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23/06/2022 | FRANCE | N°20/15846

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 23 juin 2022, 20/15846


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 23 JUIN 2022



(n° /2022, pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/15846

N° Portalis 35L7-V-B7E-CCS4I



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 octobre 2020 -Tribunal de grande instance d'EVRY - RG n° 18/05540



APPELANTS



Monsieur [V] [X]

[Adresse 3]

[Localité 10]

né le

[Date naissance 1] 1996 à [Localité 15] (91)

représenté par Me Rémy BARADEZ de la SELARL BREMARD-BARADEZ & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'ESSONNE



S.A. AXA FRANCE

[Adresse 6]

[Localité...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 23 JUIN 2022

(n° /2022, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/15846

N° Portalis 35L7-V-B7E-CCS4I

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 octobre 2020 -Tribunal de grande instance d'EVRY - RG n° 18/05540

APPELANTS

Monsieur [V] [X]

[Adresse 3]

[Localité 10]

né le [Date naissance 1] 1996 à [Localité 15] (91)

représenté par Me Rémy BARADEZ de la SELARL BREMARD-BARADEZ & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'ESSONNE

S.A. AXA FRANCE

[Adresse 6]

[Localité 11]

représentée par Me Rémy BARADEZ de la SELARL BREMARD-BARADEZ & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIMES

Monsieur [H] [O]

[Adresse 7]

[Localité 9]

né le [Date naissance 5] 1976 à [Localité 16] (France)

représenté par Me Pascal HORNY de la SCP HORNY-MONGIN-SERVILLAT, avocat au barreau d'ESSONNE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ESSONNE

[Adresse 14]

[Localité 8]

n'a pas constitué avocat

MUTUELLE NATIONALE DU PERSONNEL AIR FRANCE

[Adresse 4]

[Localité 12]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre,et devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre assesseur chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Sophie BARDIAU, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

ARRÊT :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 3 septembre 2015, M. [H] [O] qui circulait au guidon de sa motocyclette assurée auprès de la société Mutuelle d'assurance des commerçants et industriels de France (la société MACIF) a chuté de son véhicule après avoir heurté M. [V] [X], assuré auprès de la société Axa France IARD (la société Axa), qui traversait à pied le [Adresse 13] (91).

M. [H] [O] a fait l'objet d'un examen médical amiable réalisé par le Docteur [P] [L] qui a établi son rapport définitif le 21 juin 2017.

Par actes d'huissier en date des 6, 8, 11 et 30 août 2018, M. [H] [O] a fait assigner M. [X], la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne (la CPAM), la société Axa et la mutuelle Nationale des personnels Air France (la MNPAF) devant le tribunal de grande instance d'Evry afin d'obtenir la réparation de ses préjudices corporel et matériel.

Par jugement en date du 12 octobre 2020, le tribunal judiciaire d'Evry a :

- dit que M. [V] [X] est responsable des préjudices subis par M. [H] [O],

- condamné in solidum M. [V] [X] et la société Axa à payer à M. [H] [O] une somme de 24 040 euros au titre du préjudice corporel,

- condamné in solidum M. [V] [X] et la société Axa à payer à M. [H] [O] une somme de 2 125,12 euros au titre du préjudice matériel,

- déclaré le présent jugement commun et opposable à la CPAM,

- condamné M. [V] [X] à payer à M. [H] [O] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [V] [X] aux entiers dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration du 4 novembre 2020, la société Axa et M. [V] [X] ont interjeté appel de cette décision en critiquant chacune de ses dispositions.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions de la société Axa et de M. [V] [X], notifiées le 18 janvier 2021, aux termes desquelles ils demandent de :

Vu l'article 1382 (ancien) du code de procédure civile,

Vu l'article R.415-11 du code de la route,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 12 octobre 2020,

- débouter M. [H] [O] de l'ensemble de ses demandes,

- le condamner à payer à la société Axa la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,

subsidiairement,

- réduire à de plus justes proportions les sommes allouées à M. [H] [O] en réparation de son préjudice,

- débouter M. [H] [O] de ses demandes au titre de l'incidence professionnelle et du préjudice d'agrément.

Vu les conclusions de M. [H] [O], notifiées le 11 janvier 2021, aux termes desquelles il demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Evry le 12 octobre 2020 en ce qu'il a retenu la responsabilité de M. [V] [X] en application des dispositions des articles 1240 et suivants du code civil et R.412-38 du code de la route,

- confirmer le jugement rendu en ce qu'il a déclaré M. [H] [O] bien fonde à solliciter la réparation intégrale de son préjudice corporel,

- réformer le jugement rendu en ce qui concerne l'évaluation du préjudice corporel de M. [H] [O],

- condamner in solidum M. [X] et son assureur la société Axa à payer à M. [H] [O] la somme de 53 637 euros en réparation de son préjudice corporel,

- confirmer le jugement rendu en ce qui concerne l'évaluation de la réparation du préjudice matériel,

- confirmer le jugement en ce qui concerne l'allocation de l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile à 2 000 euros en première instance,

- condamner M. [V] [X] et son assureur, la société Axa à payer à M. [H] [O] la somme de 2 000 euros en cause d'appel,

- déclarer le jugement commun à la CPAM et à la MNPAF,

- débouter M. [X] et son assureur la société Axa de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel présentée à l'encontre de M. [H] [O].

Bien que destinataires de la déclaration d'appel qui leur a été signifiée à personne habilitée par actes en date des 31 décembre 2020 et 4 janvier 2021, la CPAM et la MNPAF n'ont pas constitué avocat.

La CPAM a adressé à la cour en application de l'article 15 du décret n° 86-15 du 6 janvier 1986 le décompte définitif de sa créance en date du 12 juillet 2021 qui a été communiqué aux parties par le greffe par lettre du 14 décembre 2021 et dont il résulte qu'elle a pris en charge des frais médicaux, pharmaceutiques et d'appareillage à hauteur de 16 984,51 euros et servi des indemnités journalières d'un montant de 6 909,12 euros.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la responsabilité de M. [X]

L'indemnisation des dommages causés par un piéton au conducteur d'un véhicule terrestre à moteur ne peut pas être fondée sur les dispositions des articles 1 à 6 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985.

La responsabilité de M. [X], piéton, ne peut ainsi être recherchée que sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ce dont conviennent les parties.

Il est constant que l'accident s'est produit le 3 septembre 2015 sur la commune de [Localité 18] au niveau du numéro [Adresse 2].

Les photographies du lieu de l'accident extraites du site Google Maps permettent de constater que la traversée de la chaussée par les piétons sur le passage protégé situé au niveau du numéro [Adresse 2] est réglée par des feux de signalisation.

Aux termes de l'article R. 412-38 du code de la route, «Les feux de signalisation lumineux réglant la traversée des chaussées par les piétions sont verts ou rouges et comportent un pictogramme. Ils peuvent comporter un signal lumineux jaune indiquant leur mise en service.

Lorsque la traversée d'une chaussée est réglée par ces feux, les piétons ne doivent s'engager qu'au feu vert (...)».

Par ailleurs si en application de l'article R. 415-11du même code «tout conducteur est tenu de céder le passage au besoin en s'arrêtant au piéton s'engageant régulièrement dans la traversée d'une chaussée ou manifestant clairement l'intention de le faire ou circulant dans une aire piétonne ou une zone de rencontre», ces dispositions n'exonèrent pas les piétons de l'obligation qui leur est faite de respecter la signalisation lumineuse lorsque la traversée de la chaussée par ces derniers est réglée par des feux.

M. [O] a indiqué sur le constat amiable d'accident qu'il a renseigné et signé ainsi que dans la déclaration de sinistre du 7 septembre 2015 adressée à son assureur qu'il circulait sur la voie de gauche au niveau du numéro [Adresse 2], que la voie de droite était à l'arrêt en raison d'une circulation trop dense, qu'au niveau du croisement du [Adresse 2] et de la [Adresse 17], alors que le feu était au vert dans son sens de circulation, un piéton et son chien précédemment masqués par un véhicule utilitaire présent sur la voie de droite étaient apparus devant lui, que le piéton n'avait pas observé le signal piéton et n'avait pas regardé dans sa direction, qu'il avait tenté une manoeuvre d'évitement mais avait heurté le piéton avec son guidon droit.

M. [O] a confirmé ses premières déclarations dans une lettre du 20 septembre 2015 envoyée à son assureur dans laquelle il a précisé s'être entretenu par téléphone avec le piéton après sa sortie de l'hôpital, ce dernier lui ayant alors signalé qu'ayant vu le véhicule utilitaire à l'arrêt, il avait pensé que le feu était rouge [pour les automobilistes] et qu'il pouvait traverser.

M. [N] [X], père de M. [V] [X], a dans sa déclaration de sinistre en date du 7 septembre 2015 exposé que son fils était sur le trottoir avec son chien tenu en laisse attendant de pouvoir traverser sur le passage piéton, qu'à sa hauteur une camionnette s'était arrêtée afin qu'il puisse traverser, que son fils [V] avait pensé, à la suite de l'arrêt de ce véhicule, que le feu était rouge, qu'il avait traversé lorsqu'une moto doublant la camionnette l'avait percuté sur le côté.

Il résulte de ce qui précède que M. [V] [X] qui empruntait un passage protégé dont la traversée pour les piétons était réglée par des feux de signalisation n'a pas vérifié que le feu était vert pour les piétons avant de s'engager pour traverser la chaussée et qu'en s'abstenant de procéder à ce contrôle dont il n'était pas dispensé par la circonstance qu'un véhicule utilitaire se serait arrêté pour le laisser passer, il a commis une faute d'imprudence qui est à l'origine des dommages subis par M. [H] [O].

A l'inverse, aucune faute n'est établie à l'encontre de M. [H] [O] qui a toujours indiqué que le feu était vert dans son sens de circulation, sans qu'aucun élément ne permette de remettre en cause ces déclarations, et auquel il ne peut être reproché de ne pas avoir anticipé la traversée irrégulière d'un piéton dont la vue était masquée par un véhicule utilitaire arrêté sur la voie de droite.

Le jugement qui a déclaré M. [V] [X] responsable des préjudices subis par M. [H] [O] doit ainsi être confirmé.

Sur la réparation des préjudices de M. [H] [O]

Il convient d'observer que la société Axa, assureur de responsabilité civile de M. [V] [X], ne dénie pas sa garantie.

Sur le préjudice matériel

Au vu du rapport d'expertise automobile dont les conclusions sont corroborées par les déclarations des parties concernant les circonstances de l'accident et les pièces médicales dont il résulte que M. [O] a chuté de sa motocyclette, il convient d'évaluer les frais de réparation de la motocyclette accidentée à la somme de 1 481,88 euros et les frais de remplacement des effets vestimentaires et des équipements de moto endommagés à la somme de 643,24 euros.

Le jugement sera confirmé.

Sur le préjudice corporel

L'expert, le Docteur [L], indique dans son rapport en date du 21 juin 2017 que M. [H] [O] a présenté à la suite de l'accident une fracture de la malléole externe et une rupture du ligament latéral interne avec diastasis interne au niveau de la cheville gauche et qu'il conserve comme séquelles une raideur significative mais peu douloureuse de la cheville et de l'arrière-pied gauches.

Il conclut son rapport dans les termes suivantes :

- arrêt des activités professionnelles imputable à l'accident du 3 septembre 2015 au 6 septembre 2015 et le 6 juillet 2017 [date prévue pour le retrait du matériel d'ostéosynthèse],

- déficit fonctionnel temporaire total du 3 septembre 2015 au 6 septembre 2015 et le 6 juillet 2017

- déficit fonctionnel temporaire partiel :

* de classe III du 7 septembre 2015 au 27 octobre 2015

* de classe II du 28 octobre 2015 au 17 janvier 2017 et pendant 15 jours après le 7 juillet 2017

- consolidation au 17 janvier 2017

- souffrances endurées : 3,5/7

- déficit fonctionnel permanent : 8 %

- préjudice esthétique permanent : 1/7

- préjudice d'agrément lié à l'abandon du jogging

- besoin d'assistance par une tierce personne de 1 heure par jour pendant 2 mois et 3 heures par semaine pendant 3 mois.

Ce rapport, corroboré par les documents médicaux versés aux débats constitue, sous les précisions et amendements ci-après exposés une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 5] 1976, de sa profession d'informaticien, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Par ailleurs, l'évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue.

Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Assistance temporaire par une tierce personne

Ce poste de préjudice vise à indemniser avant la date de consolidation le besoin d'assistance par une tierce personne de la victime directe pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie.

La nécessité, retenue par l'expert, de la présence auprès de M. [H] [O] d'une tierce personne 1 heure par jour pendant deux mois puis 3 heures par semaine pendant trois mois n'est pas contestée dans son principe ni son étendue mais reste discutée dans son coût, M. [H] [O] concluant à la confirmation du jugement qui a évalué ce poste de préjudice à la somme de 1 500 euros alors que M. [V] [X] et la société Axa demandent à voir ramener l'indemnité allouée à de plus justes proportions en retenant un taux horaire de 13 euros.

L'expert a toutefois omis de préciser les périodes concernées, alors que cette indication est nécessaire pour déterminer la durée exacte du besoin d'assistance, chaque mois ne comportant pas le même le nombre de jours.

En application du principe de la réparation intégrale, l'indemnisation du besoin d'assistance par une tierce personne ne saurait être réduit en raison du caractère familial de l'aide apportée ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses engagées.

Eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire de 15 euros, retenu par le tribunal.

L'indemnité de tierce personne s'établit ainsi de la manière suivante :

- du 7 septembre 2015 (date de retour à domicile) au 7 novembre 2015 (2 mois ou 61 jours)

* 15 euros x 1 heure x 61 jours = 915 euros

- du 8 novembre 2015 au 8 février 2016 (3 mois ou 92 jours)

* 15 euros x 3 heures x 92 jours / 7 jours = 591,43 euros

Soir une somme totale de 1 506,43 euros, ramenée à 1 500 euros pour rester dans les limites de la demande.

Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Incidence professionnelle

Ce poste de préjudice a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.

M. [H] [O] qui fait observer que le tribunal a omis de statuer sur sa demande d'indemnisation présentée au titre de ce poste de préjudice réclame une indemnité de 15 000 euros au titre de la pénibilité professionnelle.

M. [V] [X] et la société Axa concluent au rejet de la demande en relevant que l'accident n'a eu aucune conséquence sur l'activité professionnelle de la victime.

Sur ce, si l'expert n'a pas retenu dans ses conclusions d'incidence professionnelle, les séquelles de l'accident consistant en une raideur significative mais peu douloureuse de la cheville et de l'arrière-pied gauches, justifiant un taux de déficit fonctionnel permanent de 8%, induisent une pénibilité accrue dans l'exercice de la profession d'informaticien de M. [H] [O] lors de ses déplacements.

Compte tenu de l'âge de M. [H] [O] à la date de consolidation, soit 42 ans, il convient d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 10 000 euros.

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de la qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique jusqu'à la date de consolidation, y compris les préjudices d'agrément et sexuel temporaires.

L'expert ayant fixé la date de consolidation au 17 janvier 2017, seules les périodes de déficit fonctionnel temporaire total et partiel courant jusqu'à cette date sont indemnisables au titre de ce poste de préjudice.

Le retrait du matériel d'ostéosynthèse dont l'expert a relevé qu'il semblait être prévu pour le 6 juillet 2017 et dont la réalisation effective à la date la liquidation n'est pas justifiée, constitue une aggravation éventuelle du dommage initial dont il appartiendra à la victime de solliciter ultérieurement la réparation après la mise en oeuvre de cette intervention.

Eu égard à l'incapacité fonctionnelle subie par M. [H] [O] et aux troubles apportés à ses conditions d'existence avant la date de consolidation, ce poste de préjudice sera calculé, conformément à la demande de la victime, sur une base journalière de 25 euros pour les périodes de déficit fonctionnel total et proportionnellement pour les périodes de déficit fonctionnel partiel.

Le déficit fonctionnel temporaire doit ainsi être évalué comme suit :

- 100 euros pour la période de déficit fonctionnel temporaire total du 3 septembre 2015 au 6 septembre 2015 (4 jours)

- 637,50 euros pour la période de déficit fonctionnel temporaire partiel de classe III ( 50%) du 7 septembre 2015 au 27 octobre 2015 (51 jours)

- 2 800 euros pour la période de déficit fonctionnel temporaire partiel de classe II (25%) du 28 octobre 2015 au 17 janvier 2017, date de la consolidation (448 jours)

Soit une somme globale de 3 537,50 euros.

- Souffrances endurées

Ce poste de préjudice indemnise les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés que la victime endure pendant la maladie traumatique.

En l'espèce, il y a lieu de prendre en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison du traumatisme initial, de son hospitalisation, de l'intervention chirurgicale par réduction sanglante et ostéosynthèse par plaque vissée externe, de la pénibilité des soins, de l'apparition secondaire d'un syndrome algodystrophique et des nombreuses séances de rééducation.

Coté 3,5/7 par l'expert, ce préjudice à été justement évalué par les premiers juges à la somme de 6 000 euros réclamée par M. [H] [O].

Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent

Ce poste de préjudice vise à indemniser, pour la période postérieure à la consolidation, les atteintes aux fonctions physiologiques, les souffrances chroniques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiale et sociales.

Il est caractérisé par une raideur significative mais peu douloureuse de la cheville et de l'arrière-pied gauches conduisant à un taux de 8 % et justifiant compte tenu des séquelles constatées, des douleurs légères persistantes et des troubles induits dans les conditions d'existence de M. [H] [O] une indemnité de 15 000 euros conformément à la demande de la victime.

- Préjudice esthétique permanent

Ce poste de préjudice indemnise les atteintes physiques et plus généralement l'altération de l'apparence physique de la victime après la consolidation.

Ce préjudice, coté 1/7 par l'expert et caractérisé par la présence d'une cicatrice opératoire pré-malléolaire externe de onze centimètres de hauteur et d'un centimètre de largeur, avec traces de sutures, doit être indemnisé à hauteur de la somme de 2 000 euros.

- Préjudice d'agrément

Le préjudice d'agrément est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs et inclut la limitation de la pratique antérieure.

Si l'expert a retenu l'existence d'un préjudice d'agrément en raison de l'abandon du jogging, M. [H] [O] ne justifie par aucun élément de preuve (attestations ou autres) qu'il s'adonnait régulièrement à cette pratique sportive avant l'accident, ce que ne suffisent pas à établir ses déclarations en ce sens lors des opérations d'expertise.

Sa demande doit ainsi être rejetée ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges dans leurs motifs.

*************

Récapitulatif

Les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux de M. [H] [O] s'établissent à la somme de 38 037,50 euros se décomposant comme suit :

- assistance temporaire par une tierce personne : 1 500 euros

- incidence professionnelle : 10 000 euros

- déficit fonctionnel temporaire jusqu'à la date de consolidation du 17 mai 2017 : 3 537,50 euros

- souffrances endurées : 6 000 euros

- déficit fonctionnel permanent : 15 000 euros

- préjudice esthétique permanent : 2 000 euros

- préjudice d'agrément : rejet

Le jugement qui a, par un chef de dispositif ne ventilant pas les différents postes de préjudice, condamné in solidum M. [V] [X] et la société Axa à payer à M. [H] [O] la somme de 24 040 euros au titre du préjudice corporel sera infirmé sur ce point.

Sur les demandes annexes

Il n'y a pas lieu de déclarer le présent arrêt commun à la CPAM et la MNPAF qui sont en la cause.

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

M. [V] [X] et la société Axa qui succombent partiellement dans leurs prétentions et qui sont tenus à indemnisation supporteront la charge des dépens d'appel.

L'équité commande en application de l'article 700 du code de procédure civile d'allouer à M. [H] [O] une indemnité de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour et de rejeter la demande de la société Axa formulée au même titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe,

- Confirme le jugement, hormis en ce qu'il a condamné in solidum M. [V] [X] et la société Axa France IARD à payer à M. [H] [O] la somme de 24 040 euros au titre du préjudice corporel,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Condamne in solidum M. [V] [X] et la société Axa France IARD à payer à M. [H] [O] la somme de 38 037,50 euros, provisions et sommes versées au titre de l'exécution provisoire non déduites, au titre des postes de préjudice ci-après :

- assistance temporaire par une tierce personne : 1 500 euros

- incidence professionnelle : 10 000 euros

- déficit fonctionnel temporaire jusqu'à la date de consolidation du 17 mai 2017 : 3 437,50 euros

- souffrances endurées : 6 000 euros

- déficit fonctionnel permanent : 15 000 euros

- préjudice esthétique permanent : 2 000 euros

- Déboute M. [H] [O] de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice d'agrément,

- Dit qu'il appartiendra à M. [H] [O] de solliciter l'indemnisation des préjudices résultant de l'aggravation de son dommage consécutive au retrait du matériel d'ostéosynthèse après la réalisation effective de cette intervention,

- Condamne in solidum M. [V] [X] et la société Axa France IARD à payer à M. [H] [O] en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour,

- Déboute la société Axa France IARD de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne in solidum M. [V] [X] et la société Axa France IARD aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 20/15846
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;20.15846 ?
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