vu qu'un véhicule de type Partner ou Berlingo venant en sens inverse était arrêté pour tourner sur sa gauche, qu'il avait mis son clignotant et attendait qu'il passe, lorsqu'un autre véhicule était arrivé assez vite derrière lui, avait commencé à se déporter sur la gauche mais avait percuté l'arrière gauche du véhicule qui était arrêté et était venu s'encastrer sur l'avant de son poids-lourd.

Réentendu par les gendarmes M [C] a précisé 'j'ai vu la conductrice de la Peugeot surprise de voir le véhicule Kangoo à l'arrêt. Je l'ai vue donner un coup de volant pour éviter le Kangoo...', puis 'J'ai vu le conducteur du véhicule blanc, une femme, relever la tête et donner un coup de volant sur la gauche...' ; il a spécifié qu'avant l'accident il était en phase de ralentissement pour préparer son entrée en agglomération et que lorsqu'il avait vu le véhicule blanc 'venir' sur lui il avait donné un coup de frein ; en réponse à une question il a indiqué qu'il ne pouvait dire si la conductrice tenait un objet à la main.

L'analyse du chronotachygraphe du poids-lourd a établi que ce dernier circulait à 11h08mn09 s à 84 km/h et qu'il s'était immobilisé à 11h08mn17s.

L'étude des données enregistrées par le téléphone de Mme [N] a démontré que Mme [N] a utilisé son téléphone pour passer un appel à 10h52 mn18s, durant 22 secondes et pour consulter son répondeur à 11h04mn08s durant 45 secondes.

M. [F], expert en accidentologie, désigné dans le cadre de l'enquête pénale, après avoir pris connaissance des premiers documents de la procédure pénale, s'est rendu sur les lieux de l'accident et a examiné les véhicules impliqués ; il a noté qu'aucune trace de freinage de la voiture Peugeot conduite par Mme [N] n'avait été relevée et que celle-ci roulait à 90 km/h au moment du choc (aiguille du compteur bloquée sur 90) ; il a conclu que l'accident a eu pour origine le manque d'attention de Mme [N] qui était occupée à manipuler son téléphone portable, qu'elle n'avait pas vu le véhicule Renault Kangoo qui était arrêté avec son clignotant en fonctionnement pour tourner à gauche, et qu'elle n'avait pas tenté de freiner, ce qui de toute façon aurait été insuffisant pour éviter de percuter ce véhicule, eu égard à sa vitesse.

Les données qui précèdent démontrent que Mme [N] qui circulait à la limite maximale de la vitesse autorisée à l'approche d'une intersection et alors qu'un véhicule la précédant était arrêté pour tourner à gauche, qui n'a pas ralenti et n'a vu ce véhicule qu'au dernier moment de sorte qu'elle n'était plus en mesure de freiner efficacement, n'a donc pas adapté sa vitesse et a omis de rester attentive à ces conditions de la circulation, contrairement aux prescriptions des articles R. 413-17 et R. 412-6 du code de la route.

En outre, il résulte de l'examen des données d'enregistrement du téléphone de Mme [N] et de celles du chronotachygraphe du poids-lourd de M. [C], précisées ci-avant, compte tenu du laps de temps nécessairement écoulé entre les deux chocs qui doit être pris en compte, des déclarations de M. [C] selon lesquelles Mme [N] a relevé la tête en arrivant sur le véhicule de M. [U] et de la circonstance que le téléphone de Mme [N] a été retrouvé sous son siège, des indices graves précis et concordants permettant d'établir qu'immédiatement avant de percuter le véhicule de M. [B] Mme [N] consultait le répondeur de son téléphone et qu'elle a ainsi contrevenu à l'article R. 412-6-1 du code de la route interdisant l'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation.

Cette faute qui a empêché Mme [N] de voir à temps le véhicule arrêté de M. [B] est en lien direct et certain avec son préjudice.

En revanche, il ne peut être reproché à Mme [N] d'avoir franchi la ligne continue séparant les voies de circulation alors qu'elle ne l'a fait qu'à la suite d'un réflexe l'ayant amenée à tourner son volant sur la gauche pour éviter de percuter le véhicule de M. [B].

Les fautes précitées commises par Mme [N], eu égard à leur gravité, ne doivent pas exclure tout droit à indemnisation à son profit mais le réduire dans une proportion qu'il convient de fixer à 60 %.

Mme [N] doit donc être indemnisée de son préjudice corporel consécutif à l'accident à hauteur de 40 % et cette indemnisation pèse sur la société Generali et la société Allianz assureurs des véhicules impliqués dans l'accident, qui ne peuvent en conséquence être mis hors de cause.

Sur l'expertise et la provision

Il résulte du rapport du médecin légiste le Docteur [G] désigné dans le cadre de l'enquête pénale, des conclusions du rapport d'expertise officieux en date du 17 septembre 2018 du Docteur [T], désigné à la requête de la société Axa, et du rapport de stage en unité d'évaluation, de réentraînement et d'orientation sociale et professionnelle (UEROS) de Mme [N] que celle-ci a subi notamment un traumatisme cérébral avec hématome mésencéphalique et conserve des troubles cognitifs, de sorte que la mesure d'expertise sollicitée est justifiée et doit être ordonnée selon la mission définie au dispositif de la présente décision et qu'il convient de d'allouer à Mme [N] une provision de 100 000 euros à valoir sur son indemnisation.

Aucune faute n'étant établie ni même invoquée à l'encontre de M. [B] et de M. [C], la charge finale de cette provision sera répartie par parts égales entre la société Allianz et la société Generali.

Sur les demandes de la société Axa

La société Axa demande à la cour de condamner la société Allianz et la société Generali à lui rembourser la provision de 125 000 euros qu'elle a versée à son assurée, Mme [N] en exécution du contrat d'assurance les liant prévoyant une garantie 'sécurité du conducteur' en faisant valoir qu'elle est subrogée dans les droits de son assurée conformément à l'article L. 211-25 du code des assurances et des conditions générales du contrat qui prévoient expressément ce recours en page 26.

Elle estime que la société Generali opère une confusion entre action récursoire et recours subrogatoire et que les conditions générales du contrat ne comportent aucune confusion entre la notion de 'responsable' et la référence aux personnes tenues à réparation mentionnée à l'article L. 211-25 du code des assurances.

Elle ajoute que son recours est intégral et indépendant de la question de l'éventuelle faute des conducteurs des autres véhicules impliqués et que si elle a remboursé le préjudice matériel de M. [B] assuré auprès de la société Generali cela n'a aucune incidence sur le droit à indemnisation de Mme [N] dont elle n'a jamais implicitement reconnu l'exclusion du droit à indemnisation.

La société Generali soutient qu'en application de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 la société Axa ne dispose d'aucun recours à son encontre puisque le droit à indemnisation de son assuré, Mme [N], doit être exclu, ce que cet assureur, a, selon elle reconnu en acceptant de rembourser la totalité du préjudice matériel de M. [B], son assuré.

Elle précise qu'en page 26 et 38 des conditions générales du contrat liant la société Axa et Mme [N] il est indiqué que l'indemnité versée par la société Axa constitue un 'règlement définitif lorsque la responsabilité du conducteur assuré est totalement engagée...', que la notion de responsable, d'ailleurs non définie dans le contrat, est distincte de celle de personne tenue à réparation visée à l'article L. 211-25 du code des assurances et ne peut lui être étendue, et qu'ainsi en l'absence de toute faute prouvée de M. [B] et de M. [C], assuré auprès de la société Allianz, la société Axa ne dispose d'aucun recours à leur encontre.

La société Allianz indique que si la société Axa est fondée à exercer un recours subrogatoire à l'encontre des autres assureurs des véhicules impliqués, elle peut se voir opposer par ceux-ci tous les moyens de défense qu'ils pourraient opposer à la victime directe, Mme [N] et que le droit à indemnisation de celle-ci doit être exclu.

***

Sur ce, la circonstance que la société Axa ait remboursé à la société Generali l'indemnité que celle-ci a versée à son assuré, M. [B], au titre de la garantie 'responsabilité civile' dont bénéficiait Mme [N] ne peut être considérée comme une quelconque reconnaissance de l'exclusion du droit à indemnisation de Mme [N] et de la renonciation à exercer un recours subrogatoire contre les assureurs des autres véhicules impliqués.

Il est acquis aux débats que la société Axa a versé à Mme [N] au titre de la 'garantie conducteur' du contrat d'assurance automobile obligatoire les liant une provision de 125 000 euros.

Les conditions générales du contrat d'assurance conclu entre Mme [N] et la société Axa stipulent en page 26 d'une part, que l'indemnité versée résultant de la garantie dans la limite du plafond de garantie constitue une avance sur indemnisation lorsqu'un recours s'avère possible en totalité ou partiellement et d'autre part, ce qui figure également en pas 38, qu'en application de l'article 211-25 du code des assurances 'l'assureur est substitué pour chacun des chefs de préjudice réparés, dans les droits et actions des personnes indemnisées contre tout responsable de l'accident, à concurrence du montant des sommes payées par lui'.

Selon l'article L. 211-25 du code des assurances 'Lorsqu'il est prévu par contrat, le recours subrogatoire de l'assureur qui a versé à la victime une avance sur indemnité du fait de l'accident peut être exercé contre l'assureur de la personne tenue à réparation dans la limite du solde subsistant après paiements aux tiers visés à l'article 29 de la même loi du 5 juillet 1985...'.

Il résulte des données qui précèdent que nonobstant la formulation maladroite des clauses figurant en page 26 et 38 des conditions générales du contrat d'assurance, qui en rappelant les dispositions de l'article L. 211-25 du code des assurances, visent un recours contre tout 'responsable' de l'accident, la société Axa dispose, en vertu de ce contrat d'assurance la liant à Mme [N] et des dispositions de l'article L. 211-25 du code des assurances d'un recours subrogatoire contre la société Allianz et la société Generali pour obtenir le remboursement de l'avance sur indemnité qu'elle a versée à son assurée.

L'étendue de ce recours portera sur le solde subsistant après paiement aux tiers payeurs de l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, et ne pourra ainsi être déterminé que dans le cadre de la liquidation du préjudice corporel de Mme [N].

Sur les demandes accessoires

Il n'y a pas lieu de déclarer l'arrêt opposable à la CPAM qui est en la cause.

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être infirmées.

La société Allianz et la société Generali qui succombent supporteront la charge des dépens de première instance avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

Les dépens et frais irrépétibles d'appel doivent être réservés.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe,

- Infirme le jugement,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Condamne in solidum la société Allianz IARD et la société Generali IARD à indemniser Mme [L] [N] de son préjudice corporel consécutif à l'accident du 15 juin 2015 à hauteur de 40 %,

- Condamne in solidum la société Allianz IARD et la société Generali IARD à payer à Mme [L] [N] une provision de 100 000 euros à valoir sur son indemnisation,

- Dit que dans leurs rapports entre elles la charge de cette provision incombera par parts égales à la société Allianz IARD et la société Generali IARD,

- Dit que la société Axa France IARD dispose d'un recours subrogatoire contre la société Allianz IARD et la société Generali IARD pour la provision de 125 000 euros qu'elle a versée à Mme [L] [N],

- Dit que ce recours fondé sur l'article L. 211-25 du code des assurances portera sur le solde subsistant après paiement aux tiers payeurs de l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, et que son étendue ne pourra être déterminée que dans le cadre de la liquidation du préjudice corporel de Mme [L] [N],

Avant dire-droit sur le préjudice corporel de Mme [L] [N],

- Ordonne une expertise médicale,

Commet pour y procéder

Le Docteur [O] [D]

Département de Neurologie- [Adresse 12]

Hôpital de [18]-[Adresse 12]

[Localité 14]

Port. : [XXXXXXXX04]

Email : [Courriel 19]

à défaut

Le Docteur [I] [A]

Hôpital [22] Service Neurophysiologie clinique

[Adresse 6]

[Localité 14]

Tél : [XXXXXXXX02]

Fax : [XXXXXXXX01]

Port. : [XXXXXXXX03]

Email : [Courriel 17]

Avec pour mission de :

- Se faire communiquer par les parties ou leurs conseils :

. les renseignements d'identité de la victime

. tous les éléments relatifs aux circonstances tant factuelles que psychologiques et affectives de l'accident,

. tous les documents médicaux relatifs à l'accident, depuis les constatations des secours d'urgence jusqu'aux derniers bilans pratiqués (y compris bilans neuro-psychologiques)

. tous les éléments relatifs au mode de vie du blessé, antérieur à l'accident :

* degré d'autonomie fonctionnelle et intellectuelle par rapports aux actes élémentaires et élaborés de la vie quotidienne,

* conditions d'exercice des activités professionnelles,

* niveau d'études pour un étudiant,

* statut exact et / ou formation s'il s'agit d'un demandeur d'emploi et carrière professionnelle antérieure à l'acquisition de ce statut,

* activités familiales et sociales s'il s'agit d'une personne restant au foyer sans activité professionnelle rémunérée,

. tous les éléments relatifs au mode de vie du blessé contemporain de l'expertise (degré d'autonomie, statut professionnel..., lieu habituel de vie...),

- Après recueil de l'avis des parties, déduire de ces éléments d'information, le lieu ou les lieux, de l'expertise et prendre toutes les dispositions pour sa réalisation en présence d'un membre de l'entourage ou à défaut du représentant légal,

- Recueillir de façon précise, au besoin séparément, les déclarations de la victime et du membre de son entourage,

. sur le mode de vie antérieure à l'accident,

. sur la description des circonstances de l'accident,

. sur les doléances actuelles en interrogeant sur les conditions d'apparition des douleurs et de la gêne fonctionnelle, sur leur importance et sur leurs conséquences sur les actes élémentaires et élaborés de la vie quotidienne,

- Après discussion contradictoire en cas de divergence entre les déclarations ainsi recueillies et les documents produits,

. indiquer précisément le mode de vie du blessé antérieur à l'accident retenu pour déterminer l'incidence séquellaire :

* degré d'autonomie, d'insertion sociale et / ou professionnelle pour un adulte ;

* degré d'autonomie en rapport avec l'âge, niveau d'apprentissage scolaire, soutien pédagogique ... pour un enfant ou un adolescent ;

. restituer le cas échéant, l'accident dans son contexte psycho-affectif, puis,

. avec retranscription intégrale du certificat médical initial, et totale ou partielle du ou des autres éléments médicaux permettant de connaître les principales étapes de l'évolution, décrire de façon la plus précise que possible les lésions initiales, les modalités du ou des traitements, les durées d'hospitalisation (périodes, nature, nom de l'établissement, service concerné), les divers retours à domicile (dates et modalités), la nature et la durée des autres soins et traitements prescrits imputables à l'accident,

. décrire précisément le déroulement et les modalités des 24 heures quotidiennes de la vie de la victime, au moment de l'expertise, et ce, sur une semaine, en cas d'alternance de vie entre structure spécialisée et domicile,

- Procéder à un examen clinique détaillé permettant :

. de décrire les déficits neuro-moteurs, sensoriels, orthopédiques et leur répercussion sur les actes et gestes de la vie quotidienne,

. d'analyser en détail les troubles des fonctions intellectuelles, affectives et du comportement, et leur incidence

* sur les facultés de gestion de la vie et d'insertion ou de réinsertion socio-économique,

L'évaluation neuro-psychologique est indispensable :

* Un examen neuro-psychologique récent appréciant les fonctions intellectuelles et du comportement doit être réalisé,

- Après avoir décrit un éventuel état antérieur physique ou psychique, pouvant avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles, rechercher si cet état antérieur était révélé et traité avant l'accident (préciser les périodes, la nature et l'importance des déficits et des traitements antérieurs). Pour déterminer cet état antérieur chez l'enfant, il convient de :

* différencier les difficultés d'apprentissage et de comportement.

* décrire comment ces troubles antérieurs ont été pris en charge : type de rééducation, type de soutien scolaire, autre type de soutien, type de scolarité, en précisant bien la chronologie.

Analyser, dans une discussion précise et synthétique, l'imputabilité aux lésions consécutives à l'accident des séquelles invoquées en se prononçant sur les lésions initiales, leur évolution, l'état séquellaire et la relation directe et certaine de ces séquelles aux lésions causées par l'accident en précisant :

- si l'éventuel état antérieur ci-dessus défini aurait évolué de façon identique en l'absence d'accident

- si l'accident a eu un effet déclenchant d'une décompensation

- ou s'il a entraîné une aggravation de l'évolution normalement prévisible en l'absence de ce traumatisme. Dans ce cas, donner tous éléments permettant de dégager une proportion d'aggravation et préciser si l'évaluation médico-légale des séquelles est faite avant ou après application de cette proportion.

- Évaluer les séquelles aux fins de :

. fixer la durée du déficit fonctionnel temporaire et du déficit fonctionnel temporaire partiel qui a pour objet d'indemniser l'invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique,

. fixer la date de consolidation en établissant que les différents bilans et examens pratiqués prouvent la stagnation de la récupération des séquelles neurologiques et neuro-psychologiques,

. fixer le taux du déficit fonctionnel imputable à l'accident résultant de l'atteinte permanente d'une ou plusieurs fonctions persistant au moment de la consolidation.

Préciser, en outre le taux de déficit fonctionnel actuel résultant à la fois de l'accident et d'un éventuel état antérieur,

. en cas de vie à domicile, se prononcer sur la nécessité pour le blessé d'être assisté par une tierce personne avant et après consolidation (cette évaluation ne devant pas être réduite en cas d'assistance familiale), nécessaire pour pallier l'impossibilité ou la difficulté d'effectuer les actes élémentaires mais aussi les actes élaborés de la vie quotidienne, et les conséquences des séquelles neuro-psychologiques quand elles sont à l'origine d'un déficit majeur d'initiative et / ou de troubles du comportement.

Dans l'affirmative, préciser si cette tierce personne doit, ou non, être spécialisée, ses attributions exactes ainsi que les durées respectives d'intervention de l'assistant spécialisé et de l'assistant non spécialisé. Donner à cet égard toutes précisions utiles.

Se prononcer, le cas échéant, sur les modalités des aides techniques,

. se prononcer sur l'aménagement éventuel du logement,

. après s'être entouré, au besoin, d'avis spécialisés, dire :

* si la victime est ou sera capable de poursuivre, dans les mêmes conditions, son activité professionnelle antérieure à l'accident

* dans la négative, ou à défaut d'activité professionnelle antérieure à l'accident, si elle est ou sera capable d'exercer une activité professionnelle. Dans ce cas, en préciser les conditions d'exercice et les éventuelles restrictions ou contre-indications,

. dire si les frais médicaux, pharmaceutiques, para-médicaux, d'hospitalisation, d'appareillage et de transports postérieurs à la consolidation directement imputables à l'accident sont actuellement prévisibles et certains. Dans l'affirmative préciser lesquels et pour l'appareillage, le véhicule automobile et son aménagement, préciser la fréquence de leur renouvellement et leur surcoût,

. décrire les souffrances physiques et psychiques endurées du fait des blessures subies et les évaluer sur l'échelle habituelle de 7 degrés,

. décrire la nature et l'importance des dommages esthétique provisoire et permanent et les évaluer sur l'échelle habituelle de 7 degrés,

. indiquer s'il existe ou existera un préjudice sexuel, de procréation, d'établissement,

. décrire le préjudice d'agrément, qui vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

- Établir un récapitulatif de l'évaluation de l'ensemble des postes énumérés dans la mission,

Dit que Mme [L] [N] devra consigner auprès du Régisseur d'avances et de recettes de la cour d'appel de PARIS - [Adresse 11] - avant le 20 septembre 2022, une somme de 1 500 euros à valoir sur les frais et honoraires de l'Expert,

Dit que faute d'une telle consignation dans ledit délai, la mission de l'expert deviendra caduque,

Dit que l'expert :

- sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile,

- devra indiquer au greffe de la chambre, dans le délai d'un mois à compter de la réception de la copie de la présente décision s'il accepte sa mission,

- adressera par lettre recommandée avec avis de réception un pré-rapport aux avocats des parties, lesquels disposeront d'un délai de cinq semaines à compter du jour de la réception de ce pré-rapport, pour faire valoir auprès de l'expert, sous formes de dires, leurs questions et observations,

- répondra de manière précise et circonstanciée à ces dires qui devront être annexés au rapport définitif qui sera établi à l'issue de ce délai de cinq semaines et dans lequel devra figurer impérativement

* le nom des personnes convoquées aux opérations d'expertise en précisant pour chacune d'elle la date d'envoi de la convocation la concernant et la forme de cette convocation

* le nom des personnes présentes à chacune des réunions d'expertise

* la date de chacune des réunions tenues

* la liste exhaustive de toutes les pièces par lui consultées

* les déclarations des tiers éventuellement entendus par lui, en mentionnant leur identité complète, leur qualité et leur lien éventuel avec les parties

* le cas échéant, l'identité du technicien don't il s'est adjoint le concours, ainsi que les constatations et avis de celui-ci (lesquels devront également figurer dans le pré-rapport)

* les dates d'envoi à chacun des avocats du pré-rapport puis du rapport définitif,

Dit que l'expert déposera son rapport définitif au greffe de la chambre et en enverra un exemplaire à l'avocat de chacune des parties avant le 12 janvier 2023, délai de rigueur, sauf prorogation expresse accordée par le magistrat chargé du contrôle des expertises,

Dit qu'en application de l'article 282 du même code, le dépôt par l'expert de son rapport sera accompagné de sa demande de rémunération, dont il adressera un exemplaire aux parties par tout moyen permettant d'en établir la réception,

Dit que, s'il y a lieu, les parties adresseront à l'expert et à la juridiction ou, le cas échéant, au magistrat chargé du contrôle des mesures d'instruction, leurs observations écrites sur cette demande dans un délai de quinze jours à compter de sa réception,

- Condamne in solidum la société Allianz IARD et la société Generali Iard aux dépens de première instance qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- Réserve les dépens et frais irrépétible d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 20/17668
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;20.17668 ?
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