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30/06/2022 | FRANCE | N°19/06783

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 30 juin 2022, 19/06783


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 30 JUIN 2022



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/06783 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CADY2



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Avril 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE ST GEORGES - RG n° F 17/00042







APPELANT



Monsieur [J] [I]

[Adresse 1]r>
[Localité 3]



Représenté par Me Vincent RIBAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010





INTIMEE



SAS AEROLIS

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 2]



Représentée par Me Pa...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 30 JUIN 2022

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/06783 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CADY2

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Avril 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE ST GEORGES - RG n° F 17/00042

APPELANT

Monsieur [J] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Vincent RIBAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

INTIMEE

SAS AEROLIS

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 2]

Représentée par Me Pascal GEOFFRION, avocat au barreau de PARIS, toque : A0190

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat, entendu en son rapport, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre,

Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre,

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller.

Greffière, lors des débats : Madame Lucile MOEGLIN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE,

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre, et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES

La société Aerolis a pour activité l'exploitation des lignes du réseau des 'Cars Air France' qui relient le centre de [Localité 6] aux aéroports d'[5] et de [7].

Après plusieurs contrats à durée déterminée entre juillet 2012 et mars 2013, M. [I] a été engagé par la société Aerolis selon contrat à durée indéterminée du 29 mars 2013, en qualité de conducteur-receveur pour un salaire en dernier lieu de 3 189.23 euros brut.

La convention collective nationale applicable est celle des transports routiers et activités auxiliaires de transport du 21 décembre 1950.

A partir de 2015, M. [I] a été arrêté à plusieurs reprises pour maladie et a également connu des périodes de mi-temps thérapeutique.

M. [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Villeneuve-Saint-Georges afin d'obtenir le paiement d'un rappels de salaires, de primes et des dommages et intérêts.

Par jugement du 11 avril 2019, le conseil a débouté M. [I] de l'intégralité de ses demandes.

M. [I] a formé appel par déclaration au greffe du 29 mai 2019 et sollicite l'infirmation de la décision des premiers juges.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 27 août 2019, M. [I] demande à la cour de :

- juger que ses demandes sont recevables et bien fondées ;

Y faisant droit,

- juger que la société Aerolis est mal fondée dans l'intégralité de ses conclusions et la débouter de ses éventuelles demandes reconventionnelles,

Principalement,

- infirmer le jugement et statuant à nouveau :

- condamner la société Aerolis à lui payer les sommes suivantes :

272,61 euros au titre des rappels de salaire pour la période du 05/10/2015 au 24/10/205,

3 370.08 euros au titre des rappels de salaire pour la période du 02/05/2016 au 31/12/2016,

1 487.94 euros au titre des rappels de primes GFA et 13ème mois,

15 000 euros au titre des dommages et intérêts pour non-paiement des salaires et retard de paiement des indemnités versées par la complémentaire santé,

5 000 euros au titre des dommages-intérêts pour résistance abusive et violation du devoir de bonne foi,

1 000 euros au titre des dommages-intérêts pour délivrance de bulletin et attestation pôle emploi non conformes,

- condamner la société à lui délivrer les fiches de paie conformes sous astreinte de 50 euros par jours à compter du prononcé de l'arrêt,

- 10 000 euros au titre la violation du devoir de sécurité,

En tout état de cause,

- ordonner la capitalisation annuelle des intérêts à compter de la date du présent exploit conformément à l'article 1343-2 du code civil ;

- condamner la société Aerolis au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- assortir les condamnations précitées des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil pour les demandes qui ont un caractère salarial et à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir pour les demandes qui ont un caractère indemnitaire ;

- juger que dans l'hypothèse ou à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l'exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier, le montant des sommes retenues par l'huissier en application du décret du 10 mai 2007 n°2007-774 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n°96/1080) devront être supportés par le débiteur en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Aerolis aux entiers dépens, selon les termes de l'article 696 du code de procédure civile.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 25 novembre 2019, la société Aerolis demande à la cour d'appel de Paris de confirmer le jugement en toutes ces dispositions,

Par conséquent,

- juger que M. [I] a été rempli de ses droits au titre de son indemnisation pour ses périodes d'arrêts de travail et de mi-temps thérapeutique comme du règlement de ses primes,

- le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- le condamner à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L'instruction a été déclarée close le 8 décembre 2021.

MOTIFS

Sur l'obligation de sécurité

M. [I] soutient que les amortisseurs des cars SCANIA ont été modifiés (compressés), pour rabaisser les véhicules de manière à permettre leur passage sous le pont d'[Localité 4] Ouest (hauteur maximale 3m50), qui était trop bas pour les cars initialement (3m75) ; qu'il a ainsi connu de très graves problèmes de santé, comme nombre de conducteurs de bus et a été contraint de s'arrêter de travailler ; qu'ainsi, la société Aerolis, en modifiant la hauteur des bus, a violé l'obligation de sécurité.

La cour constate que cette demande n'avait pas été formée en première instance et que la question de la recevabilité fait partie du débat puisque l'appelant a conclu à la recevabilité de ses demandes.

Or, l'article 564 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter des prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

L'article 565 précise que les prétentions ne sont pas nouvelles lorsqu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

L'article 566 ajoute que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

En l'espèce, force est de constater que la demande de dommages et intérêts pour violation par l'employeur de l'obligation de sécurité ne tend pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge et qui portaient uniquement sur des rappels de salaire et de prime et des dommages et intérêts s'y rattachant ; que cette demande n'est en outre ni l'accessoire, ni la conséquence ou le complément nécessaire de ces demandes en paiement ; enfin qu'il ne peut pas plus être invoqué la survenance ou la révélation d'un fait puisque dès la première instance, le salarié a rencontré des problèmes de santé.

Il en découle que la demande nouvelle portant sur l'obligation de sécurité est irrecevable.

Sur le rappel de salaire et de primes

M. [I] fait valoir qu'il n'a pas perçu l'intégralité des salaires et primes auxquels il pouvait prétendre durant les périodes d'arrêt de travail pour maladie et de mi-temps thérapeutique, son salaire brut du mois précédent ses arrêts étant celui d'avril 2016 pour 3 086.02 euros, soit en net 2 662.62 euros.

La société considère au contraire avoir, par application des dispositions conventionnelles, procédé au maintien de tout ou partie du salaire pendant les arrêts de travail pour maladie simple de M. [I].

L'article 10ter de l'annexe I ouvriers de la convention collective dispose en son point 2 b) intitulé « absences pour maladies » que « chaque maladie constatée conformément aux dispositions du paragraphe 1 du présent article donne lieu, après application d'un délai de franchise de 5 jours, au versement d'un complément de rémunération assurant les garanties de ressources suivantes:

Après 3 ans d'ancienneté :

- 100 % de la rémunération du 6e au 40e jour d'arrêt ;

- 75 % de la rémunération du 41e au 70e jour d'arrêt. »

Le paragraphe d) relatif aux « périodes successives d'incapacité de travail » précise également que : « en cas de périodes successives d'incapacité de travail, la durée totale d'indemnisation au cours d'une période quelconque de 12 mois consécutifs ne peut excéder les durées fixées au présent paragraphe 2 b et 2 c. »

Par ailleurs, pendant la période de mi-temps thérapeutique, le salarié reçoit un revenu composé du salaire versé par l'entreprise et des indemnités journalières versées par la caisse d'assurance maladie.

M. [I] a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail pour maladie entrecoupés de reprises de son poste, notamment en mi temps thérapeutique entre 2015 et 2016.

M. [I] sollicite dans le dispositif de ses conclusions les sommes de :

- 272,61 euros au titre des rappels de salaire pour la période du 05/10/2015 au 24/10/205,

- 3 370.08 euros au titre des rappels de salaire pour la période du 02/05/2016 au 31/12/2016.

Or, en premier lieu, force est de constater l'absence de calcul détaillé des sommes réclamées puisque dans ses conclusions, le salarié mentionne pour la période du 5 au 24 octobre 2015: 212,61 euros (brut) et non 272,61 euros, puis des montants variables chaque mois dont il précise devoir être soustraite la prise en charge de la prévoyance sans mention des montants versés. Ainsi, il demande :

- du 02 mai au 31 mai 2016 : 952.89 euros (brut) ' prise en charge de la prévoyance,

- du 1er juillet au 31 juillet : 1 932.63 euros (brut) - prise en charge de la prévoyance,

- du 1er août au 31 août 2016 : 523.32 euros (brut) - prise en charge de la prévoyance,

- du 1er au 30 septembre 2016 : 562.38 euros (brut) - prise en charge de la prévoyance,

- du 1er au 31 octobre 2016 : 1 245.27 euros (brut) - prise en charge de la prévoyance,

- du 1er au 30 novembre 2016 : 1 205.27 euros (brut) - prise en charge de la prévoyance,

- du 1er au 31 décembre 2016 : 1 247.27 euros (brut) - prise en charge de la prévoyance.

De même, il produit en pièce 63 un 'tableau récapitulatif' des sommes perçues dans lequel est notamment mentionné un seul versement de la Carcept (prévoyance) pour 1918,09 euros sur la période de mai à décembre 2016 alors que la société justifie du versement complémentaire de la somme de 1264,62 euros en janvier 2017 (indemnités prévoyance du 14 octobre au 24 novembre 2016), puis en février 2017 (indemnités prévoyance du 25 novembre 2016 au 5 janvier 2017).

Enfin, comme indiqué par la société, des délais de carence conventionnelle sont prévus, et également appliqués par la sécurité sociale, et le maintien de la rémunération portait seulement sur 75 % du salaire à compter du 41ème jour.

S'agissant, par ailleurs, du rappel des primes GFA et 13ème mois, devant être calculé selon le salarié à 'l'aune de la convention collective et de son article 26", il n'est pas plus explicité le calcul de la somme globale réclamée de 1 487.94 euros, alors que des sommes à ces deux titres ont été versées en juillet et novembre 2016.

Il découle de ces observations qu'aucun reliquat n'est établi en faveur du salarié.

Sur les dommages et intérêts pour non-paiement des salaires et retard de paiement des indemnités versées par la complémentaire santé

M. [I] fait valoir que les carences et retards de paiement de son employeur ont entraîné des difficultés financières et il justifie notamment du prélèvement sur son compte de frais d'impayés, sa compagne ayant également sollicité un prêt auprès de son employeur.

Si en définitive la cour n'a pas retenu de solde dû au salarié, il ressort toutefois des pièces produites que la société n'a procédé à la demande de prise en charge auprès de la Carcept-Prévoyance que le 12 octobre 2016 pour un premier jour à indemniser mentionné au 22 juillet 2016. La société qui fait valoir le retard apporté par le salarié à la transmission des justificatifs utiles ne produit aucune demande ou rappel qu'elle lui aurait adressé en ce sens alors qu'il lui appartient de saisir son organisme de prévoyance.

De même, il est établi que la société Aerolis n'a adressé au salarié que le 20 septembre 2016 deux avenants liés au mi-temps thérapeutique, dont le premier débutait le 30 mai précédent et elle ne peut utilement se prévaloir du 'calendrier de présence' de M. [I], pour justifier de ce retard dans la transmission des documents contractuels.

Les retards ainsi apportés par l'employeur au respect de ses obligations ont entraîné un préjudice financier pour M. [I], notamment établi par ses relevés de compte mentionnant divers frais bancaires, ce qui justifie que lui soit allouée la somme de 1 000 euros à ce titre.

Sur les dommages-intérêts pour délivrance de bulletin non conforme

Les articles L3243-1 et suivants du code du travail imposent à tout employeur la remise des fiches de paie à son salarié. Ces fiches de paie sont normées.

M. [I] fait valoir que de 'nombreuses irrégularités' sont survenues dans la rédaction des fiches de paie mais ne cite que sa date d'entrée en fonction, mentionnée au 27 septembre 2012 au lieu du 9 juillet 2012.

Toutefois la société fait valoir à juste titre que M. [I] a été engagé suivant des contrats à durée déterminée avant que la relation de travail se poursuive en contrat à durée indéterminée et que la reprise d'ancienneté a eu lieu au premier jour du contrat de travail à durée déterminée l'ayant précédé de manière ininterrompue, comme en attestent les contrats versés aux débats.

La date d'ancienneté mentionnée au 27 septembre 2012 est donc régulière.

La demande de délivrance de bulletins de paie rectifiés sera donc rejetée, comme la demande de dommages et intérêts.

Sur les dommages-intérêts pour résistance abusive et violation du devoir de bonne foi

M. [I] sollicite enfin 5 000 euros en soutenant que l'intention de nuire de son employeur est manifeste, notamment à l'aune des 'multiples notifications émises par la DIRECCTE'.

Outre le fait qu'il ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui d'ores et déjà réparé par la somme précédemment allouée, il ne produit qu'une seule demande de l'inspection du travail adressée à son employeur le 18 août 2016 sur la question du maintien de salaire.

La demande à ce titre sera donc rejetée.

Sur les demandes accessoires

La société qui est condamnée supportera les dépens et devra verser au salarié 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Les frais d'exécution, dont le sort est réglé par le code des procédures civiles d'exécution, n'entrent pas dans les dépens qui sont définis par l'article 695 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

DECLARE irrecevable la demande formée par M. [I] au titre la violation du devoir de sécurité ;

CONFIRME le jugement, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour retard de paiement des indemnités versées par la complémentaire santé ;

Statuant à nouveau sur ce chef et y ajoutant :

CONDAMNE la société Aerolis à payer à M. [I] la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts pour retard de paiement des indemnités versées par la complémentaire santé et la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Aerolis aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 19/06783
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;19.06783 ?
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