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30/06/2022 | FRANCE | N°21/071437

France | France, Cour d'appel de Paris, B1, 30 juin 2022, 21/071437


Copies exécutoires
délivrées aux parties le RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/07143 - No Portalis 35L7-V-B7F-CDPSS

Décision déférée à la cour :
Jugement du 08 mars 2021-juge de l'exécution de PARIS-RG no 18/81385

APPELANT

Monsieur [B] [U] [W]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représenté par Me Catherine MONTPEYROUX, avocat au barreau de PARIS, toque : G0606

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 21/06784 du 14/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMÉ...

Copies exécutoires
délivrées aux parties le RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :
No RG 21/07143 - No Portalis 35L7-V-B7F-CDPSS

Décision déférée à la cour :
Jugement du 08 mars 2021-juge de l'exécution de PARIS-RG no 18/81385

APPELANT

Monsieur [B] [U] [W]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représenté par Me Catherine MONTPEYROUX, avocat au barreau de PARIS, toque : G0606
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 21/06784 du 14/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMÉE

S.A. INTRUM DEBT FINANCE AG
[Adresse 4]
[Localité 2] (SUISSE)

Représentée par Me Thierry GICQUEAU de l'ASSOCIATION GICQUEAU -VERGNE, avocat au barreau de PARIS, toque : R147

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre chargé du rapport, et Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT
-contradictoire
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier, présent lors de la mise à disposition.

Selon offre préalable du 15 juin 2001, M. [B] [U] [W] a souscrit un prêt personnel d'un montant en capital de 54.200 euros auprès de la société Sogefinancement, remboursable en 84 mensualités.

Par ordonnance du du 8 mars 2007, le juge d'instance de Paris 10ème a fait injonction à M. [U] [W] de payer à la société Sogefinancement la somme de 3634,95 euros en principal, assortie des intérêts au taux contractuel de 7,83% à compter du 24 novembre 2006, outre la somme d'un euro au titre de la clause pénale.

Cette ordonnance portant injonction de payer a été revêtue de la formule exécutoire le 17 avril 2007 et signifiée à M. [U] [W] le 23 avril 2007 avec commandement de payer.

Les 2 avril, 26 juin et 5 juillet 2007, la société Sogefinancement a successivement fait pratiquer une saisie-attribution, une saisie-vente puis une seconde saisie-attribution, toutes mesures demeurées infructueuses.

Selon bordereau de cession de créance du 17 mars 2017, la société Sogefinancement a cédé sa créance à la société de droit suisse Intrum Debt Finance AG (ci-après société Intrum), cession notifiée à M. [U] [W] par lettre simple du 2 mai 2017 et par huissier le 11 avril 2018.

Selon procès-verbal du 4 avril 2018, la société Intrum a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes bancaires de M. [U] [W] ouverts dans les livres du Crédit Mutuel. Cette saisie-attribution a été dénoncée à M. [U] [W] le 11 avril suivant.

Selon procès-verbal du 10 avril 2018, la société Intrum a fait pratiquer une seconde saisie-attribution sur le compte ouvert par M. [U] [W] dans les livres de la Banque Postale. Cette saisie a été dénoncée le 18 avril suivant.

Par acte du 18 avril 2018, M. [U] [W] a formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer ayant fondé la saisie-attribution.

Entre-temps, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris, saisi d'une contestation de la saisie-attribution du 10 avril 2018, a, par jugement du 11 juillet 2018, sursis à statuer dans l'attente du jugement du tribunal d'instance à intervenir.

Par jugement du 1er juillet 2019, le tribunal d'instance de Paris a déclaré l'opposition à injonction de payer recevable, mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer du 8 mars 2007 et, statuant à nouveau, condamné M. [U] [W] au paiement de la somme de 3634,95 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,83% à compter du 24 novembre 2006.

Par jugement du 8 mars 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris a :
- déclaré recevable la contestation de la saisie-attribution,
- en a débouté M. [U] [W],
- rejeté sa demande de délais,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [U] [W] aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a considéré que la société Intrum disposait d'un titre exécutoire valable pour pratiquer la saisie-attribution, dont il n'était pas prétendu qu'elle excédait les sommes prévues au titre exécutoire ; que compte tenu de l'ancienneté de la dette et de l'absence de tout versement significatif depuis le début de la procédure, il n'y avait pas lieu de faire droit à la demande de délais de paiement.

Selon déclaration du 13 avril 2021, M. [U] [W] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions du 8 juillet 2021, l'appelant demande à la cour de :
- le déclarer recevable et bien fondé en son appel,
- infirmer le jugement entrepris,
- lui accorder les plus larges délais de paiement,
- fixer les intérêts à compter de l'arrêt à intervenir,
- condamner la société Intrum aux entiers dépens.

A cet effet, il fait valoir que :
– tous les actes signifiés par la société Intrum l'ont été par dépôt en l'étude d'huissier, parce qu'il était retourné vivre en Tunisie de début 2007 à 2010 et n'a été informé des poursuites que lors de leur reprise en 2017, lesquelles s'apparentent à un véritable harcèlement ; qu'il a fait des tentatives de règlement amiable du litige, en vain ;
– aujourd'hui âgé de 64 ans, il est au chômage, perçoit une allocation de retour à l'emploi de 1186 euros par mois et supporte la charge de son épouse et d'un fils de 12 ans, qui présente des problèmes de santé récurrents ; il subit les répercussions sur son état de santé de l'acharnement procédural de la société Intrum ; ses comptes d'épargne auprès du Crédit Mutuel ont été bloqués ; c'est pourquoi il sollicite les plus larges délais de paiement.

Par conclusions du 28 septembre 2021, la société Intrum demande à la cour de :
– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
– débouter M. [U] [W] de l'ensemble de ses prétentions ;
– condamner M. [U] [W] au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
– condamner M. [U] [W] en tous les dépens.

L'intimée soutient que :
– M. [U] [W] a délibérément ignoré l'existence de sa dette ; il s'est octroyé des délais de fait de plus de 13 ans et n'a effectué aucun versement significatif depuis le début de la procédure ;
– la prétention de M. [U] [W] tendant à voir « fixer les intérêts à compter de l'arrêt à intervenir » doit être rejetée comme ne reposant sur aucun fondement légal.

MOTIFS

A hauteur d'appel, la saisie-attribution litigieuse, pratiquée le 10 avril 2018, n'est plus contestée.

Sur la demande en délais de paiement

Aux termes de l'article L.211-2 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution, l'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous ses accessoires.

L'appelant ne précise pas le fondement de sa demande en délais de paiement.

Cependant, aux termes de l'article 1343-5 alinéas 1 à 4 du code civil :

Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
La décision du juge suspend les procédures qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Ces dispositions, en ce qu'elles sont conçues en termes généraux, permettent l'octroi de délais de paiement y compris après la mise en oeuvre d'une mesure d'exécution. Toutefois, elles prévoient seulement que la décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées. Cette suspension, qui ne saurait être assimilée à une mainlevée, s'opère nécessairement dans l'état où se trouve la mesure d'exécution au jour de l'octroi des délais.

Ainsi, en matière de saisie-attribution, la suspension ne peut avoir pour effet que de différer le paiement en faisant obstacle à l'attribution matérielle des fonds au créancier dans le mois suivant la mise en place de cette mesure d'exécution, puisqu'en application de l'article L.211-2 du code des procédures civiles d'exécution, l'acte de saisie a déjà emporté attribution juridique des fonds au saisissant.

En conséquence, l'octroi de délais, qui ne permettrait pas de débloquer le compte de M. [U] [W], n'aurait aucun intérêt pour les sommes effectivement saisies pour lesquelles la saisie-attribution litigieuse produit ses effets. Dès lors que la somme saisie suffit à désintéresser le créancier, la demande de délais de paiement est sans objet. Dans le cas contraire, le juge de l'exécution peut statuer sur la demande de délais pour le solde de la créance.

Or d'une part, aucune des parties ne produit le procès-verbal de saisie-attribution du 10 avril 2018, l'intimée se bornant à produire le seul procès-verbal de la première saisie-attribution pratiquée le 4 avril 2018, de sorte que la cour n'est pas en mesure de connaître le montant qui a été effectivement saisi-attribué à la suite de la saisie-attribution litigieuse (du 10 avril 2018) et, par conséquent, le solde de la créance pouvant faire l'objet d'éventuels délais de paiement. D'autre part, c'est à juste titre que le premier juge a relevé l'ancienneté de la créance, qui remonte à plus de quinze ans aujourd'hui, et l'absence de preuve de sa bonne volonté par le débiteur qui n'a procédé à aucun versement depuis le mois d'avril 2018, date de la mesure de saisie-attribution litigieuse, soit depuis quatre ans. La cour ajoute que l'appelant, qui produit des justificatifs anciens (juillet à septembre 2020) d'allocations de retour à l'emploi pour un montant mensuel de 1210,86 euros et de loyers mensuels (de la même époque) de 753 euros acompte sur charges compris, ne démontre pas être en mesure d'apurer sa dette dans un délai de 24 mois, alors qu'il dit assumer la charge de son épouse et d'un enfant de 12 ans.
Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande en délais de paiement.

Sur la demande tendant à voir fixer le point de départ des intérêts à compter de l'arrêt à intervenir

Aux termes de l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution.

Par suite, la cour, statuant avec les pouvoirs du juge de l'exécution, ne peut modifier le point de départ des intérêts, que tant l'ordonnance d'injonction de payer du 8 mars 2007 que le jugement du 1er juillet 2019 ont fixé au 24 novembre 2006. Cette prétention ne peut donc qu'être rejetée.

Sur les demandes accessoires

L'appelant, qui succombe en ses prétentions, devra supporter les dépens d'appel.

En revanche, il n'y a pas lieu, au regard des situations économiques respectives des parties, de prononcer de condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Et y ajoutant,

Rejette la demande de M. [B] [U] [W] tendant à voir fixer les intérêts à compter de l'arrêt à intervenir ;

Dit n'y avoir lieu de prononcer de condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [B] [U] [W] aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : B1
Numéro d'arrêt : 21/071437
Date de la décision : 30/06/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-30;21.071437 ?
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