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30/06/2022 | FRANCE | N°21/143717

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 30 juin 2022, 21/143717


Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/14371 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEFPA

Décision déférée à la cour :
Jugement du 07 juillet 2021-juge de l'exécution de PARIS-RG no 21/80023

APPELANTES

Madame [R] [B]
[Adresse 2]
[Localité 3]

S.C.I. SUGER
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représentées par Me Raphaël

ELFASSI, avocat au barreau de PARIS, toque : D2194

INTIMÉE

S.A. ETABLISSEMENTS TAFANEL
[Adresse 1]
[Localité 4]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la ...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/14371 - No Portalis 35L7-V-B7F-CEFPA

Décision déférée à la cour :
Jugement du 07 juillet 2021-juge de l'exécution de PARIS-RG no 21/80023

APPELANTES

Madame [R] [B]
[Adresse 2]
[Localité 3]

S.C.I. SUGER
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représentées par Me Raphaël ELFASSI, avocat au barreau de PARIS, toque : D2194

INTIMÉE

S.A. ETABLISSEMENTS TAFANEL
[Adresse 1]
[Localité 4]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
Plaidant par Me Valérie MENARD du LLP WHITE AND CASE LLP, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre chargé du rapport, et Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier, présent lors de la mise à disposition.

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par jugement du 9 décembre 2015, le tribunal de commerce de Paris a condamné solidairement M. [K] [B] et Mme [M] [B], en leur qualité de cautions de la société NetS Restauration, à payer à la SA Etablissements Tafanel la somme de 67.088,72 euros, avec intérêts au taux contractuel de 3,65 % l'an à compter du 4 juin 2015, avec capitalisation des intérêts, outre une somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [B] a reçu signification de ce jugement avec commandement de payer aux fins de saisie-vente le 3 février 2016.

En exécution de ce jugement, la société Etablissements Tafanel a fait pratiquer à l'encontre de Mme [B] les mesures d'exécution suivantes :
- une saisie-vente par procès-verbal du 4 novembre 2020, suivie de la signification de la date de vente le 9 novembre 2020,
- une saisie de droits d'associé et de valeurs mobilières auprès de la SCI Suger par acte d'huissier du 16 novembre 2020, pour un montant de 88.977,72 euros,
- une saisie-attribution entre les mains de la SCI Suger par acte d'huissier du 16 novembre 2020, dénoncée à la débitrice le 18 novembre 2020.

Par trois actes d'huissier du 16 décembre 2020, Mme [B] et la SCI Suger ont fait assigner la société Etablissements Tafanel devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris aux fins de mainlevée de mesures d'exécution pour absence de titre exécutoire et, subsidiairement, d'obtention de délais de paiement.

Par jugement en date du 7 juillet 2021, le juge de l'exécution a :
- ordonné la jonction des trois affaires,
- débouté les demandeurs de l'intégralité de leurs prétentions relatives aux trois mesures d'exécution forcée,
- rejeté la demande de délai de grâce,
- condamné Mme [B] au paiement d'une indemnité de 2.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge a retenu que la signification du jugement effectuée le 3 février 2016 à domicile, par remise au compagnon de Mme [B] était valable ; que la prétendue violation des règles sanitaires, notamment le non-respect des gestes barrières, n'était pas une cause de nullité ; que, sous couvert de contestation du décompte, Mme [B] ne faisait que critiquer le jugement, ce qui ne pouvait prospérer devant le juge de l'exécution ; que le moyen tiré de la prescription biennale était inopérant, l'exécution du jugement se prescrivant par dix ans en application de l'article L.111-4 du code des procédures civiles d'exécution. Il a estimé également n'y avoir lieu à cantonnement, les montants du décompte étant pleinement justifiés en principal, intérêts et frais. S'agissant de la saisie-vente, il a jugé en outre que Mme [B] ne justifiait pas suffisamment du caractère insaisissable de certains meubles. Enfin, il a rejeté la demande de délais compte tenu de l'ancienneté de la dette.

Par déclaration du 22 juillet 2021, Mme [B] et la SCI Suger ont relevé appel de ce jugement.

Par conclusions no2 du 20 avril 2022, Mme [B] et la SCI Suger demandent à la cour d'appel de :
- déclarer leur appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions (sauf en ce qu'il a ordonné la jonction),
Statuant à nouveau,

In limine litis,
- annuler la saisie-vente en cours suivant procès-verbal de saisie-vente du 4 novembre 2020 ainsi que la signification de la date de vente des meubles saisis du 9 novembre 2020 par la SA Etablissements Tafanel,
- annuler la saisie-attribution en cours suivant procès-verbal de saisie-attribution du 16 novembre 2020 à la SCI Suger ainsi que la dénonciation du 18 novembre 2020 par la SA Etablissements Tafanel à Mme [B],
- annuler la saisie de droits d'associés et valeurs mobilières en cours suivant procès-verbal de saisie du 16 novembre 2020 à la SCI Suger ainsi que la dénonciation du 18 novembre 2020 par la SA Etablissements Tafanel à Mme [B], compte tenu de :
- l'absence de titre exécutoire faute de signification régulière du jugement rendu le 9 décembre 2015 par le tribunal de commerce réputé contradictoire dans le délai de six mois,
- l'absence d'un décompte détaillé, juste et vérifiable distinct en principal, frais et intérêts échus pour chacun des deux prêts,
- ordonner la mainlevée des saisies en cours et la restitution des meubles saisis,
A titre principal,
- déclarer insaisissables les meubles de M. [Z] [L] correspondant à un tambour ancien, à une sculpture et aux tableaux et listés dans le procès-verbal de saisie-vente,
- annuler ou à défaut réduire et cantonner considérablement le montant des sommes réclamées compte tenu des carences et de la mauvaise foi de la société Etablissements Tafanel, de la durée et du quantum des cautions, de l'absence de justification des factures liées aux dépens, du détail des comptes dû pour chaque prêt et des intérêts réclamés tardivement et qui sont trop importants,
A titre subsidiaire,
- juger que Mme [B] bénéficiera d'un délai de paiement de vingt-quatre mois afin de règlement total des sommes réclamées par la SA Etablissements Tafanel,
En tout état de cause,
- débouter la société Etablissements Tafanel de ses demandes, fins et prétentions,
- condamner la société Etablissements Tafanel à payer à Mme [B] la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 22 avril 2022, la société Etablissements Tafanel demande à la cour d'appel de :
A titre principal,
- constater que la déclaration d'appel de Mme [B] et de la SCI Suger du 22 juillet 2021 ne mentionne pas les chefs du jugement qui sont critiqués,
En conséquence,
- juger que la cour d'appel n'est pas saisie de cet appel puisque l'effet dévolutif ne s'est pas opéré,
A titre subsidiaire,
- juger Mme [B] et la SCI Suger mal fondées en leur appel,
En conséquence,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 juillet 2021,
- condamner in solidum Mme [B] et la SCI Suger au paiement d'une somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, dont distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'effet dévolutif

La société Etablissements Tafanel fait valoir que la déclaration d'appel doit comporter les mentions énumérées par l'article 901 du code de procédure civile et prescrites à peine de nullité, notamment les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et qu'en l'espèce, la déclaration d'appel ne comporte pas les chefs du jugement attaqué, étant précisé que les conclusions ne conduisent pas à solliciter l'annulation du jugement et qu'il n'y a eu aucune rectification dans le délai imparti aux appelants pour conclure. Elle conclut que l'effet dévolutif n'a pas joué, de sorte que la cour n'est pas saisie, se fondant sur la jurisprudence de la Cour de cassation, réaffirmée récemment par arrêts des 16 et 24 mars 2022.

Les appelantes estiment que ce moyen n'est pas sérieux, puisque le jugement était joint à la déclaration d'appel, ce qui permet de connaître, à la simple lecture du dispositif, les chefs du jugement critiqués puisqu'il s'agit évidemment de la quasi-intégralité du dispositif, étant précisé que l'intimé a pu conclure au fond sans difficulté. Elles font valoir que la Cour de cassation présume que la déclaration d'appel qui omet d'indiquer les chefs du jugement critiqués s'entend comme déférant à la cour d'appel l'ensemble des chefs de ce jugement, à savoir un appel total ; que selon trois avis de la Cour de cassation du 20 décembre 2017, la sanction encourue par l'acte d'appel qui ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués est une nullité de forme régularisable dans le délai imparti à l'appelant pour conclure et nécessitant la preuve d'un grief, et qu'en l'espèce, elles ont précisé les chefs de jugement critiqués dans leurs conclusions d'appelants signifiées dans le délai imparti et l'intimé n'invoque aucun grief.

L'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret du 6 mai 2017 en vigueur depuis le 1er septembre 2017, dispose :
« L'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel n'est pas limité à certains chefs, lorsqu'il tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. »

Il résulte en outre de l'article 901, 4o du même code que la déclaration d'appel doit mentionner, à peine de nullité, les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Ainsi, les chefs du jugement critiqués doivent être mentionnés expressément dans la déclaration d'appel et, lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas, étant précisé en outre que seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.

En l'espèce, la déclaration d'appel de Mme [B] et de la SCI Suger en date du 22 juillet 2021 ne mentionne aucun chef du jugement attaqué. Elle ne porte donc pas mention des chefs de jugement expressément critiqués.

Il importe peu que le jugement ait été joint à la déclaration d'appel. Il ne saurait être présumé, au regard des dispositions de l'article 562 alinéa 2 précitées, que toutes les dispositions du jugement (et encore moins « la quasi-intégralité ») étaient critiquées, alors qu'il appartenait aux appelantes d'indiquer précisément les chefs de jugement critiqués.

Par ailleurs, il résulte des demandes formulées par les appelantes dans leurs conclusions que l'appel ne tend pas à l'annulation du jugement mais à sa réformation. En outre, il est constant que l'objet du litige n'est pas indivisible.

En conséquence, l'effet dévolutif de l'appel n'a pas pu opérer, pour aucune disposition du jugement attaqué.

Enfin, c'est en vain que les appelantes font valoir que l'absence de mention des chefs du jugement critiqués dans la déclaration d'appel est sanctionnée par une nullité de forme, puisqu'en l'espèce, la société Etablissements Tafanel n'invoque pas la nullité de la déclaration d'appel mais l'absence de dévolution. Les moyens tirés du dépôt dans le délai imparti des conclusions d'appelant précisant les chefs du jugement critiqués et de l'absence de grief subi par l'intimée sont donc inopérants.

Dès lors, la cour ne peut que constater qu'elle n'est saisie d'aucune demande.

Sur les demandes accessoires

Mme [B] sera condamnée aux entiers dépens d'appel, avec distraction au profit de l'avocat de l'intimée conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il n'est pas inéquitable de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SA Etablissements Tafanel à hauteur de 1.000 euros et de condamner en conséquence Mme [B] et la SCI Suger in solidum au paiement de cette somme.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

CONSTATE que l'effet dévolutif de l'appel n'a pas opéré,

CONSTATE que la cour n'est saisie d'aucune demande,

CONDAMNE in solidum Mme [R] [B] et la SCI Suger à payer la somme de 1.000 euros à la SA Etablissements Tafanel en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum Mme [R] [B] et la SCI Suger aux entiers dépens d'appel, avec distraction au profit de Me Bruno Régnier, avocat membre de la SCP Régnier-Béquet-Moisan, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/143717
Date de la décision : 30/06/2022
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-30;21.143717 ?
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