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30/06/2022 | FRANCE | N°21/19921

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 30 juin 2022, 21/19921


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 30 JUIN 2022



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19921 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVPN



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 Octobre 2021 -Président du TJ de CRETEIL - RG n° 21/00924





APPELANTE



S.A. GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES ET EMPLOYES DE L'ETAT ET DES S

ERVICES PUBLICS (GMF), agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 1]

[Adresse 1]



Re...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 30 JUIN 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19921 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVPN

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 Octobre 2021 -Président du TJ de CRETEIL - RG n° 21/00924

APPELANTE

S.A. GARANTIE MUTUELLE DES FONCTIONNAIRES ET EMPLOYES DE L'ETAT ET DES SERVICES PUBLICS (GMF), agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Patrice ITTAH de la SCP LETU ITTAH ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0120

Assistée par Me Servane MEYNIARD, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

Mme [F] [M] née [N]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Alain CROS, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 182

Assistée par Me Medhi KEDDER, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE

S.A. AXA FRANCE IARD en qualité d'assureur responsabilité décennale de Monsieur [W] [I],

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assistée par Me GREAU Olivia, substituant Me RODAS Sylvie, avocats au barreau de PARIS

Société MAF - MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Eric ALLERIT de la SELEURL TBA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Assistée par Me Jean-Marc ALBERT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 mai 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Michèle CHOPIN, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

M. et Mme [M] ont acquis par vente en l'état futur d'achèvement un pavillon type Gentiane 2 de deux niveaux et six pièces principales à [Localité 5].

Ils ont constaté l'apparition d'une fissure verticale à tendance oblique en façade arrière du garage.

Le 13 décembre 1995, les époux [M] ont dénoncé par lettre recommandée avec accusé de réception l'aggravation de la fissure auprès de la société GMF.

Les 18 mars et 3 avril 1996, un arrêté de constatation d'état de catastrophe naturelle sur cette zone était pris et mentionnait: " des mouvements de terrains différentiels de novembre 1993 à décembre 1995 consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols".

Le 27 octobre 1996, les époux [M] ont effectué une déclaration de sinistre auprès de leur assureur multirisques habitation, la GMF.

Le 8 juillet 1997, un second arrêté de catastrophe naturelle était pris, mentionnant "des mouvements de terrains différentiels de janvier 1996 à décembre 1996 conséquence de la sécheresse et de la réhydratation des sols".

Par ordonnance du 8 janvier 1998, le juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil a désigné en qualité d'expert M. [C], remplacé ultérieurement par M. [B], assisté lui-même en qualité de sapiteur par M. [T].

M. [B] a déposé son rapport le 3 avril 2002, estimant que les causes du sinistre sont les suivantes :

- un mouvement des deux ailes du bâtiment, le garage et le pavillon n'étant pas à la même hauteur,

- l'absence de chaînage horizontal entre la maison et le garage.

Il validait une reprise en sous oeuvre ponctuelle sous le garage évaluée à la somme de 58.382, 64 euros.

En dernier lieu, Mme [M] était seule propriétaire du bien, selon partage après divorce.

Le 16 mars 2012, Mme [M] a fait appel à M. [W] [I], exerçant sous l'enseigne ETCC afin de mettre en oeuvre les travaux réparatoires validés par l'expert dans son rapport.

Dès le mois de septembre 2012, Mme [M] a signalé à la société GMF l'aggravation des désordres.

Un nouvel arrêté de catastrophe naturelle a été pris en juillet 2012.

Par ordonnance du 13 octobre 2014, le juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil a désigné en qualité d'expert M. [K].

Par ordonnances en date des 13 septembre 2016, 26 janvier 2017, 27 septembre 2017 et 24 février 2020, le tribunal judiciaire de Créteil a rendu communes les opérations d'expertise au SDC des demeures du Vallon de Villiers, la société Axa France Iard, M. [I] et son assureur Axa, M. [B], M. [T], M. [L] et la Maf.

Les opérations d'expertise sont toujours en cours et l'expert sollicite la réalisation d'une étude des sols, le montant du préfinancement complémentaire restant étant estimé à la somme de 57.931,11 euros TTC.

Par exploit du 24 juin 2021, Mme [M] a fait assigner les sociétés Axa France Iard, MAF et GMF devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil aux fins de voir condamner celles-ci in solidum au paiement de la somme provisionnelle de 57.931,11 euros.

Par ordonnance contradictoire du 21 octobre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil a :

- condamné in solidum les sociétés Axa France Iard, GMF et MAF à payer à Mme [M] la somme provisionnelle de 57.931,11 euros ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à référé sur les autres demandes ;

- réservé les dépens.

Par déclaration du 17 novembre 2021, la société GMF a relevé appel de cette décision.

Par déclaration du 29 novembre 2021, la société MAF a relevé appel de cette décision.

Par ordonnance du 29 mars 2022, les deux procédures ont fait l'objet d'une jonction et se sont poursuivies sous le n° 21/19921.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 20 janvier 2022, la société GMF demande à la cour de :

- la recevoir en son appel ;

- la recevoir en ses conclusions et les dire bien fondées ;

Y faisant droit,

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé rendue le 21 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Créteil ;

Statuant à nouveau,

- juger qu'il existe une contestation sérieuse quant à la demande de provision de Mme [M] ;

En conséquence,

- débouter Mme [M] de sa demande provisionnelle tel que formulé à son encontre ;

- débouter Mme [M] de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre ;

A titre subsidiaire,

- condamner in solidum Axa France Iard et la Mutuelle des Architectes de France à garantir la GMF de toutes condamnations pouvant être prononcées à son encontre ;

En tout état de cause,

- débouter Axa France Iard et la Mutuelle des Architectes français de l'ensemble de leurs demandes dirigées à son encontre ;

- condamner Mme [M] à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [M] aux entiers dépens.

La société GMF soutient en substance que :

- une contestation sérieuse s'oppose au paiement d'une provision à Mme [M] puisque l'octroi d'une provision suppose le constat préalable par le juge de l'existence d'une obligation non sérieusement contestable au titre de laquelle la provision est demandée ;

- l'expert s'est montré particulièrement peu précis et n'a pas indiqué à quelle catastrophe naturelle l'aggravation des désordres serait imputable ;

- l'assurance habitation ne trouve donc pas à s'appliquer lorsque les dégâts sont dus à l'inadéquation de la construction avec la nature du sol ;

- le juge des référés a donc outrepassé ses compétences en statuant sur le fond ;

- sur la somme allouée à Mme [M] par le juge des référés, 25.080,00 euros correspondent à des frais d'investigations et d'analyses sans qu'aucun devis ni élément justificatif n'ait été produit ;

- si la cour venait à confirmer la décision entreprise et à condamner la société GMF au versement d'une provision, elle sera garantie par les sociétés Axa France Iard et MAF.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 04 janvier 2022, la société MAF demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance de référé du 21 octobre 2021 rendue par le président du tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'elle a condamné in solidum la société Axa France Iard, la GMF et la MAF à payer à Mme [M] la somme provisionnelle de 57.931,11 euros ;

Statuant à nouveau,

- débouter Mme [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions dirigées à l'encontre de la Mutuelle des Architectes Français ;

A titre subsidiaire,

- condamner la société Axa France Iard et la GMF à relever et garantir la Mutuelle des Architectes français de toute éventuelle condamnation ;

- condamner tout succombant à verser à la Mutuelle des Architectes Français la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Allerit, membre de la la société Bernard-Allerit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société MAF soutient en substance que :

- l'existence de l'obligation, au titre de l'article 835 du code de procédure civile, est sérieusement contestable ;

- le juge des référés a prononcé une condamnation in solidum tout en considérant que les responsabilités des entreprises n'étaient pas, au stade de l'expertise, définitivement établies ;

- la mission d'expertise confiée à M. [B] était circonscrite à la seule partie garage et ne concernait pas le pavillon dans son ensemble ;

- en laissant s'écouler plus de dix ans sans rien faire après le dépôt du rapport de M. [B] et en demandant à l'entreprise [I] de ne réaliser qu'une partie des travaux, les époux [M] ont concouru à la réalisation de leur propre préjudice ;

- il n'existe aucun lien de causalité entre l'intervention de M. [B] et les désordres ;

- seule une faute et un lien de causalité avec le préjudice résultant des désordres, pourrait engager sa responsabilité, ce qui n'est pas le cas ;

- la demande formée par Mme [M] à l'encontre de la société MAF, devant le juge des référés était prescrite.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 18 janvier 2022, Mme [M] demande à la cour, au visa de l'article 835 du code de procédure civile, de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

En conséquence,

- débouter la société GMF de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- débouter la société MAF de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Y ajoutant,

- condamner in solidum les sociétés GMF et la MAF à payer à Mme [M] la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

- les condamner aux entiers dépens d'appel.

Mme [M] soutient en substance que :

- elle a déjà exposé la somme de 20.000 euros et est dans l'impossibilité de financer la poursuite des opérations d'expertise ;

- les assureurs ont concouru grandement à l'alourdissement des frais d'expertise pour couvrir leur responsabilité ;

- les arguments de la société GMF ne sont pas de nature à constituer une contestation sérieuse et permettre l'infirmation de l'ordonnance entreprise ;

- en soutenant que les juges des référés avait fait droit à la demande de provision ad litem tout en considérant dans le même temps que le principe de la responsabilité des défenderesses n'était pas définitivement établi, la société GMF a fait une lecture tronquée de la décision ;

- en soutenant que M. [B] n'aurait pas commis de faute et qu'il n'existerait aucun lien de causalité entre les désordres et son intervention, et en affirmant que la mission de son assuré était limitée aux désordres affectant la seule partie du garage, la société MAF a confondu le désordre et sa cause ;

- l'argument avancé par la société MAF sur la prescription quinquennale ne saurait prospérer, celle-ci ayant été assigné par référé-provision le 21 juin 2021, soit dans le délai de cinq ans.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 06 janvier 2022, la société Axa France Iard demande à la cour de :

- réformer l'ordonnance de référé rendue le 21 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Créteil, en ce qu'elle a condamné in solidum celle-ci , la société GMF et la société MAF à payer à Mme [M] la somme provisionnelle de 57.931,11 euros ;

Statuant à nouveau,

- rejeter les demandes formées par Mme [M] à son encontre et en particulier, sa réclamation visant à obtenir la condamnation de la concluante, in solidum avec les deux autres parties défenderesses, à lui verser une somme de 57.931,11 euros ;

- subsidiairement, sans aucune reconnaissance de sa part d'une éventuelle responsabilité de M. [I] exerçant sous l'enseigne Etcc, ni aucune reconnaissance de garantie, mais au contraire sous les plus expresses réserves quant à l'application de la police souscrite auprès d'elle, limiter, en tout état de cause, le montant susceptible d'être mis à sa charge au 1/3 du montant réclamé par Mme [M], soit la somme de 19.310,67 euros dont la concluante s'est déjà acquittée ;

- condamner in solidum les sociétés GMF et MAF à la relever et à la garantir de toutes condamnations qui serait prononcées à son encontre au profit de Mme [M], à tout le moins dans la proportion des 2/3 de la somme provisionnelle qui serait accordée à cette dernière ;

Yajoutant,

- débouter les sociétés GMF et MAF de toutes demandes et appels en garantie dirigées à l'encontre de la concluante ;

- condamner tout succombant à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les sociétés GMF et MAF aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Grappotte Benetreau, avocat aux offres de droit.

La société Axa France Iard soutient en substance que :

- Mme [M] a cherché par le biais d'une demande de provision ad litem, à obtenir des fonds lui permettant de régler directement le montant de la consignation complémentaire de 57.931,11 euros que le magistrat avait mis intégralement à sa charge ;

- la société Axa France Iard n'est pas opposée au principe d'une prise en charge d'une partie de ces frais d'expertise, mais à la condition qu'ils soient toutefois partagés à parts égales avec les autres compagnies d'assurances mises en cause dans cette affaire ;

- la société GMF est l'assureur multirisque habitation et protection juridique de Mme [M] ;

- les garanties de la société MAF ont vocation à être mobilisées à plus d'un titre, en particulier en sa qualité d'assureur de M. [B] dont la responsabilité est susceptible d'être mise en cause.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

L'article 835 du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le juge des référés, saisi sur ce fondement, a le pouvoir d'allouer toute provision, y compris une provision ad litem, dès lors qu'elle est fondée sur une obligation non sérieusement contestable. La provision ad litem peut comprendre les frais de consignation d'expertise ou ceux taxés après réalisation de celle-ci sans concurrence des pouvoirs propres du juge chargé du contrôle des expertises.

Par ailleurs, l'existence d'une contestation sérieuse sur l'obligation à garantie de l'assureur peut faire obstacle à l'octroi d'une provision en référé.

Il apparait en l'espèce que :

- pour mémoire, la société GMF intervient en l'espèce en qualité d'assureur multirisques habitation et protection juridique de Mme [M], la société MAF en qualité d'assureur de M. [B], expert initial, et la société Axa France Iard en qualité d'assureur de M. [I],

- par courrier du 31 mars 2021, M. [K], expert, a demandé au juge chargé du contrôle des expertises une consignation complémentaire de 57.931, 11 euros TTC afin de poursuivre les opérations et sollicité son règlement aux frais avancés des compagnies d'assurances "pour le compte de qui il appartiendra",

- par ordonnance rendue le 13 avril 2021, le juge chargé du contrôle des expertises a fait droit à cette demande et mis à la charge de Mme [M] la consignation complémentaire demandée,

- la demande formée aujourd'hui par Mme [M] d'obtenir condamnation de ses adversaires à lui payer une somme de 57.931, 11 euros n'a pas pour objet de voir statuer sur le montant de la consignation à payer ni sur la partie à la charge de laquelle elle incombe au début et au cours des opérations d'expertise mais d'obtenir une condamnation de ses adversaires à lui payer, une provision sur son préjudice résultant en l'occurrence des sommes avancées pour le paiement des frais de l'expertise,

- le bien-fondé de cette demande de provision afférente aux frais d'expertise, suppose que des obligations qui ne soient pas sérieusement contestable, seul le juge du fond pouvant en revanche statuer, au vu du rapport d'expertise, des moyens et des pièces des parties, et se prononcer subsidiairement sur la responsabilité de chacun, au regard des désordres constatés et de leur origine,

- ainsi que l'a justement observé le premier juge, il ressort des différentes notes aux parties rédigées par l'expert que la cause première et primordiale des sinistres proviendrait de mouvements des sols et qu'il resterait à déterminer les travaux à engager à titre réparatoire,

- précisément, l'expert indique dans sa lettre du 31 mars 2021 à l'attention du juge chargé du contrôle des expertises que "le rallongement très conséquent des opérations d'expertise tient aussi à une difficulté d'obtenir les préfinancements d'investigations, indispensables à la finalisation des opérations techniques "

- il précise encore : "le rapport technique établi par M. [J], géotechnicien permet d'ores et déjà d'indiquer une technicité importante des dispositions à prendre, concernant la remise en état du pavillon. En effet, les travaux à envisager relèvent des prescriptions formulées par le plan de prévention des risques de mouvements de terrains différentiels de la ville de [Localité 5]. L'appréciation des paramètres à prendre en compte pour se conformer (à ces prescriptions) conduit à des conséquences financières non négligeables en matière d'études, concernant la nécessité d'analyse des sols ainsi que de compléments de missions de contrôle technique, adapté à l'interprétation des caractéristiques des sols ; les prescriptions en découlant pour l'élaboration des travaux de remise en état à envisager",

- il s'en déduit que l'expert estime à ce stade que les manifestations des désordres et leur évolution relèvent "d'une problématique d'instabilité des sols",

- la société GMF conteste l'existence d'une obligation sérieuse au motif qu'elle n'est pas assureur responsabilité civile de Mme [M] mais a été assignée au titre de la garantie catastrophe naturelle, de sorte que sa garantie ne serait pas acquise,

- toutefois, la cour relève que la société GMF expose également que l'assurance habitation ne peut trouver à s'appliquer lorsque les dégâts sont dus à l'inadéquation de la construction avec la nature du sol,

- le contrat multirisques habitation produit par Mme [M] prévoit pourtant une garantie dommages aux bâtiments, en ce compris une garantie "catastrophe technologique" et une assurance responsabilité civile, alors que le contrat protection juridique vise tout litige lié aux habitations,

- dans ce contexte, avec l'évidence requise en référé, la contestation élevée par la société GMF qui dénie sa garantie n'est pas sérieuse,

- s'agissant de la MAF, assureur de M. [B], expert initial, il est reproché à ce dernier de n'avoir pas tenu compte du risque prévisible d'aggravation des désordres en cas de reprise en sous oeuvre partielle,

- en l'espèce, il résulte bien des opérations d'expertise et notamment de la note n°3 de M. [K] aux parties que ce dernier relève que "Nous considérons qu'il parait exister une contradiction entre cette donnée technique (établie par le sapiteur et indiquant la nécessité d'envisager et chiffrer la solution de mise en oeuvre de micropieux en deux phases) et son absence de prise en compte dans le cadre du rapport au titre de l'évaluation du coût des travaux nécessaires (...)il existe là encore une contradiction dans l'indication de la nécessité de devoir produire une estimation en ordre de grandeur des travaux à réaliser. Ce point nous parait d'autant plus surprenant qu'un des devis concerne le chiffrage de la mise en oeuvre de micropieux sous la partie garage (phase 1). Dans ces conditions, nous ne comprenons pas pourquoi il a été procédé à l'estimation de cette phase. Quant à ce qui concerne l'absence d'évaluation des travaux de la phase 2 dans le rapport de l'expert, ce non chiffrage nous parait là encore en contradiction avec l'indication dans la note technique du sapiteur",

- la société MAF ne peut, dans ces conditions, se retrancher derrière l'absence alléguée de faute de son assuré, cette contestation n'étant, au stade du référé, pas sérieuse,

- sur la prescription enfin, l'article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer,

- or, il apparait bien que la responsabilité de M. [B] a été évoquée par note aux parties du 20 juin 2017 de sorte que l'assignation de la société MAF par Mme [M] étant en date du 21 juin 2021, celle ci est intervenue dans le délai de cinq ans, la prescription ne pouvant par conséquent, et avec l'évidence requise en référé, constituer une contestation sérieuse,

- s'agissant de la compagnie Axa France Iard, assureur de la société [I] ETCC, l'expert indique que "l'intervention de la société spécialiste de ce type d'ouvrage connaissant le dossier ne nous parait pas compréhensible (...) Ces travaux se sont avérés ce qui était hautement prévisibles inopérants",

- la société Axa Iard indique qu'elle n'est pas opposée à la prise en charge d'une partie des frais d'expertise à condition qu'ils soient partagés à parts égales avec les autres assureurs,

- toutefois, étant précisé que l'obligation de la société Axa Iard n'est pas contestable ni contestée, il n'appartient pas au juge des référés de déterminer la part de responsabilité de chacune des parties, ni une telle répartition de la provision par parts égales,

- il sera observé que si Mme [M] a mis en cause initialement la GMF, celle ci a elle-même assigné le SDC Domaines des vallons et la société Axa France Iard, qui a quant à elle appelé aux opérations d'expertise la MAF, assureur de M. [B], de sorte que chacune des parties dispose d'un intérêt à voir les opérations d'expertises se poursuivre,

- la cour relève aussi que les sociétés appelantes ne contestent pas in fine les sommes réclamées au titre des frais de consignation complémentaire et au titre des mesures à prendre au titre des opérations d'expertise, étant précisé que, contrairement à ce que soutient la société Axa France Iard, ces sommes sont particulièrement détaillées dans la note de l'expert du 31 mars 2021,

- enfin, sur les demandes de garanties croisées des sociétés GMF, MAF et Axa France Iard, celles ci supposent de déterminer si et/ou dans quelle mesure leur responsabilité respective est encourue, ce qui ne relève pas de l'appréciation du juge des référés mais du juge du fond seul à même de caractériser les fautes commises et leur lien de causalité avec les désordres litigieux.

La cour confirmera ainsi la décision du premier juge en ce qu'elle a condamné in solidum les sociétés Axa France Iard, GMF et MAF à payer à mme [M] la somme provisionnelle de 57.931,11 euros et dit n'y avoir lieu à référé sur les autres demandes.

Le sort des frais irrépétibles a été exactement tranché par le premier juge.

Chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.

Il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance rendue, sauf en ce qu'elle a réservé les dépens,

Statuant à nouveau,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 21/19921
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;21.19921 ?
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