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29/06/2022 | FRANCE | N°18/05336

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 29 juin 2022, 18/05336


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRET DU 29 JUIN 2022



(n° , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05336 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5QAC



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Janvier 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de BOBIGNY - RG n° F 16/04055





APPELANT



Monsieur [F] [L]

[Adresse 2]

[

Localité 3]



Représenté par Me Pascal GASTEBOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : R188







INTIMEE



SAS LG ELECTRONICS FRANCE prise en la personne de son représentant légal

[Adres...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRET DU 29 JUIN 2022

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05336 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5QAC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Janvier 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de BOBIGNY - RG n° F 16/04055

APPELANT

Monsieur [F] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Pascal GASTEBOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : R188

INTIMEE

SAS LG ELECTRONICS FRANCE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Lionel VUIDARD, avocat au barreau de PARIS, toque : J030

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Gwenaelle LEDOIGT, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre

Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre

Madame Véronique BOST, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 16 décembre 2021

Greffier, lors des débats : Mme Sonia BERKANE

ARRET :

- contradictoire

- mis à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente et par Sonia BERKANE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

M. [F] [L] a été engagé par la société Goldstar, suivant contrat à durée indéterminée en date du 26 août 2004, à effet au 1er septembre 2004, en qualité de « Key Manager », au statut Cadre, niveau 8, échelon I de la convention collective du commerce de gros.

En février 2005, le contrat de travail du salarié a été transféré à la société par actions simplifiée (SAS) LG Electronics France, dans le cadre des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail.

La société LG Electronics France est une filiale du groupe LG, basé en Corée-du-Sud, qui commercialise sur le territoire français tous les produits achetés auprès des usines du groupe.

Par un avenant du 1er octobre 2007, à effet rétroactif au 1er juillet 2007, M. [F] [L] a été promu « Responsable des ventes Brun et ISP » toujours au statut Cadre, niveau 8, échelon I de la convention collective applicable.

À compter du 1er février 2008, les bulletins de salaire de M. [F] [L] ont fait apparaître la classification niveau 8, échelon II.

Par un avenant du 27 mars 2008, le salarié s'est vu appliquer un forfait annuel en jours.

Le 4 juillet 2008, M. [F] [L] a été nommé « directeur des ventes Brun », échelon 8, niveau II.

Dans le dernier état des relations contractuelles, le salarié percevait une rémunération mensuelle brute de 3 427,75 euros (moyenne sur les trois derniers mois).

Le 25 octobre 2011, la SAS LG Electronics France a engagé une procédure d'information/ consultation des CHSCT et CE sur un projet de réorganisation emportant la suppression d'une trentaine de postes de travail et la mise en oeuvre d'un Plan de Sauvegarde de l'Emploi (PSE).

Le PSE a finalement été arrêté en mars 2012 et mis en application durant les mois suivants.

Le 24 avril 2014, le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie. Cette arrêt a été prolongé jusqu'à la rupture des relations contractuelles.

Par une convocation datée du 12 mai 2014 et reçue par le salarié le 19 mai 2014, ce dernier a été convoqué à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé au 21 mai 2014.

Le 16 mai 2014, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur mais cette affaire a fait l'objet d'une radiation pour défaut de diligence du demandeur.

Le 4 juin 2014, M. [F] [L] s'est vu notifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, libellé dans les termes suivants :

« Nous vous notifions donc par la présente votre licenciement pour les motifs suivants constitutifs d'une cause réelle et sérieuse.

1. Vos manquements relatifs à la négociation et signature des contrats clients dont vous avez la responsabilité

Dans le cadre de vos fonctions de directeur des ventes, vous avez notamment pour mission la gestion des contrats commerciaux. Vous devez faire le lien entre le service juridique au siège et les responsables de secteurs qui les font ensuite signer aux clients sur le terrain. Vous êtes donc supposé avoir un rôle d'impulsion et de suivi de la chaîne contractuelle jusqu'à la signature du contrat par le client.

Or, nous avons découvert que, pendant plusieurs mois, vous n'aviez pas envoyé les contrats aux commerciaux qui n'ont donc pas été en mesure de les faire signer aux distributeurs concernés, par exemple pour les clients MDA, C MOINS CHER, DAYLAC ou APPLEWOOD.

Lors de la réunion du 5 mai 2014, au cours de laquelle [U] [J] a été amené à vous remplacer du fait de votre absence, plusieurs commerciaux terrain placés sous votre responsabilité se sont plaints de l'absence totale d'information sur la signature des contrats et sur leur contenu.

Votre réaction a été extrêmement tardive. Vous n'avez commencé en catastrophe à préparer les contrats avec le service juridique que fin avril 2014, après une nouvelle relance de votre supérieur hiérarchique à la suite d'une demande initiée pour le client Concurrence (dossier nommé en interne Cas « Chapelle »). A ce jour, certains contrats ne sont toujours pas finalisés.

Ces manquements sont susceptibles d'entraîner pour notre Société une perte très importante de chiffre d'affaires pour au moins la moitié du chiffre d'affaires dont vous avez la responsabilité.

A titre d'exemple, pour le seul client MDA, le risque de perte de chiffre d'affaires s'élève à environ 3.000.000 euros pour les produits HE (...)

2. Vos manquements relatifs à l'information de votre équipe

Vous ne donnez pas à votre équipe le niveau d'information nécessaire à la bonne réalisation de leurs missions ni au bon fonctionnement de l'entreprise. Par exemple, vous n'avez pas tenu informée votre équipe de commerciaux des plannings d'envoi des nouveaux catalogues à destination des clients : les commerciaux se déplaçaient donc chez leurs clients sans savoir si les catalogues avaient été reçus, ou même commandés, et quels catalogues les clients avaient reçus, le cas échéant. Les commerciaux ont été complètement perdus.

De même, concernant le KIT coupe du monde, vous n'avez pas donné l'information nécessaire sur la PLV aux commerciaux alors qu'il s'agit d'une action très importante pour la Société LG, avec de très gros investissements marketing.

Certains produits tels que le 49UB850 n'ont pas été tarifiés ni positionnés et des prix erronés ont été communiqués à certains commerciaux. De plus, la disponibilité des produits n'a pas été indiquée (...)

3. Vos manquements relatifs au management de votre équipe

Nous devons déplorer un manque criant de suivi de votre équipe alors que l'encadrement et le management de celle-ci sont inhérents à vos fonctions de directeur des ventes.

Ainsi, nous avons notamment constaté que les reportings des ventes n'ont pas été effectués par plusieurs membres de votre équipe pendant plusieurs semaines alors qu'il est indispensable au bon fonctionnement de l'entreprise que le département des Ventes et le département Marketing aient connaissance de ce qui se passe dans les magasins. De telles carences auraient dû immédiatement vous conduire à réagir auprès de vos collaborateurs, mais vous n'avez manifestement pas opéré le suivi nécessaire. Vous ne leur avez pas adressé la moindre relance, ni même fait de retour quant à la qualité des reportings quand ceux-ci étaient réalisé. De plus, vous n'avez pas suivi les performances et les objectifs des commerciaux (...)

4. Votre manque de communication avec votre hiérarchie et les autres directeurs des ventes de LG Electronics France

D'une manière générale, vous n'avez pas entretenu la collaboration qui était attendue, eu égard à vos fonctions, avec les directeurs commerciaux HE et HA (...)

Vous n'avez pas tenu à jour votre planning, ou ne l'avez jamais communiqué, ce qui a empêché tout suivi de vos rendez-vous et déplacements. Nous n'avons donc pas été en mesure de tenir informés les clients de vos absences. De même, vous n'avez pas entretenu une communication suffisante avec votre responsable pour qu'elle soit efficace, vous laissiez des courriels sans réponse ce qui entraînait des problèmes d'organisation (...)

L'ensemble des faits ci-dessus sont d'autant plus inacceptables compte tenu du niveau élevé de vos fonctions et de vos responsabilités.

Ils nuisent à la bonne marche de la direction des ventes dont vous avez la responsabilité.

Nous n'avons désormais pas d'autre choix que de mettre fin à votre contrat de travail. »

Le 27 octobre 2016, le salarié a, de nouveau, saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et solliciter un rappel d'heures supplémentaires, de repos compensateur, de bonus pour l'année 2014 ainsi que des dommages-intérêts pour une inobservation des dispositions de l'article L.1222-6 du code du travail, inobservation de la procédure de licenciement et perte du congé reclassement.

Le 11 janvier 2018, le conseil de prud'hommes de Bobigny, dans sa section Encadrement, a statué comme suit :

- dit le licenciement de M. [F] [L] dépourvu de cause réelle et sérieuse

- condamne la société LG Electronics France à verser à M. [F] [L] les sommes de :

* 34 270 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Rappelle que les créances à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement

- déboute M. [F] [L] du surplus de ses demandes

- déboute la société LG Electronics France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamne la société LG Electronics France aux dépens.

Par déclaration du 12 avril 2018, M. [F] [L] a relevé appel du jugement de première instance.

Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 28 mars 2022, aux termes desquelles M. [F] [L] demande à la cour d'appel de :

I- Sur le rappel d'heures supplémentaires

- infirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny du 11 janvier 2018,

- condamner la société LG Electronics à lui verser 59 100,58 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 5 910,06 euros bruts à titre de congés payés afférents

- condamner la société LG Electronics à lui verser 17 100,06 euros nets à titre d'indemnité compensatrice de repos compensateur,

II- Sur l'inobservation de la durée du repos quotidien et du repos hebdomadaire

- condamner la société LG Electronics à lui verser 15 000 euros nets à titre de dommages et intérêts

III- Sur le rappel de bonus 2014

- infirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny du 11 janvier 2018

- condamner la société LG Electronics à lui verser 3 148,34 euros bruts à titre de rappel de bonus 2014 outre 314,83 euros à titre de congés payés afférents

IV- Sur les dommages et intérêts pour inobservation de l'obligation de sécurité

- infirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny du 11 janvier 2018

- condamner la société LG à lui verser 50 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour inobservation de l'obligation de sécurité

V- Sur la rupture du contrat de travail

- infirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny du 11 janvier 2018

- dire que LG Electronics n'a pas informé et consulté le CHSCT et le Comité d'Entreprise de façon loyale et complète dans le cadre de la procédure de licenciement collectif pour motif économique

- dire que LG Electronics n'a pas spécifiquement informé et consulté le CHSCT et le Comité d'Entreprise sur la modification du contrat de travail de Monsieur [L] puis de la suppression de son poste

- dire que LG Electronics n'a pas respecté les dispositions de l'article L.1222-6 du code du travail

VI- A titre principal, sur le bien-fondé de l'action en résiliation judiciaire :

- infirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny du 11 janvier 2018

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société LG Electronics

- dire que la résiliation judiciaire du contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement nul

- condamner LG Electronics à verser à Monsieur [L] les sommes suivantes :

* 8 837,87 euros nets à titre de dommages et intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour inobservation des dispositions de l'article L.1222-6 du code du travail

* 150 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour nullité de son licenciement

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de la procédure d'information/consultation du Comité d'Entreprise et du CHSCT

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour perte du congé de reclassement

* 61 865,09 euros nets à titre d'indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE

- faire bénéficier Monsieur [L] de l'intégralité des dispositions du PSE

- à tout le moins, dire et juger que la résiliation judiciaire doit produire les effets d'un licenciement pour motif économique sans cause réelle et sérieuse, et par conséquent :

- condamner LG Electronics à verser à Monsieur [L] :

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour inobservation des dispositions de l'article L.1222-6 du code du travail

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement économique sans cause réelle et sérieuse

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour perte du congé de reclassement,

* 61 865,09 euros nets à titre d'indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE

- faire bénéficier Monsieur [L] de l'intégralité des dispositions du PSE

- en toutes hypothèses, dire que la résiliation judiciaire doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et par conséquent :

- condamner LG Electronics à verser à Monsieur [L] les sommes suivantes :

* 8 837,87 euros nets à titre de dommages et intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement,

* 150 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement économique sans cause réelle et sérieuse

VII- A titre subsidiaire, sur le mal-fondé du licenciement :

- dire que le poste de Monsieur [L] a été modifié puis finalement supprimé

- condamner LG Electronics à verser à Monsieur [L] les sommes suivantes :

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour inobservation des dispositions de l'article L.1222-6 du code du travail

* 150 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour nullité de son licenciement

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de la procédure d'information/consultation du Comité d'Entreprise et du CHSCT

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour perte du congé de reclassement

* 61 865,09 euros nets à titre d'indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE

- faire bénéficier Monsieur [L] de l'intégralité des dispositions du PSE

- A tout le moins, dire et juger que le licenciement doit produire les effets d'un licenciement pour motif économique sans cause réelle et sérieuse, et par conséquent

- condamner LG Electronics à verser à Monsieur [L] les sommes suivantes :

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour inobservation des dispositions de l'article L.1222-6 du code du travail,

* 150 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement économique sans cause réelle et sérieuse

* 53 027,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour perte du congé de reclassement * 61 865,09 euros nets à titre d'indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE

- faire bénéficier Monsieur [L] de l'intégralité des dispositions du PSE,

- en toutes hypothèses, dire que le licenciement pour motif personnel est sans cause réelle et sérieuse, et par conséquent condamner LG Electronics à verser à Monsieur [L] la somme de 150 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

VIII- En toutes hypothèses

- condamner la société LG Electronics à verser à Monsieur [L] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner, la société LG Electronics aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 23 mars 2022, aux termes desquelles la SAS LG Electronics France demande à la cour d'appel de :

- débouter M. [L] de l'ensemble de ses demandes.

I- Sur la resiliation judiciaire :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny

- dire que la demande de résiliation judiciaire de Monsieur [L] est sans objet

- débouter Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes suivantes :

« A titre principal, prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux

torts exclusifs de la société LG Fance

- dire que la résiliation judiciaire doit produire les effets d'un licenciement nul :

' nullité de la procédure d'information/consultation des instances représentatives du personnel

' indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement : 8 837,87 euros

' dommages et intérêts pour inobservation des dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail : 53 027,22 euros

' dommages et intérêts pour nullité de son licenciement : 150 000 euros

' dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de la procédure d'information consultation du Comité d'entreprise et du CHSCT : 53 027,22 euros

' dommages et intérêts pour perte du congé de reclassement : 53 027,22 euros

' indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE : 61 865,09 euros

' faire bénéficier Monsieur [L] de l'intégralité des dispositions du PSE

- dire que la résiliation judiciaire doit produire les effets d'un licenciement pour motif économique sans cause réelle et sérieuse :

' nullité de la procédure d'information/consultation des instances représentatives du personnel

' indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement : 53 027,22 euros

' dommages et intérêts pour inobservation des dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail : 53 027,22 euros

' dommages et intérêts pour licenciement économique sans cause réelle et sérieuse : 53 027,22 euros

' dommages et intérêts pour perte du congé de reclassement : 53 027,22 euros

' indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE : 61 865,09 euros

' faire bénéficier Monsieur [L] de l'intégralité des dispositions du PSE

En toutes hypothèse, dire et juger que la résiliation judiciaire doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse :

' indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement : 8 837,87 euros

' dommages et intérêts pour nullité de son licenciement : 150 000 euros »

II- Sur le licenciement de Monsieur [L] :

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny

- débouter Monsieur [L] de l'ensemble des demandes suivantes :

« A titre subsidiaire, sur le mal fondé du licenciement

- dire que le licenciement est nul :

' dommages et intérêts pour inobservation des dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail : 53 027,22 euros

' dommages et intérêts pour nullité de son licenciement : 150 000 euros

' dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de la procédure d'information consultation du comité d'entreprise et du CHSCT : 53 027,22 euros

' dommages et intérêts pour perte du congé de reclassement : 53 027,22 euros

' indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE : 61 865,09 euros

' faire bénéficier Monsieur [L] de l'intégralité des dispositions du PSE

- dire que le licenciement a été prononcé pour motif économique et est sans cause réelle et sérieuse :

' dommages et intérêts pour inobservation des dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail : 53 027,22 euros

' dommages et intérêts pour nullité de son licenciement : 150 000 euros

' dommages et intérêts pour perte du congé de reclassement : 53 027,22 euros

' indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE : 53 027,22 euros

' faire bénéficier Monsieur [L] de l'intégralité des dispositions du PSE

En toutes hypothèse, dire et juger le licenciement pour motif personnel est sans cause réelle et sérieuse :

' dommages et intérêts pour nullité de son licenciement :150 000 euros »

III- Au titre des heures supplémentaires :

A titre principal

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny ;

- débouter Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents

- débouter Monsieur [L] de sa demande d'indemnité compensatrice de repos compensateur

A titre subsidiaire

- débouter Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes au titre des heures supplémentaire et congés payés afférents

- débouter Monsieur [L] de sa demande de dommages-intérêts pour une prétendue inobservation de la durée du repos quotidien et du repos hebdomadaire

A titre subsidiaire et reconventionnel

- condamner Monsieur [L] à rembourser à la société la somme de 3 574,04 euros bruts au titre de JRTT indûment attribués entre 2011 et 2014 avec intérêts légaux et, le cas échéant, ordonner la compensation entre cette somme et la ou les éventuelles sommes mises à la charge de la société dans le cadre du présent litige

IV- Sur le rappel de bonus 2014

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny

- débouter M. [F] [L] de sa demande de versement de 3 148,34 euros bruts à titre de rappel de bonus 2014 outre 314,83 euros à titre de congés payés afférents

V- Sur les dommages-intérêts pour inobservation de l'obligation de sécurité

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Bobigny

- débouter M. [F] [L] de sa demande de versement de 50 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour inobservation de l'obligation de sécurité

VI - En tout état de cause

- condamner M. [F] [L] à verser 4 000 euros à la société LG Electronics France au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner M. [F] [L] aux entiers dépens.

Conclusions auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé des faits de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 30 mars 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

1/ Sur la demande de rappel de bonus 2014

Le salarié fait grief à l'employeur de lui avoir versé une somme de 10 540 euros bruts à titre de solde de rémunération variable, correspondant au montant du bonus 2014, en ayant calculé cette somme avec un taux d'atteinte de ses objectifs de 81,4 % et au prorata temporis, donc finalement calculé à hauteur de 77 %.

M. [F] [L] explique, qu'à la date où il a quitté la société, ses objectifs (KPI), n'étaient pas définies puisque les critères de pondération et le mode de calcul de la rémunération variable ne lui avaient pas encore été notifiés. Dans ces conditions et faute pour l'employeur d'avoir satisfait à ses obligations dans la détermination et la notification de ses objectifs annuels, M. [F] [L] considère que son bonus annuel 2014 aurait dû être calculé pour une atteinte à 100 % de ses objectifs, ce qui correspondait à une prime 13 688,43 euros et il revendique une somme de 3 148,34 euros bruts à titre de complément de bonus annuel.

Mais, la cour observe que le salarié ne s'explique pas sur les calculs qui lui permettent de soutenir que la société intimée ne lui aurait versé qu'un bonus correspondant à une atteinte de 81,4 %, de ses objectifs et qu'il est au contraire justifié, notamment par la lecture de l'attestation Pôle emploi (pièce 17 salarié) que M. [F] [L] a perçu une prime sur objectif de 14 414,51 euros au titre de l'année 2014, correspondant à une atteinte de ses objectifs à 100 % et pour un temps de présence jusqu'au terme de son préavis au 4 septembre 2014.

C'est donc à bon escient que les premiers juges ont débouté le salarié de sa demande de ce chef.

2/ Sur l'illicéité de la convention annuelle de forfait en jours

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail, des repos journaliers et hebdomadaires dont le suivi effectif et régulier par l'employeur permet de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable.

M. [F] [L] soutient que si la convention annuelle de forfait en jours qui lui a été appliquée a bien été prévue par un accord collectif, en l'espèce la convention collective du commerce de gros, les dispositions de cet accord ne comportaient aucune des garanties exigées par les textes légaux et la jurisprudence. L'accord d'entreprise régissant la mise en 'uvre de ce dispositif était tout aussi insuffisant puisqu'il ne prévoyait pas un contrôle effectif du temps de travail et des repos mais uniquement la possibilité pour le salarié d'exercer « un droit d'alerte », en avisant son supérieur hiérarchique ou une commission de suivi, s'il estimait être confronté à une « surcharge récurrente » de travail. M. [F] [L] ajoute qu'il n'a jamais bénéficié du moindre entretien annuel individuel portant sur sa charge de travail, l'organisation du travail dans l'entreprise et l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale. En conséquence, il sollicite la nullité ou à tout le moins l'inopposabilité de la convention de forfait annuel en jours prévue par un avenant à son contrat de travail.

L'employeur répond que le salarié a accepté de signer l'avenant à son contrat de travail, daté du 27 mars 2008, prévoyant la mise en place d'une convention de forfait annuel en jours, eu égard à son statut de cadre autonome et que l'accord collectif d'entreprise du 27 mars 2008 garantissait suffisamment le droit à la santé et à la sécurité des salariés en forfait jours. En effet, cet accord rappelait que les salariés bénéficiaient des temps de repos prévus par la réglementation et précisait que l'amplitude journalière type devait se situer entre 6 heures et 10 heures. Concernant les dispositifs de contrôle du temps de travail, il était prévu que le salarié déclare au service de paie ses jours travaillés et ses jours de repos et que sa charge de travail soit évaluée à l'occasion d'un entretien annuel. Un point relatif au nombre de jours travaillés devait être effectué à la fin du mois de novembre de chaque année. La société intimée indique, encore, qu'il est justifié que M. [F] [L] n'a jamais effectué un temps de travail supérieur aux 215 jours annuels prévus au forfait. L'employeur affirme que des entretiens annuels ont toujours été organisés et que M. [F] [L] ne s'est jamais plaint d'une surcharge de travail, ni n'a eu recours au droit d'alerte prévu dans l'accord collectif pour signaler un déséquilibre dans sa charge de travail.

Cependant, la cour constate que l'employeur s'abstient de verser aux débats les comptes rendus d'entretien d'évaluation qui auraient été organisés chaque année, à l'exception de celui relatif à l'année 2013 où il peut être noté qu'aucune question spécifique n'a été posée au salarié sur sa charge de travail et sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale (pièce 38 employeur). En outre, ce n'est qu'à compter du mois de novembre 2013 que la société intimée à mis en oeuvre un système auto-déclaratif des journées et demi-journées de travail des cadres autonomes, sans contrôle par les managers ce qui privait ce dispositif de toute efficience (pièce 44 page 22 salarié).

Dans ces conditions, il convient de considérer que l'employeur n'a pas satisfait aux exigences légales destinées à garantir la santé et la sécurité des salariés. La convention de forfait en jours sera donc dite inopposable à M. [F] [L].

Le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef.

3/ Sur les heures supplémentaires

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci.

M. [F] [L] prétend avoir travaillé au-delà des 35 heures hebdomadaires légales et au soutien de ses allégations il produit aux débats un tableau laissant apparaître, pour chaque semaine, la durée de son travail, sur la base des premiers et derniers e-mail envoyés (pièce 31) et de ses plannings (pièce 61). Il produit, également, le décompte hebdomadaire, pour la période non prescrite, des heures accomplies au-delà de 35 heures et non rémunérées par l'employeur (pièce 38).

Le salarié sollicite une somme de 59 100,58 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 5 910,06 euros au titre des congés payés y afférents.

La société intimée répond que les deux tableaux versés aux débats par le salarié sont identiques et qu'il s'agit de documents créés pour les besoins de la cause et dénuée de tout caractère probant. Il est, notamment, relevé que le salarié a procédé à des calculs à partir de moyennes, pour les périodes 2011 et 2012, et que le caractère forfaitaire des heures supplémentaires revendiquées est inopérant pour en rapporter la preuve. Ses tableaux pour les années suivantes comportent aussi des erreurs quant à la prise en compte des jours de congés qui attestent de leur manque de sérieux. Il en est de même du mode de calcul de durée effective de travail du salarié fondé sur la prise en compte des e-mails envoyés qui ne peut être considéré comme un procédé efficient de contrôle des heures de travail réalisées par l'appelant.

Toutefois, l'employeur qui se contente de discuter le caractère probatoire des pièces produites par le salarié ne verse lui-même aux débats aucune pièce permettant d'établir de manière objective et fiable le nombre d'heures de travail effectuées par M. [F] [L], pas même les relevés auto-déclaratif remplis par le salarié sur son temps de travail et qui étaient supposés garantir le contrôle effectif de sa charge de travail dans le cadre de la convention de forfait en jours. Il sera donc considéré que la SAS LG Electronics France ne remplit pas la charge de la preuve qui lui revient, le salarié ayant de son côté étayé sa demande en apportant à la cour des éléments précis concernant les heures supplémentaires accomplies en 2013 et en 2014. En revanche, la méthode de calcul utilisée par le salariée pour déterminer les heures supplémentaires qu'il aurait accomplies en 2011 et 2012 ne sera pas considérée comme suffisamment précise pour permettre à l'employeur d'y répondre puisque M. [F] [L] a appliqué à ces deux années un forfait annuel d'heures supplémentaires uniquement fondé sur les chiffres enregistrés en 2013 et 2014.

Il sera donc alloué au salarié une somme de 27 017,62 euros à titre de rappel de salaire, outre 2 701,76 euros au titre des congés payés afférents pour les heures supplémentaires accomplies du 1er janvier 2013 jusqu'à son licenciement.

4/ Sur la contrepartie obligatoire en repos

M. [F] [L] revendique une somme de 17 100,06 euros à titre d'indemnité compensatrice de repos compensateur.

Le salarié justifiant par ses décomptes avoir accompli 335,38 heures supplémentaires au titre de l'année 2013, soit 115,38 heures au-delà du contingent annuel de 220 heures ouvrant droit à une contrepartie obligatoire en repos dont il a été privé, il lui sera alloué une somme de 5 210,66 euros à titre d'indemnité de ce chef.

5/ Sur la demande de dommages-intérêts pour inobservation du repos quotidien et du repos hebdomadaire

Aux termes de l'article L. 3132-2 du code du travail, le repos hebdomadaire doit avoir une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives auxquelles s'ajoutent les heures consécutives de repos quotidien, c'est-à-dire onze heures. Le repos hebdomadaire est donc d'une durée minimale de trente-cinq heures.

M. [F] [L] affirme, au regard des pièces qu'il produit, que son repos quotidien n'a pas été respecté aux dates suivantes : du 11 au 12 février 2013 (8h14 de repos consécutifs), du 12 au 13 février 2013 (7h15 de repos consécutifs), du 18 au 19 avril 2013 (10h44 de repos consécutifs), du 13 au 14 juin 2013 (10h de repos consécutifs), du 26 au 27 mars 2014 (10h40 de repos consécutifs. Il ajoute que 35 heures de repos hebdomadaire ne lui ont pas non plus été accordées entre la semaine 37 et la semaine 38 en 2013 (12 jours travaillés consécutivement), entre la semaine 13 et la semaine 14 en 2014 (travail durant les 2 jours du week-end), entre la semaine 14 à la semaine 15 de 2014 (travail durant les 2 jours du week-end). Le salarié fait valoir que ce management a contribué à la dégradation de son état de santé et il demande une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

À défaut pour l'employeur de contredire par des éléments objectifs les allégations étayées du salarié, il sera alloué à ce dernier une somme de 1 500 euros en réparation du préjudice subi pour avoir était privé de son droit à repos quotidien et hebdomadaire. Le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef.

6/ Sur le manquement à l'obligation de sécurité

En vertu de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. L'article L. 4121-2 précise les principes généraux de prévention.

M. [F] [L] prétend qu'il a subi un préjudice moral du fait de la dégradation progressive de ses conditions de travail, qui a eu un retentissement sur son état de santé, puisque, après avoir été arrêté pour des troubles anxio-dépressif, il a souffert, à compter de cette date d'une profonde dépression réactionnelle (pièces 36). Il indique que le management de la société a d'ailleurs été dénoncé, dans un livre, par le président de la filiale française, lui-même, M. [R] [I], qui a déclaré avoir « vu des cadres démissionner sans point de chute d'ailleurs, ils préféraient cela, quel que soit le prix personnel à payer, dans l'ambiance de travail et les pressions permanentes leur étaient insupportables » (pièce 37) et que lui-même a alerté à trois reprises sa hiérarchie sur ses conditions de travail sans que celle-ci ne lui apporte de solution satisfaisante.

En réparation du préjudice subi de ce chef, M. [F] [L] réclame une somme de 50 000 euros nets à titre de dommages-intérêts.

A défaut pour l'employeur de justifier des mesures mises en 'uvre pour protéger la santé et la sécurité du salarié et, notamment, pour s'assurer qu'il ne subissait pas une charge de travail trop importante, il sera alloué à M. [F] [L] une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice subi.

7/ Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail

Les dispositions combinées des articles L. 1231-1 du code du travail et 1224 du code civil permettent au salarié de demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations contractuelles.

Il appartient à M. [F] [L] d'établir la réalité des manquements reprochés à son employeur et de démontrer que ceux-ci sont d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation contractuelle. La résiliation prononcée produit les mêmes effets qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par ailleurs si, ayant engagé l'instance en résiliation de son contrat de travail, le salarié a continué à travailler au service de l'employeur et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; si tel est le cas, il fixe la date de la rupture à la date d'envoi de la lettre de licenciement; c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.

La réalité et la gravité de ces manquements sont appréciés à la date où la juridiction statue et non à la date où ils se sont prétendument déroulés

Le salarié fonde sa demande de résiliation judiciaire sur les manquements précédemment évoqués ainsi que sur le fait qu'il se serait vu imposer une modification unilatérale de son contrat de travail par l'employeur. A cet égard, il rapporte qu'en 2011 la société LG Electronics France s'est trouvée confrontée à des difficultés économiques qui l'ont contrainte à mettre en 'uvre une réorganisation interne et des suppressions de postes. Il a, ainsi, été décidé de fusionner les équipes commerciales des produits «Bruns » et « Blancs » en une seule équipe commerciale et de redécouper les secteurs géographiques des commerciaux. C'est ainsi que sans se voir proposer le moindre avenant à son contrat de travail, M. [F] [L] est devenu responsable des commerciaux des produits Blancs, en plus de ceux des produits Bruns qu'il supervisait déjà. En dépit de cet accroissement de ses responsabilités et de sa charge de travail, le salarié prétend qu'il n'a bénéficié d'aucun moyen supplémentaire ce qui a entraîné une dégradation de ses conditions de travail. M. [F] [L] poursuit en indiquant que le but recherché par la société intimée était en réalité de supprimer les équipes commerciales en réduisant drastiquement leurs effectifs jusqu'à constater la dissolution de ce service en janvier 2016.

Considérant que la réorganisation de la société LG pour motif économique impliquait la modification des contrats de travail, M. [F] [L] affirme que ces dispositions auraient dû être intégrées au PSE et être soumises au CHSCT et au Comité d'Entreprise avant de lui être proposées en application de l'article L. 1222-6 du code du travail, qui prévoit les conditions de modification des contrats de travail pour motif économique. A défaut de respect par l'employeur de cette procédure, M. [F] [L] demande à ce qu'il soit jugé que la résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul ou, à tout le moins d'un licenciement économique sans cause réelle et sérieuse.

La société intimée réplique que, depuis son entrée au sein initialement de la société Goldstar, M. [F] [L] n'a cessé de bénéficier de promotions et d'avancements de carrière qui ont toujours été formalisés par des avenants à son contrat de travail qu'il a signés. La SAS LG Electronics France conteste avoir modifié unilatéralement le contrat de travail de l'appelant en lui confiant la supervision des commerciaux pour les produits « Blancs » et elle invoque le fait, qu'en application de son pouvoir de direction, elle pouvait modifier les tâches qui étaient confiées au salarié, dès lors qu'elles relevaient de sa qualification et de la définition de ses fonctions de Directeur des Ventes. Enfin, il est relevé que le licenciement du salarié n'est pas intervenu pour un motif économique mais pour différents griefs énumérés dans la lettre de licenciement.

En cet état, la cour retient que l'augmentation des tâches confiées au salarié ne peut être comprise comme une modification unilatérale de son contrat de travail dès lors que ses nouvelles missions étaient de même nature que celles qu'il accomplissait déjà et qu'elles ressortaient de sa compétence. L'employeur n'était donc pas tenu de recueillir l'accord du salarié et encore moins de respecter la procédure prévue à l'article L. 1222-6 du code du travail et de consulter le Comité d'Entreprise. En revanche, le non-respect par l'employeur des garanties du forfait en jours, les heures supplémentaires réalisées par le salarié et non rémunérées ainsi que sa privation de repos hebdomadaires et quotidiens sont autant de manquements graves qui rendaient impossible le maintien de la relation contractuelle. Il sera donc fait droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, cette rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à compter du 4 juin 2014.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [F] [L] qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement

M. [F] [L] qui était âgé de 44 ans, à la date de son licenciement, qui comptait 10 ans d'ancienneté et qui justifie ne pas avoir retrouvé d'emploi postérieurement à son licenciement se verra allouer la somme de 34 278 euros en réparation de son entier préjudice.

Le contrat de travail étant rompu par une résiliation judiciaire aucune indemnité n'est due au salarié pour non-respect de la procédure de licenciement, M. [F] [L] sera donc débouté de sa demande de ce chef. Le jugement déféré sera, également, confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes de dommages-intérêts pour refus de la société intimée de mettre en 'uvre l'article L. 1222-6 du code du travail, pour nullité de la procédure de consultation du comité d'entreprise et pour toutes ses demandes en relation avec le défaut de mise en 'uvre du PSE (dommages-intérêts pour défaut d'indemnité supra-légale, pour perte du congé de reclassement et demande d'application du PSE).

8/ Sur la demande de reconventionnelle de LG Electronics France de remboursement des JRTT indus

La société intimée fait valoir que si la convention de forfait en jours est déclarée inopposable au salarié, il doit être jugé que les 12,5 JRTT qui ont été octroyés au salarié sur la base de cette convention, entre 2011 et 2014, étaient indus et qu'ils doivent donner lieu à remboursement à hauteur de 3 574,04 euros.

La convention de forfait ayant été déclarée privée d'effet au point 2, il sera fait droit à la demande de remboursement des jours de RTT dont le salarié a bénéficié indûment. Il sera donc alloué à la SAS LG Electronics France une somme de 3 574,04 euros.

9/ Sur les autres demandes

La SAS LG Electronics France supportera les dépens d'appel et sera condamnée à payer à M. [F] [L] la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :

- condamné la société LG Electronics France à payer à M. [F] [L] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- débouté M. [F] [L] de sa demande de rappel de bonus 2014, de ses demandes de dommages-intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement, inobservation des dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail, en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de procédure d'information du Comité d'Entreprise et du CHSCT, pour perte du congé de reclassement, ainsi que de sa demande au titre de l'indemnité complémentaire de licenciement prévue par le PSE et de sa demande tendant à bénéficier de l'intégralité des dispositions du PSE

- débouté la société LG Electronics France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné la société LG Electronics France aux dépens,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la convention de forfait en jours qui a été appliquée au salarié lui est inopposable,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la SAS LG Electronics France à effet au 4 juin 2014,

Condamne la SAS LG Electronics France à payer à M. [F] [L] les sommes suivantes :

- 27 017,62 euros bruts à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaire

- 2 701,76 euros bruts au titre des congés payés y afférents

- 5 210,66 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice au titre de la contrepartie obligatoire en repos

- 1 500 euros bruts à titre de dommages-intérêts pour inobservation du repos quotidien et hebdomadaire

- 5 000 euros bruts à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité

- 34 278 euros bruts à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Condamne M. [F] [L] à payer à la SAS LG Electronics France la somme de 3 574,04 euros en remboursement des jours de RTT attribués entre 2011 et 2014 au titre de la convention de forfait en jours,

Ordonne la compensation entre cette somme et les sommes mise à la charge de la société dans le cadre du présent litige,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SAS LG Electronics France aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 18/05336
Date de la décision : 29/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-29;18.05336 ?
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