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30/06/2022 | FRANCE | N°21/214617

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 30 juin 2022, 21/214617


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/21461 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEZPP

Décision déférée à la cour :
jugement du 30 novembre 2021-juge de l'exécution de BOBIGNY-RG no 21/07337

APPELANT

Monsieur [U] [L]
[Adresse 2]
[Localité 1]

représenté par Me Houcine BARDI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1674>
INTIMÉE

Madame [Y] [E]
[Adresse 3]
[Localité 4]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des art...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/21461 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEZPP

Décision déférée à la cour :
jugement du 30 novembre 2021-juge de l'exécution de BOBIGNY-RG no 21/07337

APPELANT

Monsieur [U] [L]
[Adresse 2]
[Localité 1]

représenté par Me Houcine BARDI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1674

INTIMÉE

Madame [Y] [E]
[Adresse 3]
[Localité 4]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Bénédicte PRUVOST, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Monsieur Benoît DEVIGNOT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-défaut
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier, présent lors de la mise à disposition.

Par acte sous-seing privé du 15 mai 2009, M. [U] [L] a donné à bail à Mme [Y] [E] un logement situé [Adresse 3].

Par jugement du 22 novembre 2019, le tribunal d'instance de Saint-Ouen a notamment :

– dit que Mme [E] occupe les lieux sans droit ni titre depuis le 25 mai 2018, date d'effet d'un congé pour reprendre délivré le 26 octobre 2017, et autorisé M. [L] à l'en faire expulser, ainsi que tous occupants de son chef ;
– condamne Mme [E] a payer à M. [L] la somme de 21 707,05 euros au titre de l'arrie re des loyers, charges et indemnite s dus au mois d'octobre 2019 inclus,
– condamne Mme [E] a payer au bailleur une indemnite mensuelle d'occupation e gale au montant du loyer majore des charges, et ce jusqu'a libe ration effective des lieux.

Par acte d'huissier du 30 juin 2021, M. [L] a fait délivrer un commandement de quitter les lieux à Mme [E].

Par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 28 juillet 2021, Mme [E] a saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bobigny afin que lui soit accordé un délai de 36 mois pour quitter les lieux.

Par jugement du 30 novembre 2021, le juge de l'exécution a :
- accordé à Mme [E], ainsi qu'a tout occupant de son chef, un de lai de 8 mois, soit jusqu'au 30 juillet 2022 inclus pour se maintenir dans les lieux,
- dit que Mme [E], et tout occupant de son chef, devra quitter les lieux le 30 juillet 2022 au plus tard, faute de quoi la proce dure d'expulsion, suspendue pendant ce de lai, pourra e tre reprise,
- rejeté la demande de M. [L] au titre de ses frais irre pe tibles,
- laissé a Mme [E] la charge des de pens.

Par déclaration du 7 décembre 2021, M. [L] a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions du 31 janvier 2022, il demande à la cour de :
- re former inte gralement les dispositions du jugement entrepris ;
- dire et juger que la dette locative s'élève a la somme de 41.532,05 euros (de compte arre te au mois de fe vrier 2022) ;
- dire et juger que Mme [E] a de ja be ne ficie d'un long de lai de fait,
- dire et juger que le bailleur ne doit pas supporter les conse quences des rapports chaotiques de Mme [E] avec les services sociaux ;
- dire et juger que les conditions d'octroi de de lais n'e taient pas remplies au jour de l'examen de l'affaire par le juge de l'exe cution ;
- re former le jugement attaque en ce qu'il a accorde des de lais supple mentaires a l'intime e ;
- re former le jugement attaque en ce qu'il a autorise l'intime e a se maintenir dans les lieux sans paiement d'une indemnite d'occupation ;
- autoriser le bailleur a reprendre la proce dure d'expulsion ;
- condamner Mme [E] au paiement de la somme de 41.532,05 euros, au titre des loyers impaye s et de l'indemnite d'occupation y compris pour la pe riode conse cutive au jugement rendu par le juge de l'exe cution,
- constater la re alite du lien de filiation, selon le droit musulman, entre lui et Mme [D] [I] ;
- condamner Mme [E] au paiement d'une indemnite de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de proce dure civile ainsi qu'aux entiers de pens.

Au soutien de son appel, il fait valoir que Mme [E] n'a effectué que des paiements partiels et aucun durant la période de mai à octobre 2019 et qu'au mois de novembre 2019, elle avait accumulé une dette locative s'élevant à 21.707,05 euros ; qu'au mois de février 2022, cette dette atteint la somme de 41.532,05 euros ; qu'il doit seul supporter l'occupation gratuite de son appartement, privilège que même un bailleur social n'accorderait jamais ; qu'il a prévu, au titre de son devoir filial, d'installer sa mère adoptive, Mme [L] [X], dans l'appartement occupé par Mme [E], lui-même étant médecin et sa s?ur ne pouvant plus s'en occuper.

Par actes d'huissier des 12 et 31 janvier 2022, remis tous deux en l'étude d'huissier, la déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été régulièrement signifiées à Mme [E]. Celle-ci n'a pas constitué avocat.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler que les chefs de dispositif des conclusions tendant à voir « dire et juger que » ou « constater que » ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 954 du code de procédure civile, sur lesquelles il y a lieu de statuer.

Aux termes de l'article L. 412-3 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution du lieu de situation de l'immeuble peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou à usage professionnel, dont l'expulsion aura été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales, sans que lesdits occupants aient à justifier d'un titre à l'origine de l'occupation.

L'article L. 412-4 du même code précise que la durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.

Il appartient donc au juge de respecter un juste équilibre entre deux revendications contraires, en veillant à ce que l'atteinte au droit du propriétaire soit proportionnée et justifiée par la sauvegarde des droits de l'occupant, dès lors que ces derniers apparaissent légitimes.

C'est ainsi que, par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge a motivé sa décision en tenant compte d'une part de ce que Mme [E] justifiait avoir à son domicile et à sa charge trois enfants, dont un en bas âge et deux, âgés de 13 et 8 ans, scolarisés sur la commune d'[Localité 4], avoir effectué plusieurs démarches de relogement bien réelles même si elles n'avaient pas abouti, de ce que la Sauvegarde 93, désignée pour assurer la mission d'aide à la gestion du budget familial, attestait que les loyers étaient réglés certes partiellement mais régulièrement depuis novembre 2019 (à hauteur de 190 euros par mois), d'autre part de ce que M. [L], dont les déclarations sur le montant de la dette locative étaient contredites par celles de la Sauvegarde 93, ne justifiait pas d'une urgence particulière à récupérer le logement pour y installer un proche. Compte tenu de ces éléments, de l'âge des enfants et de leur scolarisation pour certains dans le quartier, il a accordé à Mme [E] un délai de 8 mois, expirant le 30 juillet 2022, pour quitter les lieux, effectuer l'ensemble des démarches administratives nécessaires et pourvoir à son relogement. Et, eu égard à la contradiction existant entre le décompte locatif du bailleur et le document de la Sauvegarde 93, il a estimé que les délais accordés ne seraient pas conditionnés par le paiement mensuel de l'indemnité d'occupation, ce qui ne signifie nullement, contrairement à ce que soutient l'appelant, que Mme [E] a ainsi été dispensée du versement de celle-ci, mais simplement que l'octroi des délais était indépendant du versement de l'indemnité d'occupation.

Dans les motifs de ses conclusions, M. [L], qui entend démontrer que la dette locative s'élève, au mois de février 2022, à la somme de 41.532,05 euros, demande à la cour de condamner Mme [E] au paiement de cette somme. Mais d'une part, dans le dispositif de ses conclusions qui, seul, saisit la cour conformément aux dispositions de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, il ne reproduit pas cette demande en paiement. D'autre part, la cour, statuant avec les pouvoirs du juge de l'exécution, ne peut délivrer de titre exécutoire hors les cas prévus par la loi et, par conséquent, prononcer de condamnation à paiement de la dette locative. Enfin et surtout, au titre de la dette constituée des indemnités d'occupations exigibles jusqu'à libération des lieux, M. [L] dispose d'ores et déjà d'un titre exécutoire, qui est le jugement du 22 novembre 2019.

Ensuite, M. [L] s'attache à démontrer le lien de parenté et l'affection l'unissant, selon la « kafala » de droit musulman, à Mme [X] [L], en faveur de laquelle il a obtenu la validation du congé pour reprise par jugement du 22 novembre 2019. Mais il y a lieu de rappeler que la cour d'appel, statuant avec les pouvoirs du juge de l'exécution, ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, en l'occurrence le jugement du 22 novembre 2019, qui a validé le congé pour reprise délivré par M. [L] à Mme [E], de sorte qu'il n'y a pas lieu de revenir sur son bien fondé, celui-ci étant définitivement acquis à M. [L]. Mais, en octroyant à Mme [E] un délai de 8 mois pour quitter les lieux, le premier juge n'a pas remis en cause le lien de parenté entre le bailleur et sa mère selon la kafala de droit musulman. Il a seulement souligné que M. [L] ne justifiait pas de l'urgence particulière qu'il y avait à récupérer sans délai le logement en vue de l'y installer.

Quoi qu'il en soit, la cour relève que le présent appel, pourtant traité selon les dispositions de la procédure à bref délai de l'article 905 du code de procédure civile, est pratiquement dépourvu d'intérêt dès lors que le présent arrêt d'appel intervient peu avant l'expiration du délai octroyé par le premier juge et qu'il restera à M. [L] à le faire signifier.

Il résulte de ce qui précède que, les moyens élevés par l'appelant s'étant avérés inopérants, le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions.

Par suite, l'appelant devra supporter les dépens et sera débouté de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Et y ajoutant,

Déboute M. [U] [L] de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [U] [L] aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/214617
Date de la décision : 30/06/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-30;21.214617 ?
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