La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2022 | FRANCE | N°18/198187

France | France, Cour d'appel de Paris, H4, 28 juin 2022, 18/198187


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 13

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 18/19818 - No Portalis 35L7-V-B7C-B6I5U

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2018 - Tribunal de Grande Instance de de Paris - RG no 16/04401

APPELANTS

Monsieur [X] [W]
[Adresse 2]
[Localité 6]

SCI MELANIE
[Adresse 4]
[Localité 7]

SCI ERICA
[Adresse 3]
[Locali

té 6]

Tous représentés par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515
Ayant pour avocat plaidant Me Vincent de LA SEIGLI...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 13

ARRÊT DU 28 JUIN 2022

(no , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 18/19818 - No Portalis 35L7-V-B7C-B6I5U

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2018 - Tribunal de Grande Instance de de Paris - RG no 16/04401

APPELANTS

Monsieur [X] [W]
[Adresse 2]
[Localité 6]

SCI MELANIE
[Adresse 4]
[Localité 7]

SCI ERICA
[Adresse 3]
[Localité 6]

Tous représentés par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515
Ayant pour avocat plaidant Me Vincent de LA SEIGLIERE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1261

INTIMÉE

Madame [M] [Z]
Née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 6]
[Adresse 5]
[Localité 6]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
Ayant pour avocat plaidant Me Sabine DU GRANRUT, avocat au barreau de PARIS, toque: K0190

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Estelle MOREAU, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Nicole COCHET, Première présidente de chambre
Mme Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre
Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Séphora LOUIS-FERDINAND

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chamrbe, pour Mme Nicole COCHET, Première présidente empêchée, et par Sarah-Lisa GILBERT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

* * * * *

La Sci Mélanie, dont le gérant et associé majoritaire est M. [X] [W], est propriétaire de huit magasins et d'un local dans un ensemble immobilier destiné au commerce de gros et constitué des bâtiments A à E composant l'immeuble en copropriété situé [Adresse 4].

Elle a confié en mai 2004 à Mmes [H] [A] et [M] [Z], avocates, la mission de défendre ses intérêts à l'encontre de la Sci des Gardinoux, copropriétaire majoritaire, à laquelle il était reproché d'avoir illicitement fait édifier entre 2001 et 2003 plusieurs bâtiments destinés à la location sur les parties communes, lui créant des difficultés d'exploitation de ses lots commerciaux.

Par jugement du 25 juillet 2007, le tribunal de grande instance de Bobigny a condamné la Sci des Gardinoux à démolir les constructions précitées ainsi qu'à verser à la Sci Mélanie une indemnité d'occupation depuis 2001 jusqu'à leur démolition effective.

Aux termes d'un protocole d'accord transactionnel signé le 23 juin 2008, la Sci Mélanie, assistée par Mme [Z], a renoncé à l'exécution du jugement à charge pour la Sci des Gardinoux de lui verser une indemnité transactionnelle (300 000 euros) et une indemnité d'occupation (8 000 euros à compter du 31 décembre 2007), et de régulariser à ses frais la situation des constructions litigieuses, notamment par la création de lots de copropriété dont deux, exempts de vices, à transférer en pleine propriété à la Sci Mélanie.

Le 30 juin 2009, l'assemblée générale des copropriétaires a décidé de régulariser la situation administrative vis-à-vis des services de l'urbanisme, de définir les droits de chaque copropriétaire sur les lots existants, a renoncé à solliciter la démolition des constructions litigieuses et a avalisé l'économie de la transaction.

Par arrêté du 14 août 2012, la commune d'Aubervilliers a accordé au syndicat des copropriétaires un permis de construire portant sur la régularisation des diverses constructions. Les travaux de mise en conformité devaient être engagés par la Sci des Gardinoux avant le 14 août 2014.

Par acte authentique reçu le 26 juin 2013 par M. [R] [G], notaire, il a été procédé au modificatif de l'état descriptif de division de l'ensemble immobilier et la propriété des lots 25 et 26 issus de la division du lot no 21, et du lot123 a été transférée au profit de la Sci Mélanie, les lots étant valorisés à hauteur de 119 659,47 euros.

Par assemblée générale du 26 juin 2013, le syndicat des copropriétaires a constaté le caractère définitif de la vente des lots de copropriété par ses soins au profit de la Sci Mélanie et a approuvé le projet modificatif de l'état descriptif de division.

A la suite de la réalisation de nouveaux travaux sans autorisation par la Sci des Gardinoux en mars 2013 dans le bâtiment C, la Sci Mélanie a obtenu la désignation en référé de M. [K], expert judiciaire, le 23 juin 2014, au titre de désordres de structure affectant les bâtiments A, B, C et D dans un premier temps, puis de désordres affectant la toiture du bâtiment C suivant extension de mission du 27 septembre 2017. L'expert, qui a déposé son rapport le 28 décembre 2018, conclut à la non-conformité des lots et ventile le coût de réparation entre la Sci des Gardinoux, s'agissant des travaux effectués, et du syndicat des copropriétaires au titre des constructions d'origine. Les travaux n'ayant pas été exécutés, la société Mélanie a assigné la Sci les Gardinoux devant le tribunal judiciaire de Paris, laquelle instance est toujours en cours.

M. [W] a créé la Sci Erica aux fins de vente de lots de la Sci Mélanie à son bénéfice.

Le 13 juillet 2014, la Sci Mélanie a dessaisi Mme [Z] de la défense de ses intérêts.

C'est dans ces circonstances que par acte du 29 février 2016, la Sci Mélanie a fait assigner Mme [Z] devant le tribunal de grande instance de Paris en responsabilité civile professionnelle. M. [W] et la Sci Erica sont volontairement intervenus à cette procédure.

Par jugement du 27 juin 2018, le tribunal a :
- déclaré recevables l'intervention volontaire de M. [W] et celle de la Sci Erica,
- débouté la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [W] de l'intégralité de leurs demandes indemnitaires,
- débouté Mme [Z] de sa demande de dommages et intérêts pour abus du droit d'agir en justice,
- condamné in solidum la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [W] aux dépens avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- condamné la Sci Mélanie à payer à Mme [Z] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 7 août 2018, M. [W], la Sci Mélanie et la Sci Erica ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 4 mars 2022, la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [X] [W] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il les déclare recevables en leurs demandes et déboute Mme [Z] de sa demande au titre de dommages et intérêts pour abus du droit d'agir en justice,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il condamne la Sci Mélanie aux dépens et à payer à Mme [Z] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en toutes ses autres dispositions les déboutant de leurs demandes pécuniaires, ci-après actualisées dans leur quantum pour certaines,
statuant à nouveau,
- condamner Mme [Z] à réparer les préjudices subis par la Sci Mélanie et ainsi à lui payer, à titre de dommages et intérêts :
- le montant des notes d'honoraires réglées à Me [Y], soit 3 347,50 euros hors taxe,
-le montant des notes d'honoraires réglées à Me [C], soit la somme de 25 476,20 euros réglée en 2014 et 2015,
-le montant des notes d'honoraires réglées à Me [F], soit la somme de 37 695 euros à ce jour, sauf à parfaire,
-le montant des notes d'honoraires réglées à Me [L] pour un montant total de 33 598 euros hors taxe à ce jour, sauf à parfaire,
- à titre de préjudice matériel, une somme de 253 800 euros,
- le montant des notes d'honoraires réglées à Me [O], huissier de justice, pour un montant total de 1 930,67 euros à ce jour,
- le montant des notes d'honoraires et frais réglés aux huissiers de justice pour signification à Iva, Reflet et Sci des Gardinoux, pour éviter la perte du permis de construire, soit la somme de 652 euros hors taxe,
- le montant des frais réglés à la société Dear Concept, soit la somme de 5 000 euros hors taxe en 2014, 2015, et 2016 à ce jour sauf à parfaire,
- le montant des frais réglés à [N] [T], ingénieur structure, soit la somme de 6 880 euros,
-le montant des frais liés aux différents constats d'huissiers de justice (dont l'AG du 30.07.2014) soit la somme de 2 211 euros hors taxe,
-le montant des frais de l'expertise judiciaire en cours, soit la somme de 10 200 euros à ce jour, sauf à parfaire,
-le montant des frais de l'expertise réactualisée de [P] en décembre 2014 soit la somme de 2 000 euros à ce jour, sauf à parfaire,
- condamner Mme [Z] à payer à M. [W] le montant de la plus-value générée par la vente des anciens lots de la Sci Mélanie au lieu des nouveaux lots qu'elle aurait vendus sans aucune plus-value s'ils étaient entrés à leur valeur dans son patrimoine, soit la somme de 235 573 euros (85 889 euros sur le lot no144, et 149.684 euros sur le lot no145),
- condamner Mme [Z] à payer à la Sci Mélanie :
- le montant des frais facturés par la Sade pour prise de garantie sur nouveaux lots en lieu et place des anciens lots vendus, soit la somme de 2 000 euros hors taxe,
-le montant des frais notariés pour la prise de garantie au profit de la Sade en lieu et place de l'ancienne garantie, soit la somme de 4 581euros hors taxe,
- condamner Mme [Z] à payer à la Sci Erica le montant des frais bancaires (intérêts bancaires liés au prêt contracté par la Sci Erica), du fait de l'impossibilité de vendre à un tiers, à cause de la situation juridique de l'ensemble immobilier, et donc de devoir contracter un nouveau prêt, à hauteur de 242 428,91 euros,
- condamner Mme [Z] à verser à M. [W] la somme de 417 093 euros correspondant au montant de la plus-value "artificielle" car générée par une minoration excessive des lots 25, 26 et 123 entrés dans le patrimoine de la Sci Mélanie,
- condamner Mme [Z] à verser à la Sci Mélanie la somme de 306 966,65 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par la sci Mélanie en raison de la dévalorisation de ses lots d'origine puisque la situation juridique n'a pas changé, sur la base de 30% de dévalorisation correspondant à la valeur portée sur l'expertise du 30.09.2012 de la société [P],
- condamner Mme [Z] à verser à la Sci Erica la somme de 132 300,11 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par la Sci Erica en raison de la dévalorisation de ses lots d'origine puisque la situation juridique n'a pas changé sur la base de 30% de dévalorisation correspondant à la valeur portée sur l'expertise du 30.09.2012 de la société [P],
- condamner Mme [Z] à verser à la Sci Mélanie et à M. [W] la somme de 60 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice moral lié aux indescriptibles tracasseries inhérentes à un litige qui perdure depuis douze ans,
- condamner Mme [Z] à leur verser la somme de 25 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 22 février 2022, Mme [M] [Z] demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de condamnation de la Sci Mélanie, de la Sci Erica et de M. [W] à lui verser la somme de 25 000 euros à titre de dommages intérêts compte tenu du caractère abusif de la procédure,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'aucune pièce ne venait établir qu'elle avait clairement attiré l'attention de la Sci Mélanie et de son gérant M. [W] sur les incidences fiscales liées à la valorisation des biens,
- condamner solidairement la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [W] à lui verser la somme de 60 000 euros de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive,
à titre subsidiaire,
- confirmer le jugement rejetant les demandes formées par la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [W] aux fins d'engager sa responsabilité,
- débouter la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [W] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
y ajoutant en cause d'appel,
- condamner la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [W] solidairement à lui verser la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [W] aux entiers dépens.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 8 mars 2022.

SUR CE

Sur la recevabilité des dernières écritures des appelants :

Par conclusions d'incident du 30 mars 2022, Mme [Z] sollicite le rejet des débats des écritures des appelants du 4 mars 2022 auxquelles elle indique ne pas avoir eu matériellement le temps de répliquer compte tenu de la clôture le 8 mars 2022.

Par conclusions d'incident du 11 avril 2022, la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [X] [W] sollicitent le rejet de cette demande aux motifs que leurs dernières écritures du 4 mars 2022 se limitent à de très rares ajouts et à répondre aux écritures de l'intimée qui n'a pas demandé de report de clôture pour le cas échéant y répliquer.

Selon l'article 15 du code de procédure civile, "Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elle produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense".

Les écritures de la la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [W] ne contiennent que quelques menues précisions par rapport à leurs précédentes écritures du 22 février 2022, en réponse aux conclusions de Mme [Z], qui était donc en mesure d'y répondre avant la clôture de l'audience si elle l'estimait opportun. Le principe du contradictoire ayant été respecté, il n'y a pas lieu de rejeter ces écritures du débat.

Sur la responsabilité de l'avocat :

Sur la faute :

Sur le défaut de conseil quant aux risques et conséquences de la conclusion de la transaction et de la cession litigieuse :

Le tribunal n'a retenu aucun manquement de l'avocat à son devoir de conseil quant aux risques et conséquences de la conclusion de la transaction et de la cession litigieuse en ce que :
- la Sci Mélanie ne saurait prétendre avoir été contrainte par son avocat de transiger puisqu'elle a signé la transaction le 23 juin 2008 et l'en a remercié,
- la transaction est valable, peu important que la cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 12 octobre 2016, ait refusé de l'homologuer en raison de l'absence de participation du syndicat des copropriétaires, dès lors qu'elle a été exécutée et que l'annulation n'a, à ce jour, pas été judiciairement prononcée,
- l'efficacité juridique de la transaction n'est pas discutable puisque :
- les conséquences des vices de structure affectant les lots cédés en exécution de la transaction ne peuvent pas être imputés à Mme [Z] dans la mesure où aucun élément ne permet d'établir qu'elle pouvait en soupçonner l'existence ou la probabilité et qu'il s'agit d'un risque inhérent à toute acquisition immobilière qui ne pouvait être anticipé par Mme [Z], qui n'était donc pas tenue d'avertir sa cliente ni d'amender l'accord en considération de ce risque général,
- en outre, rien ne permet de présumer que les demandeurs supporteront la charge définitive des frais engagés et à venir pour mettre un terme à cette situation préjudiciable, dès lors que les lots affectés des vices litigieux ont été construits par la Sci des Gardinoux,
- l'efficacité juridique de la transaction et de la cession n'est pas discutable dans la mesure où les engagements de la Sci des Gardinaux, notamment s'agissant de la régularisation des constructions litigieuses sur le plan urbanistique, y sont clairement exprimés et pourront une fois les problèmes de structure solutionnés, être mis à exécution,
- les éventuelles faiblesses juridiques de la transaction invoquées, telles que l'absence de clause pénale, doivent être mises en rapport avec l'importante efficacité économique de l'accord transactionnel pour la Sci Mélanie et supposant des concessions réciproques.

Les appelants soutiennent Mme [Z] a manqué à son devoir de conseil en ne s'assurant pas de la validité et de l'efficacité de la transaction du 23 juin 2008, en ce que :
- la transaction n'a pas d'efficacité pour poursuivre les buts objets de l'intervention de Mme [Z] qui devait obtenir de sa cliente des lots exempts de vices et n'a pas prévu des clauses claires, adaptées et coercitives à cette fin,
- le défaut d'efficacité de la transaction ressort du courrier de l'intimée du 4 novembre 2013, de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 12 octobre 2016 ayant refusé d'homologuer la transaction jugée nulle, et du jugement du tribunal judiciaire de Bobigny du 17 septembre 2020 ayant débouté la Sci Mélanie de sa demande d'exécution forcée de la transaction, ladite Sci se retrouvant avec des lots affectés de graves problèmes de structure et, suite au dépôt du permis de construire en 2014, avec des obligations de travaux au titre de la sécurité incendie sur tous ses lots y compris ceux d'origine,
- Mme [Z] a donné des conseils erronés à sa cliente, qu'elle aurait dû mettre en garde sur l'absence de capacité à disposer de droits afférents aux parties communes, dont seul le syndicat des copropriétaires est le légitime propriétaire, ainsi qu'il ressort de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 12 octobre 2016, peu important que le syndicat des copropriétaires ait, depuis lors, consenti des transferts de propriété sur les lots,
- l'absence totale de clauses pénales ou coercitives permettant l'exécution forcée de la transaction par la Sci des Gardinoux a contribué à son défaut d'efficacité, laissant toute latitude à ladite société pour refuser notamment d'apporter toutes garanties nécessaires sur la conformité des constructions, ou encore de mettre en oeuvre les travaux nécessaires pour remédier aux défaillances découvertes,
- le défaut de précision dans la transaction litigieuse quant à la cession de lots "exempts de vices" a permis à la Sci des Gardinoux de transmettre à la Sci Mélanie des lots viciés au regard des règles d'urbanisme en vigueur au moment des constructions et donc de la signature de la transaction,
- l'efficacité économique de l'accord n'était pas la mission confiée à Mme [Z] et n'est pas démontrée,
- Mme [Z] aurait dû évoquer dans la transaction les conséquences des constructions litigieuses sur les lots originels et leur dévalorisation qui perdure puisque les nouveaux lots obtenus ne la compensent pas, n'étant cessibles qu'à vil prix, et prévoir des clauses indemnitaires et coercitives à ce titre,
- dès lors qu'il ne s'agit pas d'une acquisition immobilière classique mais d'un transfert de propriété de constructions édifiées illicitement et pour lesquelles aucun document sur le mode constructif (DTU) n'a été transmis, l'avocate a commis une faute en incitant sa cliente à accepter des lots, sans audit préalable, sans dossier technique et sans réserve ou clause protectrice sur ces points,
- l'avocate avait connaissance des problèmes de structure et devait les anticiper,
- l'avocate a conseillé à la Sci Mélanie d'accepter le transfert des lots par acte notarié sans exiger de la part de la Sci des Gardinoux une expertise portant sur la structure des lots, se bornant à proposer concomittamment une résolution à l'assemblée générale des copropriétaires du 26 juin 2013 aux fins de réalisation d'une analyse structure de la totalité du bâtiment C et des bâtiments A et B, démontrant qu'elle avait conscience des problèmes de structure affectant les lots litigieux.

Ils font également valoir que Mme [Z] a manqué à son devoir de conseil relativement à l'acte notarié du 26 juin 2013 dont elle est à l'initiative du contenu, en :
- lui laissant signer l'acte transmettant des lots sans garantie technique et sans certificat de conformité, rendant cet acte inefficace,
- n'insérant aucune clause pour rendre les locaux d'origine à la Sci Mélanie.

L'intimée soutient n'avoir commis aucune faute aux motifs que :
- la transaction a été librement consentie, est valable et efficace en ce qu'elle a été exécutée dans son intégralité par la conclusion des actes de transfert de propriété du 26 juin 2013, peu important son absence d'homologation, et ce au mieux des intérêts de la Sci Mélanie compte tenu du contexte de l'époque,
- elle ne saurait être responsable d'une situation résultant de désordres révélés postérieurement à la conclusion de la transaction et sans lien avec celle-ci, ainsi qu'il ressort du jugement du tribunal judiciaire de Bobigny du 17 septembre 2020 devenu définitif, ni des conséquences prétendues de l'acte de vente du 26 juin 2013 dont elle n'est pas la rédactrice,
- les termes de la transaction démontrent l'incertitude dans laquelle se trouvaient les parties au jour de sa conclusion quant à la possibilité de régularisation des constructions,
- la Sci Mélanie, qui disposait de la possibilité, dans l'hypothèse où le transfert de propriété des constructions régularisées se serait révélé impossible, d'en solliciter la démolition, n'a jamais mis en oeuvre ce droit,
- la Sci Mélanie n'établit pas qu'elle l'aurait poussée à conclure la transaction et l'acte de cession et M. [W] est particulièrement averti en matière d'acquisition immobilière,
- la Sci Mélanie a déclaré, aux termes des actes de cession du 26 juin 2013, avoir une parfaite connaissance des biens.

L'avocat rédacteur d'acte engage sa responsabilité sur le fondement de l'article 1147 du code civil, dans sa version applicable aux faits, à charge pour celui qui l'invoque de démontrer une faute, un lien de causalité et un préjudice.

L'avocat est tenu envers son client d'un devoir de conseil sur les conséquences de l'acte qu'il rédige et doit lui délivrer toutes les informations nécessaires et d'assurer l'efficacité et la validité des actes qu'il rédige.

La transaction du 25 juin 2008 prévoit :
- la modification du règlement de copropriété, la Sci Gardinoux s'engageant à régulariser la situation des constructions qu'elle a érigées sur les parties communes à la copropriété sans autorisation des copropriétaires et/ou de l'administration,
- le versement par la Sci Gardinoux à la Sci Mélanie d'une part, d'une indemnité forfaitaire de 300 000 euros au titre de l'occupation des parties communes et des constructions litigieuses du jour de leur édification jusqu'au 31 décembre 2007, d'autre part, d'une indemnité d'occupation à compter du 1er janvier 2008, d'un montant de 8 000 euros mensuels, et revalorisée chaque année, ces sommes étant garanties par une caution bancaire de la Sci Gardinoux,
- la restitution des parties communes dues à la Sci Mélanie sous la forme d'une attribution de lots de copropriété, devant être créés en assemblée générale et dont deux lots parmi les lots 21, 22 et 123 devront être transférés en pleine propriété à la Sci Mélanie, après régularisation administrative, étant précisé que "La Sci des Gardinoux devra entreprendre toutes démarches utiles auprès de l'administration afin de régulariser lesdits lots, de sorte que la propriété en soit valablement transmissible à la Sci Mélanie exempte de tout vice, en apportant toutes les garanties de propriété régulière, relativement à des constructions régulièrement construites, identifiées et librement cessibles.
Les parties s'entendent pour définir la régularisation administrative au sens le plus large savoir, toute action permettant la régularisation des locaux construits, pour quelque cause et par quelque moyen que ce soit, permettant de conserver lesdits locaux.
Dans la mesure où cette régularisation serait obtenue, la Sci des Gardinoux s'oblige au transfert au profit de la Sci Mélanie de la totalité des tantièmes nécessaires pour rendre la Sci Mélanie propriétaire des lots 21 et 123.
Dans le cas où la régularisation serait obtenue, la Sci des Gardinoux s'oblige au transfert au profit de la Sci Mélanie de la totalité des tantièmes nécessaires pour rendre la Sci Mélanie propriétaire des lots 21 et 123;
Dans le cas où la régularissation d'un des lots 21 ou 123 ne pourrait être obtenue, le transfert d'un second lot sera effectué sur le lot de subsitution 122, de sorte que la Sci Mélanie reçoive bien deux lots.
Il est précisé que la Sci des Gardinoux fera son affaire personnelle du concours des différents copropriétaires pour aboutir à la régularisation desdits lots, en fonction des tantièmes leur appartenant, afin d'aboutir à l'exécution de la présente transaction.
(...)
Pour le cas où la Sci des Gardinoux ne pourrait pour une quelconque raison transmettre à la Sci Mélanie la propriété exempte de tout vice des lots visés (...), la Sci des Gardinoux s'engage irrévocablement à transférer la propriété à la Sci Mélanie de locaux équivalents en valeur et en rendement dépendant de la copropriété",
- la Sci des Gardinoux s'engage à supporter l'ensemble des frais de régularisation, notamment les frais et honoraires de notaire, d'architecte, de géomètre, de tenue d'assemblée générale, de régularisation du ou des permis de construire, des frais et charges de transfert de propriété, des frais de destruction éventuels et frais d'indemnisation des occupants des lots litigieux qui devraient être expulsés,
- en contrepartie des indemnisations qui lui sont consenties et des engagements irrevocables du transfert de la pleine propriété de deux lots exempts de tout vice jurdique, la Sci Mélanie renonce aux causes du jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 25 juillet 2007 et en particulier à la démolition des constructions litigieuses.

La transaction porte l'engagement de la Sci des Gardinoux de restituer des parties communes à la Sci Mélanie sous la forme d'une attribution de lots de copropriété, sans que soit associé à cet acte le syndicat des propriétaires, seul propriétaire des parties communes. En ne mettant pas en garde sa cliente sur l'absence de capacité de la Sci des Gardinoux à disposer de droits afférents aux parties communes et sur le risque de voir déclarer la transaction nulle par application de l'article 2045 du code civil, Mme [Z] a manqué à son devoir de conseil.

Le courrier de l'intimée à son client le 4 novembre 2013 (pièce 15), précisant "La transaction signée par la Sci Mélanie prévoit la propriété de trois lots de copropriété exempts de vices et librement cessibles (...). A ce jour, en cas de cession, il faudrait avertir l'acquéreur qu'il n'y a pas de conformité du PC [permis de construire] et qu'il existe un grave risque sur la structure des bâtiments A, B, C", ne contient pas l'aveu du défaut de validité et d'efficacité de la transaction mais invoque une difficulté d'exécution de celle-ci.

Par jugement du 17 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Bobigny a débouté la Sci Mélanie de sa demande d'exécution forcée de la transaction aux motifs que la Sci des Gardinoux l'avait correctement exécutée, et qu'en particulier :
- les engagements de la Sci des Gardinoux vis à vis de la Sci Mélanie, portant sur la modification du règlement de copropriété et la restitution des parties communes sous forme d'une attribution de lots de copropriété, au regard du droit de copropriété, ont été exécutés,
-l'ensemble des conditions assortissant le permis de construire a été réalisé et celui-ci a été obtenu par le syndicat des copropriétaires, de telle sorte que la situation administrative des constructions irrégulières au regard du droit de l'urbanisme a été régularisée,
- s'agissant du défaut d'obtention de la DAACT (déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux) allégué par la Sci Mélanie, il appartient au bénéficiaire du permis de construire de l'obtenir en application de l'article R.462-1 du code de l'urbanisme, et l'expert judiciaire M. [K] rappelle aux parties que le certificat de conformité n'engage pas l'administration sur les modes constructifs, le respect des DTU et les règles de l'art, et estime que rien ne s'oppose techniquement au dépôt d'une DAACT, en sorte que les vices de construction allégués par la Sci Mélanie dans le cadre d'une autre instance sont sans effet sur le dépôt d'une DAACT et l'obtention éventuelle d'un certificat de conformité des travaux aux règles d'urbanisme,
- la transaction ne peut avoir pour effet de régler une situation postérieure, résultant de désordres révélés ultérieurement et la Sci Mélanie ne démontre pas que la transaction comprenait l'obligation à la charge de la Sci des Gardinoux de réaliser des travaux réparatoires portant sur d'éventuels risques structurels qui auraient été découverts à l'occasion des opérations d'expertise judiciaire menées par M. [K] entre le 23 juin 2014 et le 26 décembre 2018, ni que ces désordres pré-existaient en 2008 au moment de la conclusion de la transaction et sont compris dans le périmètre de celle-ci.

Ainsi que l'ont pertinemment retenu les premiers juges, la transaction n'est pas dépourvue d'efficacité juridique dès lors qu'elle n'a fait l'objet d'aucune procédure en nullité, peu important que la cour d'appel de Paris, par arrêt du 12 août 2016, ait confirmé l'ordonnance ayant refusé de l'homologuer aux motifs qu'elle ne relevait pas du champ d'application de l'article 1565 du code civil, tout en relevant "surabondamment sur le fond", que ni la Sci Mélanie, ni la Sci des Gardinoux n'avaient la capacité de disposer de droit afférents aux parties communes de l'immeuble en copropriété. Il a été définitivement jugé que cette transaction avait été correctement exécutée par la Sci des Gardinoux, en l'état de la cession des lots dont la situation a été régularisée, tant au regard du droit de copropriété que de l'urbanisme.

La Sci Mélanie n'établit pas davantage devant la cour que devant ladite juridiction que les désordres qu'elle allègue pré-existaient en 2008 au moment de la conclusion de la transaction et que Mme [Z] en avait connaissance, les seuls courriels échangés avec les architectes antérieurs à la transaction, sur lesquels la Sci Mélanie fonde ses prétentions, étant afférents aux modalités du contrôle de conformité des travaux effectué par la mairie, relativement au permis de construire.

Il résulte au contraire de l'assignation en référé délivrée par la Sci Mélanie le 9 mai 2014 aux fins de désignation d'un expert judiciaire, qu'indépendamment du contentieux liant les parties ayant donné lieu au jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 25 juillet 2007 portant sur les lots au titre desquels les travaux de mise en conformité devaient être engagés aux frais de la Sci des Gardinoux le 14 août 2014, celle-ci a de nouveau entrepris des travaux sur les parties communes du bâtiment C de la copropriété en mars 2013, sans autorisation préalable et sans contrôle d'un architecte ni d'un bureau d'étude. Le syndicat des copropriétaires a mis en demeure la Sci des Gardinoux de faire cesser ces travaux le 18 mars 2013 et a fait désigner le cabinet Aves, ingénieur structure, pour auditer la partie du bâtiment C dans lequel se déroulaient lesdits travaux, lequel a, dans son premier rapport déposé le 27 mai 2013, préconisé un étaiement d'urgence des lots no128 et 129 présentant un important problème de structure. Ce n'est donc qu'en mai 2013, consécutivement à ces nouveaux travaux réalisés en mars 2013, que des problèmes de structure sont apparus, au demeurant sur des lots distincts de ceux cédés à la Sci Mélanie en exécution de la transaction. La Sci Mélanie évoque également, dans cette assignation, l'apparition d'autres problèmes de structure dont elle a eu connaissance en avril 2014 à la suite de la diffusion tardive du second rapport réalisé par le cabinet Aves, mais affectant des lots étrangers à la transaction litigieuse.

Le rapport déposé par l'expert [K] le 28 décembre 2018 conclut à la non conformité des bâtiments, en précisant que les locaux concernés par les travaux réalisés entre 2001 et 2003 par la Sci des Gardinoux seront à remettre en conformité aux normes (surcharges d'exploitation) et règlements (stabilité au feu) en vigueur à ces dates, à la charge de ladite société.

En l'absence de tout élément de nature à lui faire suspecter l'existence de désordres en 2008, Mme [Z] ne pouvait anticiper leur survenance, constatée au cours d'opérations d'expertise réalisées entre le 23 juin 2014 et le 26 décembre 2018.

Dès lors, quand bien même il était prévu le transfert de propriété de lots édifiés illicitement sur les parties communes, sans étude de structure préalable ni permis de construire, l'acte protège suffisamment les intérêts de la Sci Mélanie en mettant à la charge de la Sci des Gardinoux la régularisation de la situation des lots en matière de droit de propriété et d'urbanisme.

L'avocate n'était pas tenue de prévoir des clauses particulières relatives à des désordres qu'elle ne pouvait anticiper, en particulier d'exiger l'obtention d'un DAACT, la réalisation de travaux préparatoires portant sur d'éventuels risques structurels, la justification de la conformité des travaux entrepris au regard des normes incendie, ni d'insérer à l'acte des clauses pénales ou coercitives afin de s'assurer de l'exécution forcée de la réparation de ces désordres. Il ne peut davantage lui être fait grief d'avoir omis de tenir compte, dans la transaction, des conséquences de ces désordres susceptibles d'affecter la valeur des lots transférés en l'absence de délivrance de certificat de conformité des travaux, ainsi que retenu dans le rapport d'expertise [P] du 31 décembre 2014 ayant appliqué une décôte.

De même, Mme [Z] n'a commis aucune faute en conseillant à sa cliente d'accepter le transfert de propriété des lots -soit les lots 25 et 26 du bâtiment A et le lot 123 du bâtiment C- conformément à la transaction, régularisé par acte authentique du 26 juin 2013, sans exiger au préalable la remise d'un document sur le mode constructif (DTU), la réalisation d'un audit et d'une expertise portant sur la structure desdits lots, dès lors qu'à cette date, aucun élément n'était de nature à établir ou faire douter de désordres de structure affectant ces lots, ceux-ci n'ayant été constatés dans aucun des rapports alors diligentés par le cabinet Aves, et n'étant apparus qu'ultérieurement, au cours des opérations d'expertise confiées à M. [K].

La seule circonstance que Mme [Z] ait fait inscrire à l'ordre du jour de l'assemblée générale des copropriétaires du 26 juin 2013 - au cours de laquelle la Sci des Gardinoux a sollicité l'autorisation de réaliser les travaux engagés en mars 2013-, une résolution prévoyant une "mission à confier à un bureau d'étude technique pour réaliser une analyse de structure de la totalité du bâtiment C et des bâtiments A et B", n'établit nullement qu'elle avait conscience de problèmes de structure affectant spécifiquement les lots objets de la transaction. Ce projet de résolution était donc, en l'état des faits connus de l'époque, suffisant à préserver les intêrêts de sa cliente, l'avocate ne pouvant être tenue pour responsable du rejet de cette résolution et de l'approbation par ladite assemblée de l'exécution des travaux de conformité au permis de construire de 2012 et des transferts de propriété.

La transaction étant le résultat de compromis entre les parties, aucun élément n'exigeait que soit mise à la charge de la Sci des Gardinoux, abandonnant les lots litigieux au profit du syndicat des copropriétaires, l'obligation d'acquitter le prix des lots transférés à la Sci Mélanie, étant relevé que les lots 25 et 26 et 123, chacun composés de locaux commerciaux, lui ont été cédés sous forme de dation en paiement, sans bourse délier.

Mme [Z] n'est pas le rédacteur de l'acte authentique du 26 juin 2013. A supposer qu'elle ait effectivement participé à la préparation de cet acte, les griefs formulés à son égard qui ont trait aux conséquences de désordres apparus ultérieurement à la conclusion de cet acte, ne sont pas pertinents.

Les premiers juges ont à juste titre retenu que l'efficacité juridique de la cession n'était pas discutable dans la mesure où les engagements de la Sci des Gardinaux, notamment s'agissant de la régularisation des constructions litigieuses sur le plan urbanistique, y sont clairement exprimés et pourront une fois les problèmes de structure solutionnés, être mis à exécution.

- Sur le défaut de conseil quant aux risques inhérents à la minoration de la valeur des biens transmis dans l'acte du 26 juin 2013

Le tribunal a jugé que le défaut de conseil de l'avocate était caractérisé, en ce qu'il n'est pas justifié qu'elle aurait clairement appelé l'attention de la Sci Mélanie et de M. [W] sur les incidences fiscales liées à la valorisation des lots cédés à l'occasion de l'acte de cession du 26 juin 2013 - fixée à 119 659,47 euros- au titre de l'impôt sur la plus-value en cas de revente, peu important les conseils reçus d'autres professionnels.

Les appelants soutiennent que Mme [Z] a manqué à son devoir de conseil et d'information à l'égard de sa cliente la Sci Mélanie en ne l'informant pas des conséquences fiscales de l'acte de cession du 26 juin 2013 à la rédaction duquel elle a contribué et dont elle est responsable de la minoration volontaire de la valeur des lots cédés à la Sci Mélanie, alors qu'elle connaissait leur valeur réelle et était informée de l'intention de M. [W] de les revendre, et que ni les compétences et connaissances du client, ni la présence du notaire ne la dispensaient de son devoir de conseil.

L'intimée conteste cette faute en ce que :
- M. [W], gérant de la Sci Mélanie, dispose d'une connaissance approfondie des mécanismes d'imposition immobiliers,
- elle a attiré l'attention du gérant de la Sci Mélanie sur les risques liés à une imposition des plus-values en cas de revente, si la valeur des lots venait à être minorée,
- elle s'est bornée à proposer un cadre rappelant les attributions de lots auxquelles la régularisation de l'acte authentique devait aboutir, sans aucune évaluation financière,
- l'acte de cession du 23 juin 2013 a été rédigé par Me [R]-[G], en sa qualité de notaire rédacteur d'acte en sorte qu'elle ne saurait voir sa responsabilité engagée à ce titre,
- les décisions de cession de lots autres que ceux objet de la transaction, prises par les appelants résultent de leurs propres choix, indépendamment des missions confiées à l'avocat.

Mme [Z], qui était informée de la minoration de la valeur des lots cédés à la Sci Mélanie, en particulier au vu du rapport d'évaluation de M. [P], et du projet de ladite société de les revendre, ne justifie pas, par les pièces produites aux débats -en particulier le courrier que M. [W] a adressé à son gestionnaire le 10 septembre 2012 invoquant leurs échanges à ce titre-, avoir clairement mis en garde sa cliente avant la conclusion de la transaction, contre le risque d'imposition de la plus-value en cas de revente, calculée en fonction d'un prix d'acquisition déterminé par la valeur fixée dans la convention de dation en paiement.

Tant la compétence alléguée de M. [W] que les renseignements qu'il aurait obtenus auprès d'autres conseils sont impropres à exonérer l'intimée de son devoir de conseil.

Son manquement à son devoir de conseil de ce chef est donc caractérisé.

Sur le lien de causalité et le préjudice :

Le tribunal a retenu que si était caractérisé le défaut de conseil sur les incidences fiscales liées à la valorisation des lots cédés à l'occasion de l'acte du 26 juin 2013 au titre de l'impôt sur les revenus en cas de revente, les demandeurs ne démontrent pas qu'autrement conseillés, ils auraient opté pour une autre valeur dès lors que le courriel de M. [W] du 10 septembre 2012 à son gestionnaire de patrimoine établit qu'il avait parfaitement compris les enjeux en la matière.

L'appréciation des premiers juges n'est pas pertinemment contestée par les appelants, alors qu'il ressort du courriel de M. [W] du 10 septembre 2012 à son gestionnaire immobilier qu'il avait conscience des enjeux relatifs à l'évaluation des lots -imposition de plus-value lors de la revente en cas de valorisation minorée, et imposition à l'ISF en cas de valorisation élevée -laquelle mesure était initialement proposée par son avocate-, et que c'est en connaissance de ces éléments et après avoir apprécié les conséquences de son choix qu'il a conclu la transaction. M. [W] est en outre rompu aux opérations immobilières et a su procéder avec exactitude au calcul des plus-values immobilières des lots litigieux ainsi qu'il ressort de son courriel du 1er juillet 2014 (pièce 21). Il ne justifie dès lors pas que mieux informé par son avocate, il aurait conclu la transaction à des conditions différentes, alors que l'opération était économiquement avantageuse pour lui. Au surplus, la plus-value taxable dont il est sollicité le remboursement porte sur la cession de lots autres que ceux objets de la transaction et est donc sans lien causal avec le défaut de conseil de Mme [Z].

S'agissant du manquement de l'avocate à son devoir de conseil au titre du défaut de capacité de la Sci des Gardinaux à disposer des droits sur les parties communes, il n'est allégué ni démontré aucun lien de causalité entre ce manquement et les préjudices allégués par les appelants dès lors que le syndicat des copropriétaires a avalisé l'économie de la transaction lors d'une assemblée générale du 30 juin 2009.

Les demandes des appelants sont donc mal fondées et doivent être rejetées, le jugement étant confirmé par motifs substitués.

Sur l'abus de procédure :

Les manquements allégués de Mme [Z] étant partiellement caractérisés, il n'est démontré aucun abus d'ester en justice des appelants, en confirmation du jugement.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile sont confirmées. Les appelants seront condamnés in solidum aux dépens exposés en cause d'appel et à payer à Mme [Z] une indemnité de 8 000 euros au titre des frais de procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans la limite de sa saisine,

Dit recevables les écritures de la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [X] [W] notifiées et déposées le 4 mars 2022,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions, par motifs substitués,

Condamne in solidum la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [X] [W] à payer à Mme [M] [Z] la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la Sci Mélanie, la Sci Erica et M. [X] [W] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : H4
Numéro d'arrêt : 18/198187
Date de la décision : 28/06/2022
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2022-06-28;18.198187 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award