Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 20 JUIN 2022
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/15519 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCSAU
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Septembre 2020 -Tribunal de Commerce d'EVRY - RG n° 2018F00480
APPELANTE
S.A.S. [W] [U] DÉVELOPPEMENT - F.M.D
Ayant son siège social
[Adresse 1]
[Localité 2]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Adeline TISON de l'AARPI ROOM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : J152,
Représentée par M. Michelle DERVIEUX du Barreau de versailles.
INTIMEE
S.A.R.L. ETUDES SERVICES TRAVAUX PARISIENS ET DE MATERIELS- ESTPM
Ayant son siège social [Adresse 4]
[Localité 3]
N° SIRET : 330 466 103
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, président
Madame Sylvie CASTERMANS, conseillère
Monsieur Stanislas de CHERGÉ, conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.
FAITS ET PROCÉDURE
Le 03 décembre 2012, la Sas [W] [U] Développement (FMD), dans le cadre de la construction d'un ensemble immobilier appelé « [Adresse 5], a passé une commande de travaux auprès de la Sarl Études Services Travaux Parisiens et de Matériels (ESTPM) ayant pour objet la fourniture et l'installation d'équipements (porte basculante, portes sectionnelles motorisées, portillons, portes de hall d'entrée, boîtes aux lettres, système d'interphonie et de contrôle d'accès) pour un montant total de 84.000 euros Ht.
Le 5 avril 2013, la société FMD a informé la société ESTPM qu'elle appliquera une retenue de garantie de 5% sur le montant des travaux, soit la somme de 5 090 euros.
Les travaux étant terminés, la société FMD a réglé la retenue de garantie, mais a refusé de s'acquitter d'un solde de travaux pour un montant de 5.257,93 euros, invoquant des dysfonctionnements et des malfaçons imputables à la société ESTPM.
Le 22 juin 2018, la société ESTPM a assigné la société FMD en paiement devant le tribunal de commerce d'Évry.
Par jugement du 17 septembre 2020, le tribunal de commerce d'Évry a statué comme suit :
-Condamne la Sas [W] [U] Développement à payer à la Sarl Études Services Travaux Parisiens et de Matériels la somme de 5.257,93 euros, augmentée du taux d'intérêt légal à compter de la levée des réserves soit le 31 mai 2013,
-Déboute la société ESTPM de sa demande en dommages et intérêts,
-Condamne la société FMD à payer à la société ESTPM la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,
-Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,
-Condamne la société FMD aux dépens, en ce compris les frais de greffe liquides à la somme de 73.22 euros TTC.
Par déclaration du 28 octobre 2020, la société FMD a interjeté appel du jugement.
Par dernières conclusions signifiées le 27 janvier 2021, la société FMD demande à la cour :
Vu les articles 1217 et suivants du code civil,
-Infirmer le jugement rendu le 15 septembre 2020 par le tribunal de commerce d'Évry en ce qu'il a condamné la société FMD à payer à la société ESTPM la somme de 5.257,93 euros, augmentée du taux d'intérêt légal à compter de la levée des réserves soit le 31 mai 2013,
-Infirmer le jugement rendu le 15 septembre 2020 par le tribunal de commerce d'Évry en ce qu'il a condamné la société FMD à payer à la société ESTPM la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-Condamner la société ESTPM à rembourser les sommes versées par la société FMD sous couvert de l'exécution provisoire,
- Infirmer le jugement rendu le 15 septembre 2020 par le tribunal de commerce d'Évry en ce qu'il a débouté la société FMD de sa demande de condamnation de la société ESTPM à lui verser la somme de 1.678,03 euros,
-Confirmer le jugement rendu en ce qu'il a débouté la société ESTPM de sa demande en dommages et intérêts,
Statuant à nouveau,
-Condamner la société ESTPM à verser à la société FMD la somme de 1.678,03 euros au titre du décompte produit,
-Condamner la société ESTPM à verser à la société FMD la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance et d'appel.
Par dernières conclusions signifiées le 23 avril 2021, la société ESTPM demande à la cour :
Vu les articles 1240 du code civil et 700 du code de procédure civile,
-Confirmer le jugement, rendu le 15 septembre 2020 par le tribunal de commerce d'Évry en toutes ses dispositions ;
-Condamner la société FMD au paiement de la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de maître Pascale Flauraud, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR
La société FMD fait valoir, au visa de l'article 1217 du code civil, qu'elle est en droit de refuser de payer le solde des travaux dans la mesure où la société ESTPM n'a pas correctement exécuté ses obligations. Son choix de procéder au règlement de la retenue de garantie ne signifie pas qu'elle a renoncé à se prévaloir de réserves, liées aux dysfonctionnements des visiophones, aux difficultés de déverrouillage manuel des portes de garage individuel et à la pose du balai sous la porte du parking. Il y a lieu de déduire du décompte les frais de maintenance pour la porte basculante, le contrôle d'accès, les frais de pose du balai sous la porte basculante, le remplacement des visiophones et les travaux sur la platine. La société ESTPM est débitrice de la société FMD pour un montant total de 1.678,03 euros.
La société ESTPM réplique que les prétendues malfaçons n'ont fait l'objet d'aucune réserve au moment de la réception des travaux en date du 31 mai 2013. Concernant le système d'interphonie et de contrôle d'accès Intratone, une documentation a été remise à la société FMD en mai 2012, avant la signature du contrat, précisant que la possibilité pour le résident de voir le visage du visiteur sur l'écran de son téléphone requiert un téléphone portable compatible avec la fonction Visio 3G. Il répond aux prescriptions de la « norme handicapés ». Les travaux exécutés ont donné lieu à un procès-verbal de réception avec réserves portant sur des rajustements mineurs. Elle a corrigé toutes les réserves mentionnées dans le procès-verbal de réception. Les quitus de levée des réserves ont été signées par la société FMD qui n'apporte pas la preuve des dysfonctionnements invoqués.
Ceci étant exposé,
Selon l'article 1 de la loi n° 71-584 du 16 juillet 1971 tendant à réglementer les retenues de garantie en matière de marchés de travaux définis par l'article 1779-3 du code civil, dans sa version applicable, « les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l'article 1779-3° du code civil peuvent être amputés d'une retenue égale au plus à 5 p. 100 de leur montant et garantissant contractuellement l'exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage. La retenue de garantie stipulée contractuellement n'est pas pratiquée si l'entrepreneur fournit pour un montant égal une caution personnelle et solidaire émanant d'un établissement financier figurant sur une liste fixée par décret. »
Les six devis signés le 03 décembre 2012 par les sociétés FMD et ESTPM (pièce 4) stipulent sur une page un délai d'intervention de 4 à 8 semaines, un « accord sur plans » et une base de chiffrage établie selon des plans d'avril 2012. La mention « retenue sur Ht » mentionne « néant ». Un courrier de la société FMD en date du 03 décembre 2012 (pièce 6) mentionne un prix total de 84 000 euros Ht ferme et forfaitaire pour les prestations objets des six devis et modifie les délais, repoussés à 9 semaines pour la pose des boîtes aux lettres, outre un rendez-vous technique fixé le 05 décembre 2012.
La société FMD fait valoir que la société ESTPM n'a pas correctement exécuté ses obligations.
Mais, d'une part, une certaine confusion peut être relevée sur les relations contractuelles entre les parties dans la mesure où la société FMD a demandé le 14 mars 2013 à la société ESTPM que des travaux supplémentaires soient exécutés, avec la production de deux nouveaux devis concernant des ventouses de portes et 15 unités « Intratone vidéophone fixe Gsm ». D'autres devis ont porté sur des prestations supplémentaires « vente maint ' porte local vélo » et « électrification des Vigik » (pièce 11) à la date du 2 juin 2013. De plus, la société FMD a versé quatre décomptes entre le 03 janvier 2013 et le 04 juin 2013, pour un montant total de 86 455 euros Ttc (pièce 15), ce qui pondère les critiques formulées sur l'exécution des prestations objets des six premiers devis.
D'autre part, la société FMD s'est formellement engagée auprès de son cocontractant à appliquer une retenue de garantie de 5% sur le montant des travaux et à régler les travaux réalisés au cours de l'année 2013. En effet, par courrier du 14 mars 2013 (pièce 9), la société FMD a mentionné « un marché régularisera le contrat ; une RG de 5 % sera appliquée ; le solde des paiements sera fait 30 jours à fin de mois ; la situation de fin mars correspondra à 95 % du marché et sera réglée au 30 avril 2013 ». La société FMD s'est également engagée à appliquer une retenue de garantie de 5 090 euros à régler au plus tard le 30 avril 2013. Mais la Sci [Adresse 5], représentée par M. [U], en lieu et place de la société FMD, a imposé de façon prétorienne à la société ESTPM « une retenue d'environ 10 % de votre marché justifiée par les dysfonctionnements depuis 4 mois » le 09 août 2013. En ce qui concerne le paiement des travaux, la société ESTPM a fait remarquer à son cocontractant le 09 août 2013 un « retard systématique des règlements », l'attente d'un règlement de 8 500 euros, outre l'engagement de payer la somme de 4 445 euros au 30 juin 2013 (pièce 13) et un solde de 5 257 euros en attente de règlement le 31 octobre 2013, sans être démentie.
Par ailleurs, deux procès-verbaux ont clarifié l'exécution des travaux. Le procès-verbal de réception du lot « portes de garages, contrôle d'accès et BAL » (pièce 10), signé le 31 mai 2013 par le maître d'ouvrage, le maître d'oeuvre et la société ESTPM, constate que les travaux ont été exécutés, à l'exception de certains à terminer pour le 24 juin 2013 : « temporiser 40s le contact au digicode, temporiser le parking sortie, ajuster les grandes portes, fermeture bruyante des portillons, buée dans la platine de rue par temps de pluie, vérifier le fonctionnement des clefs de porte de box ». Deux documents confirment la prise en compte de ces difficultés : celui en date du 26 juin 2013 (pièce 12) mentionne : « augmentation temporisation BP porte intérieur (80 s) non demandé » et celui du 03 juillet 2013 : « tests et essais OK ». Si la société FMD a pointé le 02 août 2013 le blocage de la porte basculante en cas de coupure d'électricité et un « frottement » des boîtes aux lettres, ces deux nouveaux problèmes ne sont pas issus d'un constat contradictoire, mais de plaintes de résidents. De ce point de vue, la société ESTPM a formellement exposé les consignes à suivre par courrier du 09 août 2013 et rappelé la faible connexion du site au réseau Gsm pour le délai de connexion, alors que la société FMD est revenue sur son choix initial en envisageant une « solution filaire classique » le 4 novembre 2013.
Le second procès-verbal de levée de réserve en date du 07 novembre 2013, signé par la société ESTPM et la Sci [Adresse 5], maître d'ouvrage, mentionne expressément qu'au titre de l'ordre de service du 03 décembre 2012, après visite des lieux et examen des travaux, « il a été remédié aux réserves mentionnées au PV du 31 mai 2013 ». Le rapport d'expertise « protection juridique » en date du 16 juin 2015 (pièce 19) confirme cette levée des réserves et indique que « la réclamation de la société FMD et de M. [U] n'est pas fondée ».
Enfin, selon le décompte général et définitif de la société ESTPM en date du 20 septembre 2013, le solde des travaux, au titre du marché de 84 000 euros Ht et des travaux supplémentaires de 1 120 euros Ht, est de 5 257,93 euros Ttc. La société ESTPM justifie d'une mise en demeure de payer cette somme par courrier recommandé du 19 novembre 2013, renouvelée le 13 décembre 2013 (pièce 17). En réglant la retenue de garantie de 5 090 euros le 27 juillet 2016 (pièce 22), la société FMD a entériné de fait ce décompte établi précisément par la société ESTPM en 2013. Elle est malfondée à le remettre en cause a posteriori dans un courrier du 23 novembre 2018. Les premiers juges ont rejeté à juste titre la demande injustifiée de la société FMD que lui soit restituée la somme de 1 678 euros.
C'est en conséquence à juste titre que les premiers juges ont condamné la société FMD à payer à la société ESTPM la somme de 5.257,93 euros, augmentée du taux d'intérêt légal à compter de la levée des réserves, soit le 31 mai 2013.
Le jugement déféré sera confirmé sur tous ces chefs, ainsi que sur la condamnation de la société FMD au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La solution du litige conduira à rejeter toutes les autres demandes.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
REJETTE toute autre demande ;
CONDAMNE la société [W] [U] Développement à payer à la société Études Services Travaux Parisiens et de Matériels la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société [W] [U] Développement aux dépens ;
Conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, cette condamnation est assortie au profit de maître Pascale Flauraud, avocate, du droit de recouvrer directement ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu de provision.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
S.MOLLÉ E.LOOS