La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2022 | FRANCE | N°20/09777

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 23 juin 2022, 20/09777


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 23 Juin 2022

(n° 60 , 23 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/09777 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCCBD



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Mai 2020 par le juge de l'expropriation de Melun RG n° 18/00011







APPELANTES

Madame [R] [W]

[Adresse 51]

[Localité 3]



Madame [U] [W]

[Adresse 5]

[Adres

se 2]



Madame [A] [N]

[Adresse 52]

[Adresse 55]

[Localité 4]



Tous représentés par Me Miguel BARATA de l'AARPI BARATA CHARBONNEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1185







INTIMÉES

D...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 23 Juin 2022

(n° 60 , 23 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/09777 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCCBD

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Mai 2020 par le juge de l'expropriation de Melun RG n° 18/00011

APPELANTES

Madame [R] [W]

[Adresse 51]

[Localité 3]

Madame [U] [W]

[Adresse 5]

[Adresse 2]

Madame [A] [N]

[Adresse 52]

[Adresse 55]

[Localité 4]

Tous représentés par Me Miguel BARATA de l'AARPI BARATA CHARBONNEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1185

INTIMÉES

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES TRESORERIE GENERALE DE SEINE ET MARNE

[Adresse 42]

[Adresse 6]

[Localité 20]

représenté par M. [P] [O] (en visio-conférence) en vertu d'un pouvoir général

COMMUNAUTÉ AGGLOMÉRATION VAL D'EUROPE AGGLOMÉRATION représentée par son mandataire l'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMÉNAGEMENT DU SERVICE IV DE MARNE LA VALLÉE, L'EPAFRANCE, EPIC ayant son siège sis [Adresse 10]

[Adresse 32]

[Localité 21]

représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034 substituée par Me Anne-hélène CREACH, avocat au barreau de PARIS, toque : J067

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Hervé LOCU, président

Valérie MORLET, conseillère

Marie MONGIN, conseillère

Greffier : Marthe CRAVIARI, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour prévue le 09 juin 2022 prorogée au 23 juin 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président et par Marthe CRAVIARI, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

La commune de [Localité 35] d'une superficie de 890 ha, s'étire du nord vers le sud sur 5 km de long, 3 km du nord jusqu'à la D934 et 2 km au sud de la D934, jusqu'à jouxter la commune de [Localité 56] ; elle est située à 30 km de la Ville de [Localité 54], dans l'emprise du secteur 4 de Marne-la-Vallée.

Par décret n°87'192 du 24 mars 1987, était créée une nouvelle agglomération dans le secteur 4 de la ville nouvelle de Marne la vallée, dénommé Val d'Europe, composé des communes suivantes : [Localité 30], [Localité 34], [Localité 35], [Localité 50] et [Localité 56], le périmètre de cette nouvelle agglomération étant étendu en 2011 à la commune de [Localité 57].

Par décret du même jour n°87'193, était approuvée la convention relative à la création et l'exploitation d'Eurodisney en France, qui lie l'État, la région Île-de-France, le département de Seine-et-Marne, la RATP, l'EPAFRANCE et la société The Walt Disney Compagny pour l'aménagement d'une zone de 2000 ha et il déclarait Projet d'Intérêt Général le projet d'aménagement du secteur 4 de Marne-la-Vallée.

Une convention de mandat de maîtrise d'ouvrage a été signée le 20 janvier 2006 entre la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération et l'Etablissement Public d'Aménagement du 4 (l'EPAFRANCE), dans le cadre de la réalisation des opérations d'infrastructures sur les réseaux eaux usées et eaux pluviales, au titre de la phase 3 d'aménagement du secteur 4 prévue dans la convention pluriannuelle 2003/2006.

Par délibération du 11 janvier 2007, le SAN du Val d'Europe a désigné comme mandataire l'EPAFRANCE pour effectuer les procédures relatives aux acquisitions foncières nécessaires à la réalisation de ce projet.

Les ouvrages à réaliser sont situés dans le coteau Sud de la commune de [Localité 35] et au bord de la D934 consistant en la création d'un système de collecte, dépollution, régularisation, évacuation des eaux pluviales, la suppression de la station d'épuration actuelle et un raccordement de l'ensemble du réseau des eaux usées vers une canalisation de gros calibre existant sur le plateau.

Suite à une enquête préalable, la Préfecture de Seine et Marne, par arrêté du 22 septembre 2008 a autorisé les agents de SAN VAL D'EUROPE à occuper provisoirement les parcelles de terrain à [Localité 35] aux fins de travaux, puis par un deuxième arrêté du 1er octobre 2008, elle a institué au profit de SAN VAL D'EUROPE, une servitude de canalisation sur les fonds privés nécessaire à la réalisation de la chaîne des eaux pluviales et usées sur le territoire de la commune de [Localité 35].

Sont notamment concernés les consorts [N]-[W], propriétaires de la parcelle cadastrée section [Cadastre 37] d'une superficie de 185'621m², la servitude concernant 4 689 m², située dans le lieudit «'[Adresse 49]'» sur la commune de [Localité 35].

Le juge de l'expropriation de Melun a été saisi par requête déposée au greffe le 5 février 2018 par l'EPA FRANCE concernant la fixation des indemnités revenant aux consorts [N]-[W].

Par jugement avant dire droit du 17 janvier 2019 N°2019/5, le juge de l'expropriation de Seine et Marne a rejeté les exceptions de nullité et d'irrecevabilité soulevées par les consorts [N]-[W].

Les consorts [N]-[W] ont interjeté appel le 20 Juillet 2020 par RPVA limité au rejet des exceptions de nullité et d'irrecevabilité, enregistré sous le n°RG 20-09784.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

- déposées au greffe par les consorts [N]-[W], appelants, le 13 octobre 2020 notifiées le 13 octobre 2020 (AR du 15 octobre 2020) aux termes desquelles ils demandent à la cour de :

'infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

statuant à nouveau

'constater que l'EPAFRANCE n'a pas reçu de mandat spécial pour agir au nom et pour le compte du SAN Val d'Europe, aux droits duquel se trouve la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, pour agir dans le cadre de la procédure prévue aux articles L 152-1 et R 152-1 et suivants du code rural et la pêche maritime ;

'prononcer la nullité des offres indemnitaires notifiées par l'EPAFRANCE ;

en tout état de cause

'déclarer irrecevable la saisine du tribunal par l'EPAFRANCE ;

'condamner l'EPAFRANCE à leur payer une indemnité de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamner l'EPAFRANCE aux dépens.

-Adressées au greffe par le commissaire du gouvernement, intimé, le 12 janvier 2021 notifiées le 19 janvier 2021(AR des 20 janvier 2021) aux termes desquelles il indique s'agissant de la capacité d'EPAFRANCE à représenter la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération que le mandat (et ses avenants) de maîtrise d'ouvrage d'aménagement du secteur du Val d'Europe réseaux eaux usées, établi par le SAN du Val d'Europe (aux droits duquel se trouve à présent la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération) au profit d'EPAFRANCE qualifie ce dernier pour procéder à l'indemnisation des servitudes de canalisation, le cas échéant devant les instances judiciaires ; en effet, l'avenant du 20 janvier 2006 intègre dans la mission du mandataire (EPA) la gestion du foncier, à savoir « les acquisitions des emprises foncières, le choix des procédures et la gestion des procédures nécessaires à ces acquisitions » ; les consorts [N]-[W] considèrent que la mission du mandataire ne mentionne pas explicitement l'indemnisation des servitudes, mais c'est jouer sur les mots, et l'on peut considérer que la mission du mandataire EPAFRANCE intègre implicitement l'indemnisation des servitudes, concomitante des opérations d'expropriation des terrains privés (opérations que le mandataire EPA a la faculté de mener) ;

Par une requête reçue le 5 février 2018, l'EPAFRANCE agissant en qualité de mandataire de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération a saisi la juridiction de l'expropriation du tribunal judiciaire de Seine-et-Marne, aux fins de fixation de l'indemnité au titre de la constitution de la servitude de passage en sous-sol.

Par jugement du 20 mai 2020 N°18/00011, après transport sur les lieux le 23 mai 2018, le juge de l'expropriation de Seine-et-Marne a :

-fixé à la somme de 16.880 euros, toutes causes confondues, l'indemnité à payer par la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération représentée par l'EPAFRANCE aux consorts [N]-[W] pour une emprise de servitude de 4.689 m² sur la parcelle située sur la commune de [Localité 35] lieudit «'[Adresse 49]'» cadastrée [Cadastre 37] ;

-dit que les dépens seront laissés à la charge de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération représentée par l'EPAFRANCE ;

-condamner la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération représentée par l'EPAFRANCE à verser aux consorts [N]-[W] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les consorts [N]-[W] ont interjeté appel le 20 juillet 2020 par RPVA enregistré sous le n°RG 20'09 777 en ce que le tribunal a :

' rejeté l'intention dolosive de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération,

'refusé d'écarter le zonage agricole de la parcelle cadastrée section

D n°108,

'fixé la date de référence au 4 décembre 2006,

'rejeté les demandes et prétentions des consorts [W],

'retenu une valeur unitaire de 9 euros/m²,

'retenu une situation d'occupation agricole dans le cadre de son évaluation.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures dans le dossier RG 20-09777 :

- déposées au greffe, par les consorts [N]-[W], appelants, le 13 octobre 2020, notifiées le même jour (2 AR du 15 octobre 2020) aux termes desquelles ils demandent à la cour de :

-Infirmer le jugement en toutes ses dispositions querellées ;

A titre principal,

-Dire et juger que la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération a agi avec une intention dolosive ;

En conséquence,

-Ecarter le zonage A dans lequel se trouve la parcelle cadastrée section [Cadastre 37], sise au lieudit [Adresse 49], propriété des consorts [N]-[W] ;

-Retenir une date de référence et des termes de comparaison correspondant à un zonage à vocation «'dominante habitat'», à savoir une zone 2AU ;

-Dire et juger que la parcelle cadastrée section [Cadastre 37], sise au lieudit [Adresse 49], bénéficie d'une situation hautement privilégiée, et doit être évaluée à hauteur de 35 euros/m², libre ;

-Fixer le montant de l'indemnité à revenir aux consorts [N]-[W] au titre de la constitution d'une servitude de passage de canalisation en sous-sol de la parcelle cadastrée section [Cadastre 37], sise lieudit [Adresse 49], d'une superficie de 4 689 m², comme suit :

superficie de l'emprise : 4 689 m² ;

valeur unitaire : 35 euros/m², libre ;

coefficient de réduction : 60 %

soit : 65.646 euros.

A titre subsidiaire, si le zonage retenu devait être le zonage Nca,

-Dire et juger que la parcelle cadastrée section [Cadastre 37], sise au lieudit [Adresse 49], bénéficie d'une situation hautement privilégiée, et doit être évaluée à hauteur de 20 euros/m², libre ;

-Fixer le montant de l'indemnité à revenir aux consorts [W] au titre de la constitution d'une servitude de passage de canalisation en sous-sol de la parcelle cadastrée section [Cadastre 37], sise lieudit [Adresse 49], d'une superficie de 4 689 m², comme suit :

superficie de l'emprise : 4 689 m² ;

valeur unitaire : 20 euros/m², libre ;

coefficient de réduction : 60 %

soit : 37.512 euros.

-Condamner la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération à payer aux consorts [N]-[W] une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération aux dépens de l'instance.

- déposées au greffe, par la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, intimée et appelante incidente, le 13 janvier 2021, notifiées le 19 janvier 2021 (2 AR du 20 janvier 2021) aux termes desquelles elle demande à la cour de :

A titre principal,

-infirmer partiellement le jugement en tant qu'il a retenu la situation manifestement privilégiée de la parcelle section [Cadastre 37] située lieudit «'[Adresse 49] et retenu une valeur unitaire de 9 euros/m², et, partant, a fixé l'indemnité leur étant due au titre de la constitution de servitude de canalisation sur une emprise de 4 689 m² à hauteur de 16.880 euros, valeur occupée ;

Par conséquent,

-fixer l'indemnité due au titre de la constitution de servitude de canalisation sur une emprise de 4 689 m² en tréfonds de la parcelle section [Cadastre 37] située lieudit «'[Adresse 49] et propriété des consorts [N]-[W] à hauteur de 5.627 euros, valeur occupée ;

A titre subsidiaire,

-confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les consorts [N]-[W] font valoir que':

- Sur l'intention dolosive de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération s'est livrée à une intention dolosive ayant pour objet de chercher à dévaloriser la parcelle [Cadastre 37] en déclassant cette parcelle en zone A, alors qu'elle était en secteur à «'dominante habitat'» en tant qu'elle appartenait au premier scénario de la ZAC de [Localité 35]. Ils citent trois arrêts de la Cour de cassation rendus le 11 janvier 2012 qui a jugé que l'intention dolosive de l'autorité expropriante était caractérisée en maintenant en zone N une parcelle qui aurait dû être classée en zone U, et qu'elle imposait d'écarter le zonage actuel de la parcelle, pour l'évaluer suivant des références de terrains situés en zone constructible [Pièce n° 21] ;

- Sur la date de référence, celle à retenir est le 12 avril 2018, soit la date de modification simplifiée du PLUi du Val d'Europe. A cette date de référence, la parcelle [Cadastre 37] aurait dû être classée en zone 2AU, dans un secteur à «'vocation dominante habitat'» ;

- Sur la localisation exceptionnelle, ils citent un arrêt qui retient la situation privilégiée et qui concernait le projet Village Nature [Pièce n° 24': CA Paris, 28 mai 2015]. Ainsi, ils demandent la qualification de situation «'hautement privilégiée'» et donnent plusieurs exemples [Cass. 3ème civ., 1er décembre 1993, n° 92-70457'; Cass. 3ème civ., 27 avril 1994, n° 92-70466 ; CA Amiens, 17 novembre 1995, Sté Equipement du Pas de Calais / HALLUlN'; Cass. 3ème civ., 14 avril 1999, n° 98-70079]. Ils mettent en avant également la présence de réseaux à proximité immédiate';

- Sur les références en zone d'urbanisation future à «'dominante habitat'», ils se prévalent du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Melun le 10 novembre 2014 dans le cadre de l'expropriation dont ils ont fait l'objet dans la ZAC de [Localité 35]. Pour ces parcelles, le Tribunal a retenu la situation privilégiée [Pièce n° 29]';

- A titre subsidiaire, sur les références en zone N,

Sur les références proposées par l'autorité expropriante, c'est à juste titre que le tribunal a rejeté l'ensemble des références proposées par la Communauté d'Agglomération Val d'Europe agglomération';

Sur les références proposées par le commissaire du Gouvernement, elles ont été à juste titre écartées par le juge de première instance';

Sur les références des consorts [N]-[W], elles font état de trois références, à savoir deux arrêts de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2016 dans lesquels la valeur unitaire était de 8 euros/m² en valeur occupée [Pièces n° 36 et 37] et l'acquisition par l'EPAFRANCE en 2015 de parcelles à [Localité 35] pour une valeur unitaire de 10 euros/m² [Pièce n° 39].

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération répond que :

- Sur la confirmation du jugement en tant qu'il a rejeté l'exception d'intention dolosive soulevée par les requérants, ces derniers ne démontrent pas la réalité de l'intention dolosive. En effet, la parcelle a toujours été inconstructible. De plus, il n'est pas question pour elle d'acquérir la parcelle'; or, l'intention dolosive en matière d'expropriation peut être révélée par la volonté affichée par la collectivité d'acquérir le terrain à moindre coût, pour les besoins de la réalisation d'une opération';

- Sur l'infirmation du jugement en tant qu'il a fixé le montant de l'indemnité à partir d'une valeur unitaire de 9 euros/m²,

-Sur la date de référence, celle à prendre en compte est celle du 4 décembre 2006';

-Sur l'absence de qualification en terrain à bâtir, les conditions légales ne sont pas remplies :

-absence de desserte par des réseaux suffisants, la parcelle en question n'est pas viabilisée et l'étude d'impact n'a révélé aucun réseau au droit de la parcelle';

-classement en zone NC, elle n'autorise que les constructions agricoles et c'est donc à bon droit que le juge de première instance a jugé que la parcelle ne pouvait recevoir la qualification de terrain à bâtir';

-Sur la situation modérément privilégiée de la parcelle, la parcelle n'est ni viabilisée, ni urbanisée, le territoire étant à vocation agricole. Elle n'est pas située à proximité immédiate d'un site urbanisé';

- Sur les termes de comparaison,

Sur les termes de référence relatifs à des actes de vente, elle invoque des contrats de vente relatifs à des terrains situés à [Localité 35] d'une valeur unitaire respectivement de 1,70 euros/m², 1 euro/m², 0,68 euro/m², 0,50 euro/m² et 2,50 euros/m² [Pièces n° 11, 12, 13, 14 et 15]';

Sur les termes de référence relatifs à des promesses de vente, l'intimée en cite une seule signée le 19 octobre 2011 pour une valeur unitaire de 3 euros/m² [Pièce n° 16]. L'EPAFRANCE produit également cinq termes de référence portant sur des cessions intervenues en 2018 et 2020 dont les valeurs unitaires sont comprises entre 1,16 euros/m² et 4,05 euros/m²';

Sur les termes de référence relatifs à des décisions de justice, il est produit un jugement du 18 septembre 2014 qui a validé une valeur de 3,81 euros/m²'[Pièce n° 18] ;

Sur l'évaluation retenue par le commissaire du gouvernement en première instance et les expropriés, s'agissant de l'arrêt du 28 mai 2016 de la cour d'appel de Paris, ces valeurs ne reflètent pas l'état du marché et ne sont pas comparables avec la parcelle expropriée. S'agissant des deux arrêts de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2016, ces parcelles étaient situées au sein de la ZAC de [Localité 35]. S'agissant de l'acquisition en 2011 par la commune de [Localité 35] puis en 2014 des petites parcelles, celles-ci étaient situées en zone d'urbanisation future et non en zone naturelle [Pièce n° 21].

Le Commissaire du Gouvernement conclut que':

- Sur l'emprise de la servitude, il y a lieu de retenir une emprise de servitude d'une surface de 4 689 m², telle qu'indiquée initialement au relevé parcellaire annexé à l'arrêté préfectoral n° 08 DAIDD SERV 018 du 1er octobre 2008';

- Sur l'intention dolosive, la parcelle [Cadastre 37] n'a pas été déclassée lors des différents changements de PLU mais maintenue en zone agricole. La valeur de base du terrain est donc à rechercher par comparaison à des terrains agricoles non ouverts à l'urbanisation et situés en zones A ou N';

- Sur le montant de l'indemnité à retenir pour la parcelle [Cadastre 37] considérée en zone agricole, le commissaire cite deux références': deux arrêts de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2016 où la valeur occupée a été jugée à 8 euros/m² pour une zone NCa en situation «'manifestement privilégiée'».

Ainsi, il retient une valeur de 9 euros/m² en valeur libre et demande la confirmation du jugement.

Par arrêt du 28 octobre 2021, la cour d'appel de Paris a, sur le fondement de l'article 16 du code de procédure civile, le respect du principe du contradictoire devant être assuré :

-Déclaré recevables les appels principaux des consorts [N]-[W] et l'appel incident de la communauté d'agglomération du Val d'Europe agglomération ;

-Prononcé la jonction des dossiers 20'09784 et 20 '09777, l' affaire étant désormais suivie sous le n°20'09777;

-Déclaré recevables les conclusions des parties;

-Dit que le greffe va notifier à la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération les conclusions déposées dans le dossier RG 20'09784 du 13 octobre 2020 par les consorts [W] ;

-Sursis à statuer sur les prétentions et moyens des parties ;

-Renvoyé l' examen de l'affaire à l'audience du jeudi 3 février 2020.

Le greffe a notifié le 29 octobre 2021 (AR du 2 novembre 2021) à la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération les conclusions des consorts [N]-[W] du 13 octobre 2021.

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération a déposé au greffe des conclusions le 27 janvier 2022 notifiées le 28 janvier 2022 (AR du 31 janvier et 03 février 2022) aux termes desquelles elle demande la cour de :

en premier lieu, sur le jugement du 17 janvier 2019,

'confirmer le jugement toutes ses dispositions,

'débouter les consorts [W] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

en second lieu, sur le jugement du 20 mai 2020

à titre principal

'infirmer partiellement le jugement en tant qu'il a retenu la situation manifestement privilégiée de la parcelle section [Cadastre 37] situé lieu-dit « [Adresse 49] et retenu une valeur unitaire de 9 euros/m², et, partant, a fixé l'indemnité leur étant due au titre de la constitution de servitude de canalisation sur une emprise de 4689 m² à hauteur de 16'880 euros, valeur occupée,

par conséquent,

'fixer l'indemnité due au titre de la constitution de servitude de canalisation sur une emprise de 4689 m² en tréfonds de la parcelle [Cadastre 37] situé lieu-dit « [Adresse 49] et propriété des consorts [W] à hauteur de 5627 euros, valeur occupée,

à titre subsidiaire

'confirmer le jugement dans toutes ses dispositions

en tout état de cause

'débouter les consorts [W] de l'ensemble de leurs demandes et prétentions.

SUR CE LA COUR

- Sur la recevabilité des conclusions et pièces

Aux termes de l'article R 311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017-article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, les appels étant du 20 juillet 2020, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, suite à l'arrêt du 28 octobre 2021, la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération a déposé de nouvelles conclusions hors délai le 27 janvier 2022 qui sont de pure réplique à celles des consorts [N]-[W] du 13 octobre 2021 qui lui ont été notifiées le 29 octobre 2021 ; elles contenaient en effet les moyens d'irrecevabilité et de nullité soulevés par les consorts [N]-[W], ne formulent pas de demandes nouvelles ou de moyens nouveaux, et sont donc recevables au delà des délais initiaux.

- Sur les exceptions de nullité soulevées par les consorts [N]-[W]

En première instance, les consorts [N]-[W] ont conclu à la nullité des offres indemnitaires notifiées par EPAFRANCE est demandé de prononcer la nullité de la saisine du tribunal pour défaut de qualité à agir à défaut de mandat spécial conféré par la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération pour diligenter la procédure d'indemnisation.

Le premier juge a rejeté les exceptions de nullité et d'irrecevabilité soulevée par les consorts [N]-[W] ;

Il en effet considéré que le syndicat d'agglomération nouvelle du Val d'Europe dit SAN VAL d'EUROPE aux droits duquel vient aujourd'hui sans contestation la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération a donné mandat, non contesté également, à EPAFRANCE, de la maîtrise d'ouvrage pour la réalisation des opérations d'infrastructures sur les réseaux d'eaux usées et eaux pluviales au titre de la phase 3 d'aménagement du secteur 4 de Marne-la-Vallée ; que dans l'avenant du 20 janvier 2006, a été ajoutée à ce mandat la gestion du foncier ; que contrairement à ce qui est affirmé par les défendeurs, le mandat du 11 janvier 2007 ne porte pas spécifiquement sur la procédure d'établissement de la servitude de passage de canalisation, mais bien sur une demande de déclaration d'utilité publique pour pouvoir engager une procédure d'expropriation et ils ne contestent pas que l'avenant du 20 janvier 2006 donne pouvoir à EPAFRANCE de diligenter des procédures d'expropriation, tant administrative que judiciaire ; qu'il en résulte qu'EPAFRANCE tant lors de la notification des indemnisations des servitudes arrêtées que lors de la saisine du juge a agi irrégulièrement dans le cadre de son mandat et que les demandes tant de nullité que d'irrecevabilité seront rejetées.

Les appelants demandent en appel dans le dispositif de leurs conclusions qui détermine l'objet du litige en application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, de :

'infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

statuant à nouveau,

-constater que l'EPAFRANCE n'a pas reçu mandat spécial pour agir au nom et pour le compte du SAN VAL d'EUROPE, aux droits duquel se trouve la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, pour agir dans le cadre de la procédure prévue aux articles L 152-1 et suivants et R152-1 et suivants du code rural et la pêche maritime ;

en conséquence,

-prononcer la nullité des offres indemnitaires notifiées par l'EPAFRANCE ;

-prononcer la nullité de la saisine du tribunal pour défaut de notification préalable d'offres indemnitaires régulières ;

en tout état de cause,

- déclarer irrecevable la saisine du tribunal par l'EPAFRANCE,

'condamner l'EPAFRANCE à leur payer une indemnité de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

'condamner l'EPAFRANCE aux dépens de l'instance.

Ils indiquent en effet, que l'EPAFRANCE ne justifie pas avoir la qualité, ni le pouvoir, pour représenter le SAN du VAL d'EUROPE aux droits duquel se trouve à présent la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération ; au sein des offres indemnitaires notifiées le 26 juillet 2017, ainsi qu'au sein du mémoire de saisine du tribunal, l'EPAFRANCE prétend agir en qualité de mandataire de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération et elle verse aux débats une délibération prise le 11 janvier 2007 par le comité syndical du SAN VAL D'EUROPE (pièce n°1), alors qu'aucun mandat ni aucun pouvoir spécial n'a été donné pour agir dans le cadre de la présente procédure, qui était une procédure spécifique consistant, d'abord, au prononcé d'un arrêté préfectoral portant création d'une servitude sur le fondement des articles L 152-1 et suivants du code rural et la pêche maritime, et ensuite, à l'indemnisation judiciaire consécutive à l'institution de cette servitude ; l'EPAFRANCE n'a pas reçu de mandat spécial, alors que l'article R 311-20 du code de l'expropriation dispose expressément qu'à l'audience, le juge entend les parties. Toutefois, les parties peuvent se faire assister ou représenter par un avocat ou par un parent ou allié jusqu'au sixième degré. Le représentant, s'il n'est avocat, justifie d'un pouvoir spécial.

Les consorts [N]-[W] n'avaient pas contesté la compétence de l'EPAFRANCE pour saisir le juge de l'expropriation d'une procédure aux fins de fixation d'indemnités faisant suite à une ordonnance d'expropriation au profit du seul SAN.

La communauté d'agglomération Val d'Europe et le commissaire du gouvernement concluent à la confirmation du jugement.

Les appelants soulèvent l'irrégularité de la notification des offres et de la saisine du tribunal par EPAFRANCE, dans le cadre de la procédure prévue aux articles L152-1 et R152-1 du code rural et de la pêche maritime.

Or, l'article L 152-2 du code rural dispose que les contestations relatives à l'indemnité prévue au 2e alinéa de l'article L 152-1 sont jugées comme en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.

La discussion porte donc sur l'application du titre premier du livre troisième du code de l'expropriation relatif à l'indemnisation, qui prévoit dans son titre 1 les dispositions générales se décomposant comme suit :

'chapitre Ier : procédure :

'section 1 : notification par l'expropriant et détermination des ayants droits

'section 2 : offre de l'expropriant et notification des mémoires

'section 3 : transport sur les lieux et l'audience (qui comprend l'article R 311-20 mentionné par les appelants dans sa version applicable en l'espèce soit avant son abrogation par le décret N°2019-1333 du 11 décembre 2019)

'section 4 : fixation des indemnités

'section 5 : voies de recours

'section 6 : dispositions diverses.

Ils demandent la nullité des offres indemnitaires notifiées par EPAFRANCE et la nullité de la saisine du tribunal pour défaut de notification préalable d'offres indemnitaires régulières.

Concernant en l'espèce, les phases susvisée du livre 3, il ressort des pièces versées aux débats :

- Pièce N°1 : le SAN VAL d'EUROPE en la personne de son président a signé le 20 janvier 2006 avec EPAFRANCE représenté par son directeur général une convention de mandat de maîtrise d'ouvrage phase III d'aménagement du secteur du Val d'Europe lot N°1 réseaux eaux usées : proposition d'avenant administratif qui indique :

« Le SAN du Val d'Europe est chargé de la réalisation des opérations d'infrastructures sur les réseaux EU/EP au titre de la phase 3 d'aménagement du secteur IV dans le cadre de la convention pluriannuelle 2003'2006.

Pour mener à bien ses opérations, le SAN a décidé de confier à un mandataire le soin de réaliser ses opérations à compter des phases projet jusqu'au délai de garantie de parfait achèvement.

Une consultation a été lancée sous la forme d'un appel d'offres ouvert, et selon le lotissement suivant :

'lot 1 : eaux usées (estimation totale des travaux de 7'646'000 euros, estimation totale des honoraires du mandataire de 290'000 euros hors-taxes)

'lot 2 : eaux pluviales (estimation totale des travaux de 15'378'000 euros hors-taxes, estimation totale des honoraires du mandataire de 684'000 euros hors-taxes).

À l'issue de la consultation, la commission d'appel d'offres a attribué chacun des lots à l'établissement public EPAFRANCE qui répondait aux critères du SAN du Val d'Europe tant sur le prix que sur la qualité technique du dossier.

Le bureau syndical en date du 29 septembre 2005 a autorisé le président à signer le marché relatif à la mission de mandat de maîtrise d'ouvrage pour les 2 lots pour un taux de rémunération de 3,5 %.

Néanmoins, la Convention de maîtrise d'ouvrage délégué n'a pas précisé que la gestion du foncier faisait partie à part entière de la mission du mandataire. Le présent avenant a pour vocation d'intégrer cette mission à la convention.

Ceci étant exposé, il est convenu ce qui suit :

Article 1 : mission du mandataire

Il est intégré à l'article 5 « mission du mandataire », la mission suivante :

- gestion du foncier, acquisitions des emprises foncières, gestion des procédures nécessaires à ces acquisitions.

Article 2 : gestion administrative

Il est intégré à l'article 6 « gestion administrative » de l'annexe 4 « mission mandataire»

- gestion du foncier, acquisitions des emprises foncières, choix des procédures, gestion des procédures nécessaires à ces acquisitions. »

Il est donc fait expressément état de la gestion du foncier et du choix des procédures.

- Pièce n°2 : Délibération du 11 janvier 2007 du SAN Val d'Europe: « le projet porte sur la réalisation des aménagements et ouvrages hydrauliques nécessaires à l'amélioration sur le long terme de l'assainissement des eaux pluviales de la commune de [Localité 35] au sud du canal de Meaux à [Localité 31].

Du point de vue de la procédure, des équipements proposés, compte tenu de la nature des travaux, leur implantation sur les emprises partiellement privées, du montant des travaux ($gt;1,9 millions d'euros) font objet d'un dossier d'enquête publique conjointe qui regroupe quatre procédures distinctes :

'la demande d'autorisation d'application des articles L214'1 à L214'6 du code de l'environnement....

'l'étude d'impact soumis à enquête publique de type Bouchardeau....

'la demande de déclaration d'intérêt général au titre de l'article L 211-7 du code de l'environnement....

'la demande de déclaration d'utilité publique des travaux et infrastructures d'assainissement des eaux pluviales et des eaux usées, pour pouvoir engager une procédure d'expropriation des terrains privés concernant devant les accueillir ».

Cette délibération porte donc uniquement sur le dépôt des dossiers d'autorisations nécessaires à la réalisation des ouvrages hydrauliques et ne concerne pas la procédure de servitude de canalisation.

- Pièce n°4 : par arrêté du 5 novembre 2007, le préfet de Seine-et-Marne a prescrit l'ouverture à la mairie de [Localité 35] de l'enquête préalable à l'institution d'une servitude légale sur fonds privés nécessaires à la réalisation de la chaîne des eaux pluviales et usées à [Localité 35], l'enquête devant se dérouler du 4 décembre 2007 au 9 janvier 2008.

- Pièce n°5 : les agents du SAN du Val d'Europe ont été autorisés, par arrêté préfectoral du 22 septembre 2008, à occuper temporairement les parcelles de terrains sis sur la commune de [Localité 35] en vue d'effectuer les travaux nécessaires à la réalisation de pistes provisoires de chantier et à la création de lieux de dépôt provisoire de matériaux nécessaires à la réalisation des travaux de collecte, traitement de régulation des eaux pluviales sur le bassin versant sud du ru, ainsi que la collecte, transport et traitement des eaux usées.

- Pièce n°6 : par arrêté du 1er octobre 2008, le préfet de Seine-et-Marne a institué, au profit du SAN Val d'Europe, une servitude sur les fonds privés nécessaire à la réalisation de la chaîne des eaux pluviales et usées, sur le territoire de la commune de [Localité 35], sur le fondement de l'article L 152-2 du code rural et de la pêche.

Le SAN Val d'Europe a été autorisé à :

' enfouir dans une bande de terrain de 5,50 m, une ou plusieurs canalisations, une hauteur minimale de 0,60 m devant être respectée entre la génératrice supérieure des canalisations et le niveaux du sol après travaux ;

'essarter, dans cette bande de terrains, les arbres susceptibles de nuire à l'établissement et à l'entretien de la canalisation ;

'accéder au terrain dans lequel la conduite est enfouie, les agents chargés du contrôle bénéficiant du même droit d'accès ;

'effectuer tous travaux d'entretien et de réparation.

Sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 37] d'une superficie totale de 185'621 m², seuls 4680 m² ont été concernés par la servitude, cette parcelle appartenant aux appelants.

- Pièce n°8 : cette parcelle en nature de terre de culture, était exploité par Madame [F] [K] qui a fait l'objet d'une éviction totale par jugement définitif du 20 septembre 2014 par le juge de l' expropriation de Seine-et-Marne dans le cadre de l'opération d'aménagement de la Zac de [Localité 35] :

- suite à la loi n°2015'991 du 7 août 2015 portant nouvel organisation territoriale de la République, par délibération syndicale du 15 décembre 2015,la SAN est devenue la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, cette transformation étant actée par arrêté du préfet de Seine-et-Marne du 31 décembre 2015, qui précise en son article 2 que : « l'ensemble des biens, droits et obligations du SAN est transférée la communauté d'agglomération, qui est substituée de plein droit au SAN dans toutes les délibérations et tous les actes de ce dernier à la date de la transformation. L'ensemble des personnels du SAN est, à compter de cette date, réputée relever de la communauté d'agglomération dans les conditions de statut et d'emplois qui sont les siennes ».

- Pièce n°9 : EPAFRANCE a obtenu une estimation du service des Domaines du 10 juillet 2017 fixant à la somme de 3060 euros la valeur de la partie des parcelles concernées par la servitude.

En conséquence, les droits et obligations résultant de la convention de mandat établie entre le SAN et l'EPAFRANCE sont donc repris intégralement par la communauté d'agglomération.

EPAFRANCE bénéficie de la maîtrise d'ouvrage déléguée pour la réalisation de l'intégralité des ouvrages de la chaîne des eaux, et cette mission a été étendue par avenant du 20 janvier 2006 afin d'y inclure expressément la gestion du foncier qui comprend la prise en charge par EPAFRANCE de la maîtrise des emprises nécessaires à la réalisation de l'opération pour laquelle la qualité de maître d'ouvrage délégué, à savoir « acquisitions des emprises foncières » que ce soit par voie d'expropriation ou par constitution de servitude en tréfonds.

- Pièce N°7: Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 juillet 2017, EPAFRANCE a indiqué aux consorts [N]-[W] : objet :

« Réalisation de la chaîne des eaux pluviales et usées à [Localité 35]

Notification d'une indemnisation pour l'institution d'une servitude sur la parcelle cadastrée [Cadastre 37] pour une emprise de 1550 m², suivant arrêté préfectoral n°08 DAIDD SERV 018 du 1er octobre 2008 ».

Les appelants n'ont pas répondu à ce courrier en faisant état d'une opposition de leur part pour la mise en place des droits de Val d'Europe agglomération.

EPAFRANCE a notifié le 26 juillet 2017 aux appelants une offre légale d'indemnisation pour l'institution d'une servitude d'un montant total de 3060 euros :

'en qualité de mandataire de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, EPAFRANCE a saisi le juge de l'expropriation de Seine et Marne, étant représenté par Maître Le Normand bénéficiant d'un mandat ad litem.

En conséquence, EPAFRANCE a bien reçu un mandat spécial pour agir au nom et pour le compte du SAN VAL d'EUROPE, aux droits duquel se trouve la communauté d'agglomération Val d'Europe, pour agir dans le cadre de la procédure prévue aux articles L152-1 et R152-1 du code rural et de la pêche maritime.

EPAFRANCE a donc régulièrement notifié ses offres ayant qualité pour le faire et saisi le tribunal par la SELARL LAZARA avocats selon requête déposée au greffe le 5 février 2018.

Le moyen de droit soulevé par les appelants s'agissant de l'article R 311-20 du code de l'expropriation, à savoir l'absence de pouvoir spécial, en fait selon le texte de pouvoir spécial ne concerne que l'audience. Or, en l'espèce l'EPAFRANCE était représenté à l'audience devant le premier juge par Maître Lenormand (SELARL LAZARE AVOCATS.

Le mandat du 11 janvier 2007 ne porte pas spécifiquement sur la procédure d'établissement de la servitude de passage de canalisations, mais bien sur d'une demande de déclaration publique pour pouvoir engager une procédure d'expropriation, en outre, l'avenant du 20 janvier 2006 donne pouvoir à EPAFRANCE de diligenter des procédures d'expropriation, tant administratives que judiciaires, le premier avenant évoquant toutes procédures relatives à la gestion du foncier et le deuxième les procédures d'expropriation nécessaires aux travaux et infrastructures d'assainissement.

En conséquence, EPAFRANCE tant lors de la notification des offres d'indemnisation des servitudes arrêtées que lors de la saisine du juge de l'expropriation a agi régulièrement dans le cadre de son mandat.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a exactement rejeté les exceptions de nullité soulevées par les consorts [N]-[W] et de les débouter de leurs demandes en appel de voir prononcer la nullité des offres indemnitaires notifiées par l'EPAFRANCE, la nullité de la saisine du tribunal pour défaut de notification préalable d'offres indemnitaires régulières et en tout état de cause, de voir déclarer irrecevable la saisine du tribunal par l'EPAFRANCE.

- Sur le fond

Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L 321-1 du code de l'expropriation, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

Aux termes de l'article L 321-3 du code de l'expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l'indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété ou lorsque l'expropriant fait fixer l'indemnité avant le prononcé de l'ordonnance d'expropriation, à la date du jugement.

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'appel des consorts [N]-[W] au fond porte à titre principal sur l'intention dolosive de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, sur la date de référence et sur le montant de l'indemnité et à titre subsidiaire sur le montant de l'indemnité; l'appel incident de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération concerne le montant de l'indemnité.

S'agissant de la date à laquelle l'emprise de servitude doit être estimée, il s'agit de celle du jugement de première instance conformément à l'article L322-2 du code de l'expropriation, soit le 20 mai 2020.

Le premier juge a écarté l'intention dolosive soulevée par les consorts [N]-[W], a retenu comme date de référence celle du 4 décembre 2006, a écarté la qualification de terrain à bâtir qui n'est du reste pas soutenue par les parties, a retenu une situation privilégiée et a fixé la valeur de la parcelle à 9 euros/m² soit :

4689 m² x 9 euros/m² x 0, 4 = 16'880 euros arrondis en valeur occupée.

- Sur la nature de l'opération

Le territoire de la ville nouvelle de Marne la Vallée correspond au périmètre d'un projet d'aménagement territorial mené aujourd'hui par les deux établissements publics d'aménagement de Marne la Vallée, l'EPAMARNE et l'EPAFRANCE, sur un vaste périmètre qui a été divisé en 4 secteurs :

'les secteurs I, II et III ont été créés en 1972 ;

'le secteur IV a été créé en 1987.

La commune de [Localité 35] située dans le secteur IV est d'une superficie de 890 ha, s'étirant du nord vers le sud sur quelques 5 km de long, 3 km du nord jusqu'à la D934, 2 km au sud de la D934, jusqu'à ajouter la commune de [Localité 56] ; elle est située à 30 km de la Ville de [Localité 54], dans l'emprise du secteur IV de Marne-la-Vallée, à seulement 2 km du site Disneyland Paris.

En raison des débordements fréquents du ruisseau de la commune et du mauvais fonctionnement de la station d'épuration, le SAN Val d'Europe qui assure la maîtrise d'ouvrage des infrastructures primaires sur les périmètres des cinq communes du secteur IV dont [Localité 35] fait partie, a décidé, dans le cadre de la convention de 1003/2006, de réaliser les travaux correspondants (pièce n°1).

Pour les eaux pluviales, le projet porte sur la réalisation des aménagements et ouvrages hydrauliques nécessaires à l'amélioration sur le long terme de l'assainissement de la commune de [Localité 35].

Pour les eaux usées, le projet a pour objet la création d'un nouvel exutoire pour les exclure de la commune et leur raccordement aux réseaux existant du SAN Val d'Europe sur le plateau.

En qualité d'établissement public d'aménagement de l'État, L'EPAFRANCE a été désigné comme mandataire par le SAN du Val d'Europe, par délibération du 11 janvier 2007, pour effectuer les procédures relatives aux acquisitions foncières nécessaires à la réalisation de ce projet (pièce n°2).

En conséquence par décret n°87'192 du 24 mars 1987, a été créé une nouvelle agglomération dans le secteur IV de la ville nouvelle de Marne la Vallée, dénommé Val d'Europe, composé des communes suivantes : [Localité 30], [Localité 34], [Localité 35], [Localité 50] et [Localité 56] (Pièce n°1).

Le périmètre de cette nouvelle agglomération a été étendu en 2011 à la commune de [Localité 57].

Par décret n°87'193 du 24 mars 1987, était approuvée la Convention relative à la création et l'exploitation de Disneyland en France, entre l'État, la région Île-de-France, le département de Seine-et-Marne, RATP, EPAFRANCE et la société de Walt Disney compagnie pour l'aménagement d'une zone de 2000 ha et a déclaré projet d'intérêt général le projet d'aménagement du secteur IV de Marne-la-Vallée (Pièce n°2) et le projet d'aménagement du secteur IV de Marne-la-Vallée été déclaré projet d'intérêt général(PIG) au sens de l'article L 102'un du code de l'urbanisme (pièce n°3), qui a été modifié le 15 septembre 2010 par le décret n°2010'1081 (pièce n°5), porté dans les orientations d'aménagement de la convention du 24 mars 1987 sur ce territoire.

Le développement de ce territoire est également encadré par les dispositions du PLU de la commune, devenu le PLUI de la communauté d'agglomération Val d'Europe en 2016, ainsi que par le schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIFF), approuvé initialement en 1994 et dont la révision a été approuvée par le décret n°2013'1241 du 23 décembre 2013 (pièce n°6).

Le préfet de Seine-et-Marne a rappelé aux maires et aux présidents d'EPCI par missive du 17 février 2012 (pièce n°7), et par une missive portée à leur connaissance du mois de janvier 2019 (n°8) qu'il ressort de la combinaison des articles L 123-3, L141-1, L131-1 du code urbanisme que la hiérarchie entre ces documents s'établit comme suit :

'le PLU ou le PLUI compatible avec le schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF) ;

'le PLU ou le PLUI doit être conforme au PIG.

Les consorts [N]-[W] soulignent que le secteur du Val d'Europe, et le territoire de la commune de [Localité 35] en particulier, connaissent depuis de nombreuses années une forte pression foncière.

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération représentée par EPAFRANCE est bénéficiaire d'une servitude sur les fonds privés, incluant la parcelle section [Cadastre 37] pour la réalisation de la chaîne des eaux pluviales et usées sur le territoire de la commune de [Localité 35] l'autorisant à :

'enfouir dans une bande de terrains de 5,50 m une ou plusieurs canalisations, une hauteur minimale de 0,60 m devant être respectée entre la génératrice supérieure d'égalisation les niveaux du sol après travaux ;

'essarter, dans cette bande de terrains, les arbres susceptibles de nuire au rétablissement et à l'entretien de la canalisation ;

'pour accéder au terrain dans lequel la conduite est enfouie, les agents chargés du contrôle bénéficient du même droit d'accès ;

'effectuer tous travaux d'entretien et de réparation.

En conséquence, aucun transfert de propriété n'est intervenu s'agissant de l'indemnisation de l'instauration d'une servitude et la fixation d'indemnité est faite selon la consistance du bien à la date du jugement du 20 mai 2020.

La parcelle [Cadastre 37] est en forme d'obus au lieu-dit « [Adresse 49] », en nature de terre agricole, d'une superficie totale de 185'621 m², dont seuls 4680 m² sont concernés par la servitude, présentant une façade sur la rue [Adresse 39].

Cette parcelle est située dans le périmètre des servitudes nécessaires à la réalisation du projet était antérieurement exploitée par Madame [E] [K] qui a fait l'objet d'une éviction totale par jugement du 20 novembre 2014.

- Sur l'intention dolosive

L'article L322-2 du code de l'expropriation dispose que les biens sont estimés à la date de la décision de première instance.

Toutefois, et sous réserve de l'application des dispositions des articles L322-3 à L322-6, est seul pris en considération l'usage effectif des immeubles et droits réels immobiliers un an avant l'ouverture de l'enquête prévue à l'article L 1 ou, dans le cas prévu à l'article L 122-4, un an avant la déclaration d'utilité publique ou, dans le cas des projets ou programmes soumis au débat public prévu par l'article L 121-8 du code de l'environnement ou par l'article 3 de la loi n°2010'597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, au jour de la mise à disposition du public du dossier de ce débat « ou, lorsque le bien est situé à l'intérieur du périmètre d'une zone d'aménagement concerté mentionné à l'article L311-1 du code de l'urbanisme, à la date de publication de l'acte créant la zone, si elle est antérieure d'au moins un an à la date d'ouverture de l'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique. »

Il est tenu compte des servitudes et des restrictions administratives affectant de façon permanente l'utilisation ou l'exploitation des biens à la date correspondante pour chacun des cas prévus au 2e alinéa, sauf si leur institution révèle, de la part de l'expropriant, une intention dolosive.

Les consorts [N]-[W] soulèvent l'intention dolosive de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération en indiquant qu'avant la modification du PIG en 2010, le secteur dans lequel se trouve la parcelle était identifié comme un « espace naturel » (pièce n°11), et qu'il était classé en zone NCa (espace naturel) du POS de la commune de [Localité 35] (pièce n°12) ; que depuis la modification de ce PIG en 2010, le secteur dans lequel se trouve la parcelle est officiellement identifiée comme secteur à «dominante habitat » (pièce n°13) ; l'annexe au PIG relative à « l'affectation des sols et programmes d'urbanisation » définissant les objectifs, définit un secteur de 37 ha environ « pour développer l'agriculture urbaine », mais « situé à l'ouest du parc de [Localité 35] », qui ne concerne pas la parcelle ; le SDRIF adopté en 2013 contient des orientations générales et une carte de destination qui confirme la vocation urbaine ou d' urbanisation de la parcelle en la plaçant en « secteur d'urbanisation préférentielle » (pièce n°15).

EPAFRANCE a, à partir de 2011, mis en 'uvre un projet d'expropriation sur les parcelles situées dans le « secteur d'urbanisation préférentielle » dans le cadre du projet d'aménagement relatif à la Zac de [Localité 35], créée par arrêté préfectoral du 24 décembre 2013 (pièce n°10) et cette intégration ressort de la plaquette de présentation établie dans le cadre de la concertation préalable (pièce n°9) du premier scénario retenu au mois de mars 2011 (pièce n°16).

En conséquence :

'la parcelle [Cadastre 37] a été systématiquement intégrée au périmètre des études menées pour identification des espèces présentes impactées par le projet ;

'Il est fait état « d'une première version du plan guide présenté fin septembre 2011. Ce document est stabilisé en avril 2012. Ce document n'envisage d'urbanisation que sur les terres aujourd'hui agricoles » ;

'toutefois, finalement, la parcelle [Cadastre 37] sera retirée du périmètre de la Zac de [Localité 35], à partir du début de l'année 2012, et ce en raison de difficultés financières (pièce n°17 et 18).

Les consorts [N]-[W] estiment que le SAN a cherché à la suite de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération à dévaloriser la parcelle [Cadastre 37], puisque dans le périmètre du secteur 4 de Marne-la-Vallée, c'est le SAN Val d'Europe qui dispose de la compétence en matière d'urbanisme ; avant l'adoption du PLU de la commune de [Localité 35] en septembre 2012, conformément aux prescriptions du PIG (Projet d'Intérêt Général), alors en vigueur à cette époque, la parcelle était classée en zone NCa (espace naturel), le PLU de la commune de [Localité 35] a été approuvé le 20 septembre 2012, au lieu et place de l'ancien POS, et contre toute attente, il a procédé au déclassement de cette parcelle en zone A (zone agricole) (pièce n°19), alors que dans le même temps, les autres parcelles leur appartenant, qui seront expropriés dans le cas de la Zac de [Localité 35], ont été classées en zone 2aUc, zone d'urbanisation future à « vocation dominante habitat», conforme à la destination ' dominante habitat ' prévue par le PIG modifié en 2010 ; une nouvelle incompatibilité s'ajoutera en 2013 avec l'adoption du SDRIF qui a confirmé la vocation d'urbanisation de la parcelle en la plaçant en « secteur d'urbanisation préférentielle » ; tandis que le PLU de la commune de [Localité 35] a fait l'objet de plus de six modifications depuis son adoption en 2012, aucune de celles-ci, réalisé d'abord par le SAN Val d'Europe, puis par la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, n'a pour objet d'assurer sa compatibilité et sa conformité avec les documents d'urbanisme supérieurs, à savoir le PIG et le SDRIF.

Le déclassement de la parcelle et sa non intégration en zone d'urbanisation future conformément à ce qu'imposent les documents d'urbanisme supérieurs, a pour objet de tenter de diminuer la valeur de ce terrain dont l'urbanisation à court ou moyen terme et participe d'une intention dolosive selon les Consorts [N]-[W].

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération et le commissaire du gouvernement demandent la confirmation du jugement qui a écarté l'intention dolosive.

Il appartient aux consorts [N]-[W] de démontrer l'intention dolosive.

Le juge de l'expropriation ne peut apprécier la légalité ni l'opportunité des actes administratifs au vu desquels il lui est demandé de statuer; en l'espèce, les consorts [N]-[W] n'ont pas saisi les juridictions administratives compétentes.

Il ressort des pièces versées aux débats que la parcelle [Cadastre 37] n'a pas été déclassée lors des différents changements de PLU mais maintenue en zone agricole, étant passée de la zone NCa au POS à la zone A au PLU, son urbanisation n'étant plus envisagée dans un futur proche, seule une servitude de passage de canalisation venant l'impacter. Les expropriés indiquent même que leur parcelle était incluse en 2010 en zone NCa, soit en zone déjà à vocation agricole du PLU (pièce n°12); le classement en zone A est un changement de terminologie qui ne correspond pas à un « déclassement » ; ce zonage n'a pas été contesté par les appelants.

Si l'intention dolosive en matière d'expropriation peut être révélée par la volonté affichée par la collectivité d'acquérir le terrain à moindre coût, pour les besoins de la réalisation d'une opération, la communauté d'agglomération n'a pas pour projet d'acquérir dans un futur proche la parcelle, puisque celles-ci ne fait l'objet d'aucune orientation d'aménagement et est toujours cultivée.

La parcelle des consorts [N]-[W] n'est pas « fléchée » par le document d'urbanisme comme devant faire l'objet d'une ouverture à l'urbanisation à court terme ; en effet la cartographie du SDRIF ne reporte que les orientations sur les zones données, sans qu'il puisse en être fait une application à une parcelle et le document d'urbanisme local ne s'inscrit que dans une relation de compatibilité avec celui-ci en application des articles L 142-1 et L151-1 du code de l'urbanisme, et non dans un rapport de conformité (Conseil d'État, 18 décembre 2017,req n°395216), cette compatibilité devant s'apprécier à l'échelle du territoire et en prenant en compte l'ensemble des orientations fixées.

En l'espèce la parcelle se trouve en limite de zone d'urbanisation préférentielle, pour partie dans ce que le SDRIF indique comme une « continuité », au sein d'une zone agglomérée (pièce n°20) ; en outre, il ressort du dossier de demande de dérogation « espèce protégée » (pièce n°16) établie en application des articles L 411-1 et suivants du code de l'environnement dans le cadre de l'élaboration du projet de la Zac de [Localité 35] que l'affectation naturelle d'au moins une partie de la parcelle propriété des consorts [N]-[W] devait être conservée, sauf à requérir la mise en place d'importantes mesures compensatoires.

S'agissant du projet d'intérêt général (PIG) invoqué par les appelants, en application des articles L 102-1 à 5 du code de l'urbanisme, il constitue uniquement un outil mis à disposition de l'État afin, le cas échéant, pour imposer à une collectivité la prise en compte d'un projet dont l'intérêt excède la seule échelle locale et il ne constitue ni un document d'urbanisme, ni une décision relative à utilisation ou à l'occupation des sols (Conseil d'État 4 juin 2012, req 340'213).

En outre, la parcelle repérée en « dominante habitat » ce qui n'implique nullement son ouverture à urbanisation à court terme, est également couverte par une trame verte reprenant le couloir de respiration figurant au PLU et le passage de la future localisation emprunte cette trame verte ; le classement en zone agricole correspond à la vue aérienne montrant que le terrain de grande superficie est entièrement cultivé, et s'inscrit en continuité de zone naturelle et ne comporte pas de réseaux suffisants pour permettre l'urbanisation.

Enfin, les appelants font état de cette intention dolosive pour faire baisser artificiellement les prix, mais cette parcelle se trouve en dehors du périmètre de la convention conclue avec la société EURO DISNEY.

En l'espèce, ni la chronologie des fait, la parcelle [Cadastre 37] ayant toujours été classée en zone agricole, ni des considérations de fond, en l'absence d'incompatibilité avec les dispositions du SDRIF ou d'erreur manifeste dans le maintien du classement, ne caractérisent l'intention dolosive.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a exactement rejeté l'exception d'intention dolosive soulevée par les consort [N]-[W].

- Sur la date de référence

En application de l'article L322-2 du code de l'expropriation, l'enquête publique préalable à l'institution de servitudes légales sur fonds privés nécessaires à la réalisation de la chaîne des eaux pluviales et usées à [Localité 35], s'est déroulée du 4 décembre 2007 au 9 janvier 2008.

En conséquence, les appelants seront déboutés de leur demande de voir fixer la référence au 12 avril 2018 en application de l'article L 313-6 du code de l'urbanisme en faisant état du périmètre du droit préemption urbain, la parcelle [Cadastre 37] n' étant pas soumise au droit de préemption urbain.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a exactement fixé, en application de l'article L 322-2 du code de l'expropriation, la date de référence au 4 décembre 2006, correspondant à un an avant l'ouverture de l'enquête préalable à l'institution de la servitude.

À cette date, la parcelle [Cadastre 37] était située en zone NCa (zone agricole) du POS de la commune de [Localité 35], définie comme « zone naturelle constituée par les parties du territoire communal affecté aux exploitations rurales de culture et à l'exploitation forestière. La valeur économique des terres impose d'assurer la pérennité des exploitations, en interdisant toute utilisation du sol incompatible avec leur fonctionnement ou de nature à porter atteinte à l'équilibre économique qui leur est nécessaire ».

Le commissaire du gouvernement précise que la parcelle est actuellement située en zone A du PLUI du Val d'Europe, approuvée lors du conseil communautaire du 7 juillet 2016 : la zone A est une zone à protéger en raison du potentiel des terres agricoles.

- Sur la qualification juridique

Les appelants ne contestent pas que leur parcelle ne peut recevoir la qualification de terrain à bâtir au sens de l'article L322-3 du code de l'expropriation.

Ils concluent à sa situation très privilégiée, retenue par le premier juge, en indiquant qu'il s'agit d'une parcelle en nature de terre, située sur le territoire de la commune de [Localité 35], au lieu-dit [Adresse 49], d'une superficie de 185'621 m², que cette commune située à 30 km de la Ville de [Localité 54], dans l'emprise du secteur 4 de Marne-la-Vallée et à seulement 1,5 km du site Disneyland Paris, que la gare SNCF, permettant de relier la Gare de l'Est en 30 minutes, est située à moins de 5 minutes en voiture, sur la commune voisine d'Esly et que le secteur du Val d'Europe ne cesse de se développer depuis l'arrivée d'Eurodisney, d'où une très forte pression foncière dans un rayon de plus de 5 km autour du parc d'attraction ; ils ajoutent que si la commune est à prédominance rurale, tel n'est pas le cas du secteur nord dans lequel est située la parcelle évaluée, correspondant au c'ur du village, qui est urbanisé autour du centre-ville, jusqu'aux limites Sud de la commune d'[Localité 41].

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération ne conteste pas la qualification de situation privilégiée de la parcelle, mais considère que sa situation est modérément privilégiée, le territoire étant à vocation agricole.

À la date de référence, la parcelle [Cadastre 53] est proche de la zone urbanisée de la commune de [Localité 35], dont la population est en augmentation, de [Localité 20], du parc Disneyland Paris, et dans une zone de forte pression foncière ; elle dispose d'accès à plusieurs voies de circulations, étant à proximité immédiate des réseaux d'électricité, eaux potables et usées ; les consorts [N]-[W] ont en effet commandé une étude de l'état des réseaux situés à proximité immédiate de la parcelle [Cadastre 37] (pièce N°30).

Il en ressort que ce terrain est desservi par les réseaux suivants :

- route [Adresse 39] : réseau EDF haute tension et réseau eau potable

- rue [Adresse 43] : réseau EDF basse tension, eau potable, téléphonie

- [Adresse 33]s : réseau d'eaux usées.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la situation privilégiée de la parcelle, sans qu'il soit nécessaire d'y rajouter une autre appréciation qualitative, la cour de cassation ayant en effet retenu uniquement la notion de situation privilégiée.

- Sur le montant de l'indemnité de servitude

1° Sur les surfaces

Il ressort de l'extrait des plans parcellaires et de l'arrêté préfectoral du 1er octobre 2008 instituant au profit du SAN Val d'Europe la servitude sur les fonds privés, que l'emprise de la servitude sur la parcelle [Cadastre 37] porte sur une surface de 4689 m² ; par lettre du 7 janvier 2015, EPAFRANCE a notifié une offre d'indemnisation aux propriétaires portant sur cette emprise, puis a notifié une nouvelle offre le 26 juillet 2017 portant sur une emprise de 2550 m².

Le premier juge indique qu'il n'a pas la possibilité de modifier l'emprise qui est déterminée dans l'arrêté préfectoral et que l'indemnisation portera nécessairement sur la surface initiale, soit 4689 m².

En l'absence de contestation des parties sur ce point, le jugement sera donc confirmé en ce sens.

2° Sur la méthode

Le juge de l'expropriation dispose du pouvoir souverain d'adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.

La méthode par comparaison retenue par le premier juge n'est pas contestée par les parties.

Au regard de la zone de référence et du zonage de la parcelle [Cadastre 37] passée de la zone NCa au POS à la zone A au PLU, la valeur du terrain doit être recherchée par comparaison avec des terrains non ouverts à l'urbanisation situés en zone A ou N.

3° Sur les références des parties

Il convient en conséquence d'examiner les références des parties :

a) Les références des consorts [N]-[W]

Les consorts [N]-[W] demandent à titre principal de retenir une valeur unitaire de 35 euros/m².

Cependant, cette demande est formulée à l'appui de l'intention dolosive et pour une date de référence au 12 avril 2018.

Cette demande principale sera donc rejetée.

Ils se fondent sur une référence en zone d'urbanisation future à « dominante habitat », à savoir un jugement rendu par le tribunal de grande instance de Melun le 10 novembre 2014 (pièce n°29), pour plusieurs terrains, situé en zone 2AU, à vocation « dominante habitat ».

La cour ayant rejeté l'intention dolosive et ayant fixé la date de référence au 4 décembre 2016, soit en retenant un zonage NCa (zone agricole), cette référence, au demeurant trop ancienne datant de plus de cinq ans, située dans un autre zonage n'est pas comparable et sera donc écartée.

Ils demandent à titre subsidiaire pour des références en zone N de retenir une valeur de 20 euros/m², libre, avec un coefficient de réduction de 60 % soit la somme de :

(4689 m² x 20 euros) x 0,4= 37'512 euros.

Ils proposent 3 références :

'Arrêt de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2016 (pièce N° 36) : à [Localité 35], parcelles cadastrées section [Cadastre 40],[Cadastre 9], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15], [Cadastre 16], [Cadastre 17], [Cadastre 18] et [Cadastre 19], 314'200 m², zone NCa « situation manifestement privilégiée » 8 euros/m², occupé.

Ils indiquent que ces parcelles ne sont pas acollées immédiatement à une zone urbanisée, comme leur parcelle, au droit de laquelle un lotissement a été créée de longue date sur sa façade nord, que la configuration de ces parcelles très disparates est moins favorable ainsi que leur localisation.

'Arrêt de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2016 (pièce n°37) : à [Localité 35], parcelle cadastrée section [Cadastre 29], 21 549 m², zone NCa « situation manifestement privilégiée », date de référence au 4 décembre 2006, 8 euros/m² occupé.

Ils indiquent que cette parcelle n'est pas accolée immédiatement à une zone urbanisée comme leur parcelle, que sa configuration est très défavorable et que sa localisation par rapport au centre bourg est également moins favorable.

Ils ajoutent que ces arrêts portaient sur des évaluations réalisées en septembre/novembre 2014, alors que l'évaluation de la parcelle [Cadastre 37] est à réaliser à fin 2019, étant précisé qu'elle est située dans un secteur où il est acquis que la pression foncière est très forte ; ces arrêts portaient également sur des parcelles occupées en vertu d'un bail rural conférant une protection au preneur, alors que la parcelle [Cadastre 37] est occupée à titre précaire ; ces arrêts portaient sur des terrains qui ne bénéficient à l'évidence pas des mêmes qualités et avantages que la parcelle [Cadastre 37], en termes d'accessibilité aux voies et réseaux, de proximité avec les secteurs urbanisés.

Ces références sont comparables en localisation et en consistance ; elles seront donc retenues ; s'il convient de tenir compte de la situation plus favorable de la parcelle [Cadastre 37] et de l'ancienneté de ces références, la valeur revendiquée de 20 euros/m² ne peut cependant être atteinte.

'Acquisition en 2015 par EPAFRANCE auprès de la commune de [Localité 35] (pièce n°39), parcelles cadastrées section [Cadastre 36],[Cadastre 1], 1280 m², zone N, 12'800 euros, soit 10 euros/m².

Les appelants soulignent que ce terrain ne dispose d'aucun accès par une voie asphaltée n'étant accessible que par un chemin de terre, qu'il ne dispose d'aucun accès aux réseaux, si ce n'est le réseau des eaux usées situées sur le chemin du Bonhomme, qu'il est totalement en friche sans aucun entretien, qu'il ne jouxte aucune partie urbanisée, contrairement au terrain à évaluer.

Le relevé des formalités publiées (pièce n°39) mentionne une expropriation du 22 mai 2014 ; cette référence est trop ancienne datant de plus de 5 ans et sera donc écartée.

b) Les références de la communaute d'agglomération Val d'Europe agglomération

Elle produit des termes de référence correspondant à l'avis du Domaine, les actes de vente et des promesses de vente relatif à des terrains situés à [Localité 35] dont les caractéristiques sont similaires (zone Nca, terre de culture) :

'Contrat de vente du 13 octobre 2011 entre Madame [Y], Monsieur [Z] et le SAN du Val d'Europe sur une parcelle de 1931 m², cadastrée section [Cadastre 24], en zone NCa, bois taillis enclavé, 3250 euros, soit 1,70 euros/m² (pièce n°11),

'Contrat de vente du 26 janvier 2010 entre Monsieur [D] [I] et M. [H], parcelle en nature de pré de 15 873 m², cadastrée [Cadastre 58], 16 000 euros, soit 1 euro/m² (pièce n°12),

'contrat de vente du 8 septembre 2009, parcelle cadastrée [Cadastre 27] en nature de pré, 4703 m², 3176 euros, soit 0,68 euros/m² (pièce n°13),

'vente du 25 janvier 2008 sur plusieurs parcelles cadastrées section [Cadastre 26], [Cadastre 8] et [Cadastre 7], en nature de bois taillis, et [Cadastre 9], en nature de prairie, situées en zone NCa, 2651 m², 1325,5 euros, soit 0,50 euros/m² (pièce n°14)

'vente du 8 avril 2008 sur une parcelle cadastrée section [Cadastre 7], 1469 m², en zone NCa, en partie constituée par un espace boisé classé, 16 172 euros, soit 2,50 euros/m² (pièce n°15).

Ces termes sont trop anciens date de plus de 5 ans et seront donc écartés.

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération propose également une promesse de vente signée le 19 octobre 2011 entre le SAN du Val d'Europe et les consorts [S], [V] et [M] s'agissant d'une parcelle cadastrée [Cadastre 25] en nature de pré, 15 270 m², 46'000 euros, soit 3 euros/m² (pièce n°16), promesse de vente confirmée par un acte d'adhésion à l'ordonnance d'expropriation du 19 février 2014 (pièce n°17).

Ce terme de référence est trop ancien datant de plus de 5 ans et sera donc écarté.

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération propose également des cessions de quatre parcelles situées en zone agricole et une parcelle en zone AU à [Localité 35], correspondant à des parcelles plus petites et la plus grande est de 6029 m², avec des valeurs unitaires comprises entre 1,16 euros et 4,05 euro/m², toutes ces parcelles étant en zone agricole à moins de deux kilomètres de la parcelle à évaluer, avec les références de publication :

N° du terme

Date de vente

Adresse

Superficie

Prix en euros

Prix en euros/m²

Zonage

T1

25 juin 2020

[Cadastre 22]

[Adresse 46]

2644

10700

4,05

A

T2

30 octobre 2018

[Cadastre 59]

[Adresse 44]

2063

8500

4,12

A

T3

18 octobre 2018

[Cadastre 60]

[Adresse 48]

6029

7000

1,16

A

T4

18 octobre 2018

[Cadastre 23]

[Adresse 47]

223

600

2,69

A

T5

12 octobre 2018

[Cadastre 38]

[Adresse 45]

478

2000

4,18

AUaCc

Le commissaire du gouvernement commente le terme T1 et rajoute un autre terme : 5/09/2019, [Adresse 47] à [Localité 35], 502 m², 502 euros, 1 euros/m², terre, zone A.

Il indique qu'il s'agit de transactions ordinaires de terre agricole (en zone A ou NC) du PLU s'effectuant localement sur le niveau de l'ordre de 3 euros/m² en moyenne : minimum : 1 euro/m² ; maximum : 5, 29 euros/m².

Ces termes s'ils sont comparables en localisation, ne le sont pas en consistance, puisqu'il s'agit de transactions ordinaires de terre agricole, alors que le bien évalué est en situation privilégié.

Ces termes non comparables seront donc écartés.

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération propose un terme de référence correspondant à un jugement n°13/00033 du 18 septembre 2014, du juge de l'expropriation de Seine-et-Marne, parcelle cadastrée section à [Cadastre 28], à hauteur de 3,80 euros/m².

Ce terme est trop ancien datant de plus de 5 ans et sera donc écarté.

La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération indique enfin que ces décisions confirment l'estimation faite par le service des Domaines autour de 3 euros/m², auquel est déduit un abattement de 60 %.

L'avis des Domaines (pièce n°9) ne correspondant pas à une mutation effective ne peut servir de terme de référence et sera écarté.

c) les 2 arrêts de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2016

Ces deux arrêts ont déjà été étudiés et retenus pour une valeur de 8 euros/m² occupé.

Les valeurs à prendre en compte sont sensiblement plus élevées que les transactions ordinaires de terre agricole, ce qu'avaient montré des arrêt rendus en 2015 par la cour d'appel dans l'opération Villages Nature (valeur unitaire de 8 euros/m² en valeur libre et 7 euros/m² en valeur occupée), terrain classé, à la date de référence retenue par la cour, en zone Nda du POS de Villeneuve le Comte, zone à dominante naturelle, non équipée, qui devait être protégée en raison de la qualité du paysage et que confirment deux autres arrêts mentionnés par l'exproprié.

La communauté d'agglomération Val d'Europe indique que la valeur demandée de 20 euros/m² par les expropriés pour la parcelle [Cadastre 37] considérée en zone agricole en situation hautement privilégiée apparaît peu réaliste et hors marché et elle demande au vu des arrêts de la cour d'appel de confirmer la valeur de 9 euros/m² en valeur libre.

Au vu des références retenues par la cour, correspondant à deux arrêts du 30 juin 2016 pour une valeur de 8 euros/m², la valeur revendiquée par les consorts [N]-[W] de 20 euros/m² en valeur libre ne peut être atteinte ; en tenant compte de l'ancienneté de ces termes, et du caractère privilégiée de la parcelle [Cadastre 53], le premier juge a exactement porté la valeur de la parcelle à 9 euros/m².

Il est établi qu'une indemnité d'éviction a déjà été fixée au profit des occupants de la parcelle et qu'à la date du jugement celle-ci était toujours exploitée ; il ressort du procès-verbal de transport sur les lieux que la parcelle était exploitée au titre d'un bail précaire ; il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a exactement fixé l'indemnité revenant aux consorts [N]-[W] en valeur occupée soit :

4689 m² x 9 euros/m² x 0,4 (coefficient de réduction de 60 % non contesté) = 16'880 euros.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération à payer aux consorts [N]-[W] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de débouter les consorts [N]-[W] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

- Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l'expropriant conformément à l'article L 312-1 du code de l'expropriation.

Les consorts [N]-[W] perdant le procès seront condamnés aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Vu l'arrêt de la cour du 28 octobre 2021;

Déclare recevables les conclusions des parties ;

Confirme les jugements entrepris ;

Déboute Madame [R] [W], Madame [U] [W] et Madame [A] [N] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Madame [R] [W], Madame [U] [W] et Madame [A] [N] aux dépens.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 20/09777
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;20.09777 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award