Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 9
ARRET DU 24 JUIN 2022
(n° /2022, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00390 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAFF3
Décision déférée à la Cour : Décision du 04 Juin 2019 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS - RG n° 211/315452
APPELANTE
Société SELARL [C] [M] AVOCAT
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me [C] [M], avocat au barreau de PARIS
INTIMES
Monsieur [V] [J]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Comparant en personne, assisté de Me Mélanie GSTALDER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0219
Madame [X] [I]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Comparante en personne, assistée de Me Mélanie GSTALDER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0219
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Octobre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jacques BICHARD, magistrat honoraire désigné par décret du 07 août 2017 du président de la République, aux fins d'exercer des fonctions juridictionnelles, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Nina TOUATI, Présidente de chambre
Madame Laurence CHAINTRON, Conseillère
Monsieur Jacques BICHARD, Magistrat honoraire
Greffier, lors des débats : Mme Hanane KHARRAT
ARRÊT :
- arrêt contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Nina TOUATI, Présidente de chambre et par Eléa DESPRETZ, Greffier présent lors de la mise à disposition.
****
Vu le recours formé par la société d'avocats Selarl [C] [M] avocats auprès du Premier Président de cette cour par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 3 juillet 2019 à l'encontre de la décision rendue le 4 juin 2019 par le délégataire du bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de Paris qui a :
- déclaré son incompétence au profit de la juridiction de droit commun pour connaître des griefs susceptibles de mettre en cause la responsabilité éventuelle de la Selarl [C] [M] avocats,
- dit que la Selarl [C] [M] avocats devra restituer à M. [V] [J] et Mme [X] [I], chacun, la somme de 2 000 euros HT versée à titre de provision, avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision,
- dit que la Selarl [C] [M] avocats devra supporter les frais d'huissier de justice en cas de signification de la décision.
Entendues à l'audience du 23 mars 2022 les parties en leurs observations en tous points conformes à leurs écritures :
- La Selarl [C] [M] avocats qui demande à la cour de :
* infirmer la décision déférée,
* rejeter les demandes de restitution d'honoraires.
- M. [V] [J] et Mme [X] [I] qui demandent à la cour de :
* confirmer la décision déférée,
* leur allouer à chacun une indemnité de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR QUOI LA COUR,
M. [V] [J] et Mme [X] [I] ont sollicité l'intervention de la Selarl [C] [M] avocats à l'occasion d'une action prud'homale et d'une action commerciale, cette dernière étant seule concernée par le présent litige.
M. [V] [J] et Mme [X] [I] ont chacun signé le 6 décembre 2016 une convention prévoyant un honoraire de 2 400 euros TTC devant revenir à la société d'avocats au titre de la procédure commerciale.
Par mails respectivement des 3 et 21 mai 2018 M. [V] [J] et Mme [X] [I] ont fait savoir à la Selarl [C] [M] avocats qu'ils renonçaient à ladite procédure commerciale et ont sollicité le remboursement de la provision que chacun avait réglée ce à quoi s'est opposée la société d'avocats.
Par lettre du 15 juin 2018 la Selarl [C] [M] avocats a fait parvenir à ses clients ' une note concernant la recevabilité du projet de l'assignation que vous m'avez confiée ' en précisant ' je vous communique mon analyse et mes conseils concernant la poursuite d'un contentieux éventuel (................).
Si j'ai bien compris vous ne souhaitez pas poursuivre la procédure dans ces conditions compte tenu de mes conclusions et la convention d'honoraires dans ce cas s'établit en temps réel et non plus en forfait compte tenu du travail effectué et du nombre d'heures passées notamment en étude et en rédaction.
A ce titre je vous confirme que le taux horaire du cabinet en qualité de spécialiste s'élève à 325 euros HT.
Compte tenu du versement déjà effectué à hauteur de 2 000 euros HT, je considère la facture soldée '.
C'est dans ces circonstances que M. [V] [J] et Mme [X] [I] ont saisi le bâtonnier d'une demande en restitution aux termes d'un courrier enregistré par les services de l'ordre le 8 janvier 2019.
Arguant du renoncement par M. [V] [J] et Mme [X] [I] à la procédure commerciale ainsi que de leur saisine du bâtonnier la Selarl [C] [M] avocats estime que la convention d'honoraires est frappée de nullité.
Elle sollicite en conséquence le paiement de ses honoraires au temps passé, à savoir 14 heures de travail ' environ ' sur la base d'un taux horaire estimé ' entre 300 et 325 euros HT '.
M. [V] [J] et Mme [X] [I] ont volontairement renoncé à engager la procédure commerciale qui constituait l'objet de la convention d'honoraires signée le 6 décembre 2016.
Dans leurs courriers respectifs des 3 et 12 mai 2018, rappelant qu'aucune procédure n'avait encore été introduite par la Selarl [C] [M] avocats ils ont demandé le remboursement des honoraires versés à titre provisionnel.
Il doit ainsi être considéré qu'ils ont mis fin à la mission de la société d'avocats d'une façon anticipée, avant toute décision juridictionnelle ou accord irrévocable de sorte que la dite convention d'honoraires s'avère caduque et non pas nulle comme l'écrit la Selarl [C] [M] avocats dans ses conclusions et ne peut plus recevoir application.
Aucune clause de dessaisissement n'ayant été prévue entre les parties, les honoraires revenant à la société d'avocats au titre des diligences qu'elle a effectuées dans le cadre du contentieux commercial doivent être fixés selon les critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée.
A ce titre elle a dû prendre connaissance du dossier de ses clients, particulièrement de deux couriels expédiés par M. [T] les 10 octobre et 15 novembre 2016 et il est indifférent qu'elle n'ait pas sollicité le premier d'entre eux dès lors qu'il portait sur des éléments d'information dont il n'est pas discuté qu'ils étaient au moins pour partie, en lien avec le contentieux commercial en cause, peu important également dans ces conditions que ce document fut antérieur à la convention d'honoraires.
Outre ce travail d'analyse destiné à préparer le dossier, la société d'avocats a correspondu avec ses clients.
Il s'agit de diligences effectives et utiles au traitement du dossiers qui lui avait été confié conjointement par ses clients dont l'objet portait sur une éventuelle procédure pour manque d'information du vendeur et de l'acquéreur du salon de coiffure où ceux-ci travaillaient.
En revanche la consultation juridique annexée par la Selarl [C] [M] avocats à sa lettre du 15 juin 2018 ne peut être retenue dans la mesure où cette diligence attendue des clients qui faisaient état de son absence dans leur mail du 21 mai précédent a été établie postérieurement au dessaisissement de la société d'avocats et ne présentait manifestement plus alors aucune utilité.
Dès lors en l'état de ces constatations il convient de fixer les honoraires dus à la Selarl [C] [M] d'une part par M. [V] [J] et d'autre part par Mme [X] [I] à la somme de 700 euros HT en conséquence de quoi ceux-ci sont fondés à obtenir, chacun, le remboursement de la somme de 1 300 euros HT.
La solution du litige eu égard à l'équité ne commande pas d'accueillir la demande présentée par M. [V] [J] et Mme [X] [I] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant en dernier ressort, par un arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Confirme la décision déférée en ce que le bâtonnier a déclaré son incompétence au profit de la juridiction de droit commun pour connaître des griefs susceptibles de mettre en cause la responsabilité éventuelle de la Selarl [C] [M] avocats,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Fixe les honoraires dus par M. [V] [J] au titre du dossier commercial à la Selarl [C] [M] avocats à la somme de 700 euros HT,
Fixe les honoraires dus par Mme [X] [I] au titre du dossier commercial à la Selarl [C] [M] avocats à la somme de 700 euros HT,
Dit que la Selarl [C] [M] avocats devra restituer à M. [V] [J] et Mme [X] [I], chacun, la somme de 1 300 euros HT versée à titre de provision, avec intérêts au taux légal à compter de la notification de cette décision,
Dit que la Selarl [C] [M] avocats devra supporter les frais d'huissier de justice en cas de signification de la décision,
Rejette toute autre demande,
Laisse les dépens à la charge de la Selarl [C] [M] avocats.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE