La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/06/2022 | FRANCE | N°18/07421

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 22 juin 2022, 18/07421


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRET DU 22 JUIN 2022



(n° , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07421 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B53K3



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Février 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F17/01914





APPELANT



Monsieur [P] [V]

[Adresse 1]

[Locali

té 3]



Représenté par Me Aude ABOUKHATER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0031



Bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale





INTIMEE



SAS SEPHORA Agissant poursuites et dil...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRET DU 22 JUIN 2022

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07421 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B53K3

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Février 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F17/01914

APPELANT

Monsieur [P] [V]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Aude ABOUKHATER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0031

Bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale

INTIMEE

SAS SEPHORA Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège social.

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Camille JOSSE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOST, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 16 décembre 2021,chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre

Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre

Madame Véronique BOST, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 16 décembre 2021

Greffier : lors des débats : Mme Sonia BERKANE

ARRET :

- contradictoire

- mis à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile prorogé jusqu'à ce jour.

- signé par Monsieur Nicolas TRUC, Président et par Sonia BERKANE,Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [P] [V] a été engagé en qualité d'agent qualité par la société SEPHORA selon contrat à durée déterminée du 5 mai au 5 juillet 2003.

Le contrat s'est poursuivi à durée indéterminée à compter du 6 juillet 2003.

Par courrier du 3 juin 2015, M. [V] a été convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 18 juin.

Par courrier du 24 juin 2015, la société SEPHORA a notifié à Monsieur [V] son licenciement pour faute grave.

Contestant son licenciement, Monsieur [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris qui par jugement du 5 février 2018, notifié à Monsieur [V] le 23 février 2018, a débouté celui-ci de toutes ses demandes et a débouté la société SEPHORA de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [V], après avoir sollicité et obtenu l'aide juridictionnelle totale par décision du 28 mai 2018, a interjeté appel du jugement par déclaration déposée par voie électronique le 12 juin 2018.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 12 septembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits et des moyens développés, il demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes tendant à :

* dire et juger que le licenciement est nul ;

- Subsidiairement dire et juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse:

- condamner la Société SEPHORA à lui verser:

* 3 911,88 euros au titre du rappel de salaire ;

* 337,56 euros au titre de la prime d'ancienneté et de nettoyage;

* 424,94 euros au titre des congés payés afférents ;

* 2 832,96 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis;

* 283,30 euros au titre des congés payés afférents ;

* 3 399,55 euros au titre de l'indemnité de licenciement ;

* 25 496,64 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse;

* 8 498,88 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice distinct ;

* 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991;

- condamner la Société SEPHORA à payer les intérêts légaux ;

- ordonner l'anatocisme ;

- condamner SEPHORA à lui délivrer les bulletins de salaire conformes, un certificat de travail conforme, une attestation Pole Emploi rectifiée, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document;

- condamner la Société SEPHORA aux dépens ;

Et statuant à nouveau

- condamner la Société SEPHORA à lui verser :

* au titre du rappel de salaire pour la période du 4 mai au 30 juin 2015 : 2 869,44 euros

* au titre du rappel de prime d'ancienneté du 4 mai au 30 juin 2015 : 218,04 euros

* au titre des congés payés afférents : 308,75 euros

- dire que le licenciement est nul ;

- condamner la Société SEPHORA à lui verser la somme de 40 984,30 euros selon décompte suivant :

* 2 833 euros au titre de l'indemnité de préavis

* 283,30 au titre des congés payes afférents,

* 3 872 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 25 497 euros au titre de l'indemnité pour illicéité du licenciement,

* 8 499 euros au titre du préjudice moral,

A titre subsidiaire,

- dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamner la societé SEPHORA à lui verser la somme de 40 984,30 euros selon décompte suivant :

* 2 833 euros au titre de l'indemnité de préavis

* 283,30 au titre des congés payes afférents,

* 3 872 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 25 497 euros au titre de l'indemnité pour illicéité du licenciement,

* 8 499 euros au titre du préjudice moral,

A titre infiniment subsidiaire,

- dire que le licenciement repose sur cause réelle et sérieuse de licenciement ;

- condamner la société SEPHORA à lui verser la somme de 15 487,30 euros selon décompte suivant :

* 2 833 euros au titre de l'indemnité de préavis

* 283,30 au titre des congés payes afférents,

* 3 872 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 8 499 euros au titre du préjudice moral,

- condamner la société SEPHORA à lui remettre sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document :

* un certificat de travail conforme à la décision à intervenir;

* une attestation Pôle Emploi conforme à la décision à intervenir;

* un solde de tout compte conforme à la décision à intervenir;

* une fiche de paie conforme à la décision à intervenir ;

- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 21 février 2017, date de la demande amiable ;

- ordonner la capitalisation des intérêts ;

- condamner la société SEPHORA à verser à Me Aboukhater la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Il expose que:

- il a subi un harcèlement moral de sorte que le licenciement est nul,

- le règlement intérieur dont se prévaut la société SEPHORA ne lui est pas opposable faute pour celle-ci d'avoir accompli les formalités nécessaires,

- le grief portant sur l'absence d'envoi des arrêts de travail est erroné.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 10 décembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits et moyens développés, la société SEPHORA demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

À titre principal :

- constater que M. [V] ne rapporte pas la preuve de l'existence de faits de harcèlement moral commis à son encontre,

En conséquence,

- débouter M. [V] de sa demande de nullité de licenciement,

À titre subsidiaire,

- dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [V] est bien fondé,

- débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires,

À titre infiniment subsidiaire,

- dire et juger que le licenciement de M. [V] repose à tout le moins sur une cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- limiter strictement l'indemnisation de M. [V] au versement de l'indemnité compensatrice et de l'indemnité légale de licenciement.

À titre très infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, la cour devait estimer que le licenciement de M. [V] est sans cause réelle et sérieuse,

- limiter strictement l'allocation de dommages et intérêts éventuellement dus à M. [V] à la somme de 8 558,88 euros

En tout état de cause,

- débouter M. [V] de sa demande à hauteur de 2 869,44 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 4 mai au 30 juin 2015,

- débouter M. [V] de sa demande à hauteur de 218,04 euros au titre du rappel de prime d'ancienneté du 4 mai au 30 juin 2015,

- débouter M. [V] de sa demande à hauteur de 308,75 euros au titre des congés payés afférents,

- débouter M. [V] de sa demande à hauteur de 8 499 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct de la rupture,

- débouter M. [V] de sa demande à hauteur de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que :

- M. [V] n'établit l'existence d'agissements répétés constitutifs de harcèlement moral,

- il n'y a pas de lien entre l'état dépressif de Monsieur [V] et le harcèlement qu'il invoque,

- la faute grave de Monsieur [V] est caractérisée,

- une partie des absences de Monsieur [V] reste injustifiée,

- M. [V] ne démontre pas que le licenciement serait intervenu dans des conditions vexatoires.

L'affaire était fixée à l'audience du 18 juin 2020. Les parties ayant refusé la procédure sans audience, elle a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 9 mars 2022.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 février 2022.

MOTIFS

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, M. [V] se prévaut des faits suivants :

- il a été accusé à tort de vol et une procédure de licenciement a été engagée à son encontre,

- il a été victime du vol de ses affaires personnelles dans son casier et sa hiérarchie n'a pas diligenté d'enquête,

- l'employeur soutient qu'il n'a pas remis ses arrêts de travail alors que ce n'était pas le cas et qu'il a dû les adresser par lettre recommandée.

Les premiers faits dont il se prévaut ont eu lieu en novembre 2010, le vol dans son casier en novembre 2014 et les faits concernant les arrêts de travail au début d'année 2015.

Il ressort des pièces produites aux débats qu'en 2010, M. [V] a été convoqué à un entretien préalable à la suite de la découverte de flacons de parfum dans son vestiaire mais cette procédure a été interrompue avant même la tenue de l'entretien préalable. Dans ces conditions, ces faits ne peuvent caractériser des agissements de harcèlement moral.

Le vol de ses affaires personnelles dans son casier ne peut être imputé à l'employeur et M. [V] n'établit pas la matérialité d'un refus d'enquête.

En ce qui concerne les arrêts de travail, il ressort des pièces produites qu'en 2014, M. [V] a plusieurs fois remis ses arrêts de travail avec retard ou a été absent sans en justifier, ce qu'il ne conteste pas. La cour relève que le 3 octobre 2014 et le 5 janvier 2015, la société SEPHORA a adressé à M. [V] des avertissements qu'il n'a pas remis en cause dans le cadre de la présente procédure. L'employeur n'a fait qu'exercer son pouvoir de direction en sollicitant de M. [V] de justifier de ses absences.

Ainsi M. [V] ne présente pas des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, lequel ne sera en conséquence pas retenu..

Sur le licenciement

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Constitue une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur d'établir la réalité des griefs qu'il formule.

La lettre de licenciement, qui fixe les termes du litige, est ainsi rédigée :

' Pour les motifs qui vous ont été exposés lors de 1'entretien préalable en date du jeudi 18 juin 2015. conduit en présence d'[M] [E] pour vous assister, et après ré'exion et anlyse approfondie de 1a situation, nous avons décidé de rompre votre contrat de travail sur la base d'un licenciement pour faute grave, reposant sur :

$gt; Le non-respect de votre obligation de prévenance et de justification de vos absences, en dépit de nos mises en demeure et rappels de vos obligations professionnelles et contractuelles

$gt; Votre absence injustifiée du 27 avril 2015 au 17 mai 2015 puis du 24 mai 2015 à ce jour.

Engagé en tant qu'agent qualifié sur notre magasin de Rivoli depuis le 5 mai 2003,vous ne pouvez ignorer les dispositions du Règlement intérieur relatif à l'obligation qui vous est faite de nous justifier toute absence en cas de maladie ou d'accident dans les 48H par la production d'un certificat médical.

En effet, depuis votre embauche. nous avons régulièrement été contraints de vous rappeler les règles concernant votre obligation de justi'er vos absences, sans que cette multitude de rappels oraux ou de courriers n'aient eu l'effet escompté.

De nouveau nous sommes sans nouvelle de vous depuis 1e 27 avril 2015, nous vous avons adressé en date du 19 mai 2015 un courrier recommandé vous rappelant l'article III-4 de notre nouveou règlement intérieur sur votre obligation de fournir, dans un délai de 48 heures, un certi'cat médical justifiant votre état et indiquant la durée probable de votre indisponibilité.

Contre toute attente le 1er juin 2015, vous nous avez adressé un arrêt maladie établi par le centre médical et dentaire de 'la Fourche » daté du vendredi 22 mai 2015 mais qui était rétroactif puisqu'il couvrait 1a période du 18 mai 2015 au 23 mai 2015.

Vous n'avez pour autant pas justifié la période du 27 avril 2015 au 17 mai 2015. De plus, depuis 1e 23 mai 2015, vous êtes de nouveau en absence injusti'ée et à ce jour nous n'avons eu aucune justification pour cette période.

En refusant de respecter les plannings qui vous sont fixés pour 1e bon fonctionnement de notre point de vente, vous vous placez nécessairement en situation de faute. Un tel connportement s'ana1yse en un acte d'insubordination caractérisé et répété.

Nous vous rappelons que le défaut de justification précise de votre absence a désorganisé profondément le bon fonctionnement du magasin, dans la mesure où nous avons dû pallier cette absence dans l'urgence, sans pouvoir anticiper ou gérer sa durée prévisible notamment en procédant à votre remplacement. Les tâches qui vous sont habituellement confiées ont donc été atribuées à d'autres collègues générant des perturbations dans l'organisation du travail de chacun.

Lors de notre entretien du 18 juin dernier, vous avez maintenu avoir envoyé ces arrêts et avoir des justificatifs de ces envois. Vous avez d'ailleurs montré des accusés de réception qui selon vous correspondaient à l'envoi de ces arrêts. Or lorsqu'il vous a été demandé de présenter ces justi'catifs afin de regulariser votre situation, vous avez tout simplement refusé. Nous déplorons par conséquent votre comportement pour le moins incompréhensible puisque vous contestez la procedure initiée à votre encontre sans pour autant nous transmettre les éléments qui seraient en votre possession et qui permettraient de justifier votre absence.

Au surplus. nous tenons à vous préciser que nous avons effectué toutes les démarches possibles afin de régulariser votre situation puisque nous avons contacté 1a CPAM en date du 24 juin 2015 afin d'obtenir un duplicata de vos arrêts maladies.

Nous avons été pour le moins surpris lorsqu'i1s nous ont indiqué ne pas avoir reçu d'arrêts maladie vous concernant depuis le 26 mars 2015 alors même que vous prétendiez lors de notre entretien avoir rencontré récemment la directrice de la CPAM de Paris afin de mettre à jour votre dossier.

Nous estimons par conséquent que vos manquements à vos obligations contractuelles et professionnelles sont cacractérisés et pour l'ensemble de ces raisons, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave.'

Il est ainsi essentiellement fait grief à M. [V] d'avoir informé son employeur de ses arrêts de travail tardivement et de ne pas avoir justifié une partie de ses absences.

M. [V] produit aux débats de nombreux arrêts de travail, certains présentant des incohérences puisqu'il produit un arrêt du 4 mai 2015 couvrant tout le mois de mai et un arrêt daté du 22 mai 2015 portant sur la période du 18 mai au 23 mai. Il produit aussi des accusés de réception par la société SEPHORA dont les dates sont cohérentes avec l'envoi de ses arrêts de travail dans les 48 heures.

Au regard des pièces produites, il existe un doute sur le fait que M. [V] n'aurait pas informé son employeur de ses arrêts de travail dans les meilleurs délais.

Le doute profitant au salarié, le licenciement sera déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Il sera donc fait droit aux demandes de M. [V] quant à l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité légale de licenciement dont les montants ne sont pas ailleurs pas discutés.

L'entreprise comptant plus de onze salariés, M. [V] peut prétendre à une indemnité pour licenciement abusif qui ne peut être inférieure à six mois de salaire.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [V] (1 416,50 euros) de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

M. [V] sollicite en outre des dommages et intérêts pour préjudice moral. Le préjudice dont il se prévaut est lié au harcèlement moral qu'il invoquait et qui n'est pas caractérisé. Il sera en conséquence débouté de cette demande de dommages et intérêts.

Sur la demande au titre des rappels de salaire

Il ressort des pièces produites que M. [V] a bénéficié d'arrêts de travail du 4 au 30 mai puis pour tout le mois de juin 2016.

Il ressort du solde de tout compte que la société SEPHORA a régularisé la rémunération due à M. [V] au titre du maintien de salaire dont cette dernière ne conteste pas le principe pour la seule période du 18 mai au 23 mai 2016 comme l'indique M. [V] dans sa demande mais que ce dernier n'a perçu aucune somme pour la période du 4 au 18 mai et pour le mois de juin 2016.

Il sera donc fait droit à la demande de M. [V] quant à son rappel de salaire.

Sur la remise des documents sociaux

Compte tenu des développements qui précèdent, il convient de faire droit à la demande de remise de documents sociaux conformes, dans les termes du dispositif sans qu'il n'y ait lieu d'assortir cette remise d'une astreinte.

Sur les frais de procédure

La société SEPHORA sera condamnée aux dépens.

Elle sera également condamnée à payer à Me Aboukhater la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté M. [V] de sa demande de nullité du licenciement pour harcèlement moral et de dommages et intérêts pour préjudice moral,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société SEPHORA à payer à M. [P] [V] les sommes de :

* 2 833 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

* 283,30 euros au titre des congés payés afférents

* 3 872 euros d'indemnité légale de licenciement

* 15 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 869,44 euros de rappel de salaire pour la période du 4 mai au 30 juin 2016

* 218 euros à titre de rappel de prime d'ancienneté pour la période du 4 mai au 30 juin 2016

* 308,75 euros au titre des congés payés afférents

Rappelle que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé de l'arrêt et que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et que la capitalisation est de droit conformément à l'article 1343-2 du code civil,

Ordonne la remise des documents sociaux conformes à la présente décision dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt,

Condamne la société SEPHORA à payer à Me Aboukhater la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile,

Condamne la société SEPHORA aux dépens.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 18/07421
Date de la décision : 22/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-22;18.07421 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award