La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/2022 | FRANCE | N°20/12956

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 16 juin 2022, 20/12956


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 16 JUIN 2022



(n° /2022, pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/12956

N° Portalis 35L7-V-B7E-CCK22



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 juillet 2020 -TJ d'Evry - RG n° 18/05391



APPELANT



Monsieur [J] [D]

[Adresse 3]

[Localité 10]

né le [Date naissance 1] 1980

à [Localité 12]

représenté par Me Pascal HORNY de la SCP HORNY-MONGIN-SERVILLAT, avocat au barreau d'ESSONNE



INTIMES



Monsieur [B] [S]

[Adresse 4]

[Localité 8]

né le [Date naissan...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 16 JUIN 2022

(n° /2022, pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/12956

N° Portalis 35L7-V-B7E-CCK22

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 juillet 2020 -TJ d'Evry - RG n° 18/05391

APPELANT

Monsieur [J] [D]

[Adresse 3]

[Localité 10]

né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 12]

représenté par Me Pascal HORNY de la SCP HORNY-MONGIN-SERVILLAT, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIMES

Monsieur [B] [S]

[Adresse 4]

[Localité 8]

né le [Date naissance 2] 1991 à [Localité 13] (FRANCE)

n'a pas constitué avocat

Compagnie d'assurance LA MATMUT

[Adresse 6]

[Localité 7]

représentée par Me Sandrine PRISO de la SELARL SOCIETE D'AVOCAT GOGET-PRISO, avocat au barreau d'ESSONNE, toque : PC39

CPAM de l'ESSONNE

[Adresse 11]

[Localité 9]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre, et Mme Nina TOUATI, présidente de chambre assesseur chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Sophie BARDIAU, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

ARRÊT :

- Défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 11 mars 2012, M. [J] [D] a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué un véhicule conduit par M. [B] [S], assuré auprès de la société MATMUT.

Après la mise en oeuvre d'une expertise amiable réalisée à la demande son propre assureur, la société MACIF, par les Docteurs [Y] et [H], M. [D] a obtenu la désignation par ordonnance de référé en date du 22 juillet 2016 du Docteur [I] en qualité d'expert, ce-dernier ayant établi son rapport le 6 juin 2017.

Par actes d'huissier de justice des 18 juin 2018, 21 juin 2018 et 17 juillet 2018, M. [D] a fait assigner devant le tribunal de grande instance d'Evry la société MATMUT et M. [S] en indemnisation de ses préjudices, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne (la CPAM).

Par jugement rendu le 13 juillet 2020, le tribunal judiciaire d'Evry a :

- fixé le préjudice de M. [D] résultant de l'accident de la circulation intervenu le 11 mars 2012 à la somme de 43 540,46 euros, détaillée comme suit avant déduction de la provision de 6 000 euros :

- perte totale de gains professionnels pour la période du 14 mars 2012 au 22 novembre 2012 : 24 497,96 euros

- déficit fonctionnel temporaire total : 125 euros

- déficit fonctionnel temporaire partiel : 4 217,50 euros

- souffrances endurées : 3 500 euros

- déficit fonctionnel permanent : 11 200 euros,

- réservé le poste de préjudice relatif à la perte totale de gains professionnels pour la période du 14 mars 2012 au 22 novembre 2012 jusqu'à la production du décompte des versements des indemnités journalières établi par la CPAM,

- condamné in solidum M. [S] et la société MATMUT à payer à M. [D] la somme de 37 540,46 euros, avec intérêt légal à compter de la présente décision,

- débouté M. [D] de sa demande en paiement de la somme de 6 000 euros au titre du préjudice d'agrément,

- déclaré le présent jugement commun et opposable à la CPAM,

- condamné in solidum M. [S] et la société MATMUT aux entiers dépens en application de l'article 699 du code de procédure civile, comprenant le coût de l'expertise judiciaire,

- condamné in solidum M. [S] et la société MATMUT à verser à M. [D] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté les demandes plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration du 16 septembre 2020, M. [D] a interjeté appel de cette décision en critiquant ses dispositions relatives à l'évaluation de sa perte de gains professionnels actuels, au rejet de ses demandes d'indemnisation de son préjudice d'agrément et de report du point de départ des intérêts au taux légal à la date de l'accident.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions de M. [D], notifiées le 23 décembre 2021, aux termes desquelles il demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel de M. [D],

- réformer partiellement les dispositions du jugement entrepris,

- condamner M. [S] et son assureur, la société MATMUT à payer à M. [D] au titre des pertes de gains la somme de 47 736,50 euros,

- condamner in solidum M. [S] et la société MATMUT à payer à M. [D] au titre du préjudice d'agrément la somme de 6 000 euros,

- dire que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal arrêtés au jour de l'accident soit au 12 mars 2012,

à titre subsidiaire,

- faire application à l'encontre de la société MATMUT des dispositions de l'article L.211-9 du code des assurances,

- dire que faute d'offre formulée dans le délai de huit mois suivant la consolidation médicolégale, les sommes accordées porteront intérêts au double du taux légal arrêtés au jour de la consolidation et ce en application de l'article L.211-9 du code des assurances à dater du 11 novembre 2013,

- condamner M. [S] et la société MATMUT à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la société Matmut de son appel incident.

Vu les conclusions de la société MATMUT, notifiées le 7 février 2021, aux termes desquelles elle demande à la cour de :

- juger recevable et bien fondé l'appel incident de la société MATMUT,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, excepté en ce qui concerne le poste de perte de gains professionnels actuels et notamment :

- déficit fonctionnel temporaire : 4 344 euros

- perte de gains professionnels actuels : à justifier et débouter en l'état

- déficit fonctionnel permanent 8 % : 11 200 euros

- souffrances endurées 2,7 : 3 500 euros

- préjudice d'agrément : débouter,

- déduire les provisions de 6 000 euros des sommes allouées à M. [D],

- débouter M. [D] de toutes autres demandes,

- «dire au titre des pertes de gains professionnels actuels de 34 251,56 euros, dont il conviendra de déduire la somme de 9 753,60 euros ainsi que les indemnités journalières versées du 14 mars 2012 au 4 mars 2015»,

- dire que le poste de perte de gains professionnels actuels sera intégralement réservé.

La déclaration d'appel a été signifiée par acte d'huissier du 13 novembre 2020 déposé à l'étude d'huissier à M. [S] qui n'a pas constitué avocat.

Bien que destinataire de la déclaration d'appel qui lui a été signifiée le 13 novembre 2020 à personne habilitée, la CPAM n'a pas constitué avocat mais a transmis à la cour par lettre du 28 janvier 2021 le décompte définitif de ses débours s'élevant à la somme de 48 535,96 euros dont 6 848,62 euros au titre des frais d'hospitalisation, médicaux, pharmaceutiques, d'appareillage et de transport et 41 687,34 euros au titre des indemnités journalières.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Par l'effet des appels principal et incident la cour n'est saisie que de l'indemnisation des postes de préjudice liés à la perte de gains professionnels actuels et au préjudice d'agrément ; elle n'a donc pas à confirmer le jugement en ses dispositions non critiquées.

Sur les postes de préjudice en litige

L'expert judiciaire, le Docteur [I] indique dans son rapport établi le 6 juin 2017 qu'il s'est basé pour accomplir sa mission sur l'interrogatoire de M. [D] mais également sur les expertises réalisées par les docteurs [Y] et [H].

Il expose que selon le certificat médical initial en date du 20 mars 2012, M. [D] a présenté à la suite de l'accident des douleurs au rachis cervical et au rachis lombaire, des douleurs cervicales sans lésion osseuse et une fracture parcellaire cunéiforme du plateau supérieur de L2, non déplacée, nécessitant un lombostat et un traitement antalgique.

Il relève que le Docteur [Y] a mis en doute l'existence d'une fracture de la vertèbre L2 mais ne se prononce pas sur la pertinence de cet avis et précise que M. [D] a bénéficié de 20 séances de kinésithérapie et d'un suivi par un médecin psychiatre.

Il conclut son rapport dans les termes suivants :

- inactivité professionnelle imputable : arrêt de travail du 11 mars 2012 au 4 mars 2015

- définitif fonctionnel temporaire total du 11 mars 2012 au 16 mars 2012

- déficit fonctionnel temporaire partiel de classe III pendant un mois jusqu'au 11 avril 2012

- déficit fonctionnel temporaire partiel de classe II, selon le Docteur [H], du 11 avril 2012 au 11 mars 2013

- déficit fonctionnel temporaire partiel de classe I du 12 mars 2013 au 4 mars 2015

- consolidation au 4 mars 2015

- déficit fonctionnel permanent de 8%

- reprise totale de l'activité professionnelle actuellement,

-«sur le plan de l'agrément : le patient marche et espère rejouer au football comme il le faisait précédemment».

Ce rapport constitue sous les réserves ci-après exposées une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi par M. [D] à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 5] 1980, de son activité de contrôleur de bus, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

- Sur la perte de gains professionnels actuels

Ce poste vise à indemniser non seulement la perte ou la diminution de revenus causée par l'accident pendant la période antérieure à la consolidation.

Il n'y a pas lieu, contrairement à la demande de la société MATMUT de réserver ce poste de préjudice, la CPAM ayant transmis à la cour le décompte définitif de ses débours dont il résulte qu'elle a versé à M. [D] entre le 14 mars 2012 et le 4 mars 2015 des indemnités journalières d'un montant total de 41 687,34 euros.

L'expert, dont les conclusions ne font l'objet d'aucune critique sur ce point, a retenu une période d'arrêt de travail imputable à l'accident entre le 11 mars 2012 et le 4 mars 2015, date de la consolidation.

M. [D] verse aux débats une attestation établie le 11 septembre 2020 par son employeur, la société Transdev CSP contrôle, qui certifie qu'il a subi une perte de salaire net à la suite de son arrêt de travail en maladie du 11 mars 2012 au 2 mars 2015 de :

- 29 111,42 euros en salaire net

- 3 732,14 euros en prime de 13ème mois nette

- 2 911,14 euros en congés payés,

- 2 891,40 euros nets en ticket restaurant (part patronale)

- participation et intéressement, montant global de 2 229 euros.

L'employeur de M. [D] précise dans cette attestation qui présente toute garantie de crédibilité que dans son calcul, les indemnités de sécurité sociale ont été déduites et que la perte totale s'élève à la somme de 40 875,10 euros, ce qui est cohérent avec le niveau de revenus de la victime avant l'accident et le montant des indemnités journalières versées pendant la période d'arrêt de travail de M. [D] consécutive à l'accident d'environ trois ans.

Le ticket-restaurant constituant un avantage en nature payé par l'employeur qui entre dans la rémunération du salarié, la perte de cet avantage pendant la période de cessation d'activité de M. [D] doit, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, être prise en compte dans l'évaluation de la perte de gains professionnels actuels.

Ce poste de préjudice s'élève ainsi à la somme de 40 875,10 euros et non à celle de 47 736,50 euros réclamée par M. [D].

- Sur le préjudice d'agrément

Le préjudice d'agrément est constitué par l'impossibilité pour la victime, après la date de consolidation, de continuer de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs et inclut la limitation de la pratique antérieure.

M. [D] expose qu'avant l'accident il pratiquait de manière intensive le football, qu'il a cessé toute activité sportive entre la date de l'accident survenu en mars 2012 et celle de la consolidation fixée en mars 2015 et n'a pas été en mesure de reprendre ultérieurement cette activité, craignant un nouveau traumatisme au niveau cervical.

Il ajoute qu'il a été contraint de résilier son contrat d'abonnement dans un club sportif et sollicite en réparation de son préjudice d'agrément une indemnité d'un montant de 5 000 euros.

La société MATMUT fait valoir que le préjudice d'agrément est inexistant puisque seule une inaptitude temporaire a été retenue par le Docteur [I], celle-ci étant indemnisée au titre du déficit fonctionnel temporaire.

Sur ce, il convient de relever à titre liminaire que le préjudice d'agrément temporaire subi par M. [D] entre la date du fait dommageable et celle de la consolidation constitue une composante du déficit fonctionnel temporaire, d'ores et déjà indemnisé par les premiers juges.

S'agissant du préjudice d'agrément subi après consolidation, l'expert judiciaire ne s'est pas prononcé clairement sur son existence puisqu'il s'est borné à énoncer : «sur le plan de l'agrément : le patient marche et espère rejouer au football comme il le faisait précédemment», sans se prononcer sur la capacité fonctionnelle ou psychologique de la victime à reprendre cette activité sportive dans les conditions antérieures.

Compte tenu de la nature de la localisation des lésions initiales au niveau du rachis cervical et lombaire et du taux de déficit fonctionnelle de 8 % retenu par l'expert, il convient de retenir que les séquelles de l'accident induisent une limitation de la pratique du football que la victime n'avait pas reprise à la date de l'expertise et à laquelle elle justifie par les attestations produites s'être adonnée régulièrement avant l'accident en participant notamment à un championnat amateur.

De même, il convient de retenir une limitation de la pratique des sports sollicitant le rachis cervical et lombaire, M. [D] justifiant d'une inscription antérieure à l'accident dans un club sportif.

Au bénéfice de ces observations, le préjudice d'agrément de M. [D] sera évalué à la somme de 4 000 euros.

Sur le report du point de départ des intérêts au taux légal

M. [D] conclut à l'infirmation du jugement qui a rejeté sa demande tendant à voir reporter le point de départ des intérêts au taux légal à la date de l'accident.

Il soutient que l'accident est ancien, qu'il a été contraint de faire valoir ses droits en soutenant que l'évaluation de son préjudice corporel avait été sous-estimée et considère que l'attitude adoptée par la société MATMUT était éminemment critiquable.

Sur ce, comme l'ont relevé justement les premiers juges, aucune circonstance ne justifie qu'en application de l'article 1237-1 du code civil, le point de départ des intérêts au taux légal soit reporté à la date de l'accident, étant observé en outre que l'assureur disposait d'un délai de huit mois à compter de l'accident pour formuler une offre d'indemnité provisionnelle en application de l'article L. 211-9 du code des assurances.

Sur le doublement du taux de l'intérêt légal en application des articles L. 211-9 et L.211-13 du code des assurances

M. [D] demande à titre subsidiaire à la cour de faire application à l'encontre de la société MATMUT des dispositions de l'article L. 211-9 du code des assurances et de dire qu'à défaut d'offre formulée dans le délai de huit mois suivant la consolidation, les sommes allouées porteront intérêts au double du taux légal à compter du 11 novembre 2013.

La société MATMUT objecte que la société MACIF, assureur de M. [D], mandaté pour l'indemniser en application de la convention IRCA a versé à ce dernier trois provisions d'un montant total de 3 000 euros réglées au cours de l'année 2012, qu'à la suite du dépôt du rapport d'expertise provisoire du Docteur [Y], la société MATMUT a repris le mandat d'indemnisation et versé une seconde provision de 3 000 euros en juillet 2014, que le rapport définitif du Docteur [Y] fixant un déficit fonctionnel permanent de 8 % et une consolidation au 11 mars 2013 a été réceptionné par le service médical de la société MATMUT le 10 février 2015, qu'une offre définitive a été adressée à la société MACIF le 2 juin 2015 puis en mai 2016 à la victime par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Elle soutient que les délais d'offres prescrits par l'article L. 211-9 du code des assurances ont été parfaitement respectés, le requérant confondant date de consolidation et date de connaissance de la consolidation et qu'il n'y a pas lieu à application de la pénalité de doublement des intérêts prévue à l'article L. 211-13 du code des assurances, laquelle, à titre subsidiaire, ne saurait courir que du 10 juillet 2015 au 26 mai 2015, date de l'offre définitive adressée à M. [D].

Sur ce, en application de l'article L. 211-9 du code des assurances, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime, lorsque la responsabilité, n'est pas contestée, et le dommage entièrement quantifié, une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.

Une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans un délai maximal de huit mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime et l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

A défaut d'offre dans les délais impartis, étant précisé que le délai applicable est celui qui est le plus favorable à la victime, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal, en vertu de l'article L.211-13 du même code, à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.

Dans le cas de l'espèce, seule est critiqué le respect par l'assureur de son obligation la société MATMUT avait, en application des textes rappelés ci-dessus, la double obligation de présenter à M. [D] dont l'état n'était pas consolidé, une offre provisionnelle dans le délai de 8 mois de l'accident et de lui faire ensuite, une offre définitive dans le délai de 5 mois suivant la date à laquelle elle a été informée de la consolidation de son état, obligation à laquelle elle ne pouvait se soustraire en se prévalant des conventions entre assureurs qui ne sont pas opposables aux victimes qui n'y sont pas parties.

L'accident s'étant produit le 11 mars 2012, la société MATMUT devait faire une offre provisionnelle comportant tous les éléments indemnisables du préjudice au plus tard le 11 novembre 2012, ce qu'elle n'a pas fait, les provisions versées par la société MACIF puis pas la société MATMUT ne pouvant exonérer cette dernière de son obligation de faire une offre d'indemnité provisionnelle détaillée.

La société MATMUT encourt ainsi la pénalité prévue à l'article L. 211-13 du code des assurances à compter du 12 novembre 2012 ; compte tenu des limites de la demande, la pénalité ne courra qu'à compter du 11 juillet 2013.

S'agissant de l'offre d'indemnisation définitive, l'expertise amiable confiée au Docteur [Y] par la société MACIF a fixé la date de consolidation des lésions au 11 mars 2013, la société MATMUT admettant avoir eu connaissance de ces conclusions le 10 février 2015.

Le délai de cinq mois dont elle disposait pour présenter une offre d'indemnisation définitive expirait ainsi le 10 juillet 2015.

La première offre d'indemnisation définitive en date du 2 juin 2015 dont la société MATMUT se prévaut a été adressée non à M. [D] mais à son assureur, la société MACIF.

En l'absence de justification de ce que la société MACIF bénéficiait d'un mandat donné par M. [D] pour le représenter, cette offre d'indemnisation qui n'a pas été adressée à la victime contrairement aux exigences de l'article L. 211-9 du code des assurances, est irrégulière.

La société MATMUT justifie avoir adressé son offre définitive d'indemnisation à M. [D] par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 26 mai 2016, après l'expiration du délai de cinq mois qui lui était imparti.

Cette offre d'indemnisation définitive dont il n'est pas allégué qu'elle était incomplète au regard des conclusions de l'expert amiable ni manifestement insuffisante, constitue le terme encourue par la société MATMUT et son montant, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, en constitue l'assiette.

Il convient ainsi de condamner la société MATMUT à payer à M. [D] les intérêts au double du taux légal du 11 juillet 2013 au 26 mai 2016, sur le montant de l'offre du 26 mai 2016 avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

La société MATMUT et M. [S] qui succombent partiellement dans leurs prétentions et qui sont tenus à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel.

L'équité commande d'allouer à M. [D] en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut, par mise à disposition au greffe,

Et dans les limites de l'appel,

- Confirme le jugement, hormis en ses dispositions relatives à l'indemnisation des postes du préjudice corporel de M. [J] [D] liés à la perte de gains professionnels actuels et au préjudice d'agrément ainsi qu'au montant des sommes revenant à celui-ci,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Condamne in solidum M. [B] [S] et la société MATMUT à payer à M. [J] [D], les sommes suivantes, provisions et sommes versées au titre de l'exécution provisoire non déduite, au titre des postes de préjudice ci-après:

- perte de gains professionnels actuels : 40 875,10 euros

- préjudice d'agrément : 4 000 euros,

- Condamne la société MATMUT à payer à M. [J] [D] les intérêts au double du taux légal sur le montant de l'offre du 26 mai 2016 avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées à compter du 11 juillet 2013 et jusqu'au 26 mai 2016,

- Condamne in solidum M. [B] [S] et la société MATMUT à payer à M. [J] [D] en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- Condamne in solidum M. [B] [S] et la société MATMUT aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 20/12956
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;20.12956 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award