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06/07/2022 | FRANCE | N°19/05717

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 06 juillet 2022, 19/05717


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 06 JUILLET 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05717 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B75O6



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Mars 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F14/11493



APPELANT



Monsieur [R] [D]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté

par Me Frédéric INGOLD, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055



INTIMEE



UGIP ASSURANCES anciennement dénommée SOLOGNE FINANCES

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par ...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 06 JUILLET 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05717 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B75O6

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Mars 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F14/11493

APPELANT

Monsieur [R] [D]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Frédéric INGOLD, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

INTIMEE

UGIP ASSURANCES anciennement dénommée SOLOGNE FINANCES

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Harold BERRIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1423

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Anne-Ga'l BLANC, conseillère, pour président empêché et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [R] [D] a été embauché à compter du 1er janvier 2009 par la société Conseil Européen de Courtage, en qualité de responsable développement outre-mer, catégorie technicien supérieur d'encadrement.

Il occupait en dernier lieu les fonctions de responsable développement régional sur l'ensemble du territoire métropolitain, statut cadre.

Le contrat a été transéféré le 1er avril 2012 à la société Sologne Finances actuellement dénommée UGIP Assurances.

Par lettre du 30 avril 2014 remise en main propre, il a été notifié au salarié sa convocation à un entretien préalable en vue de son licenciement et sa mise à pied conservatoire.

La rupture pour faute lourde lui a été notifiée par courrier du 21 mai 2014, pour exercice d'une activité concurrente, transmission illicite d'informations confidentielles à des tiers et mise en remboursement de frais professionnels ne relevant pas de ses missions.

M. [R] [D] a saisi le conseil des prud'hommes de Paris le 10 septembre 2014 en contestation du licenciement et subséquemment en paiement de diverses sommes.

La défenderesse s'est opposée à ces prétentions et a sollicité reconventionnellement la condamnation du salarié à lui payer la somme de 238.055 euros de dommages-intérêts pour perte de marge brute et 10.000 euros de dommages-intérêts pour préjudice moral, outre celle de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 26 mars 2019, les parties ont été déboutées de leurs demandes respectives.

Appel a été interjeté par le salarié.

Par conclusions remises via le réseau privé virtuel des avocats le 10 mai 2022, M. [R] [D] prie la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté l'ensemble de ses prétentions et sollicite la condamnation de la société UGIP Assurances à lui payer les sommes suivantes :

- 101.016 euros net de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 16.837,75 euros d'indemnité de préavis ;

- 1.683,75 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 9.317,63 euros net d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 3.935,74 euros brut de rappel de salaire sur mise à pied et sur congés payés y afférents ;

- 3.800 euros net à titre d'indemnisation forfaitaire de ses frais professionnels ;

- avec intérêts au taux légal à compter de la mise à pied disciplinaire ou en tout cas depuis la saisine du conseil des prud'hommes de Paris, s'agissant des créances salariales, ou du jugement à intervenir s'agissant des créances indemnitaires ;

- 50.000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive et dilatoire ;

- 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises via le réseau privé virtuel des avocats le 28 octobre 2019, l'intimée sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [R] [D] de toutes ses demandes et son infirmation en ce qu'il a rejeté les siennes. Il demande la condamnation du salarié à lui verser les sommes suivantes :

- 238.055 euros à titre de dommages-intérêts pour perte de la marge brute subie par la

société Sologne Finances du fait des agissements du salarié ;

-10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral subi par la société

Sologne Finances ;

- 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- avec mise des dépens à sa charge.

Par conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 9 mai 2022, M. [R] [D] a demandé à la cour de révoquer l'ordonnance de clôture et d'ordonner le sursis à statuer dans l'attente des décisions définitives à intervenir à la suite de la tierce opposition formée contre le jugement du tribunal de commerce de Paris le 7 mars 2018, et de l'appel interjeté par lui contre le jugement du tribunal de commerce de Versailles le 11 mai 2021, grâce à une ordonnance le relevant de sa forclusion. Il fait valoir que le jugement du tribunal de commerce du 7 mars 2018 l'a qualifié de dirigeant de fait de la société Concept Azur attraite en justice par la société SAS Sologne Finances notamment pour concurrence déloyale, ce que son adversaire revendique dans le présent litige. Il allègue aussi que le jugement du tribunal de commerce du 11 mai 2021 est de nature à influencer la cour sur l'importance du préjudice allégué par l'employeur.

Par conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 22 mai 2022, la société UGIP Assurances s'est opposée à cette demande et a sollicité l'allocation de la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Pour plus ample exposé sur le litige, la cour se réfère aux conclusions des parties en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Par jugement du 7 mars 2018 rendu dans une affaire opposant la SAS Sologne Finances, demanderesse, et la société Conseil Assur Partner non comparante, le tribunal de commerce de Paris :

- a dit que la société Conseil Assur Partner s'est rendue complice de la violation des obligations de non concurrence et de confidentialité liant M. [D] à la SAS Sologne Finances ;

- a dit que la société Conseil Assur Partner a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la SAS Sologne Finances ;

- a dit que la SAS Conseil Assur Partner à payer à la SAS Sologne Finances la somme de 238.055 euros en réparation du préjudice causé par les agissements de concurrence déloyale commis par la société Conseil Assur Partner ;

- a condamné la société Conseil Assur Partner à payer à la SAS Sologne Finances la somme de 16.190 euros au titre du coût de recrutement d'un responsable du développement régional en remplacement de M. [D], la somme de 1.250,03 euros au titre des frais exposés et la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La juridiction a notamment relevé dans ses motifs que :

- M. [D] a transmis des informations sur la clientèle, sur les conditions contractuelles, sur les produits de la SAS Sologne Finances à la société Conseil Assur Partner en violation des obligations contractuelles de non concurrence et de confidentialité ;

- M. [D] est l'actionnaire majoritaire de la société Conseil Assur Partner avec 60 % des actions, face à deux actionnaires minoritaires et a joué le rôle de dirigeant de fait.

Par jugement du 11 mai 2021 rendu dans le litige opposant la SELARL Mars, prise en qualité de liquidateur de la société Conseil Assur Partner, demanderesse, et M. [R] [D], non comparant, le tribunal de commerce a dit que M. [R] [D] a la qualité de gérant de fait de la société Conseil Assur Partner et l'a condamné à payer la somme de 235.000 euros à la SELARL Mars, és qualité, pour être affectée à l'apurement de l'insuffisance d'actif de la société Conseil Assur Partner, ainsi que la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La juridiction, après avoir rappelé la condamnation précitée prononcée par jugement du 7 mars 2018, fonde sa décision sur les fautes commises par le salarié : il était manifestement le premier instigateur du détournement de clientèle opéré au bénéfice de la société Conseil Assur Partner dont il était le principal actionnaire ; il a permis avec la complicité du dirigeant de droit de la société Conseil Assur Partner de capter la clientèle de la SAS Sologne Finances. Le tribunal de commerce juge que les dirigeants de la société Conseil Assur Partner ont réalisé des actes de concurrence déloyale qui ont très largement contribué à l'insuffisance d'actif et que ces actes traduisent une incompétence notoire an matière de gestion et une incurie ou de la malhonnêteté qui ont mis l'entreprise qu'il dirigeait dans une situation qui ne pouvait que lui porter gravement préjudice.

A l'appui de la demande de sursis à statuer, M. [R] [D] fait valoir que ces deux décisions qui lui sont défavorables ont fait l'objet d'évolutions procédurales postérieures à l'ordonnance de clôture rendue le 14 décembre 2021, en ce sens que le jugement du 7 mars 2018 a donné lieu à une assignation en tierce opposition de la part du salarié et que le jugement du 11 mai 2021 a été frappé d'appel par le salarié à la suite d'un relevé de forclusion par la cour d'appel de Versailles.

La société UGIP Assurances invoque en premier lieu pour s'opposer au sursis à statuer, l'absence de cause grave de nature à justifier la révocation de la clôture, en ce que, d'une part, M. [R] [D] disposait depuis plusieurs année des éléments pour diligenter une tierce opposition contre le jugement du 7 mars 2018 et, d'autre part, il a disposé de plusieurs mois, pour exercer un recours avant la clôture.

Aux termes du premier alinéa de l'article 803 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

Il ressort de la communication de pièces intervenue dans le présent litige que le jugement du 7 mars 2018 a été porté à la connaissance de M. [R] [D] le 20 décembre 2018. Toutefois la portée de ce jugement au regard des intérêts de celui-ci n'a été révélée pleinement qu'à travers le jugement du 11 mai 2021, qui fixe les montants des condamnations prononcées contre l'intéressé comme dirigeant de fait de la société Conseil Assur Partner, compte tenu de la condamnation prononcée par le premier jugement contre la société Conseil Assur Partner elle-même.

M. [R] [D] a assigné le 4 novembre 2021 en référé la SELARL Mars, ès qualité, en relevé de forclusion pour peut interjeter appel, sans qu'il apparaisse qu'il ait agi avec retard. L'ordonnance de référé du 6 janvier 2022 portant relevé de forclusion a été rendue après l'ordonnance de clôture.

Il a sollicité la révocation de la clôture par conclusions d'incident du 9 mai 2022.

Il ne pouvait agir que postérieurement à la clôture compte tenu de la date de l'ordonnance de relevé de forclusion et aucun retard par rapport à la date de la clôture ne peut être opposé au salarié.

L'évolution de ces deux procédures commerciales constitue une cause grave de nature à justifier la révocation de la clôture.

En second lieu, la société UGIP Assurances soulève l'irrecevabilité de la demande de sursis à statuer pour n'avoir pas été soulevée avant toute défense au fond comme le prescrivent les articles 73, 74 alinéa 1er et 110 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 73 du code de procédure civile, constitue une exception de procédure, tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours.

Aux termes de l'article 74 du code de procédure civile les exceptions doivent à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non recevoir.

Il en résulte que les exceptions dilatoires doivent être soulevées simultanément ou avant toute défense au fond, au fur et à mesure de l'apparition des faits qui justifient la demande et apparus antérieurement aux conclusions par lesquelles elles sont soulevées antérieurement à une défense au fond et une fin de non recevoir.

En l'espèce, c'est à partir de la connaissance du jugement du 11 mai 2021, que la nécessité d'obtenir un relevé de forclusion du délai d'appel contre cette décision et de faire tierce opposition contre celui du 20 décembre 2018 sont apparues et que donc la demande de sursis à statuer était envisageable.

Les dernières conclusions de l'appelant avant celles remises le 10 mai 2022 par le réseau privé virtuel des avocats ont été remises le 6 décembre 2021, soit avant l'ordonnance de relevé de forclusion du 6 janvier 2022 nécessaire à la demande de sursis à statuer.

En conséquence, la demande de sursis à statuer est recevable.

Enfin la société UGIP Assurances invoque l'article 6.1 de la convention européenne des droits de l'homme aux termes duquel toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, alors que la saisine du conseil des prud'hommes remonte au 10 septembre 2014, soit à plus de huit années.

Compte tenu de l'ancienneté de la procédure et de l'absence d'autorité de chose jugée des jugements litigieux dans la présente affaire, puisque aucun des deux n'oppose les mêmes parties que celle-ci, il n'y a pas lieu à prononcer un sursis à statuer.

Il est équitable de rejeter la demande de la société UGIP Assurances au titre des frais irrépétibles en l'état de la procédure.

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;

Ordonne la révocation de la clôture ;

Rejette la demande de sursis à statuer ;

Dit que la société UGIP Assurances répondra en tant que de besoin aux conclusions de M. [R] [D] avant le 26 octobre 2022 ;

Dit que la clôture sera prononcée le 28 février 2023 ;

Renvoie l'affaire à l'audience du 28 mars 2023 à 13 heures 30 - salle Louise HANON ;

Rejette la demande de la société UGIP Assurances au titre des frais irrépétibles ;

Réserve les dépens.

LA GREFFI'RE POUR LE PR''SIDENT EMP'CH'',

LA CONSEILL'RE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/05717
Date de la décision : 06/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-06;19.05717 ?
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