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30/06/2022 | FRANCE | N°18/13172

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 30 juin 2022, 18/13172


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 30 JUIN 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/13172 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6ZD7



Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Octobre 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 18/00178







APPELANT



Monsieur [J] [W]

[Adresse 2]

[Localit

é 3]



Représenté par Me Emmanuel GAYAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0028





INTIMEE



SARL CHAUFFAGE CLIMATISATION MOALLA (C.C.M)

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par ...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 30 JUIN 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/13172 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6ZD7

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Octobre 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 18/00178

APPELANT

Monsieur [J] [W]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Emmanuel GAYAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0028

INTIMEE

SARL CHAUFFAGE CLIMATISATION MOALLA (C.C.M)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Marc-antoine PEREZ, avocat au barreau de PARIS, toque : R178

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Laurent ROULAUD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat, entendu en son rapport, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre,

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre,

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller.

Greffière, lors des débats : Madame Lucile MOEGLIN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE,

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre, et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES

M. [J] [W] a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein prenant effet le 4 novembre 2002 par la société Chauffage Climatisation Moalla (ci-après désignée la société CCM) en qualité de chef de chantier. Au dernier état, sa rémunération était de 2.970,63 euros bruts.

La société CCM employait habituellement moins de onze salariés.

Les relations de travail étaient soumises à la convention collective des ouvriers du bâtiment de la région parisienne.

Le 7 septembre 2012, M. [W] a été victime d'un accident du travail, à savoir un traumatisme cranien causé par la chute d'un poteau métallique de 45 kg lui occasionnant des vertiges, des insomnies, des céphalées, un stress post traumatique et un sifflement constant à l'oreille gauche.

Suite à cet accident du travail, M. [W] a fait l'objet d'arrêts de travail de manière continue jusqu'au 5 octobre 2017.

Le 25 juillet 2017, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis a notifié à M. [W] une lettre de fixation de la date de consolidation de son état de santé.

Le 22 septembre 2017, M. [W] a bénéficié d'une visite de reprise au terme de laquelle le médecin du travail l'a déclaré inapte à son poste de travail.

M. [W] a été convoqué le 6 octobre 2017 à un entretien préalable fixé le 16 octobre 2017 en vue d'un éventuel licenciement qui lui a été notifié le 20 octobre 2017 pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.

Sollicitant notamment le versement de l'indemnité spéciale de licenciement, M. [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny le 23 janvier 2018 aux fins d'obtenir la condamnation de la société CCM au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 23 octobre 2018, le conseil de prud'hommes a débouté M. [W] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

Le 22 novembre 2018, M. [W] a interjeté appel de ce jugement.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 11 avril 2022, M. [W] demande à la cour de :

Condamner la société CCM à lui payer les sommes suivantes :

- 11.937,79 euros à titre de reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- 5.672,46 euros à titre d'indemnité compensatrice équivalente à l'indemnité de préavis,

- 567 euros de congés payés y afférents,

Dire que les condamnations porteront intérêts au taux légal,

Condamner la société CCM à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ordonnance du 21 septembre 2020, le conseiller de la mise en état a prononcé l'irrecevabilité des conclusions de la société CCM.

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L'instruction a été déclarée close le 13 avril 2022.

MOTIFS

Au préalable, en application de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs. Les conclusions de la société CCM ayant été déclarées irrecevables par ordonnance du 21 septembre 2020 susmentionnée, l'intimée est réputée s'être appropriée les motifs du jugement entrepris en application de ces dispositions.

En l'espèce, le conseil de prud'hommes a pris sa décision après avoir rappelé les textes de loi applicables.

Sur le caractère professionnel de l'inaptitude :

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie, et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement. L'application de celles-ci n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie du lien de causalité entre l'accident du travail et l'inaptitude et il appartient aux juges du fond de rechercher eux-mêmes l'existence de ce lien de causalité.

Ainsi, la qualification d'accident du travail ou de maladie professionnelle rendant applicables les dispositions de l'article L. 1226-10 du code du travail ne relève pas de la compétence exclusive de la caisse primaire d'assurance maladie.

Il appartient, en tout état de cause, au juge prud'homal de vérifier si l'inaptitude avait, au moins partiellement, une origine professionnelle et, dans l'affirmative, si l'employeur avait connaissance de cette origine.

* Sur l'origine professionnelle :

Il ressort du courrier du 22 décembre 2017 versé aux débats que l'employeur a refusé la demande d'indemnité spéciale de licenciement du salarié aux motifs que, d'une part, l'avis d'inaptitude du 22 septembre 2017 du médecin du travail a fait état d'une visite de reprise dans le cadre d'un accident ou d'une maladie non professionnelle et, d'autre part, la caisse primaire d'assurance maladie a refusé par courrier en date du 9 novembre 2017 de prendre en charge des arrêts maladie, sans autre précision, dans le cadre de la législation sur les risques professionnels.

En l'espèce et en premier lieu, la cour constate que le courrier du 9 novembre 2017 précité n'est pas produit. En outre, comme il a été dit précédemment, les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ne sont pas subordonnées à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie du lien de causalité entre l'accident du travail et l'inaptitude.

En second lieu, il est constant que, le 22 septembre 2017, M. [W] a bénéficié d'une visite de reprise au terme de laquelle le médecin du travail l'a déclaré inapte à son poste de travail et a précisé qu'il 'pourrait occuper un emploi sans manutention sans gestes répétitifs et sans port de charges égales ou supérieures à 5 kg de façon répétée et prolongée dans le temps, (sans) travail en hauteur, (sans) conduites de véhicules et (sans) taches sur des chantiers de bâtiment et de travaux public' et qu'il était préconisé 'un travail strict au sol'.

S'il est vrai que la case 'accident ou maladie non professionnel' de l'avis d'inaptitude du 22 septembre 2017 a été cochée, il ressort des éléments versés aux débats que :

- cette visite de reprise fait suite à une précédente en date du 9 août 2017 ayant donné lieu à l'établissement par le médecin du travail d'une fiche d'aptitude médicale dans laquelle était cochée la case 'accident du travail' et mentionnant que M. [W] ne pouvait travailler et qu'il devait revoir son médecin traitant,

- suite à l'accident du travail du 7 septembre 2012, M. [W] a fait l'objet d'arrêts de travail de manière continue jusqu'au 5 octobre 2017, l'arrêt de travail du 6 juillet 2017 faisant référence à l'accident du travail du 7 septembre 2012, et qu'au cours de cette période, il a bénéficié de visites de pré-reprise les 29 octobre 2013, 6 juin 2014 et 28 avril 2015 suite auxquelles le médecin du travail n'a pas déclaré le salarié apte à la reprise de son emploi de chauffagiste,

- par courrier du 30 octobre 2017, le médecin du travail a indiqué à M. [W] que son inaptitude 'est susceptible d'être en lien avec l'accident du travail du 7 septembre 2012".

De même, la cour constate que les restrictions mentionnées par l'avis d'inaptitude du 22 septembre 2017 sont en lien avec les lésions consécutives à l'accident du travail de 2012 à savoir des vertiges, des insomnies, des céphalées et un syndrome post traumatique.

Enfin, il ne ressort d'aucune pièce versée aux débats que la maladie non professionnelle mentionnée dans l'avis d'inaptitude du 22 septembre 2017 et dont la nature n'est pas précisée dans ce document a pour origine exclusive une situation distincte de l'accident du 7 septembre 2012.

Il se déduit de l'ensemble de ces pièces que l'inaptitude du salarié a au moins partiellement pour origine l'accident du travail du 7 septembre 2012. Par suite, cette inaptitude a, au moins partiellement, une origine professionnelle.

* Sur la connaissance de l'origine par l'employeur :

Il n'est pas contestable que l'employeur avait connaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude du salarié au moment de son licenciement dans la mesure où l'ensemble des éléments médicaux susmentionnés a été transmis à la société CCM et que ceux-ci ont été inventoriés dans le courrier du 9 novembre 2017 que le salarié a adressé à l'employeur et qui est versé au débats.

* Sur les sommes mises à la charge de l'employeur en application de l'article L.1226-14 du code du travail

Selon l'article L.1226-14 du Code du travail, le licenciement pour inaptitude ouvre droit pour le salarié, si l'inaptitude est d'origine professionnelle avec impossibilité de reclassement, d'une part, à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité légale de licenciement, d'autre part, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à une indemnité compensatrice de préavis. Cette dernière indemnité n'a pas la nature d'une indemnité de préavis et dès lors n'ouvre pas droit à congés payés.

M. [W] sollicite la somme de 5.672,46 euros à titre d'indemnité compensatrice et la somme de 11.937,79 euros à titre de reliquat d'indemnité spéciale de licenciement, une somme de ce montant lui ayant déjà été versée par l'employeur à titre d'indemnité de licenciement.

Compte tenu du salaire de l'appelant (2.970,63 euros bruts), de son ancienneté et des stipulations de l'article 1.1.10a de la convention collective applicable relatif aux modalités de calcul de l'indemnité de licenciement, il sera fait droit à ces demandes et le jugement sera infirmé en conséquence.

En revanche, M. [W] sera débouté de sa demande au titre des congés payés et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires :

La société CCM qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens de première instance et d'appel. Elle sera condamnée à verser à M. [W] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. [J] [W] de sa demande au titre des congés payés ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société Chauffage Climatisation Moalla à verser à M. [J] [W] les sommes suivantes :

- 11.937,79 euros à titre de reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- 5.672,46 euros à titre d'indemnité compensatrice équivalente à l'indemnité de préavis,

- 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que les créances indemnitaires porteront intérêt à compter de la décision qui les prononce ;

CONDAMNE la société Chauffage Climatisation Moalla aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 18/13172
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;18.13172 ?
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