Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRÊT DU 16 JUIN 2022
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/06224 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCNGZ
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 05 Août 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 20/00555
APPELANTES
Madame [M] [T]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Société LE SYNDICAT FRANCILIEN DE PROPRETE SFP-CFDT
[Adresse 3]
[Localité 5]
Tous deux représentées par M. [B] [Z] (Délégué syndical ouvrier)
INTIMÉE
S.A.S.U. ATALIAN PROPRETE ILE DE FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Séverine HOUARD-BREDON, avocat au barreau de PARIS, toque : E0327
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame LAGARDE Christine, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur FOURMY Olivier, Premier président de chambre
Madame ALZEARI Marie-Paule, présidente
Madame LAGARDE Christine, conseillère
Greffière lors des débats : Mme CAILLIAU Alicia
ARRÊT :
- contradictoire
- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
- signé par Olivier FOURMY, Premier président de chambre et par CAILLIAU Alicia, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Madame [T] a été embauchée par la société ISS Propreté suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 9 juin 1997 et était, en dernier lieu, affectée sur le site «Monoprix [Localité 7] » situé à [Localité 7] (92).
La convention collective applicable est celle des entreprises de propreté et des services associés.
A compter du 15 juin 2020, la Société Atalian Proprete Île-de-France (la société Atalian) est devenue le nouvel adjudicataire du marché «Monoprix Saint-Cloud » (ci-après 'le Marché') .
Par courrier en date du 12 juin 2020, la société Atalian a informé la société ISS Propreté de ce que le dossier de Mme [U] était incomplet.
Par courrier du 18 juin 2020, la société ISS Propreté a informé Mme [T] de ce que son contrat de travail est transféré à la société Atalian.
Par courrier du 3 juillet 2020, Mme [T] s'est opposée à son changement d'employeur indiquant n'avoir été informée que le 20 juin 2020 de la situation et qu'elle n'avait signé aucun avenant à son contrat pour son affectation sur le site «Monoprix [Localité 7] » de sorte que son contrat ne pouvait être utilement transféré faute de disposer d'un avenant régulier.
Par requête réceptionnée le 6 juillet 2020, Mme [T] et le Syndicat Francilien de Propreté CFDT (ci-après 'le Syndicat') assistés de M. [Z], défenseur syndical, ont saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Paris.
Aux termes de cette requête, il était demandé :
- à titre principal à l'encontre de la société sortante la société ISS Propreté d'ordonner « le maintien de contrat en absence d'aucune notification de transfert de contrat à un nouvel employeur comme l'indique l'article 7 et en absence de l'application de l'article L1224-1 du code du travail », le rappel de salaire et la remise des bulletins de paye conformes ;
- à titre subsidiaire à l'encontre de la société entrante la société Atalian, d'ordonner la remise de l'avenant du contrat du marché repris, le rappel de salaire de la date de la reprise à la date d'audience, la remise des bulletins de paye conformes.
Le Syndicat avait en outre sollicité des dommages et intérêts à l'encontre de « la société ».
Par ordonnance en date du 5 août 2020, le conseil de prud'hommes de Paris a dit n'y avoir lieu à référé tant sur les demandes de Mme [T] que sur celles du Syndicat au motif de l'existence d'une contestation sérieuse et de l'absence de trouble manifestement illicite, et a laissé les dépens à la charge de Mme [T].
Le conseil de prud'hommes a motivé sa décision en précisant qu'au « vu des éléments apportés par Madame [M] [T], notamment le déroulement des faits et des envois et réceptions des courriers et au vu des éléments présentés par les deux sociétés, notamment sur les dates des courriers et les dates des envois, l'appréciation des faits venant à l'appui de l'intégralité des prétentions de Madame [M] [T], dans le présent litige, ne peut relever que du juge saisi au principal ».
Mme [T] et le Syndicat ont interjeté appel de la décision le 21 septembre 2020 à l'encontre de la société Atalian et de la société ISS Propreté.
Par ordonnance du 26 mars 2021 confirmée par arrêt du 24 juin 2021, la présidente de la chambre a :
- prononcé la caducité partielle de la déclaration d'appel à l'encontre de la société ISS Propreté faute pour l'appelant d'avoir procédé à la signification de la déclaration d'appel à la société ISS Propreté dans le délai imparti ;
- rappelé que « l'instance se poursuit entre Mme [T], le Syndicat Francilien de Propreté SFP-CFDT, appelants et S.A.S.U. Atalian Propreté Île-de-France, Intimée ».
Par conclusions adressées en lettre recommandée avec demande d'avis de réception le 28 mars 2022, le Syndicat ayant pour défenseur syndical M. [Z] demande à la cour :
« D'INFIRMER les Ordonnances de la formation des référés en toutes ses dispositions.
DIRE et JUGER les demandes du Syndicat Francilien de Propreté recevables et bien fondées,
DIRE et JUGER les sociétés ISS PROPRET, SAMSIC, PROPRETE, ALALIA, sont mal fondées dans l'intégralité de leurs conclusions et les débouter de leurs éventuelles demandes reconventionnelles,
DE CONDAMNER séparément les sociétés ISS PROPRET, SAMSIC, PROPRETE, ALALIA au paiement au profit de Syndicat (SFP-CFDT) :
- 2000euros à titre de dommages et intérêts à l'encontre de chaque société ayant fait obstacle et viole les règles de l'article 7 et détourne lesdites règles au paiement des dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 2132-3 du code du travail.
- 2000€ à titre des dommages et intérêts à l'encontre de chaque société ayant fait obstacle et viole les règles de l'article 7 et détourne lesdites règles au paiement de l'article 700 du NCPC.
Aux dépens à l'encontre de chaque société ayant fait obstacle et viole les règles de l'article 7 et détourne lesdites règles aux dépens y compris l'intégralité des frais des actes de la procédure d'exécution de la décision de l'arrêt de la cour ».
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 23 décembre 2020, la société Atalian demande à la cour de:
« A TITRE PRINCIPAL :
- Confirmer l'ordonnance rendue par la formation des Référés du Conseil de Prud'hommes de Paris le 5 août 2020, en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé
Statuant à nouveau :
- Dire n'y avoir lieu à référé
- Renvoyer les parties à mieux se pourvoir au fond
A TITRE SUBSIDIAIRE :
- Mettre la société ATALIAN PROPRETE ILE DE FRANCE hors de cause
- Débouter Madame [T] de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société ATALIAN PROPRETE ILE DE FRANCE
- Débouter le SYNDICAT FRANCILIEN DE LA PROPRETE CFDT de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société ATALIAN PROPRETE ILE DE FRANCE
EN TOUTES HYPOTHESES
- Condamner Madame [T] et le SYNDICAT FRANCILIEN DE LA PROPRETE CFDT à verser à la société ATALIAN PROPRETE ILE DE FRANCE la somme de 2 000 euros sur le
fondement de l'article 700 du CPC
- Condamner Madame [T] et le SYNDICAT FRANCILIEN DE LA PROPRETE CFDT aux entiers dépens».
La clôture a été prononcée le 31 mars 2022.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions des parties, il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il est rappelé qu' aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 954 du code de procédure civile, « les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion ».
La cour relève, que le Syndicat présente des demandes à l'encontre de la société ISS Propreté alors que la déclaration d'appel a été jugée caduque à son égard, ainsi qu'à l'encontre de la Société Samsic non dans la cause, de sorte que les demandes présentées à l'encontre de ces deux société sont irrecevables.
Les demandes du Syndicat ne seront en conséquence étudiées par la cour qu'en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de la « société ALALIA », soit la société Atalian, s'agissant d'une erreur manifestement matérielle.
La cour relève encore que seul le syndicat est mentionné comme 'appelant' dans les dernières conclusions du Syndicat, Mme [T] n'étant plus mentionnée comme partie appelante, ce qui est conforme au dispositif dans lequel aucune demande n'est formulée à son bénéfice.
Sur la demande de dommages et intérêts du Syndicat
Le Syndicat fait valoir au soutien de sa demande de dommages et intérêts que :
- les sociétés Atalian, Elior, Samsic Propreté et ISS Propreté ne respectent pas leurs obligations lors de passation des marchés de nettoyage et du transfert des salariés en violations des règles de l'article 7 de la convention collective ;
- leurs comportements blâmables ont pour conséquence « d'abandonner pendant plusieurs mois les travailleurs de nettoyage salariés dans la nature, sans travail, sans salaires, sans nouvelles, sans aucune ressource et sans aucune possibilité de pouvoir bénéficient d'allocation de chômage » ;
- Mme [T] est une des « victimes de la guerre commerciale entre les sociétés » qui ont porté des préjudices directs à l'intérêt collectif de la profession, notamment la violation des dispositions conventionnelles fixant les conditions de travail du personnel en cas de changement de prestataire.
La société Atalian fait valoir que :
- la demande de Mme [T] présentée en première instance, tendant à ce qu'il soit « ordonné la remise de l'avenant au contrat du marché faisant l'objet de reprise » est abandonnée en cause d'appel ;
- la société ISS Propreté n'a pas informé préalablement Mme [T] de la perte de son marché à son profit alors qu'elle était tenue de le faire conformément aux dispositions de l'article 7.3 II du code du travail ;
- il résulte des demandes initiales de Mme [T] dirigées à l'encontre de la société ISS Propreté qu'elle souhaitait la poursuite de son contrat de travail avec la société ISS Propreté ;
- alors qu'elle n'y était pas tenue, elle a néanmoins proposé un avenant à Mme [T] qui l'a refusé de sorte que son contrat ne pouvait être transféré ;
- il existe un contestation sérieuse alors qu'aucun manquement ne peut lui être imputé ;
- le dispositif des premières conclusions en cause d'appel ne comprenaient aucune demande pour le compte du Syndicat de sorte que toute demande présentée à ce titre est irrecevable.
S'agissant de l'irrecevabilité soulevée de la demande du Syndicat en dommages et intérêts, force est de constater qu'elle n'est pas reprise dans le dispositif des conclusions de la société Atalian de sorte que la cour n'en est pas saisie.
Sur ce,
Aux termes de l'article R. l455-6 du code du travail, « la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ».
En l'espèce, la cour a relevé en premier lieu que Mme [T] ne présente plus de demande et ne figure plus comme partie appelante de sorte que les comportements « blâmables » allégués à l'encontre de la société ISS Propreté et de la société Atalian ne se trouvent pas caractérisés avec la rigueur qui s'impose en référé, et qu'à tout le moins, les griefs articulés par Mme [T] l'ont été à l'encontre de la société ISS Propreté, de sorte que cette situation et ce contexte particuliers constituaient une contestation sérieuse faisant obstacle à l'octroi d'une provision.
Surabondamment, l'appréciation du caractère fautif du comportement des sociétés dans le cadre de la reprise d'un marché relève de l'appréciation des juges du fond de sorte que c'est par de justes motifs que le conseil de prud'hommes a débouté le Syndicat de sa demande de dommages et intérêts.
En conséquence, l'ordonnance déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le Syndicat, qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel et sera condamné à payer à la société Atalian la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et débouté de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Décide que sont irrecevables les demandes présentées par le Syndicat Francilien de Propreté CFDT à l'encontre de la société Samsic Propreté et de la société ISS Propreté ;
Confirme l'ordonnance de référé en date du 5 août 2020 du conseil de prud'hommes de Paris, en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne le Syndicat Francilien de Propreté CFDT aux dépens d'appel;
Condamne le Syndicat francilien de propreté CFDT à payer à la société Atalian propreté Île-de-France la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le déboute de sa demande à cet égard ;
Déboute les parties de toute demande autre, plus ample ou contraire.
La Greffière, Le Président,