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28/06/2022 | FRANCE | N°20/008227

France | France, Cour d'appel de Paris, H4, 28 juin 2022, 20/008227


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 13

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 20/00822 - No Portalis 35L7-V-B7E-CBIMW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 décembre 2019 - Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG no 18/01839

APPELANT

Monsieur [B] [M]
Né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 7]
[Adresse 6]
[Localité 4]

Représenté par Me Frédéric AMSAL

LEM, avocat au barreau de PARIS, toque : A0069

INTIMÉ

Monsieur [K] [C]
[Adresse 3]
[Localité 5]

Représenté par Me Thierry KUHN de la ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 13

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 20/00822 - No Portalis 35L7-V-B7E-CBIMW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 décembre 2019 - Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG no 18/01839

APPELANT

Monsieur [B] [M]
Né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 7]
[Adresse 6]
[Localité 4]

Représenté par Me Frédéric AMSALLEM, avocat au barreau de PARIS, toque : A0069

INTIMÉ

Monsieur [K] [C]
[Adresse 3]
[Localité 5]

Représenté par Me Thierry KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque: P0090, substitué par Me Gérard SALLABERY, avocat au barreau de PARIS, toque : E379

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Estelle MOREAU, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nicole COCHET, Première présidente de chambre
Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre
Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Séphora LOUIS-FERDINAND
ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre, pour Mme Nicole COCHET, Première présidente empêchée, et par Sarah-Lisa GILBERT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

* * * * *

Le divorce de M. [B] [M] et Mme [X] [H], mariés le [Date mariage 2] 1999, a été prononcé par la cour d'appel de Paris le 11 janvier 2007. M. [M] ayant assigné Mme [H] aux fins de liquidation et de partage de la communauté ayant existé entre les époux, M. [K] [C], notaire, a été désigné en qualité de liquidateur, puis a dressé un procès verbal de difficultés le 5 mai 2007.

Par jugement du 17 mai 2011, le tribunal de grande instance d'Evry a reconnu diverses créances des époux sur l'indivision et la communauté et a renvoyé M. [M] et Mme [H] devant M. [C] pour poursuivre les opérations de liquidation et de partage de l'indivision et de la communauté ayant existé entre eux sur la base des points de principe tranchés par le jugement. Par arrêt du 10 avril 2013, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement sauf en ce qui concerne le quantum de la créance de M. [M] envers l'indivision. Cet arrêt a fait l'objet d'un pourvoi rejeté par la Cour de cassation le 24 juin 2014.

Le 27 août 2014, M. [C] a reçu Mme [H] seule puis a adressé un courriel à M. [M] pour l'informer de cette visite et du contenu de leurs échanges.

Par courrier du 22 octobre 2014, M. [C] a convoqué M. [M] et Mme [H] pour le 8 novembre 2014 à l'effet de procéder au partage du solde du prix de vente du bien immobilier et d'accepter ou non le projet de partage. Le notaire a versé à M. [M] la somme sequestrée de 45 037,19 euros mais les parties ne sont parvenues à aucun accord.

M. [C] s'étant dessaisi du dossier, M. [M] a obtenu son remplacement par M. [G], notaire à [Localité 5], afin de procéder aux opérations de liquidation partage de l'indivision et de la communauté ayant existé entre les époux, par ordonnance du président du tribunal de grande instance d'Evry du 9 janvier 2018.

C'est dans circonstances que M. [M] a assigné M. [C] le tribunal de grande instance d'Evry par acte du 22 mars 2018, en responsabilité civile professionnelle.

Par jugement du 9 décembre 2019, le tribunal a :
- débouté M. [M] de l'ensemble de ses demandes,
- condamné M. [M] à verser à M. [C] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [M] aux dépens.

Par déclaration du 30 décembre 2019, M. [M] a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions notifiées et déposées le 26 août 2020, M. [B] [M] demande à la cour de :
- dire et juger que M. [C] a manqué à ses obligations dans le cadre des opérations de liquidation partage,
- dire et juger que ces manquements lui ont causé d'importants préjudices,
- infirmer le jugement,
- condamner M. [C] à lui régler les sommes suivantes :
- au titre de l'arrêt d'appel : 9 351,13 euros,
- au titre des frais annexes : 2 150 euros,
- au titre du préjudice moral :10 000 euros,
- condamner M. [C] à lui régler la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de la présente instance.

Dans ses dernières conclusions notifiées et déposées le 8 juillet 2020, M. [K] [C] demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement,
- dire et juger qu'il n'a commis aucune faute,
- dire et juger que M. [M] ne caractérise pas le lien de causalité qui doit nécessairement exister
entre la faute invoquée et le préjudice allégué,
- dire et juger que M. [M] ne caractérise son dommage ni dans son principe ni dans son quantum,
- débouter M. [M] de toutes ses demandes,
- condamner M. [M] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [M] en tous les dépens.

La cour a invité les parties, d'une part, s'agissant de la mise en cause de la responsabilité du notaire, à formuler leurs observations quant à une éventuelle perte de chance et, d'autre part, à justifier de l'état d'avancement des opérations de liquidation-partage confiées à M. [G] et faire toutes observations utiles à ce titre. M. [M] et M. [C] ont respectivement adressé à la cour une note en délibéré les 3 et 23 mai 2022, et le 10 mai 2022.

SUR CE

Sur la faute du notaire :

Le tribunal a jugé que :
- M. [C] a respecté le principe du contradictoire et son devoir d'impartialité en ce que :
- il a aussitôt informé M. [M] de la visite de Mme [H] et du contenu de leurs échanges par courriel du 27 aooût 2014,
- s'il n'est pas démontré que Mme [H] s'est présentée au rendez-vous du 8 novembre 2014, elle a bien été convoquée,
- le contenu du courriel de M. [C] du 27 août 2014 est insuffisant à établir que le notaire a manqué à son devoir d'impartialité,
- en revanche, M. [C] a manqué à ses obligations en ne dressant pas un second procès-verbal de difficultés, sinon un procès-verbal de carence, et en se dessaisissant du dossier sans en informer le tribunal l'ayant désigné.

M. [M] fait valoir que :
- M. [C] a manqué à son devoir d'impartialité en réservant tous ses conseils à Mme [H], en la recevant seule et en conseillant fortement à M. [M] d'accepter les conditions de signature de la liquidation et de la communauté imposées par Mme [H],
- M. [C] a manqué à ses devoirs de notaire en ne délivrant pas de procès-verbal de difficultés et en se dessaisissant de la mission confiée par le tribunal sans l'informer.

M. [C] répond que :
- il a correctement rempli sa mission jusqu'à ce que M. [M] adopte un comportement déplacé, incompatible avec la poursuite de celle-ci, de sorte que ce n'est pas par sa faute que la mission a été interrompue,
- le jugement a pertinemment retenu qu'il avait respecté le principe du contradictoire et d'impartialité.

Ainsi que l'a justement retenu le tribunal, il n'est caractérisé aucun manquement par M. [C] au titre du respect du contradictoire dès lors que s'il s'est entretenu seul avec Mme [H] qui s'est présentée à son étude le 27 août 2014, il a aussitôt adressé un courriel à M. [C] pour le tenir informé de cette visite et du contenu de leur entretien. Il n'est aucunement démontré que M. [C] aurait réservé ses conseils à Mme [H] dans son intérêt exclusif et au détriment de ceux de M. [M] et aurait ainsi manqué à son devoir d'impartialité, en l'informant, dans son courriel du 27 août 2014, que Mme [H] lui avait confirmé son accord pour qu'il débloque les fonds séquestrés à la condition que ce soit à titre de solde de tout compte et qu'il renonce à lui réclamer le solde qu'elle ne peut payer, et par le seul emploi de la formule "Espérant que vous accepterez cette proposition" dans le souci de rechercher un accord entre les parties.

C'est également tout aussi pertinemment que les premiers juges ont retenu que le notaire, confronté à l'impossibilité des parties de trouver un accord et les ayant convoquées en vue d'accepter ou non le projet de partage, avait manqué à ses obligations en ne dressant pas un second procès-verbal de difficultés ou à tout le moins un procès-verbal de carence à considérer que l'attitude de M. [M] ait effectivement contrevenu à la signature d'un tel acte et en n'informant pas le tribunal qu'il n'entendait plus poursuivre sa mission en raison du comportement de M. [M] qu'il jugeait déplacée.

Sur le préjudice et le lien de causalité

Le tribunal a jugé que :
- M. [M] n'établit pas le lien de causalité entre les fautes du notaire et le préjudice correspondant au reliquat de la créance due par Mme [H] au titre de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 10 avril 2013,
- il ne justifie ni du préjudice moral allégué, ni d'un lien de causalité avec les fautes du notaire,
- il ne démontre pas s'être acquitté des frais de notaire dont il sollicite le remboursement,
- le préjudice allégué au titre des frais d'huissier de justice n'est pas causé par les fautes du notaire.

M. [M] fait valoir que si le notaire avait dressé le second procès-verbal de difficultés et informé le tribunal de son dessaisissement, il aurait pu assigner son épouse en partage judiciaire sur la base du projet liquidatif, et que le tribunal aurait sans nul doute, sur la base de l'état liquidatif, procédé au partage en tenant compte du calcul effectué par le notaire. Il soutient en conséquence qu'il a subi un préjudice financier en lien causal avec les fautes du notaire en ce ce qu'il a été privé de l'intégralité des sommes qu'il aurait dû percevoir, et qu'il n'a toujours pas récupérées, si les opérations de liquidation partage avaient été menées à leur terme, soit les sommes suivantes :
- au titre de l'arrêt d'appel : 9 351,13 euros,
- au titre des frais annexes (frais de notaire et d'huissier de justice) : 2 150 euros.
Il invoque également un préjudice moral de 10 000 euros en ce qu'il reste toujours dans l'indivision et compte tenu de l'attitude discourtoise du notaire à son égard.
Il précise à la demande de la cour que M. [G] a établi le 25 juillet 2018 un projet de partage aux termes duquel une somme de 9 083 euros devait lui être reversée et que par courrier du 25 septembre 2018, M. [C] lui a adressé un décompte mentionnant le versement de ces fonds alors que dans son propre projet de partage, d'autres sommes devaient lui être versées.

M. [C] répond que le préjudice allégué par M. [M] n'est pas la conséquence directe de ses prétendues fautes, ni établi en ce que :
- il n'existe aucun lien de causalité entre ses prétendues fautes et la créance de M. [M] à l'égard de son ex-épouse,
- les opérations de partage n'ont pas pu être réalisées du seul fait du désaccord permanent entre les ex-époux et le préjudice moral allégué au titre du désarroi de M. [M] espérant voir ces opérations se terminer rapidement n'est pas lié à ses fautes prétendues, ni démontré,
- les demandes au titre des frais de notaire dont M. [M] ne justifie pas s'être acquitté et d'huissier de justice ne sont pas plus justifiées.
Il ajoute qu'il n'est caractérisé aucune perte de chance, ses fautes prétendues n'ayant en aucun cas empêché la liquidation-partage de la communauté, un procès-verbal de difficultés ayant été dressé le 5 mai 2007 et l'attitude de M. [M] n'ayant pas permis la poursuite des opérations.

M. [C] a été nommé par le tribunal de grande instance d'Evry avec comme mission de poursuivre les opérations de liquidation et de partage de l'indivision et de la communauté ayant existé entre les époux sur la base des points de principe tranchés par le jugement.

M. [C] s'étant dessaisi du dossier, M. [M] a obtenu son remplacement par M. [G], notaire à [Localité 5], afin de procéder aux opérations de liquidation partage de l'indivision et de la communauté ayant existé entre les époux, par ordonnance du 9 janvier 2018, avec mission identique à celle procédant du jugement du tribunal de grande instance d'Evry du 17 mai 2011.

L'absence d'information du tribunal du dessaisissement de M. [C] de sa mission a seulement privé M. [M] de la possibilité d'obtenir plus rapidement la désignation d'un notaire en remplacement.

M. [M] ayant fait le choix de solliciter le remplacement de M. [C] plutôt que d'informer le tribunal d'une difficulté relative au défaut d'établissement d'un second procès-verbal de difficultés ou d'un procès-verbal de carence, ne justifie pas qu'il a été privé de la chance de saisir aussitôt le tribunal aux fins de liquidation partage de la communauté.

Il est établi qu'alors que le projet de partage de M. [C], au titre duquel les époux [M]-[H] étaient convoqués le 8 novembre 2014, mentionnait une créance de M. [M] de 50 220 euros, l'étude notariale de M.[C] a viré à M. [M] la somme de 51 204,75 euros le 16 décembre 2014, en sorte que ce dernier a été rempli de ses droits, même au delà du projet.

M. [M] échoue donc à démontrer un quelconque préjudice financier actuel et certain ou une quelconque perte de chance réelle et sérieuse en lien causal avec les fautes du notaire, dès lors qu'il a perçu les fonds qui lui étaient dus selon le projet de liquidation partage et dès le dessaisissement de M. [C]. Ni le décompte de ce dernier, ni celui de M. [G] ne mentionnent le véhicule de 10 500 euros comme un bien propre de M. [M], mais de la communauté, en sorte que l'appelant inclut vainement la valeur de ce véhicule dans le décompte de sa créance pour prétendre à la perte d'une somme de 9531,13 euros en raison de la faute de l'intimé.

M. [M] ne justifiant pas du règlement personnel ni des frais de liquidation partage mentionnés à raison à la charge de la communauté, ni des frais d'huissier de justice, n'établit pas qu'il aurait pu obtenir le remboursement de ces frais annexes.

Le préjudice moral allégué aux motifs que M. [M] "reste toujours dans l'indivision, alors que depuis de nombreuses années il ne demande qu'à en sortir" est imputable au seul désaccord des époux et sans lien causal avec les fautes du notaire.

M. [M] doit donc être débouté de l'ensemble de ses demandes, en confirmation du jugement.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

M. [M] échouant en ses prétentions sera condamné aux dépens d'appel et à payer à M. [C] une indemnité de procédure que l'équité commande de fixer à 3000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne M. [B] [M] à payer à M. [K] [C] une somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [B] [M] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : H4
Numéro d'arrêt : 20/008227
Date de la décision : 28/06/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Evry, 09 décembre 2019


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-28;20.008227 ?
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